SUISSE L'Acte de médiation 19 février 1803 |
L'armée française occupa la Suisse à partir de 1798. La France transforma le système politique suisse sur le modèle français. La Confédération helvétique devint République helvétique et adopta un gouvernement centralisé comme c'était le cas dans la Constitution française de 1795. Cependant, le modèle français s’avéra une catastrophe en raison des différences de religions, de langues et de cultures totalement inadaptées à un régime unitaire. La situation intérieure dégénéra rapidement et la guerre civile éclata dans le pays. Les Suisses durent se résoudre à demander l’aide de Bonaparte, alors premier consul depuis 1799. Le 19 février 1803, Bonaparte mit fin à l'existence de la République helvétique par l'Acte de médiation. Selon la nouvelle Constitution, la Suisse redevenait une confédération, constituée de 19 cantons (voir la carte de gauche), c'est-à-dire six de plus qu’auparavant avec l'arrivée des cantons du Tessin, de Saint-Gall, des Grisons, d'Argovie, de Thurgovie, et de Vaud. Au plan linguistique, Bonaparte fit donc de la Suisse un État multilingue avec la reconnaissance formelle de l’égalité des langues. |
Le texte original est composé d'un Préambule et de 20 chapitres imposant une constitution à chacun des cantons. Le chapitre 20 porte sur l'institution de la Confédération. Il n'était prévu aucune disposition linguistique, mais comme chaque canton disposait de sa propre constitution et que l'égalité des droits était assurée entre tous les citoyens, le plurilinguisme allait de soi.
PRÉAMBULE
FAIT PAR LE PREMIER CONSUL DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE, ENTRE LES PARTIS QUI DIVISENT LA SUISSE Bonaparte, premier Consul de la République; Président de la République italienne, aux SUISSES
L'HELVÉTIE, en proie aux
dissensions, était menacée de sa dissolution:
elle ne pouvait trouver en elle-même les moyens
de se reconstituer. L'ancienne affection de la
nation française pour ce peuple recommandable,
qu'elle a récemment défendu par ses armes et
fait reconnaître comme puissance par ses
traités; l'intérêt de la France et de la
République italienne, dont la Suisse couvre les
frontières; la demande du sénat, celle des
cantons démocratiques, le vœu du peuple
helvétique tout entier, nous ont fait un devoir
d'interposer notre médiation entre les partis
qui le divisent.
Les sénateurs Barthélemy, Roederer, Fouché et Démeunier, ont été par nous chargés de conférer avec cinquante-six députés du sénat helvétique, et des villes et cantons, réunis à Paris. Déterminer si la Suisse, constituée fédérale par la nature, pouvait être retenue sous un gouvernement central autrement que par la force; reconnaître le genre de constitution qui était le plus conforme au vœu de chaque canton; distinguer ce qui répond le mieux aux idées que les cantons nouveaux se sont faites de la liberté et du bonheur; concilier dans les cantons anciens les institutions consacrées par le temps avec les droits restitués à la masse des citoyens: tels étaient les objets qu'il fallait soumettre à l'examen et à la discussion. Leur importance et leur difficulté nous ont décidés à entendre nous-mêmes dix députés nommés par les deux partis, savoir; les citoyens d'Affry, Glutz, Jauch , Monnot, Reinhart, Sprecher, Stapfer, Ustery, Watteville et Vonflue; et nous avons conféré le résultat de leurs discussions, tant avec les différens projets présentés par les députations cantonales, qu'avec les résultats des discussions qui ont eu lieu entre ces députations, et les sénateurs-commissaires. Ayant ainsi employé tous les moyens de connaître les intérêts et la volonté des Suisses, nous, en qualité de médiateur, sans autre vue que celle du bonheur des peuples sur les intérêts desquels nous avions à prononcer, et sans entendre nuire à l'indépendance de la Suisse, STATUONS ce qui suit : [...] CHAPITRE 20 TITRE PREMIER Article 1er Les dix-neuf cantons de la Suisse, savoir :
Appenzell, Argovie, Bâle, Berne, Fribourg, Glaris, Grisons, Lucerne,
St-Gall, Schaffhouse, Schwytz, Soleure, Tessin, Thurgovie,
Unterwald, Uri, Vaud, Zoug et Zurich, sont confédérés entre eux,
conformément aux principes établis dans leurs constitutions
respectives. Ils se garantissent réciproquement leur constitution,
leur territoire, leur liberté et leur indépendance, soit contre les
puissances étrangères, soit contre l'usurpation d'un canton ou d'une
faction particulière. [...] Le présent acte ainsi que les constitutions des dix-neuf cantons abrogent toutes les dispositions antérieures qui y seraient contraires ; aucun droit, en ce qui concerne le régime intérieur des cantons et leur rapport entre eux, ne peut être fondé sur l'ancien état politique de la Suisse. Le repos de la Suisse, le succès des nouvelles institutions qu'il
s'agit de former, demandent que les opérations nécessaires pour les
faire succéder à l'ordre de choses qui finit, et pour transmettre à
de nouvelles magistratures le soin du bonheur du peuple soient
garanties de l'influence des passions, exemptes de tout ce qui
pourrait les animer et les mettre aux prises, exécutées avec
modération, impartialité, sagesse. On ne peut espérer une marche
convenable que de commissaires nommés par l'Acte de médiation même
et animés de l'esprit qui l'a dicté. Pour l'an 1803, le canton directeur est
Fribourg. [...] Le 15 avril, la constitution sera en
activité : pour le 1er juin, chaque canton aura nommé ses députés à
la Diète et rédigé leurs instructions ; et le premier lundi de
juillet de la présente année, la Diète se réunira. [...] |