République du Turkménistan

Turkménistan

2) Données historiques

 

1 Les plus anciennes périodes

Tout au long de son histoire, le territoire de l'actuel Turkménistan fut dominé par les grands empires environnants, celui des Turcs, des Perses, des Grecs, des Arabes, des Mongols ou des Russes avant de devenir un État à part entière en 1991. Le Turkménistan actuel correspond à l’ancienne province perse de la Sogdiane formée par Cyrus II (de 559 à 530 avant notre ère), le fondateur de l'Empire perse, au VIe siècle, puis conquise par Alexandre le Grand, deux siècles plus tard, ensuite par les Turcs (VIe siècle de notre ère) et par les Arabes (VIIe-VIIIe siècles). À l’origine, les langues parlées sur l’actuel territoire du Turkménistan étaient à l'origine de souche iranienne, tels que le bactrien, le soghdien, le khorezmien, etc.

1.1 L'Empire achéménide

L’Empire achéménide fut le premier grand empire perse. C'est Cyrus II qui, le premier, réunit les deux royaumes (Anshan et Ariaramnès) et fonda alors l’Empire perse. À l'âge d'or de leur puissance, sous le règne de Darius Ier  (Darius le Grand), au Ve siècle avant notre ère, les souverains achéménides de la Perse régnèrent sur les territoires actuels de l’Iran, l’Irak, l’Arménie, l’Afghanistan, la Turquie, la Bulgarie, les régions orientales de la Grèce, l’Égypte et la Syrie et la plupart des territoires de ce que sont devenus le Pakistan, la Jordanie, Israël, la Palestine, le Liban, le Caucase, l’Asie centrale, la Libye et le nord de la péninsule arabique. Cet empire fut certainement le plus grand empire de toute l’Antiquité. L'araméen servait alors de langue administrative et de langue véhiculaire dans l'empire, bien que le vieux persan soit parlé par une partie importante de la population.

L'Empire perse fut pratiquement toujours en guerre contre les Grecs, ce qui allait entraîner son déclin, car il fut finalement conquis par Alexandre le Grand en 330 avant notre ère. Selon la tradition du zoroastrisme, Alexandre le Grand aurait détruit le texte original de l’Avesta, rédigé en lettres d’or sur des peaux de bœuf.  À l'extérieur de la Perse, la langue véhiculaire était, selon le cas, l'égyptien (Égypte), le grec (monde hellénique) ou le lydien (Asie Mineure ou Anatolie).

1.2 Les Séleucides

Lors du décès d’Alexandre le Grand (23 juin 323) mort sans héritier, Séleucos Ier Nicator s’empara de la partie asiatique de l’empire d’Alexandre. Il fonda sa future capitale, Séleucie (devenue ensuite Antioche), située sur la Méditerranée. Au cours de cette période, l’Empire perse acquit un caractère multiculturel, car il était peuplé non seulement de Perses, mais aussi de Grecs, de Juifs, de Mèdes, etc. La Perse connut alors une certaine hellénisation, y compris dans la langue, car les souverains qui régnaient sur l’ancien empire achéménide étaient d’origine grecque. De nombreux mots provenant des langues avoisinantes, telles que l'araméen et le grec furent introduits dans la langue persane.

La dynastie des Séleucides s’éteignit en 64 avant notre ère, lorsque le général romain Pompée détrôna Antiochos XIII et annexa le royaume de Syrie pour en faire une province romaine.

1.3 L'Empire sassanide

Sassan, fondateur de la dynastie sassanide, était prêtre du temple d’Anahita à Istakhr et se proclamait descendant de Darius III, l’un des derniers souverains perses achéménides. Sassan fonda l’Empire sassanide, lequel correspond au second empire persan et le nom de la quatrième dynastie iranienne (226-651). Cet empire s’étendit sur l’Arabie méridionale, mais l'expansion territoriale se poursuivit sous Khosro II Parviz avec l’annexion de la Syrie, de l’Égypte et de la Palestine. Sous les Sassanides, la civilisation perse connut des conflits importants avec Rome qu'elle réussit cependant à repousser. On considère l'ère des Sassanides comme l'une des périodes les plus importantes de l'histoire de l'Iran. La langue officielle était le vieux persan connu par ses inscriptions cunéiformes.

En général, ces inscriptions étaient rédigées en trois langues: en vieux persan, en akkadien et en élamite. Au cours de cette période, la langue persane emprunta des éléments sémitiques araméens. Le nom de pehlvi est souvent utilisé pour désigner la langue de la Perse durant cette période. Le vieux persan fut parlé jusqu'au IIIe siècle avant notre ère. Le néo-persan se constitua vers l'an 1000 en tant que langue littéraire. C'est cette langue qui formera après un long processus le persan moderne.

1.4 Turquification et islamisation

Vers le VIe siècle de notre ère, les populations persanes furent contraintes de s'assujettir aux Göktürk, un peuple turcophone qui avait régné sur la Mongolie et l'Asie centrale avant de prendre de l'expansion vers la mer Caspienne, donc au Turkménistan. Ils formaient constituaient un khanat créé par le clan des Ashina. Les Göktürk parlaient le göktürk, appelé aussi le «vieux turc». Ils avaient également une religion, le tengrisme, basée sur la vénération de Tängri, le Dieu-Ciel. C’est ainsi que les habitants de la région passèrent des langues iraniennes aux langues turques, dont le turkmène, l’ouzbek, le kazakh, etc. Tout comme les autres langues de la famille altaïque, la langue turkmène resta toujours influencée par les langues d’origine iranienne (persan ou farsi, ta djik, etc.).

Cela dit, certaines langues iraniennes résistèrent, comme en témoigne la langue tadjike parlée aujourd'hui au Tadjikistan et dans certaines régions de l'Ouzbékistan. D’ailleurs, au XIe siècle, le persan était demeuré la langue de la littérature, de la cour et de l’administration en Asie centrale. Cette tradition s’est même perpétuée dans certaines régions du Turkménistan et de l'Ouzbékistan. 

Au cours de cette première phase de l'histoire, la majorité des habitants du Turkménistan furent des adeptes du zoroastrisme ou du bouddhisme, alors que la région était largement dominée par les peuples iraniens. Ces incursions et ces époques, bien que cruciales, n'ont pas façonné l'histoire de la région comme les invasions de deux groupes d'invasion ultérieurs: les Arabes et les Turcs Oghuz.

- La conquête arabo-musulmane

Le VIIIe siècle allait amener un autre bouleversement d'envergure dans cette région de l'Empire perse et de l'Asie centrale.

Durant le califat d’Omar (634-644), les Arabes musulmans entreprirent la conquête de l’Empire perse des Sassanides, une dynastie perse originaire du Fars, fondée par Ardachêr Ier, vers 224 de notre ère. Le calife Omar déploya quelque 30 000 cavaliers arabes contre l'armée perse. Au milieu du VIIe siècle, les Arabes contrôlaient déjà toute la Mésopotamie (l'Irak actuel). L’ancienne religion zoroastre, même si elle était tolérée par les dirigeants musulmans, ne peut résister à la force de l’islam. La noblesse et les populations urbaines furent les premiers à se convertir, puis suivirent les paysans et les ''dihqans'' (gentilshommes possédant de la terre).

L'islam fut introduit au Turkménistan pendant la première période de l'Empire arabo-musulman, sous les deuxième et troisième califes des Rachidounes, soit Omar (634-644), puis Othman (644-656). L'islam intégra la structure tribale turkmène grâce au principe de la tribu sainte des «övlat».  

- Le règne des Turcs

Après les Arabes musulmans, ce fut le tour des Turcs oghuz, les ancêtres des Turkmènes actuels. Rappelons que les Turcs étaient originaires de l'Asie centrale et qu'ils avaient fondé un premier empire, celui des Seljoukides, lequel fut détruit en 1292 par les Mongols de Gengis Khan (1206-1227). L'une des tribus turques fut les Ottomans issus d'une tribu d'Asie centrale appartenant à la branche des Oghuz. Durant le XIVe siècle, ces derniers se rendront progressivement maîtres d'une grande partie de l'Asie Mineure (l'Anatolie) et de plusieurs îles grecques, avant de s'emparer des Balkans et de l'Empire byzantin. Les Turcs ottomans entrèrent en contact avec l’islam par intermédiaire de la dynastie iranienne des Samanides, installés au Xe siècle en Transoxiane (l'actuel Ouzbékistan). Les Turcs s'islamisèrent au contact de l'armée samanide et l'islam cessa d’être seulement la religion des Arabes pour devenir aussi celle des Turcs. L'alphabet arabe s'implanta dès lors dans l'écriture turque. À partir du Xe siècle, les Sassanides et leurs alliés, les Turcs occidentaux, prirent la région de l'actuel Turkménistan qui devint la patrie des Turcs oghuz.

Le terme Turkmène semble avoir été employé dès cette époque (au Xe siècle) pour distinguer, d'une part, les Turcs oghuz islamisés ayant immigré vers le sud dans les territoires de Seljuk, d'autre part, les Turcs non islamisés restés dans la steppe. Graduellement, le terme finit par être employé exclusivement pour désigner les musulmans ogoudes puisqu'au XIIIe siècle le terme Turkmène avait définitivement supplanté la désignation Oghuz. Néanmoins, l'origine du mot Turkmène reste obscur. Selon un étymologie populaire datant du XIe siècle, le mot proviendrait du Turc auquel s'est ajouté l'élément persan (iranien) -manand signifiant «ressemblant à un Turc». Pour leur part, les linguistes contemporains croient que l'élément -man (ou -men) joue le rôle d'une particule intensive et serait traduit par «Turc pur» ou «le plus Turc des Turcs».

- L'Empire mongol

Au XIIIe siècle, le pays fut incorporé à l’Empire mongol de Gengis Khan (1206-1227), puis au XIVe siècle à celui de Tamerlan (1370-1405). Lors de la conquête mongole, les populations de la région du Turkménistan s'identifiaient déjà comme un peuple distinct des Turcs de l'Empire ottoman : il s'appelaient Turkmènes. Ils furent repoussés plus loin dans le désert de Karakoum et le long de la mer Caspienne. Jusqu'à la première moitié du XVIe siècle, les Turkmènes demeurèrent concentrés dans quatre régions principales : le long de la côte du sud-est de la mer Caspienne, dans la péninsule de Mangyshlak (sur la côte nord-est de la Caspienne), autour des montagnes du Balkan (province actuelle) et le long de la rivière Uzboy. C'est à cette époque que les Turkmène se formèrent en groupe tribaux très puissants. La plupart des tribus turkmènes furent divisées entre deux principautés ouzbèkes : le khanat de Khiva et le khanat de Boukhara (Bukhoro).  Les khans et les princes ouzbeks enrôlaient habituellement les Turkmènes dans leurs armées, surtout pour combattre les Perses. C'est pourquoi beaucoup de Turkmènes immigrèrent dans les centres urbains des khanats ouzbeks. Plus tard, entre les XVIIe et XIXe siècles, le chah de Perse, les khans de Khiva et les seigneurs féodaux d’Afghanistan luttèrent pour le contrôle du Turkménistan. La langue turkmène subit alors l'influence de la langue iranienne (le persan ou farsi).

2 L'expansionnisme russe

Au XIXe siècle, soit entre 1865 et 1873, le contrôle russe sur l’Asie centrale s’accentua et, en 1868, les khanats et émirats ouzbeks devinrent des vassaux de la Russie tsariste: émirat de Boukhara, khanat de Khiva, oblast de Transcaspienne, oblast de Samarcande, oblast de Ferghana et oblast de Semiretchie) . Les territoires conquis furent regroupés dans un ensemble administratif appelé «Gouvernement général du Turkestan». Il y eut aussi un Turkestan chinois, ainsi que probablement un Turkestan afghan.

En 1867, la ville de Tachkent devint la capitale du Turkestan russe, qui allait jouer un rôle important dans l'histoire de la culture du coton. En effet, l'Empire russe favorisa la culture du coton en lieu et place des cultures extensives traditionnelles; la production du coton fut contrôlée par les Russes, ce qui entraîna d’importants conflits entre la population locale et les Russes.

La conquête de l’Asie centrale fut le dernier volet de l’expansion russe. Ce fut une colonisation «par continuité géographique» faite au nom de l’État tsariste. 

2.1 La Russie tsariste

En matière de langue, l'empire de Russie adopta diverses mesures visant à propager le russe dans les territoires conquis en Asie centrale. La russification administrative fait référence à la centralisation croissante de la bureaucratie impériale russe qui était un processus en cours depuis au moins le règne de Nicolas I (de 1825 à 1855). Le tsar adopta un programme de russification qui visait à éliminer ou du moins à circonscrire les langues et les cultures des minorités, surtout dans la partie occidentale de l’Empire où sévissaient des mouvements nationalistes. La fermeture d’écoles et de journaux s’accéléra, tout en pratiquant une campagne de russification de l’enseignement dans le but de renforcer la loyauté au tsar et à l’Empire. C’est ainsi que l'administration tsariste n'utilisa que le russe, alors que des écoles furent ouvertes à la fois pour les enfants russes et les «autochtones» afin de faire utiliser par ces derniers la langue russe.

Durant les années 1870, le tsar de Russie, Alexandre II, s’intéressa à la région turkmène. Les Russes débarquèrent sur la côte orientale de la mer Caspienne et furent à l’origine de la création du port de Krasnovodsk (aujourd’hui Saparmurat-Türkmenbaşy, du nom du président Saparmourat Niazov et de son «livre saint»). En 1881, les Russes signèrent un accord avec les Perses et fixèrent la frontière actuelle entre le Turkménistan et l'Iran. En 1897 un accord semblable fut conclu entre les Russes et les Afghans. En l'espace de quelques années, les Russes construisirent un chemin de fer depuis Krasnovodsk (Saparmurat-Türkmenbaşy) sur la mer Caspienne jusqu'à Tchardjoou sur l'Amou-Daria en passant par les oasis sur la bordure sud du désert de Karakoum et par Achgabat et Merv. Ce fut la première artère de chemin de fer de toute l'Asie centrale, qui relia le port de Türkmenbaşy à la capitale Achgabat pour continuer vers la frontière avec l'Ouzbékistan. Les zones urbaines commencèrent à se développer le long du chemin de fer. Les Russes prirent ainsi le contrôle de ce qu'ils appelèrent la Trans-Caspia (ou «province transcaspienne») avec le reste de l'Asie centrale. Mais, de tous les peuples de l'Asie centrale, les Turkmènes furent ceux qui présentèrent la résistance la plus forte contre l'expansionnisme russe.

2.2 La République socialiste soviétique

Après la révolution russe d’Octobre (1917), les Turkmènes obtinrent une brève indépendance de la part de la Russie en établissant un gouvernement social-révolutionnaire. Cependant, l’Armée rouge reprit le contrôle de la région et, dès 1920, le Turkménistan fut divisé entre la République socialiste soviétique autonome du Turkestan et les républiques populaires soviétiques de Boukhara et de Khorezm. En 1924, la République socialiste soviétique fédérée du Turkménistan fut créée dans le cadre du redécoupage administratif de l’Asie centrale. Bien que les Soviétiques aient tenté d'en minimiser l'importance, beaucoup de Turkmènes trouvèrent la mort dans les mouvements de résistance contre les forces armées de Moscou. Dans les années 1930, l'Union soviétique réussit à tenir fermement la république turkmène sous son contrôle. La politique des nationalités du Parti communiste de l'Union soviétique favorisa le développement d'une élite turkmène pro-russe. Après 1926, l'alphabet latin des Turcs remplaça l'alphabet arabe dans la transcription du turkmène; cet alphabet était alors très proche de celui adopté par la Turquie de Mustapha Kemal Atatürk.


La RSS du Turménistan

Puis, dans les années 1940, Joseph Staline imposa l'alphabet cyrillique à la langue turkmène, ainsi d'ailleurs que, dans les autres républiques voisines, pour le kazakh, l'ouzbek, le kirghiz, le tadjik, le gagaouze et le tatar. Afin de faire correspondre l'alphabet cyrillique aux  phonèmes du turkmène, des signes diacritiques furent ajoutés... avec plus ou moins de succès. Durant plus de cinquante ans, l'alphabet cyrillique est resté l'écriture des Turkmènes. Les élites au pouvoir ainsi que la population furent scolarisées au moyen de cet alphabet, conjointement à un apprentissage intensif du russe.

2.3 La politique linguistique sous le régime soviétique

Sous le Régime soviétique, le russe était la langue officielle la langue officielle de l'Union, alors que chacune des langues dites «titulaires» l'était dans chacune des républiques. Même si le russe n'a jamais été déclaré formellement langue officielle, ni par l'Union ni par aucune république, pas même pas en Russie (1978), il a toujours joui dans les faits du statut de langue officielle jusqu'en 1991.

- L'égalité des langues titulaires et du russe

Quand on lit la Constitution du 13 avril 1978 de la RSS du Turkménistan, on constate que l'accent est mis sur l'égalité de toutes les langues de l'ex-URSS. En réalité, la politique linguistique du Turkménistan soviétique était tout axée sur l’égalité des droits linguistiques de tous les citoyens, surtout ceux des russophones, et sur le développement harmonieux de toutes les nations et ethnies de l’URSS. C'était une façon de banaliser toutes les langues nationales (ou tutélaires) et d'accorder un statut privilégié au russe. C’est ainsi qu’on pouvait lire aux articles 32 et 34 de la Constitution :

Article 32 [abrogé]

1) Les citoyens de la République socialiste soviétique du Turkménistan sont
égaux devant la loi indépendamment de leur origine, de leur situation sociale et de leurs biens, de leur appartenance raciale et nationale, de leur sexe, de leur niveau d'instruction, de leur langue, de leur attitude vis-à-vis de la religion, du genre et du caractère de leurs occupations, de leur lieu de résidence et autres circonstances.

2) L'égalité en droit des citoyens de la RSS du Turkménistan est garantie dans tous les domaines de la vie économique, politique, sociale et culturelle.

Article 34
 [abrogé]

1)
Les citoyens de la RSS du Turkménistan de races et de nationalités différentes jouissent de
droits égaux.

2) L'exercice de ces droits est garanti par la politique de développement harmonieux et de rapprochement de toutes les nations et ethnies de l'URSS, par l'éducation des citoyens dans l'esprit du patriotisme soviétique et de l'internationalisme socialiste,
par la possibilité d'utiliser sa langue maternelle et la langue des autres peuples de l'URSS.

3) Toute restriction directe ou indirecte des droits, tout établissement de privilèges directs ou indirects pour les citoyens en raison de la race ou de la nationalité, de même que toute propagande d'exclusivisme racial ou national, de haine ou de mépris sont punis par la loi.

Cela dit, le turkmène, pas plus que le russe, ne bénéficiait du statut de langue officielle. Cette absence de statut pour le russe n'empêchait pas les russophones de jouir de tous les droits et privilèges de la langue officielle de l'Union. À cette époque bénie, la vie était facile pour les russophones vivant dans les républiques de l'Union, au Turkménistan comme ailleurs. En effet, ces derniers bénéficiaient de tous les avantages d’une majorité fonctionnelle qui n’avait pas besoin d’être bilingue; ils détenaient les clés de la domination économique, sociale, culturelle, etc. Mais les temps ont changé pour la minorité dominante!

- L'éducation et la justice

En matière de justice, le turkmène était employé dans la procédure judiciaire (art. 159) de la Constitution de 1978 en même temps que la langue de la majorité de la population de la localité donnée, ce qui désignait normalement le russe: 

Article 159  [abrogé]

1)
La procédure judiciaire dans la RSS du Turkménistan doit se dérouler ans la langue turkmène ou dans la langue de la majorité de la population de la localité donnée.

2) Les personnes participant au procès et ne possédant pas la langue dans laquelle se fait la procédure judiciaire ont le droit de prendre pleinement connaissance du dossier, de prendre part aux actions judiciaires par l'intermédiaire d'un interprète et de s'exprimer durant l'audience dans leur langue maternelle.

Quant aux lois, décrets et autres actes, ils devaient être publiés dans les langues turkmène et russe :

Article 103  [abrogé]

Les lois de la RSS du Turkménistan, les décrets et autres actes du Conseil suprême de la RSS du Turkménistan doivent être publiés dans les langues turkmène et russe, et signés par le président et le secrétaire du Présidium du Conseil suprême de la RSS du Turkménistan.

C'était le règne du bilinguisme très recherché par les Russes de sorte que la langue turkmène se trouvait, comme toutes les autres langues, sous la dominance du russe. En éducation, les Russes pouvaient exiger que leurs enfants reçoivent leur instruction uniquement en langue russe (art. 43 de la Constitution de 1978):

Article 43  [abrogé]

1)
Les citoyens de la RSS du Turkménistan ont droit à l'instruction.

2) Ce droit est garanti par la gratuité de tous les types de formation, par la réalisation de l'enseignement secondaire obligatoire universel de la jeunesse, par le vaste développement de l'enseignement secondaire spécialisé, de l'enseignement professionnel et technique et de l'enseignement supérieur sur la base du rapport de l'enseignement avec la vie et avec la production; par le développement des cours par correspondance et des cours du soir; par l'octroi de bourses du gouvernement et d'avantages aux élèves et aux étudiants; par la possibilité d'un enseignement à l'école
dans la langue maternelle; par la création de conditions pour l'autodidaxie.

Malgré tout, les Turkmènes n'ont jamais beaucoup fréquenté les écoles russes. Ces dernières étaient, dans les faits, réservées aux Russes et à la plupart des minorités nationales telles que les Ouzbeks, les Kazakhs, les Arméniens, les Ukrainiens, les Tatars, les Azéris ou les Baloutches. Le russe était la langue des communications interethniques. C'est pourquoi cette langue avait un prestige supérieur au turkmène. Beaucoup de fonctionnaires non turkmènes avaient de la difficulté, dans les centres urbains, à s'exprimer en une autre langue que le russe. Ajoutons aussi que le turkmène était relégué au second plan comme langue de travail, sauf dans les régions rurales. On comprendra que, dans ces conditions, les milieux nationalistes aient trouvé un terrain propice à leurs revendications, bien que la russification n'ait jamais été aussi avancée que, par exemple, en Biélorussie. Néanmoins, les Soviétiques ont éliminé l'analphabétisme. Les communistes ont ouvert des écoles. Notre langue était riche à travers la langue russe, car toute la littérature scientifique, la littérature humanitaire est sortie à travers la langue russe.

La situation commença à changer vers la fin du régime soviétique, notamment avec l'arrivée de Mikhaïl Gorbatchev au pouvoir et la perestroïka, puis la chute du mur de Berlin, l'effondrement des régimes communistes, la fin du monopole politique des partis communistes, etc. 

3 Le Turkménistan indépendant: le règne de Niazov

Saparmourat Niazov, ex-premier secrétaire du Parti communiste turkmène, a accédé à la présidence du Turkménistan en 1985, à l'époque où la pays faisait partie de l'Union soviétique. En 1990, la langue turkmène fut déclarée langue officielle de la République. Ce fut la Loi sur la langue de la République socialiste soviétique du Turkménistan, adoptée le 20 mai de la même année, et encore en vigueur aujourd'hui. À la suite de l'effondrement de l'URSS, le Turkménistan proclama son indépendance le 27 octobre 1991. Le résultat officiel du référendum révéla que  94 % de la population était en faveur de l'indépendance. Après l'adoption de la Constitution, le 21 juin 1992, lors d'un nouveau scrutin présidentiel, Saparmourat Niazov avait recueilli 99,5 % des suffrages, alors qu'il était le seul candidat à briguer la magistrature suprême. Dès lors, les mouvements nationalistes favorisèrent la turkménisation de la société. Dès 1990, le turkmène était devenu la langue officielle de la République. C'est en adoptant l'idéologie nationaliste que Niazov a réussi à survivre à la dislocation de l'URSS. Il allait peu à peu construire un royaume ubuesque, coupé du monde.

3.1 La turkménisation du secteur public

Le gouvernement de Saparmourat Niazov commença à prendre des mesures pour faire apprendre la langue turkmène aux fonctionnaires, aux enseignants, aux médecins, etc. Dans la plupart des entreprises, établissements d'enseignement et hôpitaux, des cours obligatoires de turkmène furent donnés aux employés.  Une résolution fut adoptée en 1992 afin de renommer les noms de lieu russes par des appellations turkmènes. C'est alors que les noms de nombreuses rues et de plusieurs bâtiments furent remplacés par des héros turkmènes. Les tribus turkmènes furent «incitées» à redevenir nomades, une sorte de retour en arrière, à la situation avant l’arrivée des Russes. Les centres sanitaires et médicaux du pays furent fermés afin de revenir à une médecine plus traditionnelle.

L'objectif  était de donner un «visage turkmène» au pays, mais le bilinguisme turkmène-russe est demeuré fréquent, surtout dans les villes.  Niazov fut réélu en 1992 avec 99,5 % des votes; on lui décerna la palme de l'Ordre du héros du peuple turkmène. Le Parlement turkmène lui donna le titre de Turkmenbachi, ce qui signifie «le père des Turkmènes», qui s'est ensuite autoproclamé «prophète». Depuis, les portraits du Turkmenbachi furent présents dans la plupart des rues et sur la façade de tout bâtiment public. 

3.2 La réintroduction de l'alphabet latin

Au cours des 100 dernières années, le peuple du Turkménistan a utilisé quatre alphabets différents: l'alphabet arabe (env. de 1000 à 1928), l'alphabet latin (première version, de 1928 à 1939) l'alphabet cyrillique (de 1940 à 1993) et l'alphabet ​​latin (seconde version, de 1993 à nos jours). Ces changements ne sont jamais survenus sous l'initiative des gens ordinaires, mais plutôt parce que les élites intellectuelles et/ou politiques décidèrent à chaque fois de changer l'alphabet pour symboliser les changements que la société avait connus à une certaine époque. Ce genre de changement entraîna  souvent une rupture complète avec le passé.

C'est en 1993 que le Turkménistan est passé à l'alphabet latin, seconde version, coupant ainsi un autre élément de l'ère russophone, c'est-à-dire soit l'alphabet cyrillique. La mise en œuvre du changement de l'alphabet était prévue pour la période de 1993 à 1995. Le changement débuta avec les panneaux de signalisation, la publicité et les titres de journaux, puis il a lentement progressé. On a même vu des panneaux publicitaires en russe avec l'alphabet latin (voir l'illustration ci-contre). Le gouvernement du Turkménistan a accompagné la transition vers le nouvel alphabet avec une campagne d'information massive à travers les journaux et la télévision.

La discipline «Nouvel alphabet turkmène» fut introduite dans toutes les écoles, dont la mission fut d'apprendre à la hâte aux enfants à lire et à écrire avec l'alphabet latin. Les enseignants reçurent une formation et de nouveaux manuels furent élaborés.

Depuis le 1er janvier 1996, le turkmène est officiellement écrit dans un alphabet latin qui compte 30 lettres (9 voyelles et 21 consonnes). Cet alphabet est différent de celui qui avait été adopté au début du siècle. En réalité, il s'agit moins d'un nouvel alphabet traduisant les réalités phonétiques et phonologiques du turkmène que d'une adaptation de l'alphabet cyrillique appliqué à la langue jusqu'en 1993.

Malgré les coûts encourus pour réintroduire l'alphabet latin, de nombreux Turkmènes de souche considérèrent le nouvel alphabet comme le symbole correspondant du nouveau pays, car il affirmait leur identité nationale. Dans un discours présenté dans les Mejlis (Parlement national), le président Niazov déclarai que le nouvel alphabet contribuerait à la renaissance culturelle du Turkménistan, augmenterait sa capacité à communiquer avec d'autres pays et élargirait l'accès des citoyens aux technologies de l'information et aux ordinateurs.

Cependant, l'alphabétisation avec un nouvel instrument constituait aussi un problème. Malgré la relative indifférence de l'introduction d'une nouvelle langue écrite pour une population jeune et flexible, les résidents adultes du Turkménistan connurent des difficultés avec la nouvelle écriture. Celles-ci affectèrent non seulement la population russophone, mais aussi les citoyens ruraux qui ne parlaient pas la langue russe. En particulier, les personnes âgées, habituées à l'alphabet cyrillique au cours de leur vie, se sont retrouvées dans un état d'impuissance pendant un certain temps. Dans les écoles, les élèves de première année apprirent le nouvel alphabet latinisé, mais l'année suivante ils furent contraints de réapprendre le cyrillique, car il n'y avait pas de nouveaux manuels pour la 2e année; cette situation incohérente dura cinq ou six après le début de la réforme.

De plus, des modifications furent apportées à l'alphabet à plusieurs reprises, mais les Turkmènes ont dû s'adapter le plus rapidement possible aux circonstances qui les entouraient. Les livres publiés en 1993 sont devenus obsolètes en seulement deux ans. Les enseignes publiques achetées à Moscou changeaient régulièrement; sur l'emballage des produits, les étiquettes et les modes d'emploi devaient être changées à chaque fois. Cette réforme post-soviétique de l'alphabet se voulait le début d'un changements dont l'objectif n'était pas seulement l'abolition de la russification, mais aussi l'avènement de la turkménisation.

3.3 La réforme de l'éducation

Cependant, le principal coup porté à la langue russe fut la réforme de l'éducation, qui a entraîné une réduction significative de l'enseignement du russe. Les écoles russes sont d'abord devenues communes avec les Turkmènes, puis ont complètement disparu, laissant parfois des classes de russe dans l'oubli. En raison de la réduction de l'enseignement en russe, ainsi que de la turkménisation du secteur public, la jeune génération du Turkménistan commença à parler de moins en moins le russe. Dans le même temps, la langue russe, en tant que «langue supplémentaire», eut à faire face à la concurrence du turc et de l'anglais.

En 1993, le président Saparmourat Niazov (écrit aussi Saparmyrat Ataýewiç Nyýazow, dit Türkmenbaşyv) signa un décret obligeant les membres du gouvernement à apprendre l'anglais dans les six mois. Selon Niazov, c'était nécessaire afin de permettre aux principaux responsables politiques du pays de dialoguer librement avec les représentants des entreprises étrangères et des gouvernements étrangers. Les ministres du Turkménistan n'ont d'autre choix que d'apprendre l'anglais de toute urgence. Mais le russe est demeuré une langue bien plus importante au sein de l'État et de l'Administration. La même année, le président Niazov a publié un décret pour remplacer l'alphabet cyrillique par l'alphabet latin, qui devait devenir l'écriture officielle en 1996. Le Turkménistan a également opté pour une monnaie propre, le manat, en remplacement du rouble russe.

Le 15 janvier 1994, le président Saparmourat Niazov (écrit aussi Saparmyrat Niyazov) fit plébisciter le prolongement de son mandat jusqu’en 2002.

En décembre 1999, le Parlement turkmène a aboli toutes les restrictions constitutionnelles concernant la durée du mandat présidentiel, faisant ainsi de lui le «président à vie» de la République. La loi précise que «le premier président élu par le peuple entier bénéficie du droit exclusif à une présidence à vie». Le 1er janvier 1996, le nouvel alphabet latin entrait officiellement en vigueur pour écrire la langue turkmène. Rappelons que cet alphabet est différent de celui qui avait été adopté au début du siècle. En réalité, il s'agit d'une adaptation de l'alphabet cyrillique appliqué auparavant au turkmène.

3.4 L'influence de la Turquie

Depuis l'indépendance, la Turquie a toujours occupé une place de choix dans la coopération économique et culturelle avec le Turkménistan. Cette nouvelle situation s'explique en raison des origines communes des deux pays et des courants nationalistes très orientés vers le monde turcophone. Les nombreux voyages des présidents du Turkménistan et de la Turquie n'ont fait qu'intensifier et améliorer les rapports entre les deux États. Ces visites ont donné l'occasion de rappeler les origines communes des deux peuples, mais également de souligner la communauté linguistique et religieuse. Les Turcs ont su occuper les créneaux vacants de l'économie turkmène et sont devenus aujourd'hui les nouveaux bâtisseurs du pays, que ce soit pour les hôtels, les restaurants, la réfection des édifices publics, les aéroports, etc. Bref, la plupart des travaux réalisés dans la capitale d'Achgabat sont du «made in Turkey». Cette mainmise de l'économie turque a nécessairement des répercussions sur la langue turkmène.  Il n'est pas surprenant que le gouvernement d'Ankara ait réussi à influencer le gouvernement turkmène dans l'adoption du nouvel alphabet latin. Aujourd'hui, les différences diacritiques entre l'écriture turque et l'écriture turkmène sont minimes, ce qui a entraîné l'emprise des imprimeurs et éditeurs turcs pour l'impression des nouveaux manuels scolaires.

Afin de promouvoir la paix et la compréhension dans le monde, le président Saparmourat Niazov a décidé de lancer ses précieux chevaux de race dans un rallye équestre à travers les cinq continents. Niazov a déjà attelé ses chevaux de race akhal-teke (ou akhaltekin), célèbres pour leur rapidité et leur endurance, au service de la diplomatie de son pays désertique, en offrant quelques exemplaires aux grands dirigeants du monde, dont le Chinois Jiang Zemin, le Britannique John Major, le Français François Mitterrand et les deux présidents russes, Boris Eltsine et Vladimir Poutine.

3.5 Les droits humains

Pendant ce temps, la situation des droits humains au Turkménistan est devenue extrêmement préoccupante. Elle s'est encore aggravée après la tentative d'assassinat présumée du président Saparmourat Niazov en novembre 2000. En effet, depuis, de nombreux Turkmènes (dont des femmes et des enfants) ont subi des mises en détention, du harcèlement, des expulsions et des spoliations. Des informations dignes de foi font état de torture et de mauvais traitements en détention, car de nombreuses personnes ont été condamnées à de lourdes peines de prison, allant jusqu'à l'emprisonnement à vie, après des procès manifestement inéquitables, au cours desquels ces personnes ont été reconnues coupables d'avoir participé à l'attentat présumé.

Puis la Déclaration des différents actes illégaux de haute trahison et les mesures de sanction contre les traîtres a été adoptée par l'Assemblée du peuple. Ce texte précise que sont considérés comme des crimes de haute trahison «tous les efforts de semer le doute au sein du peuple quant à la politique intérieure ou extérieure du premier président et président permanent du Turkménistan, Saparmourat Turkmenbachi le Grand». Ce serait aussi une façon de mettre au pas certaines minorités comme les Russes et les Ouzbeks. Ce fut une réussite, car plus de 200 000 Russes ont fini par quitter le pays. En général, il s'agissait de professionnels fortement qualifiés, tels que des médecins, des enseignants, des ingénieurs, des ouvriers spécialisés, etc. Le départ des Russes du Turkménistan a grandement affecté l'économie du pays qui a versé dans le totalitarisme.  

3.6 Le culte de la personnalité

Le président Niazov, le Türkmenbaşyv (Turkmenbachi : «le père des Turkmènes»), qui se considérait comme le «refondateur» du pays, le «redécouvreur» de l'identité turkmène, utilisa les deniers de l'État pour célébrer son culte de la personnalité; il fut souvent comparé à Saddam Hussein (Irak), à Kim Jong-il (Corée du Nord) et à Enver Hoxha (Albanie). Niazov s'est fait construire de nombreuses statues aux quatre coins d'Achgabat, généralement en or, dont certaines ont coûté plusieurs dizaines de millions de dollars/pièce. Son portrait figure aussi sur un grand nombre d'emballages alimentaires, que ce soit de la bière, du savon, des sacs de voyage ou des produits en conserve. En fait, Niazov, qui monopolisait le pouvoir en cumulant les fonctions de chef de l'État et de chef du gouvernement, se comparait à Mustapha Kemal Atatürk, «le père des Turcs». Niazov a exigé d'être déclaré «prophète» par le Conseil populaire (un conseil des aînés qui remplace le Parlement quand c'est jugé nécessaire).

- Le père des Turkmènes

En avril 2002, Saparmourat Niazov, qui n'avait jamais servi dans l'armée, reçut le grade militaire de maréchal. Le président à vie a également rebaptisé de nombreux noms de lieu destinés à être plus conformes à l'idéologie du «père des Turkmènes». Si la capitale, Achgabat, a conservé son nom («ville de l'amour»), le grand port de la mer Caspienne, Krasnovodsk, s'appelle maintenant Turkmenbachi. En 2002, le président Niazov a décidé que l'année civile devait «avoir un calendrier avec des mois évoquant des personnalités nationales»:

Janvier = Turkmènebashi («le père des Turkmènes») Juillet = Gorkou (héros turkmène d'une saga épique)
Février = Baidar (drapeau) Août = Arp Arslan (guerrier turkmène médiéval dans l'empire Seldzhuk)
Mars = Novrouz (arrivée du printemps) Septembre = Rukhnama (le livre saint du président)
Avril = Gourbansoltan Edjé (non de la mère du président) Octobre = Garaschsizlik (l'Indépendance)
Mai = Makhtoum Kouli (poète turkmène) Novembre = Sandjar (nom d'un sultan du XIIe siècle durant l'empire Seldzhuk)
Juin = Ogouz Khan (nom du commandant fondateur du pays) Décembre = bitaraplik (neutre, qualificatif du pays)

Le président Niazov aurait aimé que le mois d'avril porte le nom intégral de sa mère (décédée en 1948 lors d'un tremblement de terre), Gourbansoltan Niazova, consacrée «héroïne nationale», mais les députés ont plutôt choisi le nom de «maman Gourbansoltan», qui devient ainsi «la tante de tous les Turkmènes». Les jours de la semaine ont également été renommés. Le lundi est devenu le «jour principal» (Bash Gyun), mardi, le «jour jeune» (Yash Gyun), mercredi, le «jour favorable» (Khosh Gyun), jeudi, le «jour juste» (Sogap Gyun), vendredi n'a pas changé (Anna Gyun), samedi, le «jour de l'esprit» (Rukh Gyun) et dimanche le «jour du repos» (Dynch Gyun). Cela dit, les calendriers turkmène et chrétien sont tous deux employés dans le pays.  Le président a aussi déclaré qu'un «jeune homme» est âgé de plus de 25 ans mais n'a pas encore célébré son 37e anniversaire. Il a interdit l'utilisation des termes tels que «vieux/vieille» et «vieillesse». Conformément au décret du Turkmenbachi, un homme âgé entre 61 et 73 ans a atteint l'«âge prophétique»; quand il a plus de 73 ans, il est dans l'«âge inspiré». Pour sa part, Niazov est récemment entré dans l'«âge prophétique» (il est né en 1940).

Évidemment, le nom de Saparmurat Niazov a remplacé celui de sa ville natale, anciennement Krasnovodsk, sans oublier un nombre important de rues, d'usines, de fermes collectives, d'écoles, etc. Dans tout le Turkménistan, plus de 14 000 monuments et bustes du Turkmenbachi ont été installés. Des images et des portraits du Turkmenbachi ont été affichés sur des milliers d'affiches et de bannières, d'innombrables photographies dans les locaux des institutions, des mosquées, des cabines de voiture, au début de presque toutes les émissions de télévision nationale et les premières pages des journaux, sur l'emballage des produits industriels et alimentaires, sur les bouteilles de vodka Serdar («Leader») et cognac, etc. Un portrait du cheval bien-aimé du Turkmenbachi a été placé sur les armoiries du Turkménistan.

Niazov reçut un doctorat en sciences politiques et économiques, le titre d'académicien de l'Académie des sciences du Turkménistan. Il reçut aussi les titres honorifiques d'un certain nombre d'académies et d'universités étrangères pour avoir développé le concept d'indépendance de l'État. Niazov reçut au total une bonne centaine de distinctions honorifiques, surtout en provenance de son pays, mais aussi du Kazakhstan, de la Turquie et de la Russie!

- L'autocratie

En 2003, Niazov révoqua l'accord avec la Russie permettant la double citoyenneté aux russophones du Turkménistan. Beaucoup de Russes ayant la double nationalité russo-turkmène ont dû choisir, en date du 22 juin, d'opter pour la nationalité russe ou la nationalité turkmène. Ce décret, qui stipulait que les Russes perdraient du même coup leur propriété au Turkménistan, provoqua une vague de départs pour la Russie.

Certains observateurs laissèrent entendre que ce mouvement d'évincer la minorité russe avait été sanctionné par Moscou en guise de récompense à Niazov pour une lucrative affaire de gaz signée le 10 avril 2003; le président Poutine de Russie aurait «vendu» les Russes du Turkménistan pour du gaz. De toute façon, le président Poutine ne devait pas savoir quoi faire de ces Russes du Turkménistan!

Dans toute l'Asie centrale, le président Niazov fut perçu comme la figure la plus caricaturale des régimes autoritaires qui, délivrés du totalitarisme soviétique, ont sombré dans l'autocratie. Le gouvernement turkmène ne tolérait aucune opposition, limitant les libertés politiques et civiles et contrôlant sévèrement les médias. L'organisme Amnistie internationale a demandé aux autorités du Turkménistan d'introduire rapidement des réformes fondamentales du droit et des institutions du pays, afin de respecter les obligations du Turkménistan envers le droit international relatif aux droits humains, et d'apporter des améliorations significatives en cette matière. Il semble que la communauté internationale ait oublié le Turkménistan depuis longtemps. Le régime était rongé par la corruption et reprenait les travers les moins nobles des anciennes républiques soviétiques. Au mois d'août 2002, le Conseil du peuple avait rendu perpétuel le mandat présidentiel de Niazov, mais le Turkmenbachi avait déclaré officiellement qu'une présidentielle aurait quand même lieu après 2008. Soucieux de redorer son image en Occident, Niazov a, en 2004, interdit ses portraits dans les rues au nom de la «lutte contre le culte de la personnalité», mais les statues et les dénominations publiques en son honneur sont restées intactes.

- La mégalomanie

Évidemment, dans les conversations privées, certains Turkmènes critiquaient la mégalomanie de leur «président-à-vie» à qui on prêtait le désir de se faire bientôt reconnaître comme...  Dieu. D'autres n'appréciaient guère sa politique concernant l'éducation qui provoquerait «de grands dégâts», car Niazov a supprimé l’enseignement des langues étrangères, ramené la durée de la scolarisation obligatoire de douze à dix ans et invalidé tous les diplômes supérieurs obtenus hors du pays après 1993. Sous sa présidence, le nombre d’étudiants dans l’enseignement supérieur, de 40 000 lors de la dernière décennie soviétique, est tombé à 6500. Dans sa logique totalitaire, Niazov avait interdit les cirques, l'opéra et les bibliothèques. Certains le traitaient de fou, mais au moins il n'embêtait pas ses voisins, dont quelques-uns sont, comme lui, des despotes et des caciques.

Enfin, de plus en plus de Turkmènes rêvaient d'un avenir sans leur «grand leader», c'est-à-dire leur Grand Guide. Depuis son accession à l'indépendance en 1991, le Turkménistan n'a entrepris aucune réforme importante si ce n'est l'introduction dans tous les établissements d'enseignement du Rukhnama, le livre saint du président, publié en turkmène en 2001 et en russe en 2002. Dans sa mégalomanie, le président Niazov en a fait presque le seul ouvrage disponible dans le pays. Depuis les dernières années, Niazov cumulait tous les pouvoirs: à la fois président, premier ministre, chef des armées et leader du Parti démocratique, l'unique formation politique existant officiellement au Turkménistan.

- Le décès de Niazov

Puis, le 21 décembre 2006, le président Niazov décéda subitement à 66 ans d'un arrêt cardiaque, mais il aurait déjà été affecté par des problèmes de santé depuis quelques années. En 1997, l'ex-président turkmène avait subi en Allemagne un pontage coronarien et, depuis, des chirurgiens du cœur allemands se rendaient régulièrement à Achgabat. On croit aussi que l'ex-dictateur aurait pu être empoisonné trois jours avant son décès officiel.

Comme d'autres dictateurs avant lui, Niazov n'a pas prévu de successeur. Sa mort créa nécessairement un vide ouvrant la voie à toutes les convoitises. Ce pays pouvait tomber désormais dans le giron des États-Unis, qui voudraient déménager leurs bases militaires au Turkménistan (après avoir été chassés de l'Ouzbékistan), ou basculer dans celui de la Russie? Quoi qu'il en soit, la période de transition créa une certaine instabilité dans une région déjà explosive, mais une chose est certaine: le Turkménistan ne pouvait devenir soudainement, comme par enchantement, une terre de libertés et il était fort à parier que la continuité politique et idéologique serait assurée pendant un certain temps, pendant que le Rouhnama servira encore de guide politico-spirituel dans le pays.

3.7 Le Ruhnama

Sous le régime du président Niazov, le système d'éducation a subi de profondes modifications, d'une part, par l'introduction du fameux Ruhnama dans toutes les écoles, d'autre part, par la réduction du nombre des écoles non turkménophones. 

Dans sa réorganisation de l'éducation, le président Saparmourat  Niazov a imposé son livre «saint», le Ruhnama (signifiant «livre de l'esprit»); il croit que ce livre «est né dans son cœur par la volonté du Tout-Puissant et que le peuple turkmène doit vivre en suivant ses préceptes». Les imams turkmènes l'auraient reconnu comme l'égal du Coran, de la Bible et de la Torah.  Le livre saint a été publié en turkmène, en russe, en turc et en anglais pour un total d'un million d'exemplaires.

Tous les élèves et les étudiants des collèges et universités durent connaître des passages du Ruhnama par cœur. Tous furent tenus de réciter régulièrement des paragraphes du livre saint du Turkmenbachi. Pour réussir leur examen d'entrée à l'université, les étudiants durent répondre à des questions portant sur le Rukhnama. Des détenus se sont vu refuser leur libération parce qu’ils n’avaient pas voulu jurer allégeance au président sur le Ruhnama. Ce livre est devenu la pièce centrale du système d'éducation du pays. Selon l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (CSCE), de nombreuses disciplines furent simplement éliminées du programme d'études scolaires au profit du Ruhnama, de l'écriture et de quelques mathématiques. Ce livre devint le seul livre d'étude des écoliers et des étudiants, qui durent passer au moins une heure par jour à discuter des écrits du Turkmenbachi. La parfaite maîtrise du guide devait permettre aux Turkmènes, d'après les sources officielles, d'entrer dans le «siècle d'or du Turkménistan».

Désormais, c'était l'«histoire enseignée par le Ruhnama», la «géographie enseignée par le Ruhnama», même l'«anglais enseigné par le Ruhnama». L'histoire fut enseignée selon les préceptes édictées dans le Ruhnama, lesquels exaltent la nation turkmène à la pointe du progrès mondial depuis les temps bibliques! L'histoire contemporaine est quasi inexistante, sauf pour parler des actes patriotiques du peuple turkmène lors de la Seconde Guerre mondiale! Les écoles durent apprendre aux jeunes Turkmènes que la roue et l’écriture ont été inventées au Turkménistan même, et que leur pays, appelé la «Suisse de l'Asie centrale», demeure le «troisième pays le plus important au monde» (après les États-Unis et la Russie).

Dans les universités, les étudiants durent, eux aussi, consacrer une heure par jour à la lecture du Ruhnama. C'est que la question de l'éducation des jeunes préoccupait beaucoup le «président à vie». Il avait déclaré à la Radio Free Europe: «Nous devons éduquer notre jeunesse. Ibn Sînâ [= médecin philosophe et poète appelé Avicenne par les Occidentaux] disait que celui qui veut donner une bonne éducation à son enfant doit le battre. C'est comme l'utilisation de l'engrais en agriculture.» (SAPARMYRAT).

Le système d'éducation a tellement été transformé depuis qu'il est fondé sur l'apprentissage du Ruhnama que les experts craignaient grandement pour la qualité de l'enseignement et pour l'avenir de la nation turkmène elle-même, car le système en cours créait une génération dont les connaissances sont limitées à la biographie du président Niazov, puisque le système d'éducation semblait uniquement conçu pour «chanter les louanges» du président Niazov. Cette situation aggravait un système déjà miné par le départ ou le congédiement des enseignants qualifiés (Russes, Ukrainiens, Arméniens, etc.).

Le Turkmenbachi entreprit également une vaste réorganisation de l'enseignement en le révisant à la baisse: moins d'années d'études (la durée de la scolarisation obligatoire est passée de douze à dix ans) et moins de professeurs, donc une économie considérable pour l'État. Environ 12 000 professeurs à travers le pays furent congédiés; l'Académie des sciences fut supprimée et plusieurs instituts de recherche durent fermer. Il y avait 40 000 étudiants dans les universités en 1996; dix ans plus tard, il en restait 3500.

Les professeurs qui sont restés en poste ont vu leur charge d'enseignement alourdie et durent enseigner le samedi tout en manquant dramatiquement de manuels scolaires et de matériel pédagogique, sans compter les bas salaires. En effet, la plupart des enseignants furent dans l'obligation d'attendre des mois avant de recevoir leur salaire mensuel d'environ 60 $ US et doivent payer de leurs poches pour certaines nécessités (papier et crayons), voire pour faire effectuer des rénovations urgentes dans les salles de classe. Les manuels en langue russe furent interdits dans les écoles turkmènes, mais il n'en existait pas d'autres pour les remplacer. Devant la pénurie des manuels en turkmène, la réponse du gouvernement fut de faire compléter l'enseignement au moyen du Ruhnama. Enfin, le président Saparmourat Niazov signa un décret interdisant aux jeunes hommes du pays de porter les cheveux longs ou la barbe; dans un pays musulman, une telle mesure paraît difficilement acceptable! À ce jour, le Ruhnama fut publié dans 30 langues du monde, dont le russe, le chinois, l'anglais, le turc, le japonais, le persan et même le zoulou.

Après la mort de Niazov (le 21 décembre 2006), le Ruhnama commença à perdre de sa popularité, et au printemps 2009, les autorités du Turkménistan lancèrent une campagne pour saisir des exemplaires de ce livre dans toutes les institutions et entreprises du pays. Au lieu de cela, les livres du nouveau président y furent amenés.

4 Le début d'un temps nouveau?

Le 11 février 2007, le Turkménistan avait un nouveau président: Gourbangouly Berdimouhamedov (en français)  ̶  urbanguly Mälikgulyýewiç Berdimuhamedow en turkmène  ̶  élu avec près de 90 % des suffrages, à l'issue d'un scrutin auquel participaient pour la première fois plusieurs candidats, mais ces élections ont été considérées comme ni libres ni équitables par les nations occidentales. Cependant, tous ces prétendants étaient membres du seul parti politique autorisé, le Parti démocratique.  Quant à Berdimoukhammedov, il était vice-premier ministre et très proche de Niazov; on dit même qu’il serait son fils illégitime. Le nouveau président promit «à tous l'accès à l'Internet» et déclara que chaque Turkmène devait «parler au moins trois langues». Mais Turkménistan gouverné par Niazov était devenu l'un des pays les plus fermés au monde.

4.1 Les réformes modestes

Berdimoukhammedov procéda à quelques réformes modestes, comme la suppression du serment de loyauté quotidien au chef de l'État, question de modérer les excès de Niazov qui, en vingt-et-un ans de pouvoir, avait fondé l'un des régimes les plus répressifs et opaques, qui puisse exister. Selon Mme Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d'Amnistie internationale, ces mesures paraissent bien modestes:

Faire devenir réalité la promesse pré-électorale d'accorder à tous l'accès à Internet serait une avancée appréciable. Toutefois, il faut faire beaucoup plus – les médias sont toujours tous sous contrôle de l'État, l'accès à Internet est étroitement surveillé par le ministère de la Sécurité nationale et des militants des droits humains sont emprisonnés ou risquent des représailles. La liberté d'expression et d'association est un préalable crucial à l'engagement actif de la société civile. Le nouveau président et son gouvernement doivent rapidement engager des réformes pour mettre le droit et la pratique au Turkménistan en conformité avec les obligations du pays au regard du droit international relatif aux droits humains.

Quoi qu'il en soit, il subsiste encore d'énormes difficultés pour que la population du Turkménistan ait un réel accès au monde par l'Internet, dont notamment le coût excessivement élevé du service (l’équivalent d’environ 10 $ US l’heure ou 6,7 €), le manque de fiabilité des connexions, les filtres bloquant l’accès à de nombreux sites Web et la surveillance étroite exercée sur les courriers électroniques. En outre, il est toujours impossible pour un individu d’obtenir une connexion Internet à son domicile.

4.2 La continuité de l'autocratie

Au début, le nouveau président semblait être un réformateur : il a supprimé le contrôle au franchissement des frontières administratives au Turkménistan, annulé les visas de sortie, parlé de «perestroïka» et de la liberté des médias. Mais à partir des programmes de réforme, il n'y eut qu'un remplacement pour le culte de la personnalité du Turkmenbachi  par un culte moins solennel, mais tout aussi présent. Du Turkmenbachi, le président est devenu l'Arcadag, le patron; en russe "Аркадаг" ou "босс" (Gourbangouly Berdimouhamedov

En somme, Berdimouhamedov devait suivre les traces de son prédécesseur mégalomane : en juillet 2007, il fêta son cinquantième anniversaire en s'attribuant l'ordre de la Mère-Patrie, une breloque d'or et de diamant pesant près d'un kilo, afin de reconnaître son «œuvre immense», le tout complété d'une augmentation de 30 % de son salaire. Quant aux réformes, la plupart des observateurs n'y voyaient encore aucun changement important et soulignaient le peu d’avancées dans la liberté civique et les droits de l’homme.

En réalité, le Turkménistan est resté le même que sous Niazov. L’apprentissage du Rouhnama, l'œuvre de Niazov que tous les Turkmènes devaient obligatoirement réciter pour passer le permis de conduire, un examen ou même pour obtenir un emploi, est demeuré en vigueur. Le régime de Berdimouhamedov est considéré aujourd'hui comme une dictature avec les mêmes dérapages que chez son prédécesseur : culte de la personnalité, scores soviétiques aux élections, projets pharaoniques, etc. À la fin du mois de mai 2015, une statue de 21 mètres de haut, fondue en bronze et recouverte de feuilles d'or à Achgabat fut dévoilée.

Son fils, Serdar né en 1981 fut considéré comme un héritier potentiel de son père à la tête de l'État, voire son petit-fils. Dès 2016, le paternel organisa l’ascension de son fils avec des promotions successives, qui amenèrent ce dernier à occuper plusieurs fonctions, de député à vice-premier ministre, en passant par des postes de diplomate et de responsable régional. En mars 2022, Serdar Berdymoukhamedov succédait à son père pour prendre les commandes du Turkménistan, demeuré l'un des pays les plus répressifs au monde. Le fils de Gourbangouly Berdymoukhamedov, l’autoritaire et excentrique président turkmène sortant, a remporté le scrutin du 12 mars avec 73 % des suffrages. Le score reste loin cependant des 90%, voire parfois 97%, récoltés par son père lors des deux précédentes élections. Sa victoire ne faisait toutefois aucun doute dans ce pays désertique et riche en hydrocarbures où son père détenait tous les leviers du pouvoir depuis quinze ans.  En 2020, le Turkménistan occupait la 165e place sur une échelle de corruption de 180 pays testés par Transparency International.

4.3 Et les minorités?

Dans ces conditions, on ne voit pas comment les minorités linguistiques pourraient bénéficier d'une place honorable dans ce pays, et ce, d'autant plus que les fonctionnaires locaux et les forces de police ne cessent de les maintenir sous leur menace. En même temps, le régime a réintroduit la langue russe dans toutes les écoles. Pour ce qui est de la langue,  malgré la politique de turkménisation, la langue russe reste la langue principale de la communication interethnique et un outil de connaissance. La connaissance de la langue russe distingue principalement un citadin de son concitoyen rural. Grâce à la langue russe, les citoyens turkmènes communiquent non seulement entre eux, mais consomment également divers produits du marché russe des médias et du segment russe d'Internet. La maîtrise du russe est la bienvenue sur le marché du travail, car tout employé dans les services qui maîtrise le russe est avantagé pour obtenir un meilleur emploi. L'intérêt pour la langue russe au Turkménistan commence à croître parallèlement à la baisse du niveau d'éducation, la langue héritée de l'Empire soviétique disparu crée un environnement d'information qui n'est pas comparable. Le russe reste la langue maternelle de nombreux Turkmènes (349 000 locuteurs). Quoi qu'il en soit, la politique linguistique du Turkménistan semble dans un état léthargique, car le gouvernement, à l'exception du chef de l'État, n'est pas considéré par la population comme un pouvoir efficace. 

D'ailleurs, alors que l'État se prétend laïc, les autorités annoncent vouloir réhabiliter l’islam et les traditions islamiques, mais dans une religion très encadrée par l’État. En dépit des revenus tirés du gaz, le peuple turkmène reste extrêmement pauvre. Selon la Banque mondiale, 60 % de la population vit sous le seuil de pauvreté et 44 % disposent de moins de deux dollars par jour.

Les critiques du gouvernement et les groupes de défense des droits de l'Homme affirment que Berdimouhamedov a réprimé la dissidence et apporté peu de changements dans le pays restrictif depuis son arrivée au pouvoir après la mort de l'autocrate Saparmurat Niazov en 2006.

Turkménistan


1) Situation générale
 

2) Données historiques
 

3) La politique linguistique
 
 
4) Bibliographie
 


 

Dernière mise à jour: 23 déc. 2023
 

 
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