Histoire de la
Nouvelle-France
Royaume de France |
La
Baie d'Hudson
(La mer du Nord)
1682-1713
|
REMARQUE :
Lorsqu'il
est question de la colonie ou de la région, on écrit
Baie-d'Hudson (avec un trait d'union) ou plus couramment Baie d'Hudson
(sans trait d'union), avec une
majuscule initiale sur le terme générique «Baie» et sur le nom
propre
spécifique «Hudson». Lorsqu'on présente la baie en tant que «réalité
géographique», on écrit baie d'Hudson, avec une
minuscule initiale sur le terme spécifique, sans trait
d'union. On écrit aussi la baie James ou baie de
James, sinon la Baie-James (pour la région).
Au XVIIe
siècle, les Français appelaient la baie d'Hudson la
mer du Nord,
parfois la baie du Nord.
Avis: cette
page a été révisée par Lionel Jean, linguiste-grammairien. |
Plan de l'article
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La baie d'Hudson est une
une vaste mer intérieure de 822 324 km²
située au Canada
et mesurant près de
1000 km de largeur et
700 km de
longueur du nord au sud. Elle est prolongée
au sud par une sorte de grand golfe appelé
la baie James (ou baie de James). Ce bassin
hydrographique est entouré par les provinces
du Québec, de l'Ontario, du Manitoba et par
le territoire du Nunavut (qui possède toutes
les îles de la baie).
Selon l'Organisation hydrographique
internationale, la baie d'Hudson est considérée comme une partie de l'océan
Arctique. |
Depuis la colonisation européenne en
Amérique du Nord, les Français et les Anglais se sont intéressés à la
baie d'Hudson en raison de son positionnement géographique qui
facilitait les expéditions de fourrures en Europe. Pendant des décennies, la France et l'Angleterre ont
tout fait pour s'assurer un contrôle exclusif sur ce vaste territoire. À
partir de la ville de Québec, les Français
envoyèrent de nombreuses expéditions dans la baie d'Hudson afin de
chasser les Anglais des postes de traite
érigés par la Compagnie de la
Baie d'Hudson. Durant tout ce temps, les forts changaient
régulièrement de mains. Les conflits ne furent réglés qu'après le
traité d'Utrecht (1713) qui attribua définitivement toute cette région à la
Grande-Bretagne.
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Avant
le traité
d'Utrecht de 1713, la Nouvelle-France
comprenait cinq colonies: le Canada
(incluant le «Pays-d'en-Haut» ou région des Grands Lacs), l'Acadie
(aujourd'hui la Nouvelle-Écosse), la
mer du Nord (aujourd'hui la baie d'Hudson),
Terre-Neuve (que la
France partageait avec la Grande-Bretagne sous le nom de
Plaisance) et la
Louisiane (voir
la carte agrandie de la Nouvelle-France avant 1713). Si le «Pays-d'en-Haut»
faisait partie du Canada, le «Pays
des Illinois» était rattaché à la Louisiane.
2.1 Après le
traité d'Utrecht
Après le traité d'Utrecht, la Nouvelle-France
a vu son territoire réduit. Celui-ci comprenait dès lors le
Canada, l'Acadie
continentale (aujourd'hui le Nouveau-Brunswick), l'Île-Royale (le Cap-Breton et
l'île Saint-Jean, aujourd'hui l'île du Prince-Édouard) ainsi que la
Louisiane. La Nouvelle-France avait perdu Terre-Neuve
(Plaisance),
l'Acadie péninsulaire et la Baie d'Hudson.
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En principe, chacune des
colonies possédait son gouverneur local et son administration
propre. Cependant, la Nouvelle-France demeurait relativement unifiée en
vertu des pouvoirs conférés au gouverneur du Canada, obligatoirement
un militaire de carrière, qui résidait à
Québec, mais qui était en même temps gouverneur général de la
Nouvelle-France. Il avait effectivement autorité pour intervenir dans les affaires des autres
colonies de l'Amérique du Nord. En temps de guerre, le commandement suprême de
la Nouvelle-France était à Québec, mais après 1748 le gouverneur du Canada ne
pouvait plus commander les troupes françaises stationnées à Louisbourg, parce que leur
commandement relevait directement de Versailles.
2.2 La Baie d'Hudson
Le cas de la Baie d'Hudon était
un peu différent, car ce vaste territoire n'était pas colonisé; il servait uniquement
de zones de réserves pour le commerce des fourrures au moyen de quelques postes de
traite. Les Français y érigèrent des forts et les désignèrent par des
appellations françaises. Ils occupèrent ou détruisirent les forts anglais, le territoire
étant constamment disputé
aux Anglais qui non seulement menaçaient la souveraineté française, mais
aussi le monopole des fourrures avec les autochtones. De façon générale, le gouverneur
de la Nouvelle-France intervenait directement dans les affaires de la Baie
d'Hudson, puisque ce territoire était considéré comme l'arrière-cour du Canada et
seul un commandant local assurait l'administration française dans la baie,
généralement au fort Bourbon.
Toutes les colonies de la
Nouvelle-France étaient administrées par le secrétaire d'État à la Marine (voir
la liste). La France exerçait un contrôle étroit sur ses colonies de
l'Amérique du Nord et avait accompli une unité nécessaire à la défense
de son empire, sans oublier l'Alliance avec la quasi-totalité des nations
amérindiennes du continent. Cette cohésion a d'ailleurs fait longtemps la force de la Nouvelle-France par
opposition aux colonies anglaises de la Nouvelle-Angleterre, toutes divisées
entre elles et peu enclines à coopérer. Le système français suscitait l'envie
des Anglais qui auraient bien apprécié une telle unité pour leurs colonies de la
Nouvelle-Angleterre.
C'est le marin anglais
Martin Frobisher (1535-1594) qui découvrit en
1576 l'extrémité méridionale de la terre de Baffin, en recherchant le fameux
passage du Nord-Ouest qui, croyait-t-on, devait relier l'océan Atlantique à l'océan Pacifique
en passant entre les îles arctiques du Grand Nord. Le but était de découvrir une
nouvelle route commerciale vers l'Inde et la Chine. Frobisher explora une partie
de l'Arctique et revendiqua la région pour la couronne d'Angleterre. Par la suite,
ce furent encore des navigateurs
anglais, dont Henry Hudson (1610-1611), Thomas Button (1612-1613), Robert Bylot
(1615), Luke Foxe (1631), Thomas James (1631-1632), ainsi que le Danois Jens Munck
(1619-1620), qui découvrirent le passage vers cette grande mer intérieure qu'est la baie d'Hudson.
3.1 Henry Hudson
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C'est grâce à
Henry Hudson (1570-1611)
que les Anglais ont pu explorer la baie d'Hudson, car il fut le premier en 1610
à conduire son navire vers le sud du détroit d'Hudson (au sud de la Terre de
Baffin) pour atteindre une vaste étendue d'eau, la
baie qui portera son nom. Durant plusieurs mois à partir du mois d'août 1610, Hudson explora le
littoral oriental.
En novembre, son navire, le Discovery, fut pris dans
les glaces et son équipage débarqua pour hiverner à terre à l'extrémité sud de
la baie de James. Après la fonte des glaces au printemps, Hudson voulut explorer
le reste de la région, mais l'équipage se mutina le 22 juin 1611 et abandonna
Hudson sur une chaloupe. Personne ne le revit. |
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3.2
Thomas James
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Quant à Thomas
James, un autre navigateur anglais, il explora plus
systématiquement la région au cours de l'année 1631-1632, alors qu'il cherchait
lui aussi le fameux passage du Nord-Ouest. Le 24 juin 1632, James prit possession de
l'île Charlton (où il avait passé un difficile hiver) au nom du roi Charles Ier
d'Angleterre.
Dans ses récits de
voyage, Thomas James pouvait conclure qu'il n'existait guère de passage du Nord-Ouest au
sud du 66e
degré de latitude nord. Après le passage de Thomas James, il ne subsista
plus
aucune trace d'un voyage quelconque dans la baie d’Hudson. Ainsi, cette grande
région froide de ce qui fait partie aujourd'hui du Nunavut canadien fut à
l'origine découverte par les Anglais, non par les Français. |
3.3 Les droits de propriété
Pendant ce temps-là,
les Français découvraient de leur côté la vallée du Saint-Laurent. Samuel de Champlain
fondait Québec en 1608; le sieur de Laviolette fondait Trois-Rivières en 1634 et
Paul de Chomedey de Maisonneuve fondait Montréal en 1642. Les Français n'avaient
alors jamais exploré la baie d'Hudson, même si Samuel de Champlain avait entendu
parlé de la «mer du Nord» lors de son voyage en Huronie en 1613. Pour les
Français, cette «mer du Nord» faisait quand même partie du Canada et ils en avaient la
pleine souveraineté.
Dans le droit international de
l'époque, une découverte suivie d'une prise de possession symbolique était
suffisante pour constituer un titre juridique de souveraineté. Cependant, il ne
fallait pas qu'un territoire soit sous la souveraineté d'un État ou que ses
habitants soient organisés en État. En d'autres termes, il fallait que le
territoire soit une terra nullius, c'est-à-dire un territoire
n'appartenant à personne ou à aucun État, ce qui n'empêchait pas qu'il pouvait
néanmoins être habité. Un territoire ne pouvait appartenir qu'à un «roi
chrétien», les habitants n'étant que des «sujets» de ce roi, non les
propriétaires. En Amérique du Nord, il n'existait pas d'État organisé par les
nations autochtones. Si les Français s'étaient approprié la vallée du
Saint-Laurent, ils n'avaient jamais pris possession de la baie d'Hudson.
L'Angleterre pouvait donc légitimement prétendre que cette zone était une
terra nullius.
Au moment où la Nouvelle-France
commençait son expansion dans la vallée du Saint-Laurent et à l'ouest de la
rivière des Outaouais, au cours de la décennie de 1650, les guerres
iroquoises menaçaient la colonie. La
région du «Pays-d'en-Haut», c'est-à-dire celle des Grands Lacs
(Supérieur, Michigan, Huron, Érié et Ontario), était
coupée du reste du Canada à partir de l'Outaouais, étranglant par
le fait même le marché des fourrures. De part et d’autre de l'Atlantique, on
évoqua la possibilité d'abandonner le Canada si rien n'était fait pour protéger
l'économie des pelleteries.
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En août 1654, Médard Chouart des
Groseilliers (1618-1696), un
Français (né dans le
Brie) devenu coureur
des bois et interprète, partit avec
des compagnons pour explorer la
région des Grands Lacs: en passant
par la rivière des Outaouais, il se
rendit jusqu’aux lacs Huron, Érié et
Michigan. Deux ans plus tard, Des
Groseilliers et ses camarades
revinrent dans la colonie avec une
cinquantaine de canots remplis de
fourrures. Malgré l’opposition du
gouverneur
Pierre du Voyer d'Argenson (1658-1661),
Des Groseilliers repartit en
expédition au mois d'août 1659 avec
Pierre-Esprit Radisson (v.
1636-1710), son beau-frère,
également français (né à Paris). Cette
expédition les conduisit jusqu'à
l'extrémité du lac Supérieur. De
retour à la mi-août 1660, ils
dirigèrent un convoi de canots
contenant 300 hommes et 200 000 livres
de fourrures, à la grande joie des
marchands qui s'apprêtaient à
retourner ruinés en France.
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4.1 Les alliances franco-amérindiennes
Parce qu'ils
étaient partis sans autorisation, le gouverneur
d'Argenson fit emprisonner Des Groseilliers et Radisson, confisqua leur butin,
puis les condamna à une amende imposante. Or, Radisson et Des Groseilliers
venaient en fait de sauver la colonie. Lors de leurs voyages, les
deux aventuriers avaient entendu les Cris affirmer qu'il
y avait une région très riche en fourrures de castors,
située près de la mer du Nord, que les Anglais
appelaient la baie d'Hudson. Radisson et Des
Groseilliers avaient en outre noué de solides alliances avec un grand nombre de nations amérindiennes,
notamment les Iroquois, les Sioux, les Cris, les Hurons,
les Outaouais, les Ojibwés (Saulteux) et les Dakotas (voir
la carte autochtone). On
peut même affirmer que ces voyages des deux Français dans les
territoires des Grands Lacs ont grandement favorisé le
développement des alliances franco-amérindiennes.
4.2 Au service de
l'Angleterre
Une fois libérés, Des Groseilliers et Radisson
envisagèrent la possibilité qu'une compagnie privée puisse entreprendre le commerce des
pelleteries à l'intérieur du continent, en passant par l'Atlantique jusqu'à la
mer du Nord (baie d'Hudson). Mais les démêlés avec les autorités
françaises ainsi que le manque évident d'intérêt de la part de la France pour la baie
d'Hudson firent échouer le projet. Louis XIV connaissait d'autres préoccupations
plus sérieuses en Europe (cf. la lutte pour la suprématie maritime entre l'Angleterre et la
Hollande) que la glaciale et lointaine baie d'Hudson.
C'est alors que les deux explorateurs, apparemment plus
aventuriers que français, décidèrent
de se mettre au service de l'Angleterre, ennemie numéro
un de la France, qui cherchait par tous les moyens
d'obtenir les fourrures du nord des Grands Lacs par des
chemins détournés. Des Groseilliers et Radisson
parlaient quelques langues amérindiennes, en plus du français et de l'anglais;
ils changeront souvent d'allégeance en fonction de leurs intérêts.
Les deux Français se
rendirent d'abord à Boston en 1662, afin de trouver de l'aide financière pour entreprendre une expédition
à la
baie d'Hudson. À la fin de l'été de 1665, Des Groseilliers et Radisson allèrent présenter
leur projet au roi Charles II d'Angleterre. La Royal Society, qui était à l'avant-garde des courants intellectuels de son époque,
appuya aussi le projet. Trois ans plus tard, les deux
Français, devenus "Radishes & Gooseberries", guidèrent les premiers navires anglais
vers la baie d'Hudson: celui de
Radisson, l'Eaglet, ne put s'y rendre, mais celui de Des
Groseilliers, le Nonsuch, entra dans la baie d’Hudson et atteignit au sud
la rivière Rupert, le 29 septembre 1668. Au cours de l'hiver, les compagnons de Des Groseilliers
jetèrent les bases du fort Charles. Des Groseilliers et son équipage revinrent
en Angleterre avec
une telle quantité de fourrures que le roi allait
ensuite autoriser,
en 1670, la fondation de la Compagnie de la Baie
d'Hudson, chargée de la traite des fourrures dans ce
territoire.
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Le 2 mai 1670, Charles II
d'Angleterre autorisait la
fondation de la Compagnie de la
Baie d'Hudson sous le
nom, selon la Charte royale, de The Governor and
Company of Adventurers of
England, trading into Hudson’s
Bay, c'est-à-dire la
«Compagnie des aventuriers d'Angleterre faisant le commerce dans la baie
d'Hudson».
En plus d'octroyer la Charte royale de la Compagnie de la
Baie d'Hudson, Charles II avait créé en 1660 la Royal Society, qui existe encore
de nos jours, afin de promouvoir la recherche scientifique. Plusieurs
personnages importants de la Royal Society firent partie de la Hudson's Bay Company
(ou HBC).
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5.1
La Charte royale de Charles II
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Le roi d'Angleterre
reconnaissait à la Compagnie de la Baie d'Hudson le droit exclusif de
faire du commerce dans l'immense territoire appelé Terre de Rupert, ainsi
nommé en l'honneur du prince Rupert, cousin du roi, qui finança en partie l'expédition.
L'Angleterre s'affirmait souveraine sur les terres de Rupert tout en
accordant la propriété à la HBC. Le roi Charles croyait qu'il avait
le droit de donner ce territoire qui ne lui appartenait pas, parce
qu'aucun autre monarque chrétien ne l'avait revendiqué. Il
appliquait donc
la règle de la terra nullius s'appliquant à une terre n'appartenant à personne, les autochtones ne
pouvant être que les sujets d'un roi chrétien.
La Charte stipulait que la
Compagnie détenait le monopole de la totalité du territoire baigné par les
rivières et les cours d'eau qui se jettent dans la baie d'Hudson, ce
qui représentait en tout une étendue de plus de 3,8 millions de
kilomètres carrés, allant du Labrador à l'est jusqu'aux Rocheuses à
l'ouest, et bien au delà de la présente frontière canado-américaine
au sud. |
La Charte royale précisait aussi que la
HBC pouvait armer des navires et recruter des forces pour défendre son
territoire, faire la guerre à tous ceux qui n'étaient pas chrétiens, payer les
dommages à même les butins recueillis, faire construire des fortifications,
établir des garnisons, installer des colonies, exercer la justice et assurer
l'ordre. Bref, la Compagnie de la Baie d'Hudson était un gouvernement
territorial.
Ce territoire représenterait
aujourd'hui plus de 40 % de la superficie actuelle du Canada, incluant le Nunavik (au Québec),
les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut et le Manitoba. Dirigée
par le prince Rupert jusqu'en 1682, la HBC jouera un grand rôle dans la construction du Canada de 1867.
5.2 Le commerce des
fourrures
De 1670 à
1675, Des Groseilliers et Radisson entreprirent un voyage annuel vers la baie
d'Hudson et y fondèrent des postes de traite pour les Anglais en y rapportant
de grandes quantités de pelleteries. Pendant ce temps, la Compagnie de la Baie d'Hudson
édifiait ses comptoirs le long de la baie d'Hudson et de la baie de
James. Dès le 31 mai 1670, la marine anglaise avait désigné un gouverneur colonial,
Charles Bayly, qui
avait pris possession du territoire au nom de Charles II d'Angleterre. Mère Marie de
l'Incarnation (1599-1672) révèle
dans sa Correspondance que, peu après son
retour à Londres, «Des Groseillers a reçu vingt mille
écus de récompense du roi qui
l'a fait chevalier de la
Jarretière, que l'on dit être
une dignité fort honorable».
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Mais la Compagnie de la
Baie d'Hudson ne se montra guère intéressée à fonder une colonie,
comme les Français l'avaient fait dans la vallée du Saint-Laurent et
en Acadie. Seul le commerce des fourrures l'intéressait.
Des petits forts de bois se dressaient à l'embouchure des
principales rivières et les autochtones descendaient en canot pour
venir échanger leurs peaux de castor. Progressivement, la langue
anglaise devint le véhicule des communications entre Blancs et
autochtones, sauf dans les environs du fort Bourbon, resté
généralement français. Les rivières et les forts ou postes de traite
acquirent des dénominations anglaises: Sutton, Severn,
Winisk ou Weenisk, Eastmain, Rupert,
York, Moose, Albany, etc. Le
quartier général des opérations de la
HBC était placé à Fort Nelson, juste à l'embouchure du fleuve
Nelson (aujourd'hui au Manitoba); le fort changera successivement de nom: les
Français l'appelleront Fort Bourbon, les Anglais, Fort
York. |
D'autres postes de traite étaient
établis sur la rive sud de la baie d'Hudson (Ontario et Québec actuels). Ces postes étaient appelés "factories" (en français: «manufactures»),
d'après le mot "factor", désignant un commerçant. Le
Fort York, ainsi nommé par les Anglais en l'honneur du duc d'York,
successeur du roi Charles II, sera le plus souvent un fort français avec le nom de Fort
Bourbon, ainsi appelé en l'honneur du roi de France
Louis XIV, membre de la
Maison de Bourbon. Au siècle suivant, la France allait construire un
nouveau fort Bourbon, dressé celui-là le long du lac Winnipeg et du
fleuve Nelson conduisant vers la baie d'Hudson et l'ancien fort
Bourbon.
Bien évidemment, la présence des Anglais à
la baie d'Hudson et l'importance du commerce qu'ils entretenaient avec les
autochtones inquiétèrent les autorités de la Nouvelle-France; celles-ci
rejetèrent les prétentions britanniques. Non seulement la France contestait la
souveraineté anglaise sur la baie d'Hudson, mais aussi sa mainmise sur
l'exploitation des richesses naturelles, c'est-à-dire la traite des fourrures. Dès lors, la France allait tenter par
tous les moyens d'empêcher la HBC d'établir des postes de traite sur les rives
de la baie.
Dès le moment de la fondation de la
Compagnie de la Baie d'Hudson (1670), la région allait représenter un important sujet de discorde dans les
relations entre la France et l'Angleterre. Pour y conserver leurs intérêts, les Anglais et les Français entreprirent tour à tour des
expéditions afin de
déloger les postes de traite érigés par le clan adverse. Rappelons que si
l'Angleterre ne pouvait accéder à la baie d'Hudson que par le détroit d'Hudson,
fermé à la navigation les quatre-cinquièmes de l'année, les Français avaient
l'avantage de pouvoir s'y rendre par terre toute l'année et y traiter avec les
Indiens.
6.1 Les intérêts français
Le 10 novembre 1670,
l'intendant Jean Talon
écrivit au ministre Colbert pour lui
transmettre ses inquiétudes au sujet du voyage de Des Groseilliers à la baie
d'Hudson:
Par le retour des Algonquins qui hivernèrent
cette année à Tadoussac, j'apprend qu'on a veu deux vaisseaux Européens qui
cabannent (c'est le terme des sauvages) assez près de la baye d'Hudson.
Après avoir bien repassé sur toutes les nations qui peuvent avoir percé
jusqu'à ce lieu bien Nort, je ne puis rabattre que sur l'Anglois qui sous la
conduite d'un nommé Desgroseliers autrefois habitant de Canada, a pu prendre
la résolution de tenter cette navigation de soy fort inconnu et pas moins
dangereuse; je suis dans le dessin d'y faire passer par terre quelques
hommes de resolution pour inviter les Kilistinons, de descendre chez nous. |
En 1671, l'intendant Talon
décida d'envoyer ces «hommes de résolution» (lire "avec fermeté et courage") vers la baie d'Hudson. Pour les
Français, la «mer du Nord» était considérée comme une
sorte de frontière naturelle à explorer, ainsi qu'un riche territoire où les
Indiens pouvaient constituer des alliés pour le commerce des fourrures, mais
aussi des
sujets à convertir pour les missionnaires. En réalité, Talon voulait aussi
vérifier les rumeurs voulant que des Français y étaient installés pour le compte
de la HBC ; il s'agissait, bien sûr, de Radisson et de Des Groseilliers. La mère
Marie de l'Incarnation écrivit en 1671 au sujet de Des Groseilliers :
Il y a plusieurs années qu'on cherche un
passage pour aller à la grande baie du nord... Le révérend Père Albanel est
parti avec eux (les Indiens) pour porter la Foi en leurs pays; il sait en
perfection la langue montagnaise... M. l'Intendant a envoyé des Français
avec le père prendre possession de ces grands pays qui, outre la Foi, qui
est la fin principale, sont très avantageux pour le commerce. Il y a loin
d'ici et peut-être n'entendrons nous de deux ans des nouvelles de cette
mission. |
6.2 La souveraineté
française
Jean Talon choisit le père Charles Albanel
(1614-1696),
missionnaire jésuite connaissant les langues amérindiennes, pour l'envoyer à la baie d'Hudson,
afin d'y affirmer la souveraineté française. Albanel détenait des pouvoirs
plénipotentiaires. Au cours de l'été 1671, une petite expédition partit
de Tadoussac et emprunta la route de la rivière Saguenay
et du lac Mistassini. Le père Albanel et
ses compagnons arrivèrent sur les bords de la baie de James le 28 juin
1672. Ils y trouvèrent inhabité le fort Charles construit par Des
Groseilliers pour le compte de la Compagnie de la Baie d'Hudson. Avec son crucifix
levé vers le ciel, le père Albanel prit possession de la baie d'Hudson au nom du roi
de France. Puis il marqua le territoire des armes du roi en
différents lieux. Après plus de 3000 kilomètres de toute, Albanel était probablement le premier Européen à être
parvenu à la
baie de James par voie terrestre. Dans une lettre au roi datée du 2
novembre 1671, l'intendant avait fait ainsi rapport sur la mission du père
Albanel:
Il y a trois mois que
j'ay fait partir avec le
Père Albanel, jésuite, le sieur de St-Simon jeune gentilhomme de Canada
honoré par
le Roy depuis peu de ce titre; ils doivent pousser jusqu'à la baye
d'Hudson, faire des mémoires sur tout ce qu'ils découvriront, lier
commerce de pelleteries avec les sauvages et surtout reconnoistre
s'il y a lieu d'y faire hiverner quelques bastiments pour y faire un
entrepost qui puisse un jour fournir des rafraichissements aux
vaisseaux qui pourront cy-après descouvrir par cet endroit la
communication des deux mers du nord et du sud; depuis leur depart
j'ay receu trois fois de leurs lettres, les dernières apportées de
cent lieus d'icy par lesquelles ils me marquent que des sauvages,
qu'ils ont trouvé sur leur chemin les ont asseuré que deux vaisseaux
anglois et trois barques avoient hiverné dans le voisinage de cette
baye et y avoient fait grand amas de castors; si mes lettres en
response sont fidellement rendues, aud. père, cet establissement
sera bien examiné et sa majesté en sera bien informée. Comme ces
terres ont esté anciennement descouvertes, premièrement par les
françois, j'ay donné commission audit sieur de St-Simon de prendre
possession réitérée au nom de sa Majesté avec ordre d'y arborer l'escusson
de France dont il est chargé et de dresser son procès verbal en la
forme que je luy ay donnée. |
L'objectif était clair: il fallait
reprendre officiellement possession du territoire, faciliter le commerce avec
les Amérindiens et étendre l'occupation française en Amérique du Nord. Selon la
France, la mer du Nord lui appartenait et les Anglais, considérés comme des
intrus. L'insistance manifestée par l'Angleterre pour s'établir dans la baie
d'Hudson fut perçue par les Français comme de la provocation.
L'intendant Talon allait
retourner en France en 1672, non sans au préalable avoir compris que les Anglais pourraient
encercler complètement la Nouvelle-France, du nord au sud, c'est-à-dire de la
baie d'Hudson à la Nouvelle-Angleterre. En 1673, le gouverneur
général, le
comte de Frontenac, envoya
à nouveau le père Charles Albanel en mission auprès du gouverneur
anglais de la Baie d'Hudson,
Charles Bayly. Dans une longue lettre adressée au
ministre Colbert, Frontenac écrivit en
post-scriptum qu'il désirait que le père Albanel puisse rencontrer Des
Groseilliers:
J'oubliais, Monseigneur, à vous mander que
les avis que j'ai eus que des Groseiller nous débauchait tous les Sauvages
et leur faisait des présents pour les attirer à la Baie de Hudson, où il
s'est établi, ont fait que je me suis servi du zèle que témoignait le père
Albanel, Jésuite, d'aller faire une mission dans ces quartiers là pour
tâcher de détourner les Sauvages, parmi lesquels il a beaucoup de créance,
de prendre cette route, ce qui apporterait un fort grand préjudice à la
traite de Tadoussac et même à celle des Ôutaouaos auxquels des Groseillers à
ce qu'on me mande, a envoyé aussi des présents
sans qu'ils y aient voulu encore répondre et que j'essaierai d'empêcher par
toute sorte de moyens. Le dit Père Alhanel doit pressentir des Groseillers
s'il le rencontre et essayer de voir s'il pourra le faire rentrer dans nos
intérêts. Il voulait emmener son fils que nous avons ici mais j'ai cru qu'il
n'était pas à propos pour ce voyage. |
Charles Albanel quitta Québec le 8 octobre
1673, mais n'arriva à la rivière
Rupert que le 30 août 1675. Il remit au gouverneur Charles Bayly la lettre
de Frontenac, datée du 8 octobre 1673:
J'ay este ravy de rancontrer une occasion
aussy favorable que celle du R.P. Albanel pour pouvoir vous assurer de la
bonne correspondance, que je suis résolu d'entre tenir avec vous, et a
laquelle Je n'en Doute point que vous ne repondier, Scacham La grande union
et Intelligence qui est entre nos Deux Monaques. Je vous conjure de
favoriser le Dit R.P. en tout ce qui Dépendra de vous, et d'estre persuadé
que je vous rendray la pareille, si Jamais il vien en ce pays quelquen de
vostre parte puisque Je ne Saurois avoir plus de joye que de trouver une
occasion pour fair paroitre combien je suis Mons.
Votre très humble et très affectionné serviteur. |
Mais le gouverneur Bayly arrêta le père Albanel et l'expédia en
Angleterre. Ce dernier était soupçonné par les Anglais de détourner
des groupes de chasseurs et de trappeurs indiens du commerce avec la Compagnie
de la Baie d'Hudson, ce qui était exact. Remis en liberté au début de
1676, Albanel passa en France et obtint l'autorisation de retourner au
Canada. Ce n'était là que le début d'un long conflit entre la France et
l'Angleterre, lequel allait durer jusqu'au traité de
Ryswick de 1697, pour ne se terminer vraiment qu'avec le
traité d'Utrecht de 1713. En 1674, Des Groseilliers et Radisson
avaient cessé (pour un temps) de
travailler pour les Anglais et étaient retourné au Canada.
6.3 L'explorateur
Louis Jolliet
Quelques années plus tard, au printemps
de 1679, le gouverneur général, le comte de Frontenac, demanda à l'explorateur
Louis Jolliet (1645-1700) de «faire
la visite des nations et des terres du domaine du roi en ce pays». Il
l'envoya à la baie d'Hudson afin de tenter de tisser des liens commerciaux avec
les Indiens du Nord et d'enquêter sur leurs contacts avec les Anglais qui y
étaient
installés. En réalité, Jolliet se voyait assigner un double objectif : évaluer l’influence anglaise sur les
Indiens du bassin hudsonien et jeter les bases d’une alliance commerciale avec
eux. Il s'y rendit en empruntant la rivière Saguenay et le lac Saint-Jean. Dans la
baie, il rencontra le gouverneur anglais Charles Bayly, qui l'accueillit «avec beaucoup de civilités»
et l'invita même à se mettre au
service des Anglais. Le 25 octobre, il rentra à Québec en étant
persuadé que les Anglais exerçaient à la baie d’Hudson «le plus beau commerce du
Canada», qu'ils «cueillaient» le castor «tant qu’ils voulaient» et qu'ils
espéraient même «rendre cet établissement plus considérable à l’avenir». Et
Louis Jolliet de conclure : «Il n'y
a point de doute que si on laisse les Anglais dans cette baie, [ils] ne se
rendent maîtres de tout le commerce du Canada en deça de six [dix ?] ans.»
Jolliet savait aussi que les Outaouais
étaient les principaux fournisseurs des Français pour les fourrures dans la
région du lac Supérieur. Or, il craignait que ces nations indiennes ne préfèrent
porter leurs fourrures «directement aux Anglais». C'est pourquoi il invita
discrètement Sa Majesté à «faire sortir les Anglais de cette baie» ou au moins à
«les empêcher de s'établir plus loin, sans les chasser ni rompre avec eux».
Pendant ce temps, les jésuites se
plaignaient auprès du
ministre Colbert et auprès de nombreux courtisans pour déplorer le manque de
contre-mesures efficaces de la part de la France dans ce qu'on aurait pu appeler
«l'agression anglaise en Nouvelle-France». De fait, pour les Français, les
Anglais menaçaient la souveraineté française; il s'imposait donc de réagir sans
plus tarder.
|
Afin de concurrencer la HBC
par voie de mer, les
Français fondèrent en 1682 la Compagnie de la Baie du Nord (appelée
appelée simplement
la «Compagnie du Nord»). C'était l'équivalent français de la compagnie anglaise de
la Baie d'Hudson. Bénéficiant du soutien du roi, la nouvelle compagnie fut
formée de riches marchands, dont Charles Aubert de la Chesnaye
(1632-1702), considéré comme le plus important homme d'affaires et le
plus grand propriétaire foncier de la Nouvelle-France. Pour
l'intendant Jacques
Duchesneau, le seul moyen d'empêcher les Anglais de s'approprier
le commerce français et le territoire de la baie d'Hudson «seroit de
les chasser de vive force de cette baye estant à nous» (Lettre au
ministre, 13 nov. 1681). Louis XIV n'entretenait aucun doute sur sa
souveraineté et sur son statut de seigneur propriétaire. Il ordonna
à la Compagnie du Nord de faire le nécessaire pour protéger ses
intérêts. Dorénavant,
le territoire de la Baie d'Hudson allait être constamment contesté à
la fois par l'Angleterre et la France. Durant plusieurs décennies,
Anglais et Français allaient tenter de se déloger à tour de rôle,
dans un inlassable jeu de bascule.
|
Au mois d'août 1682, Radisson et Des Groseilliers conduisirent
deux navires de la Compagnie du Nord jusqu'à la rivière Monsoni (aujourd'hui Hayes), à
l'extrémité sud de la baie de James. Ils prirent le poste de traite
de Port Nelson aux Anglais, s'emparèrent d'un navire bostonnais
appartenant à Benjamin Guillam et ramenèrent une impressionnante cargaison de
fourrures à Québec.Mais le gouverneur
Joseph-Antoine Lefèbre de
La Barre
décida de
sévir contre Radisson et Des Groseilliers, sous prétexte que
la France n'était pas en guerre contre l'Angleterre. Guillam fut
libéré et le navire, rendu aux Anglais. Radisson fut conduit à Paris
où il fut accusé de ne pas avoir payé l'impôt de 25 % sur sa
cargaison de fourrures. Cette fois, c'en était trop! Radisson gagna aussitôt
l'Angleterre pour réintégrer un peu plus tard la Compagnie de la
Baie d'Hudson, et ce, d'autant plus que sa femme était la fille d'un
des directeurs de la Compagnie. En mai 1684, il reprit le poste de
Port-Nelson aux Français et vida les entrepôts. Des Groseilliers
abandonna sa carrière pour s'installer dans la région de Sorel.
En 1685,
Louis XIV cédera à la Compagnie de la Baie du Nord le monopole de la traite des
fourrures dans la baie d'Hudson. Au fil des années, les expéditions
militaires contre la
Compagnie de la Baie d'Hudson ainsi que la taxation excessive du
commerce des fourrures (représentant alors le quart des ventes). Son monopole lui sera retiré en janvier 1700 et transféré à la
Compagnie de la Colonie.
La stratégie française se
durcit à partir de 1686. Allaient alors prendre de l'ampleur dans la baie d'Hudson les guerres
coûteuses entre les
Français et les Anglais. Le seul objectif de part et d'autre était
d'éliminer la concurrence commerciale dans un secteur en plein
essor, celui de la traite des fourrures sur les terres revendiquées
par les deux pays. Toutefois, jusqu'au
traité d'Utrecht de 1713, ni la France ni l'Angleterre ne
posséderont la Baie d'Hudson en entier, sauf durant quelques
semaines ou de façon provisoire, alternativement.
8.1 La bataille du chevalier de Troyes (1686)
|
La Compagnie de la Baie du Nord, avec l'appui du nouveau
gouverneur de la Nouvelle-France,
Jacques-René de Brisay, marquis de
Denonville,
organisa une expédition afin de
régler une fois
pour toutes les problèmes causés par les Anglais à la Baie d'Hudson.
On fit appel à Pierre de Troyes
(1645-1688), capitaine d'une compagnie de la Marine
débarqué à Québec, le 1er
août 1685. Denonville ordonna au sieur de
Troyes de quitter Québec «pour aller occuper des postes
sur les côtes de la baie du Nord».
La troupe,
composée de 30 soldats, dont Pierre Le Moyne
d'Iberville (1661-1706), et de 70 miliciens canadiens triés sur le
volet, partit de Montréal, navigua sur la rivière des
Outaouais, puis fit du portage pour atteindre le lac Témiscamingue et le lac Abitibi avant d'arriver
vers le 19 juin 1686 à la
rivière Moose, qui se jette dans la baie de James. |
En quelques semaines, la troupe de soldats et de miliciens expulsa
les Anglais du fort Charles (Rupert), du fort Albany (Fort Monsoni
ou Moose Factory) et du fort Quichichouane (ou Albany), ainsi que de
l'entrepôt de l'île Charlton. Le fort Rupert devint le fort
Saint-Jacques; le fort Albany, le fort Sainte-Anne; le fort Monsoni
ou Moose Factory, le fort Saint-Louis. Cette bataille allait
être la première d'une série d'éclatantes victoires pour d'Iberville
et ses compagnons. Cette année-là, les Français retrouvaient
pratiquement le contrôle du commerce des fourrures de toute la baie
d'Hudson, car les Anglais ne conservaient que le petit poste de
traite de Port-Nelson. Le conflit se termina cette année-là par une
entente entre la France et l'Angkleterre afin que la rivière Nelson
demeure une propriété commune entre les deux pays. Quelques semaines après le retour
du sieur Pierre de Troyes dorénavant surnommé «la main de fer»,
de
Denonville
exprimait ainsi sa
satisfaction à Jean-Baptiste
Colbert, ministre des Colonies :
Le
sieur de Troyes est le plus intelligent et le plus
capable de nos capitaines ; il a l’esprit tel qu’il faut
pour avoir tous les ménagements nécessaires pour
commander aux autres. On ne saurait avoir une meilleure
conduite que celle qu’il a eue dans l’entreprise du Nord
car il lui a fallu du savoir-faire pour tirer des
Canadiens les services qu’il en a eus et pour les mettre
dans l’obéissance. |
Pendant ce temps, Pierre de
Troyes avait confié à Pierre Le Moyne d'Iberville, alors cadet de la
marine royale, le commandement des postes anglais qui venaient de
tomber. D'Iberville s'empara ensuite de deux navires anglais, ce qui
lui permit à son équipage d'échapper à la
famine et d'approvisionner Fort Saint-Louis. À la fin d'octobre 1687, il rentra
à Québec par mer à bord du
Craven
chargé de
fourrures et de marchandises anglaises. L'expédition militaire menée dans la
baie d'Hudson par le chevalier de Troyes et par d'Iberville marqua
l'histoire de la Nouvelle-France et inaugura une nouvelle ère de
confrontations dans les relations anglo-françaises. L'année
suivante, les Iroquois détruisirent le fort Abitibi (Témiscamingue),
coupant ainsi toute retraite terrestre aux Français.
8.2 Les campagnes de Pierre Lemoyne
d'Iberville
|
Pierre Le Moyne
d'Iberville séjourna en France à l'hiver de 1687-1688.
Il était déjà surnommé «le Cid canadien» en raison de ses
exploits contre les Anglais. Il réussit à convaincre
Louis XIV de soutenir la Compagnie de la Baie du Nord et
d'assurer par le fait même la consolidation des positions françaises dans cette
région, ladite compagnie jouant le rôle de
garde-frontière. Le 1er
mai 1689, Louis XIV écrivit à
Denonville
et à
l'intendant Champigny: «Devront donner leur
protection à la Compagnie du Nord pour leur commerce et
pour chasser les Anglois de la baie d'Hudson si la
guerre éclate.» Après tout, les Français avaient
découvert ce territoire, du moins d'après les
prétentions de
la Compagnie du Nord.
Le roi confia à
d'Iberville
le plus moderne et le plus rapide des navires, la
frégate Le Soleil d’Afrique. D'Iberville en prit
immédiatement le commandement. De retour à la baie
d'Hudson en septembre 1688, il se rendit compte
que les Anglais tentaient de reprendre leurs anciens
postes de traite. |
Au moment où il quittait le
fort Sainte-Anne (fort Albany) à bord d'un petit navire, deux
vaisseaux anglais le bloquèrent avant qu'il n'ait pu sortir de la
rivière Albany. Comme l'hiver approchait, les trois vaisseaux furent
pris dans les glaces du fleuve, ce qui pouvait reporter l'affrontement à
l'été suivant. D'Iberville quitta la baie de James en septembre
1689, après avoir capturé un autre vaisseau anglais au mois de
juillet précédent. Les Anglais avait conservé Port-Nelson, mais ils
ne pouvaient plus récupérer le sud de la baie. D'Iberville arriva à
Québec, le 28 octobre, en ramenant des prisonniers anglais et un
butin considérable.
Pierre Le Moyne d'Iberville repartit de
Québec pour la baie d'Hudson en juillet 1690. À la fin du mois
d’août, il arriva devant le fort York, mais il dut battre en
retraite devant
un vaisseau anglais mieux armé. Il décida alors d'attaquer plutôt
New Severn (en français: Neuve-Savanne), un avant-poste situé au sud-est du fort
York. Neuve-Savanne devint ensuite un centre commercial français
florissant et un petit centre de peuplement. Pendant les années qui suivirent,
d'Iberville ne parvint toutefois pas à
expulser les Anglais de la baie d'Hudson. En revanche, James Knight
reprit le fort Albany en 1693, ce qui força tous les Français à
abandonner la baie.
En 1694,
d'Iberville fut désigné une quatrième fois pour
prendre
la tête d'une expédition contre le fort York.
Afin de garder son intérêt, on lui
concéda, jusqu'en juillet 1697, le monopole du
commerce dans la baie d'Hudson, évidemment en dépit de
l'opposition des actionnaires de la Compagnie de
la Baie du Nord. D'Iberville et son frère Joseph
Le Moyne de Sérigny quittèrent Québec le 10 août
1694 et arrivèrent à la rivière Hayes le 24
septembre. Ils reprirent le fort York renommé
Fort Bourbon et y passèrent l'hiver.
Au cours
de la campagne de 1694–1695, les Indiens avaient
amené 450 canots remplis de pelleteries au fort
Bourbon. L'année suivante,
les
Anglais envoyèrent dans la baie cinq vaisseaux
et 400 hommes commandés par le capitaine William
Allen, qui reprirent le fort Bourbon (renommé
York) et s’emparèrent en même temps d’une
cargaison de fourrures évaluées à 136 000
livres.
- Les représailles à Terre-Neuve
En
représailles à la présence de corsaires anglais
qui détruisaient les ports de pêche français à
Terre-Neuve, Pierre Le Moyne d'Iberville fut
appelé en renfort dans cette colonie durant
l'hiver de 1696-1697, avec une flotte de trois
navires et l'aide de 200 miliciens canadiens et
d'Amérindiens alliés. Il anéantit presque tous
les postes anglais échelonnés sur la côte
orientale de l'île, soit une quinzaine, dont le
chef-lieu St John's (qui devint provisoirement
Saint-Jean); il massacra plus de 200
Anglais et fit plus de 700 prisonniers; il
s'appropria ou rasa plus de 370 bateaux de
pêche. À la fin de l'expédition, en mars 1697,
il ne restait plus aux Anglais que deux petites
agglomérations, Bonavista et Carbonear. Pendant
cette période de quatre mois d'offensive,
d'Iberville avait fait disparaître 36 postes de
pêche anglais. La campagne de Terre-Neuve fut
sans doute la plus cruelle et la plus
dévastatrice de toute sa carrière.
-
L'épisode du Pélican
Évacuation
du Pélican |
D'Iberville fit ensuite voile à nouveau vers la baie d'Hudson. À bord de
son navire Le Pélican (44 canons), il
entra dans l'embouchure de la rivière Hayes le 4
septembre 1696. Le lendemain, trois vaisseaux de
guerre anglais l'attaquèrent: le
Hampshire (56 canons),
le Dering
(36
canons) et
le Hudson’s Bay
(32 canons). D'Iberville coula le
Hampshire,
puis captura le Hudson’s Bay,
mais Le Pélican dut être abandonné, car les
canons du Hampshire
avaient fait une brèche dans la coque du navire. Les trois
autres vaisseaux de l'escadre française
arrivèrent au moment de l'évacuation du
Pélican. Après de vifs
engagements durant plusieurs jours, les Anglais rendirent aux Français
tous les forts de la baie d'Hudson, le 13
septembre 1697.
Cet épisode du Pélican constitue
sans doute la plus rapide et la plus brillante
campagne d’Iberville. Ce devait être aussi la
dernière fois qu'il guerroyait dans
ces contrées nordiques. |
- Le traité de Ryswick
Quelques jours plus tard, le
traité de Ryswick (aujourd'hui Rijswijk, ville hollandaise de la
région de La Haye) mettait fin à la guerre de la Ligue d'Augsbourg (connue
en anglais sous le nom de "King William's War",
de 1688 à 1697) entre Louis XIV
et la Grande Alliance. Le traité confirmait la puissance de la France en Amérique.
L'Acadie et
Plaisance retournaient à la France. Le territoire de la Baie d'Hudson fut rattaché à la Nouvelle-France en tant que
colonie autonome. Le traité précisait que le «fond de la baye» demeurait
français et que le fort York (ex-Bourbon) revenait à la Compagnie de la Baie d'Hudson,
ce qui signifiait que la baie d'Hudson était anglaise; la baie de James,
française.
Dans les faits, les Anglais conservaient Fort Albany, tandis que
Fort Bourbon (Fort York) restait aux mains des
Français. Les forts (postes de traite) porteront alors
des appellations françaises (Fort
Bourbon,
Fort Saint-Louis,
Fort Saint-Jacques,
Fort Sainte-Anne, Fort Neuve-Savane, etc.).
En réalité, la Compagnie de la Baie d'Hudson avait demandé à Guillaume III
d'Angleterre de donner la baie de James à la France et de conserver la baie
d'Hudson, afin que, peu de temps après, il soit possible de chasser les Français
et de tout conserver! Le traité prévoyait aussi la création d'une commission
chargée de déterminer le statut de trois forts faisant l'objet d'un litige dans
la région de la baie d'Hudson. Ces dispositions du traité de Ryswick
ne furent cependant jamais appliquées, car les commissaires chargés de
déterminer les appartenances respectives des postes anglais et français ne
parvinrent jamais
à s'entendre sur un protocole quelconque.
- Le fléau des Anglais
La guerre pour la souveraineté française
sur la baie d'Hudson avait fait rage durant si longtemps que d'Iberville pouvait
écrire au roi: «Sire, je suis las de conquérir la Baie d'Hudson.» À la suite du
chevalier de Troyes, Pierre Le Moyne d'Iberville, surnommé aussi "the scourge of
the English" (le «fléau des Anglais») et "the scourge of the Bay" (le «fléau de
la Baie»), avait combattu victorieusement à la baie d'Hudson en 1688, en 1691,
en 1694 et en 1687. En fait, ces tueries sans cesse renouvelées, suscitant
autant de revanches chez le clan adverse, auraient pu être évitées si les
Français (ou les Anglais) avaient pu installer d'importantes garnisons. On
détruisait tout, puis on repartait avec les fourrures pillées à l'autre. Tout
était à recommencer!
|
Pierre Le Moyne d'Iberville retourna en France
en novembre 1697. Il réussit à faire prolonger
jusqu'à l'été de 1699 le monopole commercial qu'il détenait
au fort Bourbon. Mais il allait dorénavant être appelé à
jouer un rôle fondamental dans le développement
de la Louisiane fondée en 1682; il devint
gouverneur de cette colonie de
1699 à 1702. Le 25 août 1699, il
avait été fait
chevalier de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, le
premier Canadien à recevoir cette distinction
honorifique.
S'il est perçu comme le premier véritable héros
canadien, il ne faut pas oublier que d'Iberville
s'est aussi rendu coupable de nombreux actes de
perfidie, de cruauté et de pillage. Le gouverneur, le
comte
de
Frontenac, écrivit même à Versailles que «ce
Monsieur d'Iberville a beaucoup plus en vue ses
propres interest et son commerce que le service
du Roy». |
Le Moyne D'Iberville n'était pas seulement un
militaire de premier ordre, il était aussi un
astucieux homme d'affaires à la limite du
fraudeur.
Il avait su se réserver un monopole
de la traite
des fourrures à la baie d'Hudson de 1694 à 1700 —
sans doute en guise de récompense pour ses
loyaux services —, ce qui lui rapporta beaucoup d'argent;
il avait aussi des intérêts dans les pêcheries à
Terre-Neuve, en
Louisiane et à Saint-Domingue.
Il possédait en France deux seigneuries dans
l'Aunis: Ardillières près de Rochefort et Duplessis,
ce qui suppose qu'il était assez riche.
Son nom officiel est le suivant:
Pierre Le
Moyne d'Iberville et d'Ardillières.
Sa mort soudaine, survenue à 45 ans à La Havane
en juillet 1706, serait liée à une vente de cargaison de fer
à Cuba. S'il était considéré comme
un véritable héros de légende en France et en
Nouvelle-France, il était craint et détesté par
les Britanniques qui voyaient en lui
un corsaire et un flibustier. Néanmoins, Pierre
Le Moyne d'Iberville avait vu juste au sujet de
la présence des Anglais à la baie d'Hudson, en
présageant la perte de la
Nouvelle-France.
8.3 Changement de stratégie après 1713
Ce n'est que le 11 septembre 1714 que Nicolas
Jérémie, gouverneur du fort Bourbon depuis 1709,
considérant ce poste comme «un des meilleurs
qu'on ait dans l'Amérique, pour peu qu'on y fit
des dépenses», remit ledit pactole, sur ordre du
ministre
Pontchartrain, à James Knight, gouverneur de
la Hudson's Company. Celle-ci deviendra
tellement puissante après 1760 que certains
interpréteront son sigle HBC par Here
Before Christ («Ici, devant le Christ»).
À partir de 1713,
les dispositions du
traité
d'Utrecht remplacèrent celles du
traité de
Ryswick et l'Angleterre, devenue la
Grande-Bretagne depuis 1701, entra en possession de
toute la région du bassin de la baie d’Hudson, y
compris du fort Bourbon. Plus tard, en 1738, Pierre
Gaultier de Varennes et de La Vérendrye
(1685-1749) construira le Fort Rouge, au lieu
actuel de Winnipeg (Manitoba) au confluent de la
rivière Rouge et de la rivière Assiniboine. En
cédant la baie d'Hudson, la France perdait une source significative de revenus
liés à la
traite des fourrures et faisait une brèche
importante dans ses possessions
nord-américaines. En effet, la Nouvelle-France
se voyait encerclée par de nouveaux territoires
britanniques: la Baie d'Hudson au nord, l'île de
Terre-Neuve à l'est et l'Acadie péninsulaire au
sud-est.
Contrainte
d'abandonner les territoires de la baie
d'Hudson, riches en fourrures, la France
s'employa à miser davantage sur les territoires de
l'Ouest, le
Pays-d'en-Haut. En effet, Versailles
autorisa la construction de
nombreux
forts dans la région des Grands Lacs: le fort La
Baye (1717), le fort Ouiatenon (1717), le fort Beauharnois (1727), le fort de la
Presqu'île (1753), le fort Machault (1754), le fort Dusquesne (1754), etc. Grâce à ses alliances
amérindiennes et à ses prises de possession du territoire, la Nouvelle-France
contrôlait pratiquement toute la région des Grands Lacs, y compris le sud du lac
Ontario après la Grande Paix de Montréal (1701), et progressait plus au sud
vers le Pays des Illinois et,
par la suite, vers la
Louisiane qui avait été fondée en 1682.
C'est en effet à près le traité d'Utrecht que la
France développa davantage la Louisiane.
|
Si la Terre de Rupert (cf. la
section no 5) restait sous contrôle britannique
à partir du
traité
d'Utrecht
(1713), le territoire
continuait d'être administré par une compagnie privée, la Hudson Bay Compagny.
Le drapeau de la HBC témoignait de l'appartenance du
territoire à l'Empire britannique.
Deux décennies après la cession
du Canada à la Grande-Bretagne au traité de Paris (1763), le
territoire fut géré par deux entreprises de traite des
fourrures : la Hudson Bay Compagny (Compagnie de la Baie d'Hudson),
dont le siège social était à Londres, et la North West Company
(Compagnie du Nord-Ouest), dont
le siège social se trouvait à Montréal ; elle avait été fondée en 1782
par les frères Frobisher (Benjamin et Joseph) et Simon
McTavish. |
Après que
la France eut cédé la Nouvelle-France à la
Grande-Bretagne (1763), les postes de la
Compagnie de la Baie d'Hudson furent attaqués en
1782 par un amiral français, le comte de La
Pérouse, qui ravagea les possessions
britanniques en guise de soutien aux
révolutionnaires américains. Il détruisit le
fort Prince-de-Galles (ou Churchill, en
l'honneur de
John Churchill, duc de Marlborough) et le fort
York ("York Factory"). Ce fut la dernière
incursion française dans la baie d'Hudson.
Pendant un siècle et demi,
les deux entreprises de traite entretinrent de bonnes relations
avec les populations autochtones, les Inuits, les Amérindiens et les Métis.
Ces entreprises possédaient près de 600 postes de traite dans ce qui est
aujourd'hui le Québec, l'Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan, le
Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest. Au moment de la fusion de
la Compagnie de la Baie d'Hudson et de la Compagnie du Nord-Ouest en
1821, il existait encore 125 postes en exploitation, dont 68
appartenaient à la HBC.
Un peu
avant la création de la Confédération canadienne (1867), la
Grande-Bretagne et le gouvernement canadien entreprirent le
processus d'annexion de la Terre de Rupert, mais sans avoir consulté la
population locale qui comptait quelque 100 000 personnes,
pour la plupart des Inuits, des Amérindiens (Cris, Tchippewayans,
Couteaux-Jaunes, Slavey, Flancs-de-Chien, Lièvres et Kaskas) et des
Métis. Ces derniers, appelés aussi «Sang-Mêlés», étaient les
plus revendicateurs et constituaient trois groupes linguistiques
distincts: les Métis de langue française (majoritaires), les Métis
anglophones d'origine écossaise dits «de la baie d'Hudson» et
les Métis assimilés aux Amérindiens et parlant une langue autochtone. Sur le territoire
de la HBC, le
français et l'anglais jouissaient d'un statut officiel de facto. Les lois
étaient lues à haute voix dans les deux langues, au moins deux fois
par année; la Terre de Rupert était un «pays bilingue», et ce, à la plus
grande satisfaction de tous les habitants.
|
La Compagnie
de la Baie d'Hudson avait estimé à 400 millions de dollars la valeur
de son territoire (terre de Rupert). Finalement, pour seulement 1,5
million de dollars, le Canada signait en 1869 la plus grosse
transaction immobilière de son histoire et devenait propriétaire
d'un immense territoire de sept millions de kilomètres carrés (voir
la carte de gauche).
Par décret
du 23 juin 1870, le Conseil Impérial de Londres cédait le territoire
au «Dominion du Canada».
L'ensemble de ces nouveaux territoires allait être désigné comme les
Territoires du Nord-Ouest
(Northwest Territories)
le 15 juillet 1870, jour de leur entrée officielle dans le Canada.
À la suite de l’Accord sur les revendications
territoriales du Nunavut conclu en 1993, la carte du Canada fut
à nouveau transformée, le 1er
avril 1999, par la division des Territoires du Nord-Ouest en deux
entités territoriales distinctes: les
Territoires du
Nord-Ouest
(qui conservent leur
nom dans la partie ouest) et le
territoire du Nunavut
(voir la carte).
|
Dernière mise à jour:
13 mai 2024
Bibliographie portant sur
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La Nouvelle-France -
Le Canada actuel
Province de Terre-Neuve
(Canada)
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