République de Géorgie

Géorgie

(2) Politique de la langue officielle

La politique linguistique de la Géorgie porte à la fois sur la langue officielle, le géorgien, ainsi que sur les langues des minorités nationales. Un grand nombre de lois à portée linguistique ont été adoptées, ainsi qu'une loi sur la langue officielle en 2015. Par ailleurs, le Comité pour les droits de l'homme et des minorités au Parlement géorgien a déjà discuté d'un projet de loi portant sur les minorités nationales. Le projet de loi a été rédigé, entre autres, par Gia Zhorzholiani, directeur de l'Académie géorgienne du Centre des sciences pour les relations internationales. Avant les discussions du comité, le projet de loi même a été étudié par l'ONU et des experts de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui lui ont accordé une évaluation positive. Mais le texte n'a jamais été adopté par le Parlement, en dépit des pressions du gouvernement géorgien. Cependant, la Loi sur la langue officielle, adoptée en 2915, compte plusieurs dispositions concernent directement les minorités nationales: art. 3, 7, 9, 11, 12, 20, 23, 24, 25 et 37.

1 La langue de la législation

La langue de la législation est celle des lois, des règlements, des circulaires, etc. Selon l'article 12, de la Loi sur la langue officielle, il est clair que les textes législatifs ne sont rédigés qu'en géorgien, sauf en Abkhazie ils doivent être aussi en abkhaze:

Article 12

Langue de la rédaction des lois et de l'activité législative

1) Les actes normatifs doivent être rédigées et promulguées dans la langue géorgienne et, dans le territoire de la République autonome d'Abkhazie, ils doivent être rédigées et promulguées dans la géorgienne ainsi que la langue abkhaze. Les actes normatifs peuvent être promulguées dans des langues non officielles, mais ces textes ne sont pas officiellement valides.

3) Les projets de loi et les propositions de loi sont soumis au Parlement de la Géorgie en géorgien, selon la procédure de présentation des initiatives législatives.

Lorsque des textes législatifs ne sont pas en langue géorgienne, ils n'ont aucune valeur légale, sauf en russe dans la mesure où ils ont été adoptés avant l'indépendance et qu'ils n'ont pas fait l'objet d'une modification. Certains textes législatifs ou réglementaires peuvent être traduits dans une langue non officielle minoritaire, mais ils n'ont qu'une valeur informative. La plupart des textes législatifs sont également traduits en anglais pour des raisons pratiques, ce qui ne leur donne pas davantage de valeur juridique.   

Étant donné que la Géorgie n'exerce plus aucun contrôle sur l'Abkhazie, il apparait inutile de commenter la législation concernant le bilinguisme dans cette région autonome. D'ailleurs, la Constitution (1994) de la République autonome d'Abkhazie déclare à l'article 6 que l'abkhaze et le russe sont à égalité de statut:

Статья 6 (version russe)

1. Государственный язык Республики Абхазия — абхазский.

2. Русский язык наряду с абхазским признается языком государственных и других учреждений.

3. Государство гарантирует всем этническим группам, проживающим в Абхазии, их право на свободное использование родного языка.

Статья 12

Основные права и свободы принадлежат человеку от рождения. Каждый человек рождается свободным. Все равны перед законом и судом независимо от расы, национальности, пола, языка, происхождения, имущественного и должностного положения, места жительства, отношения к религии, убеждений, идеологий и других обстоятельств.
Article 6 (traduction)

1. La langue officielle de la république d'Abkhazie est l'abkhaze.

2. La langue russe, ainsi que la langue abkhaze, est reconnu comme langue de l'État et de ses autres institutions publiques.

3. L'État garantit à tous les groupes ethniques vivant en Abkhazie le droit d'utiliser librement leur langue maternelle.

Article 12

Les libertés et droits fondamentaux appartiennent au peuple dès la naissance. Chaque personne est née libre. Tous sont égaux devant la loi et les tribunaux, sans distinction de race, de nationalité, de sexe, de langue, d'origine, de fortune ou de position sociale, de lieu de résidence, d'attitude envers la religion, de croyances, d'idéologies et d'autres considérations.

D'après ce texte, l'abkhaze serait l'unique langue officielle et le russe, également «une langue de l'État» ou plus précisément une «langue d'État» (языком государственных), ce qui correspond en russe à une langue officielle, puisqu'elle est utilisée par l'État. Quant au géorgien, il est totalement ignoré. Or, d'après le recensement de 2011 en Abkhazie, les Abkhazes constituent plus de 50 % de la population de la région, contre 19,2 % pour les Géorgiens, 17,3 % pour les Arméniens et 9,1 % pour les Russes:

Année Abkhazes Géorgiens Arméniens Russes Grecs Total
Recensement de 2011 122 069 46 367 41 864 22 077 1380 240 705
Pourcentage 50,7 % 19,2 % 17,3 % 9,1 % 0,6 % 100 %

Mais ce sont les Russes, le 4e groupe ethnique, qui bénéficie du statut de langue co-officielle, pas le géorgien ni l'arménien.

2 Le domaine judiciaire

Lors de la Constitution soviétique de 1978, l'article 171 prévoyait expressément dans quelle langue devait se dérouler une procédure judiciaire. Il s'agissait, en général, de la langue de la majorité de la population locale concernée:

Article 171 [abrogé]

La procédure judiciaire dans la RSS de Géorgie doit se dérouler dans la langue géorgienne ou dans la langue de la république autonome ou de la région autonome ou dans la langue de la majorité de la population de la localité donnée. Les personnes participant au procès et ne possédant pas la langue dans laquelle se fait la procédure judiciaire ont le droit de prendre pleinement connaissance du dossier, de prendre part aux actions judiciaires par l'intermédiaire d'un interprète et de s'exprimer durant l'audience dans leur langue maternelle.

On peut penser qu'il s'agissait, selon le cas, du géorgien, du russe, de l'abkhaze ou de l'ossète. En réalité, les locuteurs de l'azéri ou de l'arménien pouvait aussi être entendus dans leur langue. En cas de problème, on demandait l'aide d'un traducteur.  

La Constitution géorgienne actuelle (1995-2018) prévoit formellement l'usage du géorgien, ainsi que le recours à un interprète lorsqu'un justiciable ne connaît pas la langue officielle:

Article 62

Procédure judiciaire

4)
La procédure judiciaire se déroule dans la langue officielle. Une personne qui ne maîtrise pas la langue officielle doit bénéficier des services d’un interprète.

L'article 13 de la Loi sur la langue officielle (2015) reprend les mêmes dispositions à ce sujet:

Article 13

Langue de la procédure judiciaire

Toute procédure judiciaire doit se dérouler dans la langue officielle, conformément à la Constitution de la Géorgie et à la législation sur la procédure. Un interprète doit être attribué à quiconque ne parle pas la langue officielle.

Il en est ainsi de l'article 10 de la Loi organique sur les tribunaux de juridiction générale (1997), sauf qu'il est précisé que les coûts relatifs à la traduction sont assumés par l'État :

Article 10

Langue de la procédure

La procédure doit se dérouler dans la langue officielle. Quiconque ne connaît pas la langue officielle doit être assisté d'un interprète. Les dépenses relatives à la traduction sont versées à partir du budget de l'État.

Par ailleurs, l'article 142 du Code pénal (1999) et l'article 1153 du Code civil (1997) interdisent toute discrimination en matière de justice en fonction de la langue ou de l'appartenance ethnique. De plus, l'article 38 de la Constitution, qui entend protéger les droits des personnes appartenant à des minorités nationales, stipule que tous les citoyens de Géorgie sont égaux en droits dans la vie sociale, économique, culturelle et politique, indépendamment de leur appartenance nationale ou ethnique, de leur religion ou de leur langue:
 

Article 38

1)
Les citoyens de la Géorgie sont égaux dans la vie sociale, économique, culturelle et politique, indépendamment de leur appartenance nationale, ethnique, religieuse ou linguistique. En vertu des principes universellement reconnus et des normes des lois internationales, tous ont le droit de développer librement leur culture, sans aucune discrimination ni immixtion. Ils peuvent employer leur langue maternelle dans la vie privée et publique.

En matière judiciaire, la législation impose le géorgien dans toute procédure, mais le recours à un interprète est un droit lorsqu'un justiciable ignore la langue officielle. Le juge n'est pas tenu de connaître une autre langue.

3 Les services administratifs

Du fait que le géorgien a acquis le statut de langue officielle en Géorgie, les services gouvernementaux offerts à la population doivent être en géorgien, bien que des accommodements soient possibles pour les minorités nationales. Ainsi, l'article 14 du Code administratif général (1999) énonce que la langue officielle de la procédure administrative est le géorgien, mais l'abkhaze en Abkhazie:

Article 14

Langue officielle de la procédure administrative

La langue officielle de la procédure administrative est le géorgien. La langue officielle supplémentaire de la procédure administrative en Abkhazie est l'abkhaze.

Il en est ainsi à l'article 73 du même Code administratif en ce qui a trait à une procédure administrative :

Article 73

Les parties à une procédure administrative

1) Les parties à une procédure administrative doivent impliquer un organisme administratif ou une personne physique ou morale.

2) Une procédure administrative doit être effectuée par un organisme administratif autorisé.

3) Toute procédure administrative doit se dérouler en géorgien. La procédure administrative dans le territoire de l'Abkhazie peut aussi bien se dérouler en abkhaze.

4) Si la demande, la déclaration ou tout autre document présenté par une partie concernée n'est pas dans la langue officielle, la partie doit présenter une traduction notariée du document dans le délai prescrit par l'instance administrative.

 

L'article 23 de la Loi sur la langue officielle (2015) prescrit l'emploi du géorgien dans le nom des organismes publics:

Article 23

Langue des dénominations des pouvoirs publics, des organismes d'autonomie locale, des institutions, des organisations et des entreprises

1) Le nom officiel des autorités publiques et des organismes d'autonomie locale sont créés et utilisés dans la langue officielle. Ces noms peuvent être utilisés dans l'une des langues non officielles à côté de la langue officielle; et ceux des municipalités où les membres des minorités nationales sont installés dans les communautés, ces noms peuvent être utilisés également dans la langue de ces minorités nationales.

Le géorgien doit être aussi la langue des sceaux, des timbres, des en-têtes, etc. (art. 15 de la Loi sur la langue officielle):

Article 15

Langue des textes des sceaux, timbres, cachets et en-têtes

Les pouvoirs publics et les organismes d'autonomie locale doivent préparer les textes des sceaux, des timbres, des cachets et des en-têtes dans la langue officielle. S'il est nécessaire, des textes appropriés peuvent être rédigés dans l'une des langues non officielles

 

Comme il fallait s'y attendre, le géorgien est forcément la langue des forces armées (art. 14 de la Loi sur la langue officielle):

Article 14

Usage de la langue dans les forces militaires et autres forces paramilitaires de la Géorgie

1) Les forces militaires et autres forces paramilitaires de la Géorgie pratiquent leurs activités officielles dans la langue géorgienne, sauf pour les cas par ailleurs prévues par la loi ou par des traités ou accords internationaux de la Géorgie.

2) La langue du service militaire et du commandement dans les forces militaires et des autres forces paramilitaires de la Géorgie est le géorgien.

L'article 9 de la Loi organique sur l'autonomie locale (2005) prescrit le géorgien comme langue de travail pour les instances d'autonomie locale:

Article 9

Langue de travail, Bureau du travail et documents de travail pour les instances d'autonomie locale

La langue de travail et les documents de travail de toute instance d'autonomie locale doivent être dans la langue officielle de la Géorgie.

Selon l'article 9 de la Loi sur la langue officielle, tous les citoyens de la Géorgie sont tenus de communiquer avec les pouvoirs publics dans la langue officielle :

Article 9

Droits et obligations des citoyens de la Géorgie dans le domaine de l'usage de la langue

1) Tous les citoyens de la Géorgie ont le droit d'exiger de l'État qu'il leur assure les conditions nécessaires pour la protection, l'étude et le développement de la langue officielle, et de soutenir les garanties prévues par la présente loi et par d'autres actes législatifs.

2) Tous les citoyens de la Géorgie, conformément à la présente loi et au Code administratif général de Géorgie, sont tenus de communiquer avec les pouvoirs publics et les autorités autonomes locales dans la langue officielle, sauf pour les exceptions prévues par la législation de la Géorgie.

Cependant, si un citoyen soumet une demande ou un document dans une autre langue que le géorgien, l’instance administrative accorde un délai supplémentaire pour la présentation d’une traduction notariée (art. 73 du Code administratif général). Ce délai est pris en compte aux fins du respect de la date limite initiale (article 73).

Par voie de conséquence, l'État assure tous les citoyens, notamment les fonctionnaires, des conditions appropriées pour l'étude et l'usage de la langue officielle (art. 6 de la Loi sur la langue officielle):

Article 6

Garanties pour l'utilisation des langues officielles et non officielles

1) L'État doit assurer des conditions appropriées pour l'étude et l'usage de la langue officielle.

2) Les citoyens de la Géorgie, en conformité avec le Code administratif général de Géorgie, reçoivent les informations officielles dans la langue officielle, sauf dans les cas où celles-ci sont rédigées dans une langue non officielle.

3) Les fonctionnaires, en conformité avec la législation de la Géorgie, reçoivent leurs informations de service dans la langue officielle.

4) Les fonctionnaires sont dans l'obligation de parler la langue officielle.

En 2005, le gouvernement géorgien a créé l'École d’administration publique de Zurab Zhvania. Cet établissement a comme fonction, entre autres, d'assurer par un programme national professionnel l'amélioration des compétences linguistiques des fonctionnaires. Dans cette école d’administration, les études visent deux objectifs principaux :

a) l'enseignement de la langue nationale pour les fonctionnaires maîtrisant mal ou pas du tout le géorgien ;
b) l'initiation à la méthodologie moderne d’administration publique.

Cet établissement propose aussi aux membres appartenant aux minorités ethniques des programmes spéciaux de formation à la langue géorgienne et à la fonction publique. Il met particulièrement l'accent sur l'enseignement du géorgien aux enseignants et aux responsables publics locaux qui ne parlent pas la langue nationale.

En Géorgie, conformément à l'article 26 de la Loi sur la citoyenneté (1993), l'acquisition de la citoyenneté pour un étranger exige au préalable la connaissance de la langue officielle:

Article 26

Le critère pour l'acceptation de la citoyenneté géorgienne

La citoyenneté géorgienne peut être octroyée à un citoyen étranger ou un apatride ayant l'âge légal selon la présente loi, s'il remplit les conditions suivantes:

a) résider de façon permanente sur le territoire de la Géorgie depuis les dix dernières années;
b)
connaître la langue officielle dans les limites fixées par la loi;
c) connaît l'histoire de la Géorgie dans les limites fixées par la loi;
d) avoir un emploi ou une résidence sur le territoire de la Géorgie.

Cependant, pour un ressortissant géorgien, la Loi organique sur la nationalité géorgienne (2014) interdit toute discrimination de langue ou d'appartenance nationale ou ethnique:

Article 4

Le statut juridique des ressortissants géorgiens

1) Les citoyens géorgiens sont égaux devant la loi sans distinction de race, de couleur de la peau, de langue, de sexe, de religion, d'opinions politiques ou autres, d'appartenance nationale, ethnique et sociale, d'origine, de statut social ou de fortune, de lieu de résidence ou d'autres caractéristiques.

Conformément à l'article 4 de la Loi sur le statut juridique des étrangers (1998), tous les étrangers doivent respecter la langue géorgienne, la culture, les coutumes et les traditions du peuple géorgien:

Article 4

L'obligation pour les étrangers de se conformer à la Constitution et aux lois de la république de Géorgie

Les étrangers dans la république de Géorgie doivent se conformer à la Constitution de la république de Géorgie et aux lois de la république de Géorgie, respecter la langue géorgienne, la culture, les coutumes et les traditions du peuple géorgien, ainsi que les droits et libertés des minorités nationales vivant en Géorgie.

En définitive, la situation linguistique a bien changé depuis l'indépendance en 1991. Le russe est presque disparu du paysage administratif. Le géorgien s'est imposé dans toutes les régions à l'exception, bien sûr, de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud.

4 La langue des élections

Compte tenu de l'importance des instances d'autonomie locale, les élections sont fréquentes et ne se limitent pas à la députation parlementaire ni à la présidence de la République. En Géorgie, les élections sont sous la juridiction de la Commission électorale centrale (CEC). Dans tous les postes pour lesquels il faut recourir à une élection, la connaissance de la langue officielle est une exigence incontournable.

Selon l'article 10 du Code électoral (2012), les candidats à la présidence de la CEC doivent notamment maîtriser couramment la langue officielle:

Article 10

Composition de la CEC et procédures de l'élection du président

4) Les candidats à la présidence de la CEC doivent être des citoyens compétents de la Géorgie, qui ont atteint l'âge de 25 ans, qui sont non partisans, qui bénéficient d'un enseignement supérieur, qui maîtrisent couramment la langue officielle de la Géorgie, qui répondent aux conditions au paragraphe 5 de l'article 12 de la présente loi, du présent paragraphe et de l'article 17 de la loi de la Géorgie sur la fonction publique, qui disposent d'une expérience de travail d'au moins trois ans et être titulaires d'un certificat d'une instance administrative électorale officielle.

Les articles 17 et 18 de la Loi sur la langue officielle énoncent que les documents nécessaires lors des élections et des référendums doivent être préparés dans la langue langue officielle: 

Article 17

Langue des élections

Lors de la procédure électorale, les candidats doivent être enregistrés, les documents appropriés doivent être préparés et la procédure d'élections doivent être dans la langue officielle, sauf pour les cas prévus par la loi organique de la Géorgie, le Code électoral de la Géorgie.

Article 18

Langue des référendums et des plébiscites

1) Les référendums et plébiscites doivent être préparés et se dérouler dans la langue officielle, sauf pour les cas prévus par la loi organique de la Géorgie, le Code électoral de la Géorgie.

2) Les bulletins de vote pour la tenue des référendums et des plébiscites sont émises et les décisions prises à la suite des référendums et des plébiscites sont faites dans la langue officielle, sauf pour les cas prévus par la loi organique de la Géorgie, le Code électoral de la Géorgie.

 

Quant aux bulletins de vote, ils doivent, selon l'article 63 du Code électoral, être rédigés en géorgien et, en cas de nécessité, dans une langue locale:

Article 63

Bulletin de vote et enveloppe spéciale

1) Le bulletin de vote doit être imprimé en vertu de l'ordonnance de la CEC et en conformité avec l'échantillon établi par l'ordonnance en géorgien, mais également en abkhaze en Abkhazie, ainsi que, en cas de nécessité, en d'autres langues intelligibles pour la population locale.

Quant à l'article 70, il énonce que les résumés de protocole doivent être en géorgien et dans une langue intelligible pour la population locale:
 

Article 70

Résumé du protocole des résultats du bureau de vote

10) Un résumé des protocoles doit être imprimé en géorgien et en abkhaze en Abkhazie, et pour les circonscriptions électorales pour lesquelles les bulletins de vote sont imprimés dans une langue différente intelligible pour la population locale, le résumé des protocoles sont imprimés aussi dans cette langue.

En somme, que ce soit à la présidence, au Parlement ou dans les municipalités, il n'y a pas moyen de s'en tirer : la maîtrise du géorgien est nécessaire pour se porter candidat à un poste quelconque. D'ailleurs, les postes de fonctionnaires et les diplômes professionnels ne sont accessibles qu’aux personnes parlant le géorgien, et ce, d'autant plus qu'ils sont subordonnés à la réussite d‘examens de qualification supplémentaires.

La Commission électorale centrale a publié des guides en trois langues: en russe, en arménien et en azéri. Ces guides sont destinés aux membres des bureaux de vote et de leurs formateurs dans les régions où sont concentrées les minorités concernées.

4.4 L'éducation en Géorgie

Durant les premières années de l'indépendance (1991), l'éducation n'a pas été une grande priorité pour les nouvelles autorités géorgiennes qui avaient fort affaire pour assurer la souveraineté de l'État. Il a fallu attendre la fin de la décennie de 1990 pour constater un virage important dans ce domaine.

Aujourd'hui, la durée de l’enseignement public est de douze ans en Géorgie. Les enfants sont admissibles à l'école primaire à l'âge de six ans pour une durée de six ans. Ensuite, ils peuvent accéder à l'école secondaire pour trois années avant, si possible, de passer au lycée à 15 ans (trois autres années). Quant à l'enseignement supérieur, il est partagé entre des établissements publics (env. 25) et privés (env. 80).

- La langue nationale

L’enseignement de la langue nationale, le géorgien, constitue une matière importante dans le programme d'études et son apprentissage est obligatoire pour tous les élèves, avec un nombre d’heures déterminé. La politique appliquée à la langue nationale est soumise à la Loi sur l'éducation générale (2005).

 En vertu de l’article 4, la langue d’enseignement dans les établissements d’enseignement public est le géorgien, ainsi que l’abkhaze en Abkhazie:
 

Article 4

Langue d'enseignement

1) La langue d'enseignement dans les établissements d'enseignement public est le géorgien, tandis que dans la République autonome d'Abkhazie c'est le géorgien ou l'abkhaze.

2) Si la langue d'enseignement dans les établissements d'enseignement public dans la République autonome d'Abkhazie est l'une des langues officielles, l'enseignement de la seconde langue officielle est obligatoire.

Cependant, les citoyens de la Géorgie, dont la langue maternelle n'est pas le géorgien, ont le droit d'acquérir une instruction publique complète dans leur langue maternelle. C'est pourquoi le géorgien peut également être enseigné comme langue seconde.

L'article 7 de la Loi sur la langue officielle précise également que l'enseignement préscolaire, l'enseignement général ou public au primaire et au secondaire, ainsi que l'enseignement supérieur, doivent être offerts dans la langue officielle:  

Article 7

Langue d'enseignement

1) L'État doit prévoir un enseignement préscolaire, un enseignement général et un enseignement supérieur dans la langue officielle. La question de recevoir une instruction dans une langue non officielle et dans les langues des minorités nationales est régie par la législation de la Géorgie.

La Loi sur l'éducation générale de 2005 autorise l’enseignement dans une langue minoritaire dans certaines zones géographiques où sont concentrées des minorités, mais l’apprentissage du géorgien comme langue seconde demeure obligatoire dans toutes les écoles.

- L'enseignement supérieur

La Géorgie compte une vingtaine d'établissements supérieurs, dont une douzaine à Tbilissi. Sous le Régime soviétique, tous les cours étaient offerts presque uniquement en russe et les programmes étaient tous élaborés à Moscou. Sans connaissance du russe, l'accès à l'université demeurait impossible. Aujourd'hui, c'est le géorgien qui est devenu nécessaire dans les études supérieures. 

Selon la Loi sur l'enseignement supérieur (2004), la langue d'enseignement dans un établissement d'enseignement supérieur doit être le géorgien: 

Article 4

Langue de l'enseignement supérieur

La langue d'enseignement dans un établissement d'enseignement supérieur est le géorgien et également l'akhaze en Abkhazie. (À l'exception des cours pour des études personnelles, l'instruction en d'autres langues est autorisée à la condition que ce soit prévu ou convenu par un accord international avec le ministère de l'Éducation et de la Science de la Géorgie.)

Légalement, l’instruction peut être donnée dans une autre langue à condition qu'elle soit soumise à réglementation au moyen d'un traité ou d'un accord international conclu avec le ministère de l’Éducation et des Sciences, mais dans les faits certains cours spécialisés se donnent néanmoins en russe ou en anglais.

Par arrêté  (n° 127) du ministère de l’Éducation et des Sciences en date du 28 mars 2005, il existe des examens nationaux d’entrée unifiés. Tous les étudiants, quelle que soit leur langue d’instruction, inscrits dans les établissements d’enseignement supérieur agréés sont tenus de réussir des examens de langue et de littérature géorgiennes, de langue étrangère (anglais, russe, allemand ou français, au choix de l’étudiant) et d’aptitudes générales. Ces examens sont complétés par d'autres tests en mathématiques, en  histoire, en sciences, etc.

- Les langues étrangères

De par son histoire, la Géorgie a toujours été ouverte et orientée vers l’Occident, mais sous le régime communiste (1925-1991), les contacts avec l‘Europe ou avec d’autres pays non soviétiques étaient strictement interdits. La Géorgie fut ainsi contrainte de s’isoler dans cet espace soviétique. Après l’indépendance, la Géorgie a cherché des moyens pour rétablir ses relations avec l’Europe, bien qu'elle aie attendu neuf ans pour devenir membre du Conseil de l’Europe (1999). C'est alors que la Géorgie est entrée dans un espace géopolitique multilingue et multiculturel. En effet, l'intégration ne devait se faire que par la maîtrise des langues étrangères.

C'est pourquoi le ministère de l'Éducation et des Sciences (MES) en entrepris, ces dernières années, de profondes réformes en matière d'enseignement des langues étrangères. Le ministère de l’Éducation et des Sciences a mis l'accent sur l’apprentissage précoce des langues à l’école primaire et sur la continuité de l’enseignement de ces langues. Dans presque toutes les écoles publiques, la première langue étrangère fut introduite en 2004 en 3e année du primaire; son enseignement s’étalait sur sept ans. La deuxième langue étrangère devint obligatoire en première année du secondaire pour une durée de trois ans (de la 7e à la 9e année).

Les langues étrangères proposées par le programme national sont l'anglais, le russe, l'allemand, le français, l'ukrainien, l'espagnol, l'italien, le turc, l'arabe ou le japonais. Cependant, les écoles sont libres de choisir «leurs» langues, tandis que les parents sont, eux aussi, libres de choisir la langue qui convient pour leurs enfants parmi la palette proposée localement. Quant aux autres langues que l'anglais, surtout le russe, le français et l’allemand, elles bénéficient d’un statut de première ou de seconde langue étrangère. Rappelons que la maîtrise de deux langues étrangères, au minimum, est obligatoire. En 10e année, une troisième langue est introduite sur une base facultative.

En 2011, à la suite de la décision du président Mikheil Saakachvili, l’enseignement de l’anglais devint obligatoire dès la première année du primaire. Ce fut le programme TLG («Teach and learn with Georgia») qui suscita la controverse. La langue géorgienne utilise un alphabet particulier pour son écriture: l'alphabet géorgien. L'introduction de l'anglais signifie que des élèves de six ans sont tenus d'apprendre en même temps deux alphabets : celui de leur langue maternelle et l’alphabet latin avec les premières notions d’anglais. De plus, cette introduction de l’anglais dès la première année mettait en danger les autres langues étrangères. De fait, en rendant l'anglais obligatoire, le russe devenait prépondérant sur toute autre langue pour des motifs utilitaires dans un pays post-soviétique comme la Géorgie. Dès lors, la place réservée aux langues que l’anglais et le russe devient extrêmement réduite.

Dans ces circonstances, l'enseignement des langues étrangère est demeuré très éloigné des objectifs prévus à l'origine: la diversification d’offre des langues et le développement du plurilinguisme en Géorgie. Or, l'enseignement des langues étrangères est réduit dans les faits à une seule langue, l'anglais, et contribue davantage à l’hégémonie de cette dernière. La gamme des langues enseignées reste fort limitée, le plurilinguisme géorgien se limitant à la maîtrise de l'anglais, parfois suivi du russe. Pourtant, les documents officiels soulignent encore l’importance de l’enseignement des langues étrangères comme élément incontournable de la formation de tout individu. Non seulement la demande d'enseignement des grandes langues européennes, comme le français, l'allemand ou l'espagnol, demeure faible, mais la demande d’enseignement des langues pays voisins (arménien, turc, grec, persan, arabe, etc.) est rarissime du fait qu'elles paraissent inutiles. Aujourd'hui, la plupart des étudiants aux études supérieures sont à la recherche de bourses d’enseignement à l’étranger auprès des ambassades ou des fondations anglo-saxonnes. La maîtrise de la langue anglaise est devenue un outil d’affirmation de soi dans la «Nouvelle Géorgie».

Une question se pose sur l'imposition de l'anglais dans les écoles. Comment est-il possible que le président d'un pays puisse intervenir personnellement pour imposer une langue étrangère à tous les enfants de son pays? Normalement, ce genre de décision devrait revenir au ministère de l'Éducation sur la base d'études et de recherches élaborées préalablement par des spécialistes. Normalement, ce genre d'intervention dans les programmes scolaires n'est possible que dans une dictature. Il est vrai que l'ancien président, Mikheil Saakachvili, avait construit un État policier, mais la plupart des Géorgiens ne veulent plus de dictateur… Toutefois, le système d'éducation se trouve à promouvoir l’enseignement de l’anglais, alors qu'une grande partie de la population parmi les minorités nationales ne maîtrise pas le géorgien, la langue officielle du pays. 

Pour ce qui est de la langue russe, elle recule d'année en année. Les Géorgiens de moins de 30 ans ne la parlent généralement pas, alors que les plus 30 ans ne veulent plus la parler. La communauté russe a quitté massivement le pays, les écoles russes disparaissent progressivement et les cours de russe langue seconde sont supplantés par l'anglais. Le rejet de la langue et de la culture russes s'accentue de plus en plus. Dans une décennie, la décolonisation russe ne sera plus qu'un souvenir.

- Les problèmes en éducation

La Géorgie connaît divers problèmes reliés à l'éducation. Le faible financement de l’État en la matière, une forte dégradation des équipements scolaires et un manque d’enseignants qualifiés sont identifiés comme les principaux problèmes. Malgré les augmentations dans les dépenses publiques dans le domaine de l'éducation au cours des dernières années, ces efforts sont demeurés insuffisants. Actuellement, beaucoup d'écoles sont dans des bâtiments délabrés. Non de nombreuses salles de classe sont vétustes, mais les coupures d'eau et le manque de chauffage en hiver ne favorisent guère leur entretien. Les organismes internationaux déplorent que des écoles soient généralement fermées en janvier et en février, car il est impossible de travailler dans le froid.

Les équipements font aussi défaut, que ce soit les bibliothèques, les gymnases, les ordinateurs, etc. Il y a une constante pénurie de matériel essentiel de toute sorte : les tables, les chaises, les manuels de classe (vieillis), le papier, les crayons, les craies, etc. À cela s'ajoute le coût de ce matériel élémentaire. Souvent on trouve des ordinateurs, mais pas de modem; des photocopieurs, mais pas de poudre ou de cartouche d'encre; une bibliothèque, mais peu ou pas de livres; une salle d'activités physique, mais sans matériel; un système de chauffage, mais pas de carburant, etc. La qualité de l’éducation publique souffre de ces manques de ressources.

La formation des enseignants dans les écoles publiques au primaire et au secondaire ne semble pas toujours adéquate, notamment en dehors des grands centres urbains. Rares sont les enseignants qui sont dotés d'un baccalauréat, car la plupart ont une formation généralement restreinte à deux années d'études post-secondaires. Au point de vue linguistique, seule la connaissance du géorgien est nécessaire, mais la maîtrise de l'anglais, du russe, de l'arménien ou de l'azéri, en dehors des cours de langue étrangère, peut être un atout. Il faut déplorer également les faibles salaires donnés aux enseignants, soit une allocation mensuelle aussi basse que 300 $ (env. 275 €), ce qui couvre à peine leurs frais.

Mais il s'agit là d'un salaire «normal» en Géorgie, car le revenu mensuel moyen dans ce pays est d'environ 400 $ (365 €). Le ministère de l'Éducation et des Sciences exige beaucoup de bénévolat de la part des enseignants pour les diverses activités parascolaires. À cela s'ajoute les retards de paiement avec le résultat que beaucoup d'enseignants quittent la profession après quelques années.

En contrepartie, les enseignants bénéficient d'un mois de salaire payé pour leurs vacances et des billets d'avion aller-retour  à cette fin, une couverture médicale complète, un logement à coût réduit, etc.  Bref, la pauvreté demeure un problème grave et qui prend de l’ampleur dans les familles de la Géorgie.

Certains organismes internationaux déplorent régulièrement des manifestations de racisme dans le discours public, notamment dans les écoles. En raison des conflits armés qui ont secoué la Géorgie, surtout depuis 2008, on assisterait à une rhétorique très nationaliste pro-géorgienne et anti-russe, ainsi qu'une propagande haineuse visant particulièrement les Russes, les Abkhazes et les Ossètes, en les décrivant comme les «ennemis» de la nation. Le «défenseur public» doit intervenir pour combattre ces signes d'intolérance et de discrimination. 

4.5 Les médias

Après la disparition de l'Union soviétique, de nombreux journaux nouveaux et plusieurs chaînes de télévision nouvelles surgirent dans le paysage médiatique géorgien. Les nouveaux médias ont aussitôt soutenu le président Zviad Gamsakhourdia dans ses politiques nationalistes se résumant à «une Géorgie pour les Géorgiens», au détriment des autres groupes ethniques. La nouvelle direction du pays fait en sorte de placer des fidèles partisans à des postes clés dans les publications et les télévision d'État. Après l'éviction de Gamsakhourdia à la fin de 1992, les médias indépendants se multiplièrent sous la présidence d'Edouard Chevardnadzé, même si les à la liberté de la presse restrictions se poursuivirent jusqu'en 1994. Peu à peu, les médias écrits et électroniques découvrirent une liberté sans précédent dont bénéficient aujourd'hui les médias géorgiens.

Depuis le mois d'avril 2011, un groupe d’experts indépendant des médias, le Media Advocacy Group, a élaboré des propositions de réforme de la législation sur les médias en Géorgie. Les propositions ont traité, entre autres, sur des problèmes liés au pluralisme et à l'indépendance des médias, ainsi que sur le fonctionnement du service public de radiodiffusion. Sous les présidents Edouard Chevardnadzé (1992-2003) et Mikheil Saakachvili (2004-2007 et 2008-2013), la politisation des médias était la règle: les interférences politiques étaient la règle dans la nomination et le licenciement des dirigeants au sein de l'audiovisuel public comme dans les médias privés.

La Loi sur la langue officielle (2015) ne traite pas de la langue des médias, sauf à l'article 27 qui mentionne que «les questions relatives à la langue de diffusion sont régies par la Loi sur la radiodiffusion». Or, le seul article de la Loi sur la radiodiffusion (2004) énonce que le diffuseur de service public doit diffuser une proportion pertinente de programmes élaborés par les groupes minoritaires dans leur langue, sans faire aucune référence à la langue officielle:

Article 16

Obligations du contenu


Le diffuseur d'un service public doit:

l) diffuser une proportion pertinente de programmes élaborés par les groupes minoritaires dans leur langue;

Le chapitre VII de la Loi sur la langue officielle porte sur «La langue de l'information et des médias». Dans ce chapitre, on trouve les articles 24 et 25. L'article 24de la Loi sur la langue officielle précise que la langue de l'information auprès du public est le géorgien:

Article 24

Langue de l'information auprès du public

Les textes des déclarations, notifications, titres, affiches, enseignes, annonces, publicités et autres informations visuelles destinées à informer le public doivent être rédigés dans la langue officielle. [...].

Quant à l'article 25 de la Loi sur la langue officielle, il énonce que les inscriptions destinées à l'information auprès du public doivent être présentées dans la langue officielle. De plus, selon les conditions prévues par la loi, lorsqu'une inscription est rédigée à la fois dans la langue officielle et dans une langue non officielle, celui en géorgien doit prédominer sur celui dans la langue non officielle, c'est-à-dire être placé en premier, soit à gauche ou au-dessus, et la police du texte écrit dans la langue non officielle ne devant pas être supérieure à la police du texte écrit dans la langue officielle:
 

Article 25

Présentation et le emplacement des inscriptions destinées à l'information du public

1) Les inscriptions destinées à l'information auprès du public doivent être présentées dans la langue officielle.

3) Dans les cas prévus par la présente loi, lors de l'écriture des noms officiels à la fois dans les langues officielle et non officielles, le texte écrit dans la langue officielle doit être placé en premier (à gauche ou au-dessus) et le texte écrit dans la langue non officielle doit être placé en dernier (à droite ou en-dessous).

4) Lors de l'écriture des noms officiels dans les langues géorgienne, abkhaze et non officielles, le texte géorgien doit être placé en premier (à gauche ou au-dessus), le texte en abkhaze doit être placé au milieu, alors que les textes écrits dans les langues non officielles doivent être placés en dernier (à droite ou en-dessous).

5) Dans les cas différents de ceux prévus aux paragraphes 3 et 4 du présent article, le texte écrit dans la langue officielle doit être placé en avant du texte rédigé dans la langue non officielle (à gauche ou au-dessus).

6) Lorsque les textes sont rédigés à la fois dans les langues non officielles et la langue officielle, la police du texte écrit dans la langue non officielle ne doit pas être supérieure à la police du texte écrit dans la langue officielle.

- Les journaux

Dans la république de Géorgie, il existe approximativement 200 journaux indépendants, les plus importants étant publiés dans la langue géorgienne : 24 Saati («24 heures»), Rezonansi («Résonance»), Alia, Akhali Taoba, Kvilis Palitra, etc. On y trouve aussi de nombreux journaux en anglais: Georgian Messenger, The Financial (hebdomadaire), Georgia Today (hebdomadaire), The Georgian Times (hebdomadaire). Il subsiste encore quelques journaux en russe: Svabodnaia Gruzia, Rech, Vecherni Tbilisi, Zakavkazskie Vedomosti, Zaria Vostoka, Batumi, etc. Il convient d'ajouter aussi plusieurs journaux dans les langues minoritaires, notamment en arménien, en azéri, en assyrien, en allemand, en grec, etc.

- La radio

Les médias électroniques diffusent massivement en géorgien. Un certain nombre de stations de radio indépendantes diffusées sur les fréquences AM et FM, mais la plupart de leur programmation se compose de a musique. La radio nationale continue de dominer les régions en dehors de Tbilissi. La Sakartvelos Sasogadoebriwi Mauzkebeli (en anglais: Georgian Public Broadcasting (ou Broadcaster) est l'entreprise de radiotélévision nationale de la république de Géorgie.

À Tbilissi, les ondes FM sont utilisées par une station de radio appartenant à l'État et six par des compagnies privées. La plupart des stations mettent l'accent sur la musique et portent de moins en moins attention aux nouvelles de l'actualité. D'autres stations privées diffusent à Zougdidi, à Samtredia et à Batumi. Certaines stations de nouvelles rediffusent des émissions en en géorgien à partir de Voice of America et de Radio Liberty. Les stations radiophoniques russes de la fédération de Russie sont facilement accessibles en Géorgie.

- La télévision

La Radiotélévision publique géorgienne (Sakartvelos Sasogadoebriwi Mauzkebeli) a occupé toute la scène télévisuelle après l'indépendance. Le réseau de télévision géorgienne (TNG) a commencé ses travaux en 1996; il regroupait alors 15 stations non détenues par l'État et couvrait quelque 15 villes et villages. En mai 1996, les stations de télévision indépendantes ont commencé à diffuser des programmes hebdomadaires en commun et échanger la documentation avec le réseau InterNews US. En 1998 est apparue la chaîne Rustavi-2, qui mettait fin au quasi-monopole de la société d'État.

Rustavi-2 est maintenant considérée comme la seule station indépendante de l'État ayant un auditoire national. En plus de Rustavi-2, il y a maintenant sept stations de télévision indépendantes à partir de Tbilissi. Il faut ajouter aussi près de 50 stations de télévision régionales, dont 17 d'entre elles offrent des nouvelles quotidiennes. Bien que ces stations soient apparemment indépendantes, le manque de recettes publicitaires oblige souvent celles-ci à demander des subventions auprès des administrations locales pour le soutien. Certaines régions, comme la région de Samtskhe-Javakheti et de Kutaisi, ont des médias relativement indépendants. Les médias audiovisuels continuent d'être la principale source d'information pour la grande majorité de la population de la Géorgie.

La chaîne Rustavi-2 accapare à elle seule environ 55 à 65 % du marché national de la publicité. Or, l'article 4.2 de la Loi sur la publicité (1998) exige que toute publicité soit transmise «dans la langue nationale»:

Article 4

Exigences générales relatives à la publicité

1) La publicité doit être explicite dès le moment de sa présentation sans recours à des connaissances et à des équipements spéciaux en tant que publicité directe.

2) La publicité est transmise dans toute la Géorgie dans la langue nationale. Cette exigence ne concerne pas les transmissions et les programmes qui sont publiés dans une autre langue, mais les propriétaires d'une marque (logotype) de commerce (service) enregistrée dans une langue étrangère et déposée en Géorgie doivent s'engager à utiliser le géorgien par l'intermédiaire de la translitération.

3) Toute question relative au respect des normes linguistiques dans la publicité est régie par la législation de la Géorgie.

Mais lorsqu'une station de radio ou de télévision diffuse en une autre langue, elle n'est pas assujettie à la loi sur la publicité. Elle doit néanmoins respecter les normes linguistiques exigées par la loi dans l'usage du géorgien. 

4.6 Le monde du travail et du commerce

Sous le Régime soviétique, le russe demeurait sans conteste la langue des relations de travail et du commerce en Géorgie. La situation a bien changé depuis l'indépendance au profit du géorgien et parfois de l'anglais. En vertu de l'article 29 de la Loi sur la langue officielle (2015), les consommateurs ont le droit de recevoir les informations dans la langue officielle : 

Article 29

Droits des consommateurs de recevoir des informations dans la langue officielle

1) Les consommateurs peuvent demander et recevoir des informations dans la langue officielle, selon les modalités prévues par la législation de la Géorgie.

2) Les services ne peuvent pas être refusés à une personne qui ne parlerait pas langue officielle.

À partir de ce principe, le Code du chemin de fer (2002) stipule que toute information destinée au public de la part d'une compagnie de chemin de fer doit être transmise ou publiée dans la langue géorgienne ou, en cas de nécessité, dans une autre langue :

Article 7

Responsabilités des parties alors que le transport

7) La compagnie de chemin de fer est tenue de donner des informations véridiques et nécessaires pour le passager et le client (récepteur) concernant la qualité du service selon le présent code et de tout autre instrument normatif de la Géorgie. Les informations doivent être transmises (publiées) dans la langue géorgienne ou, en cas de nécessité, suivant l'intérêt des citoyens et des étrangers qui habitent en Géorgie, elles peuvent de plus être transmises (publiées) dans une autre langue.

La Loi sur la langue officielle exige aussi que les technologies de l'informatique (logiciels) utilisées par les pouvoirs publics et les organismes d'autonomie locale doivent permettre à leurs utilisateurs de préparer des textes dans la langue officielle:

Article 31

Usage de la langue dans le domaine de l'informatique

1) L'État doit faciliter l'usage de la langue géorgienne dans toutes les technologies de l'information.

2) Les technologies de l'informatique (logiciels) utilisées par les pouvoirs publics et les organismes d'autonomie locale par des personnes morales en vertu des lois publiques et privées doivent permettre à leurs utilisateurs de préparer des textes dans la langue officielle.

Toutes les entreprises privées qui transigent avec l'État doivent utiliser le géorgien lorsqu'elles demandent des permis, que ce soit pour enregistrer une marque déposée (Loi sur les marques de 1999) ou une appellation d'origine ou une indication géographique (Loi sur les appellations d'origine et les indications géographiques des marchandises de 1999) ou encore pour une demande d'émission de brevet (Loi sur les brevets de 2010).

La politique linguistique à l'égard de la lange officielle en est une de valorisation. Le géorgien avait été ravalé au rang d'une langue régionale sous le régime soviétique. À la suite de l'indépendance en 1991, les nouvelles autorités se devaient de rehausser le statut de la langue nationale. Après des débuts plutôt timides sous la présidence d'Edouard Chevardnadzé, les autorités lors de la présidence de Mikheil Sakachvili ont considérablement haussé les exigences et les prescriptions en matière de langue, ce qui a augmenté les tensions non seulement avec les Russes, les Abkhazes et les Ossètes, mais aussi avec d'autres groupes minoritaires, notamment les Arméniens et les Azéris. Il était certes nécessaire d'exercer un rattrapage en faveur du géorgien, tout en poursuivant un dialogue constant avec les représentants des minorités. Ce n'est pas toujours ce qui a été fait dans l'empressement de mettre en pratique la politique de valorisation de la langue officielle. Le fait que la Loi sur la langue officielle n'a pu être adoptée qu'en 2015, soit 24 ans après l'indépendance, signifie que la politique linguistique fut lente à être élaborée, sinon très difficile à être échafaudée dans le but d'être mise en œuvre. Il y eut divers projets de loi présentés au Parlement, mais les députés n'ont pu s'entendre que deux décennies plus tard. La législation linguistique de 2015 mentionne à plusieurs reprises la question des minorités. Il reste maintenant à voir ce qu'il en est à ce sujet. 

Dernière révision: 22 déc. 2023
 

La Géorgie
 

(1) Situation générale
 

(2) Politique linguistique du géorgien
 

(3) Politique des minorités nationales
 

(4) Bibliographie