L'arabe
L'arabe est une langue chamito-sémitique ou afro-asiatique attestée dès le VIIe siècle. Elle fait partie de la branche sémitique avec l'hébreu et l'amharique en Éthiopie. On peut consulter une structure arborescente illustrant la plupart des afro-asiatiques en cliquant ici s.v.p. L'arabe doit son expansion à la propagation de l'islam, à la diffusion du Coran et à la puissance militaire des Arabes au VIIe siècle. Ces trois facteurs sont intimement liés au point qu'on ne peut que difficilement les dissocier.
Carte reproduite avec l'aimable autorisation de M. Mikael Parkvall de l'Institutionen för lingvistik, Université de Stockholm.
La langue arabe se présente sous trois formes : l'arabe vernaculaire (ou dialectal), l'arabe standard moderne (ou littéral) et l'arabe classique (ou coranique). Autrement dit, il existe une grande variété d'arabes parlés, bien que l'on compte au moins 290 millions d'arabophones dans le monde.
1.1 L'arabe vernaculaire
L'arabe vernaculaire résulte à la fois de la fragmentation de l'arabe du VIIe siècle et de la fusion des parlers provenant des conquêtes militaires et des brassages de population des langues sud-arabiques, berbères, africaines, etc. Ces variétés d'arabe sont, de nos jours, extrêmement nombreuses et persistent dans tout le monde arabe. L'arabe vernaculaire est la langue que chacun des 290 millions d'arabophones utilise toute sa vie et qui véhicule toute une culture populaire, traditionnelle et contemporaine. Il est fortement dévalorisé au plan social et est souvent perçu comme «vulgaire» ou «abâtardi». C'est donc une langue presque exclusivement parlée dont les variétés sont rarement incompréhensibles entre les arabophones.
On distingue principalement deux types d'arabe vernaculaire, c'est-à-dire deux grands groupes: le groupe occidental et le groupe oriental.
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Le groupe occidental correspond aux variétés d'arabe parlées en Andalousie (Espagne), dans les pays du Maghreb (Tunisie, Algérie, Maroc, Libye, Mauritanie et Sahara occidental) ainsi que dans l'île de Malte. Le groupe oriental correspond aux variétés parlées en Égypte, à Djibouti, au Soudan, au Tchad, dans les États dits du Machrek (Irak, Syrie, Liban, Jordanie, Palestine et Koweït) et ceux de la États de la péninsule Arabique (Arabie Saoudite, Yémen, Oman, Qatar, Émirats arabes unis, Koweït et Bahreïn). Il faudrait ajouter aussi certaines variétés d'arabe parlées par de petites communautés en Turquie, en Afghanistan, au Tadjikistan, en Iran, etc. Comme chaque pays a son arabe particulier, que ce soit l'arabe algérien, l'arabe égyptien, l'arabe irakien, l'arabe jordanien (levantin), l'arabe libanais (ou syro-libanais), l'arabe libyen, l'arabe marocain, l'arabe mauritanien, l'arabe omanais, l'arabe palestinien, l'arabe saoudien, l'arabe syrien (ou syro-libanais), l'arabe tchadien, l'arabe tunisien, l'arabe yéménite, etc., la réalité peut paraître relativement complexe. Dans plusieurs pays arabes, il peut exister des variétés dialectales différentes en usage selon les régions et les villes. Par exemple, l'arabe parlé à Damas, la capitale de la Syrie, est différent de celui d'Alep, la seconde ville du pays. Certains diront aussi que, en Algérie, il existe plusieurs variétés d'arabe algérien . |
Cependant, si certaines variétés vernaculaires sont relativement compréhensibles entre elles (p. ex., l'arabe égyptien et l'arabe libanais), d'autres le sont beaucoup moins (p. ex., l'arabe algérien et l'arabe jordanien). De façon générale, les variétés d'arabe parlées au Maghreb et autour de la Méditerranée sont difficilement intelligibles pour les Arabophones du Proche-Orient, le Machrek, et vice versa. À l'exception de l'arabe égyptien qui a connu une certaine diffusion (notamment par le cinéma), les différentes variétés d'arabe ne sont guère diffusées au-delà de leur pays d'origine.
1.2 L'arabe coranique (classique)
L'arabe coranique a conservé ses caractéristiques essentielles éloquentes qui permettent aux locuteurs habiles de se livrer à de véritables créations stylistiques, d'où l'expression «arabe éloquent». Alors que certains Arabes très religieux croient que, parmi toutes les langues, l’arabe est celle qui dispose des ressources les plus vastes et du lexique le plus riche, d'autres n'y voient là que du remplissage, de la verbosité ou du vain étalage. C'est peut-être pourquoi il est presque impossible d'écrire et de parler l'arabe classique de façon totalement irréprochable. Autant l'arabe vernaculaire peut être une langue simple à pratiquer, autant l'arabe classique peut paraître complexe et difficile. C'est un peu ce qui explique qu'aucune population arabophone ne l'ait adopté comme langue maternelle.
Toutes les tentatives de changement et de réforme de la langue arabe coranique ont avorté en raison des protestations de la part des protecteurs de la tradition. Il existe dans le monde musulman un certain courant dominant pour reconnaître que, parmi toutes les langues du monde, seul l'arabe, «la langue sacrée du Coran», ne peut être sujet à la révision ou à la réforme. Les Français ont pensé ainsi au XVIIe siècle et ils se trompaient. Pour certains Arabes, toucher à la langue arabe reviendrait à porter atteinte au Saint Coran. Comment, en effet, comprendre encore le Saint Coran et la Sunna du prophète si l'on change les règles de la grammaire et de la syntaxe? Pour certains, les appels à la suppression des règles actuelles de la grammaire arabe sont «des signes de l'existence du complot impérialo-sioniste». Quoi qu'il en soit, l'arabe coranique est une forme prestigieuse de l'arabe parce qu'elle est associée à la religion et à la tradition.
1.3 L'arabe standard moderne ("fusha")
De nombreux linguistes considèrent que l'arabe moderne standard est distinct de l’arabe coranique. Il n'existe cependant pas de critères linguistiques convenus qui distinguent les deux types d'arabe. Pourtant, il existe certaines différences, bien que ce soit des variétés linguistiques très proches.
L'arabe standard moderne (appelé «arabe fusha») est la variété de l’arabe littéraire standardisé qui s’est développée dans le monde arabe à la fin du XIXe et au début du XXe siècle. L'arabe standard moderne est la langue employée dans la littérature, le monde universitaire, la presse écrite et les médias, le droit et la législation, bien qu’il ne soit généralement pas parlé comme langue maternelle. Il s’agit d’une langue pluricentrique enseignée dans tout le monde arabe dans le cadre de l’éducation formelle, qui diffère considérablement de nombreuses variétés vernaculaires de l’arabe qui sont couramment parlées comme langues maternelles dans une région. Très peu d'Arabes dans le monde parlent cette variété d'arabe comme langue maternelle. Ainsi, seulement 120 millions de personnes connaissent l'arabe fusha en tant que langue seconde. Bref, on parle l'arabe vernaculaire, mais on écrit en arabe standard.
Cela dit, cet arabe moderne est basé sur l'arabe coranique, mais il a subi certaines modifications commencées au cours des dernières décennies du XIXe siècle, ce qu'on a appelé la «période de la Nahda», ce qui signifie «Renaissance», une renaissance à la fois politique, culturelle et religieuse. Ce mouvement fut principalement l'œuvre d'un groupe d'intellectuels du Liban, puis de l'Égypte et aussi de la Syrie et de la Palestine. Ces réformateurs entreprirent de moderniser la langue arabe en modifiant et en simplifiant quelque peu la syntaxe originale du VIIe siècle, mais surtout en ajoutant des mots modernes tels que «train», «compagnie», «démocratie», «socialisme», etc. Pour ce faire, il fallut puiser dans les ressources grammaticales de l'arabe, en recourant notamment au procédé de l'analogie (al-qiyas). Aujourd'hui, près de 60 % du vocabulaire moderne provient de cet arabe réformé.
Malgré les controverses au sujet des diverses formes d'arabe, y compris entre l'arabe vernaculaire et les autres formes —, il existe de très forts liens historiques et idéologiques qui unissent les deux, ainsi que de nombreuses similitudes linguistiques. Ainsi, les lettres de l'alphabet sont souvent identiques, de même que l'ordre des mots ou la syntaxe. Toutefois, les mots et la prononciation peuvent être très différents dans la mesure où l'arabe moderne perd toute trace vernaculaire locale. C'est pourquoi les communautés arabes ont toujours considéré qu'il n'existe qu'une seule langue arabe. On prie on arabe coranique, on écrit en arabe moderne, bien que l'arabe vernaculaire puisse théoriquement s'écrire, mais son parle en arabe vernaculaire. Cela étant dit, on estime que le taux d'analphabétisme dans le monde arabe serait de 50% environ, mais il varie grandement selon les pays.
De façon réductrice, on peut dire que les Arabes disposent de trois «langues» ou des variétés de langues différentes: l'arabe vernaculaire, l'arabe coranique classique et l'arabe moderne dit aussi «simplifié», «littéral» ou intermédiaire des médias. L'enseignement de l'arabe comme langue seconde se révèle très différent de celui des langues européennes comme l'anglais ou le français. En effet, un seul type d'arabe est normalement enseigné, l'arabe littéral, et ce, dans les pays où cet arabe est non seulement la langue officielle, mais aussi la langue vernaculaire est de la grande majorité de la population. Pour tous les arabophones, l'arabe qui est enseigné dès le primaire constitue une langue seconde, l'arabe vernaculaire demeurant la langue spontanée.
Cela signifie que l'apprentissage de l'arabe à l'école constitue un moyen de valorisation sociale au même titre que le sont le français, l'anglais ou le portugais en Afrique noire. On parle l'arabe vernaculaire en famille, avec ses intimes, dans ses loisirs. Mais on lit les journaux en arabe intermédiaire et on écrit dans cette variété, parfois en arabe classique; l'administration de l'État fonctionne en arabe intermédiaire, ce qui n'empêche pas les fonctionnaires de parler l'arabe vernaculaire entre eux et de rédiger des rapports en français ou, selon le cas, en anglais.
De façon générale, les fonctions de prestige sont remplies en arabe littéral, les relations interpersonnelles privilégiant l'arabe vernaculaire. Sur une population de 290 millions d'arabophones, on estime à 160 millions le nombre d'arabophones ne pratiquant que l'arabe vernaculaire; c'est donc dire qu'à peine quelque 130 millions d'arabophones connaissent l'arabe moderne. Au point de vue numérique, l'arabe vernaculaire a donc supplanté l'arabe moderne. De plus, l'élite arabophone est le plus souvent bilingue: elle parle soit le français (autour de la Méditerranée et au Proche-Orient), soit l'anglais (tout le Moyen-Orient), parfois les deux (Égypte, Liban, Syrie).
La situation de l'arabe dans le monde s'avère fondamentalement différente de celle des autres grandes langues internationales. Soulignons encore une fois que son aire d'extension géographique est limitée à deux continents limitrophes et que le caractère diglossique de cette langue nuit à l'expansion dans sa forme officielle. De plus, l'arabe classique n'a pas réussi encore à se moderniser complètement et sa dépendance à l'égard de l'anglais ou du français demeure très grande. N'oublions pas que l'analphabétisme chronique de certains pays arabophones (Yémen, Qatar, Soudan, Soudans du Sud, etc.) entrave aussi la propagation de l'arabe classique. S'il est relativement aisé de créer des commissions de terminologie en arabisation, il est beaucoup plus difficile de s'organiser pour faire appliquer les décisions. En général, toutes les décisions des commissions de terminologie restent lettre morte, et ce, d'autant plus qu'il est dans la pratique impossible de normaliser les travaux de chacune des commissions nationales, chacune étant jalouse de ses prérogatives. |
Toutefois, la force de l'islam dans le monde assure une expansion de l'arabe comme langue seconde dans tous les pays où vivent de nombreux musulmans, contribuant ainsi à une certaine unité idéologique du monde arabe. À l'exception du monde arabe, on n'enseigne à peu près pas cette langue dans aucun pays en tant que langue étrangère, sauf dans les universités et départements spécialisés. L'enseignement des langues étrangères semblent être l'apanage de l'anglais, puis du français et de l'espagnol, voire du russe.
En fait, les deux grands états de l'arabe, l'arabe classique et l'arabe vernaculaire, sont devenus complémentaires, mais en même ils constituent une grande faiblesse de cette grande langue, puisqu'il lui faut trois variétés nécessaires afin de répondre à tous les besoins de la communication.
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L'arabe doit sa fortune, on le
sait, à l'expansion de l'islam, qui
s'est étendu en l'espace de quelques siècles (entre le VIIe
siècle
et le XIIe siècle), de l'Afrique du Nord à l'Espagne, puis au
Proche-Orient et au Moyen-Orient et en Asie. C'est ce lien puissant entre une grande religion et
une langue qui a contribué à sacraliser l'arabe et à maintenir une unité
linguistique à travers le temps et l'espace. C'est pourquoi, dans le monde
occidental, on associe facilement l'islam et les musulmans à la langue arabe,
croyant que la religion islamique et le monde arabophone forment un tout quasi
indissociable. Il s'agit là d'une généralisation semblable à celle qui
consisterait, par exemple, à croire que tous les anglophones du monde sont de
religion protestante ou anglicane.
Il est vrai que 85 % des musulmans sunnites parlent l'arabe : ils habitent l'Algérie, le Maroc, la Tunisie, la Libye, l'Égypte, le Soudan, la Jordanie, l'Irak et toute la péninsule Arabique (Arabie Saoudite, Yémen, Oman, etc.). La Syrie parle a ussi l'arabe, mais la majorité des habitants sont des musulmans sunnites (avec des minorités chiites, alaouites, druzes et chrétiennes). Les chiites habitent principalement l'Iran, l'Azerbaïdjan et une partie de l'Irak. |
3.1 Sunnisme et chiisme
On peut simplifier la situation religieuse en distinguant
deux grandes confessions musulmanes: le sunnisme et le chiisme. La
scission de ces deux courants de l’islam remonte à la mort du prophète Mahomet
en 632. Il s'est alors posé la question du successeur le plus légitime pour
diriger la communauté des croyants :
Une majorité de musulmans soutinrent Abou Bakr, qui devint le premier calife. Depuis, les sunnites ont toujours été majoritaires. Ils représentent aujourd’hui environ 85 % des musulmans du monde. Les seuls pays à majorité chiite sont l’Iran, l’Irak, l’Azerbaïdjan et le Bahreïn, mais d’importantes minorités existent au Pakistan, en Inde, au Yémen, en Afghanistan, en Arabie saoudite et au Liban. |
Les sunnites considèrent le Coran comme une œuvre divine : l’imam est vu comme un un pasteur nommé par d'autres hommes et il fait office de guide entre le croyant et Allah pour la prière; dans certaines situations, il peut s'autoproclamer iman. Par contre, les chiites considèrent l’imam, descendant de la famille de Mahomet, comme un guide indispensable de la communauté, tirant directement son autorité de Dieu. C’est pourquoi leur clergé est très structuré. La conséquence pratique de ces valeurs amène les sunnites à accepter que les autorités religieuses et politiques soient fondues dans la même personne, alors que les chiites prônent une séparation claire. Par exemple, au Maroc, majoritairement sunnite, le roi est le «commandeur des croyants», tandis qu’en Iran, à tendance chiite, les ayatollahs sont indépendants du pouvoir exécutif.
Aux côtés de ces deux grandes branches existent également d’autres courants minoritaires : les alaouites en Syrie, les alévis en Turquie, les druzes, dispersés dans tout le Proche-Orient, et les khâridjites à Oman et au Maghreb.
3.2 Liens entre l'arabe et l'islam
Bien que les liens entre l'arabe et l'islam soient manifestes et que l'islamisation d'une population ait souvent entraîné son arabisation, certaines populations islamisées n'ont pas adopté l'arabe et certaines populations arabisées ne se sont jamais islamisées. Les autres peuples de religion musulmane (sunnite ou chiite) non arabophones habitent la Turquie, l'Iran, le Pakistan, le Bangladesh et l'Indonésie. En Afrique, les musulmans non arabophones couvrent le Mali, le Niger, la Somalie et les Comores. Ces peuples font usage d'une bonne vingtaine de langues dont le turc, l'amharique (Éthiopie), le farsi ou persan (Iran), le berbère (Algérie), l'indonésien (Indonésie), le pachtou (Afghanistan), l'ourdou (Pakistan), le singhalais et le tamoul (Sri Lanka), le comorien (Comores), etc. |
De façon plus accidentelle, certains peuples arabisés ne se sont pas islamisés. C'est le cas des Maltais de l'île de Malte au sud de la Sicile. Le maltais est apparenté à l'arabe, mais la population de l'île est demeurée chrétienne. Au Liban, beaucoup de Libanais parlent l'arabe, mais demeurent chrétiens; il en est ainsi en Égypte où l'on retrouve des chrétiens coptes (mais aussi des communautés catholiques).
À l'heure actuelle, on dénombre 1,25 milliard de musulmans dans le monde. Mais seulement 290 millions sont arabophones et 160 millions ont une connaissance réelle de l'arabe classique comme langue seconde. Autrement dit, 90 % des musulmans ne peuvent lire le Coran dans le texte original, mais ils ne le parlent pas. Comme quoi les mots «musulmans», «Arabes» et «arabophones» ne sont pas équivalents.
Les pays arabes sont regroupés aujourd'hui dans une sorte de fédération appelée la Ligue arabe, fondée en Égypte le 22 mars 1945 à Alexandrie. Les pays fondateurs furent l'Égypte, l'Irak, le Liban, l'Arabie Saoudite, la Syrie, la Transjordanie et le Yémen (Nord). Avec la fin de la domination coloniale, la Ligue arabe s'est élargie et compte désormais 22 membres: en plus des membres fondateurs, on y trouve la Libye, le Soudan (ancien Soudan au nord), la Tunisie, le Maroc, le Koweït, l'Algérie, les Émirats arabes unis, Bahreïn, Oman, la Mauritanie, la Somalie, Djibouti et les Comores, plus la Palestine qui est membre à part entière depuis 1976. Bien qu'exprimant l'aspiration unitaire des Arabes, la Ligue n'a jamais été un instrument de mise en œuvre de la langue arabe. D'ailleurs, ses statuts ne prévoient pas d'efforts en ce sens.
4.1 Les pays du Proche et du Moyen-Orient
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Au
Proche et Moyen-Orient, l'arabe, ou
plutôt l'une de ses variantes vernaculaires, est
la langue maternelle de la grande majorité des populations locales totalisant
129,2 millions de locuteurs. Ou bien c'est la langue de 80 % de la
population ou bien c'est celle de la quasi-totalité de la
population. Quoi qu'il en soit, l'arabe véhiculaire est partout
majoritaire. Bref, partout l'arabe est majoritaire. Ces 11 pays arabophone sont les suivants: l'Arabie Saoudite (30,1 M), le Bahreïn (1,3 M), les Émirats arabes unis (9,1 M), l'Irak (36,5 M), la Jordanie (6,7 M), le Koweït (2,7 M), le Liban (5,8 M), le sultanat d'Oman (3,6 M), la Palestine (4,5 M), le Qatar (2,3 M) et le Yémen (26,1 M). Si l'arabe classique est l'unique langue officielle de tous ces pays, la langue maternelle est l'arabe véhiculaire.
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4.2 Les pays d'Afrique
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Sur le continent africain, la situation de la langue arabe est un peu
plus complexe qu'au Proche-Orient, puisque les seuls pays ou territoires où l'arabe
et ses variantes
sont parlés presque par 100 % de la population sont les
suivants: l'Égypte (90,4 M), la Libye (6,2 M) et la Tunisie (11,4 M).
Les arabophones constituent 72 % des locuteurs en Algérie (41,4 M en concurrence avec les langues berbères); 60 % au Maroc (33,6 M, en concurrence avec l'amazight); 80 % en Mauritanie (3,5 M, en concurrence avec le poular et le soninké); 72 % au Soudan (39,5 M, en concurrence avec le bedja, une langue couchitique). |
Sur une population de 226,2 millions de locuteurs, quelque 145 millions de locuteurs parlent une variété d'arabe véhiculaire.
Les minorités arabophones sont le plus souvent bilingues et habitent surtout des pays où l'islam est la religion principale; néanmoins, certaines populations immigrées vivent en Europe et en Amérique du Nord. On trouve d'importantes minorités arabophones au Tchad (11 % de 11,4 M) et en Israël (20 % de 8,3 M).
D'autres petites minorités habitent l'Iran (2 % de 82,8 M), la Turquie (1 %) de 80,2 M), la Somalie (1 % de 12,4 M), le Mali (5 % de 17,9 M), le Niger (3,4 % de 20,6 M), le Sénégal (1 % de 12,3 M), l'Afghanistan (0,5 % de 32,5 M), le Tadjikistan (05 % de 8,3 M). Ces minorités arabophones comptent environ 15 millions de locuteurs.
On compte également près de cinq millions d'arabophones du Maghreb en Europe, principalement en France, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique. Étant donné que l'Europe tend à limiter l'immigration maghrébine, beaucoup d'arabophones ont commencé à choisir les États-Unis et le Canada comme terre d'accueil.
L'arabe est la langue officielle ou co-officielle de
25 États dans le
monde.
Les États arabophones occupent deux aires géographiques limitrophes: l'Afrique
du Nord et le Proche-Orient et
Moyen-Orient. En Afrique, l'arabe est l'unique langue
officielle en Algérie, au Maroc, en Tunisie, en Libye, en Égypte et au Soudan.
Il est co-officiel avec le français en Mauritanie, à Djibouti, au Tchad et
dans l'archipel des Comores. L'arabe (hassanya) est la langue majoritaire en Mauritanie,
mais l'arabe local est minoritaire à Djibouti et au Tchad; aux Comores, il n'a que le
statut de langue religieuse, puisque la grande majorité de la population parle
le comorien, une variante du swahili. Au Moyen-Orient, le statut de l'arabe est nettement mieux défini. Il constitue l'unique langue officielle des États de la région: Syrie, Irak, Liban, Jordanie, Arabie Saoudite, Yémen, Koweït, Qatar, Oman, Bahreïn, Émirats arabes unis et, au Proche-Orient, la Palestine. Cela dit, jamais un texte de loi désigne de quel arabe il s'agit comme langue officielle. C'est l'arabe standard moderne, bien sûr! |
Cette ambiguïté est voulue: elle donne l'impression qu'il n'y a qu'une seule langue arabe, ce qui illustrerait l'unité linguistique du monde arabe. Cet arabe moderne standard est l'une des six langue officielles des Nations unies. Dans plusieurs pays arabes, des mesures politiques, parfois vigoureuses, ont été prises pour renforcer le statut juridique de l'arabe, particulièrement là où cette langue s'était trouvée dans un état de subordination. Ce fut le cas au Maroc et en Tunisie, mais particulièrement en Algérie où les campagnes d'arabisation ont été aussi virulentes qu'incessantes. La situation est la même avec les États arabes aux prises avec la langue anglaise qui livre à l'arabe une vive concurrence: l'Égypte, le Koweït, la Jordanie, le Qatar, les Émirats arabes unis, l'Arabie Saoudite, etc.
Soulignons que la langue arabe n’a aucun statut «civil» dans les grands pays musulmans où cette langue n'est pas officielle, mais simplement une langue religieuse, comme en Turquie, en Iran, au Pakistan, au Bangladesh, en Indonésie, etc.
Cependant, dans l'île de Malte, les habitants de ce pays parlent le maltais (co-officiel avec l'anglais), une variété d’arabe maghrébin fortement marquée par le sicilien, l’italien, l’anglais et un peu de français. C'est pourquoi le maltais est associé aux pays arabes, mais il diffère de l'arabe coranique et il constitue le seul cas où l'arabe vernaculaire est la langue officielle.
On pourra consulter le tableau des pays où l'arabe est une langue officielle.
La Ligue des États arabes, appelée officiellement Ligue arabe, fut fondée, le 22 mars 1945, à Alexandrie, par l’Arabie Saoudite, l’Égypte, l’Irak, la Jordanie, le Liban et le Yémen du Nord. Ces pays désiraient collaborer entre eux, sans perdre pour autant leur souveraineté respective. |
Ensuite, adhérèrent à la Ligue arabe la Libye, le Soudan, la Tunisie, le Maroc, le Koweït, l’Algérie, les Émirats arabes unis, le Bahreïn, le sultanat d’Oman, la Mauritanie, la Somalie et Djibouti. L’OLP (Organisation de libération de la Palestine) en est membre à part entière depuis 1976. Le siège de la Ligue arabe fut transféré du Caire (Égypte) à Tunis en 1979, après la signature des accords de paix entre l’Égypte et Israël, mais depuis le 31 octobre 1990 le siège fut de nouveau rendu au Caire. Aujourd’hui, la Ligue arabe compte en principe 22 États membres provenant à la fois de l’Afrique du Nord, de la Corne de l'Afrique, de la péninsule Arabique et du Levant (région du littoral oriental de la mer Méditerranée, comprenant la Syrie, le Liban et Israël). Tous ces États compte au moins 300 millions d’habitants. De tous les États arabophones, seul Malte ne fait pas partie de la Ligue arabe. Voici la liste des États de la Ligue arabe: Algérie, Arabie Saoudite, Bahreïn, Comores, Djibouti, Égypte, Émirats arabes unis, Irak, Jordanie, Koweït, Liban, Libye, Mauritanie, Maroc, Oman, Palestine, Qatar, Somalie, Soudan, Syrie, Tunisie, Yémen. Parmi tous les pays dont l'arabe est une langue officielle, seul Israël ne fait pas partie de la Ligue arabe. |
L'organisation de la Ligue arabe repose sur quatre organismes principaux: le Sommet des chefs d'État, le Conseil des ministres, les Comités permanents et le Secrétariat général. De plus, divers organismes ont été créés en application de traités qui complètent le Pacte de 1945 et plusieurs agences spécialisées travaillent en étroite collaboration avec elle.
Contrairement au Commonwealth et à la Francophonie, la Ligue arabe constitue une organisation «régionale» d'États géographiquement contigus, dont les membres partagent une même langue: l’arabe. En effet, l'arabe et un patrimoine culturel commun ont permis aux membres de la Ligue arabe, dont bon nombre ont déjà été des colonies ou des protectorats français, britanniques et italiens, de se regrouper. La Ligue arabe favorise les liens culturels et économiques, ainsi que les communications, et sert de médiateur dans les cas de différends entre les membres.
Dans le domaine de l’éducation, la langue commune a permis aux pays dotés d'une population active plus scolarisée d'en faire bénéficier les pays moins. Les pays arabes riches aident les pays moins riches, par l'intermédiaire du Fonds de la Ligue arabe pour le développement économique et social et de la Banque arabe pour le développement agricole et industriel. Les échanges commerciaux et économiques entre les membres de la Ligue sont facilités par des tarifs intérieurs réduits et la mise en place de tarifs extérieurs communs, ainsi que par des organismes comme l'organisation du transport aérien et le tourisme. Cependant, la réputation de la Ligue arabe a été quelque peu ternie en raison de son efficacité douteuse. En est témoin la passivité relative de la Ligue face aux nombreux conflits qui opposent les États membres et le peu d’entrain qu’elle manifeste à mettre un terme aux multiples dissensions.
À l’heure actuelle, la religion musulmane reste dominante dans les pays arabophones. Pourtant, l'islam est aussi pratiqué dans plusieurs autres pays qui ne font pas partie de la Ligue arabe et qui ne sont pas de culture arabe. En principe, la Ligue arabe est composée d'États contigus géographiquement, parlant la même langue, partageant la même culture et dont les populations partagent majoritairement la même foi. La Ligue demeure avant tout un instrument de concertation et de recherche d'un consensus vis-à-vis des grands problèmes auxquels ces pays sont confrontés.
L'apport important de l'arabe au lexique français peut s'articuler en trois temps: au Moyen Âge, à la Renaissance et au XIXe siècle. Ces sources sont tirées du dictionnaire Le Petit Robert.
9.1 Le Moyen Âge
Les savants arabes ont fourni au français, directement ou par l'intermédiaire d'autres langues (notamment latin médiéval et espagnol), des termes d'origine arabo-persane, comme échec (jeu), jasmin, laque, lilas, safran ou timbale. C'est essentiellement aux XIIe et XIIIe siècles, plus rarement au XIVe siècle, que les emprunts à l'arabe pénètrent en français :
1) soit par l'intermédiaire du latin médiéval, de l'espagnol (plus rarement du catalan) ou de l'italien. C'est ainsi que le français emprunta à l'arabe des mots des sciences et des techniques, ainsi que du commerce: abricot, alambic, alchimie, algèbre, almanach, ambre, azur, chiffre, coton, douane, girafe, hasard, épinard, jupe, magasin, matelas, nénuphar, orange, satin, sirop, sucre, tare.
2) soit directement comme dans cuscute, élixir, gazelle, nadir, tasse, truchement, zénith, etc.
9.2 La Renaissance
Le domaine des sciences (mathématiques, chimie, botanique) et des techniques
s'enrichit de nouveaux termes. L'arabe fournit au français, par
l'intermédiaire de l'italien, des mots comme arsenal, artichaut, calibre,
massepain, massicot, nacre, tarif, zéro. Le français emprunta directement à
l'arabe des mots comme alcool, algorithme, alcali, amalgame, marcassite,
sinus (terme de mathématiques), sofa, soude, talc, talisman, usnée.
9.3 Les XIXe et XXe siècles
Les emprunts seront étroitement liés aux circonstances historiques. Avec la campagne d'Égypte de Napoléon et les conquêtes coloniales de la France en Afrique du Nord, le français emprunta aux variétés régionales d'arabe, essentiellement à l'arabe maghrébin (algérien, marocain, tunisien), des mots qui seront véhiculés par les militaires et trouveront leur place dans l'argot ou le langage familier. Par exemple, baraka, barda, bésef, caoua, chouia, clebs, droper « courir vite », fissa, kif-kif, maboul, macache, moukère, niquer, zob. D'autres mots désignent des réalités locales comme bled, casbah, djebel, djellaba, erg, gandoura, harissa, méchoui, merguez, oued, reg, sarouel, souk, taboulé, tajine, zellige.
Enfin, les conflits nationaux et internationaux qui secouent le monde musulman à la fin du XXe siècle (guerre du Golfe, conflit israélo-palestinien, révolution islamique en Iran) favoriseront l'introduction en français (et dans d'autres langues) de mots comme ayatollah, charia, djihad ou intifada.
Les autres langues internationales:
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