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L'affichage
commercial et l'article 58 de la Charte de la langue française |
La question de l'affichage commercial a fait couler beaucoup d'encre au Québec depuis l'adoption de la Charte de la langue française en 1977. La version originale de l'article 58 de la loi 101 imposait uniquement l'emploi du français dans l'affichage commercial.
Version originale de 1977
Article 58L'affichage public et la publicité commerciale se font uniquement dans la langue officielle.
Sous réserve des exceptions prévues par la loi ou par les règlements de l'Office de la langue française, l'affichage public et la publicité commerciale se font uniquement dans la langue officielle.
En 1983, l'article 58 fut modifié de la façon suivante:
Version modifiée de 1983
Article 58
L'affichage public et la publicité commerciale se font uniquement dans la langue officielle.
Toutefois, dans les cas et suivant les conditions ou les circonstances prévus par règlement de l'Office de la langue française, l'affichage public et la publicité commerciale peuvent être faits à la fois en français et dans une autre langue ou uniquement dans une autre langue.
En 1988, la Cour suprême du Canada décidait (arrêt Ford) que le Québec avait le droit d'imposer l'usage du français, mais ne pouvait interdire l'anglais. Cette année-là, le gouvernement de Robert Bourassa a fait adopté en catastrophe la loi 178: Loi modifiant la Charte de la langue française. Cette loi, qui visait à rendre la Charte de la langue française conforme au jugement de la Cour suprême, permettait le bilinguisme dans l'affichage intérieur des commerces, mais maintenait l'unilinguisme français dans l'affichage public et dans la publicité commerciale à l'extérieur des établissements.
Version modifiée de 1989
Article 58
L'affichage public et la publicité commerciale, à l'extérieur ou destinés au public qui s'y trouve, se font uniquement en français :
1. À l'intérieur d'un centre commercial et de ses accès, sauf à l'intérieur des établissements qui y sont situés;
2. À l'intérieur de tout moyen de transport public et de ses accès;
3. À l'intérieur des établissements des entreprises visées à l'article 136;
4. À l'intérieur des établissements des entreprises employant moins de 50 mais plus de cinq personnes, lorsque ces entreprises partagent avec au moins deux autres entreprises l'usage d'une marque de commerce, d'une raison sociale ou d'une dénomination servant à les identifier auprès du public.
Le gouvernement peut toutefois prévoir par règlement les conditions et modalités suivant lesquelles l'affichage public et la publicité commerciale peuvent être faits à la fois en français et dans une autre langue, aux conditions mentionnées au deuxième alinéa de l'article 58.1, à l'intérieur des établissements des entreprises visées aux paragraphes 3 et 4 du deuxième alinéa.Le gouvernement peut, dans ce règlement, établir des catégories d'entreprises, déterminer des conditions et modalités qui varient selon chaque catégorie et renforcer les conditions mentionnées au deuxième alinéa de l'article 58.1.
Cependant, pour adopter une telle disposition, le gouvernement devait se soustraire à certaines dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés en invoquant la «clause dérogatoire» (qui devait être renouvelée après cinq ans).
Article 10 de la loi 178
Les dispositions de l'article 58 et celles du premier alinéa de l'article 68, respectivement édictées par les articles 1 et 6 de la présente loi, ont effet indépendamment des dispositions du paragraphe b de l'article 2 et de l'article 15 de la Loi constitutionnelle de 1982 (annexe B de la Loi sur le Canada, chapitre 11 du recueil des lois du Parlement du Royaume-Uni pour l'année 1982) et s'appliquent malgré les articles 3 et 10 de la Charte des droits et libertés de la personne (L.R.Q., chapitre C
)12).
En 1993, la loi 86 ou Loi modifiant la Charte de la langue française remplaçait la loi 178 en supprimant le recours à la «clause dérogatoire» de la Constitution. À cet effet, la loi permettait l'affichage bilingue «avec prédominance du français». En privilégiant le retour à une forme de bilinguisme institutionnel, la loi réduisait ainsi le rôle de l'Office québécois de la langue française (OQLF) et remettait plus de pouvoirs au ministre chargé de l'application de la Charte de la langue française. En même temps, la loi 86 éliminait la Commission de protection de la langue française et c'est l'OQLF qui s'occuperait dorénavant des dossiers de la défunte commission de protection.
Finalement, la version de 2022 est la dernière en vigueur.
Version modifiée de 2022 (en vigueur)
Article 58
L’affichage public et la publicité commerciale doivent se faire en français.
Ils peuvent également être faits à la fois en français et dans une autre langue pourvu que le français y figure de façon nettement prédominante.
Toutefois, le gouvernement peut déterminer, par règlement, les lieux, les cas, les conditions ou les circonstances où l’affichage public et la publicité commerciale doivent se faire uniquement en français ou peuvent se faire sans prédominance du français ou uniquement dans une autre langue.
1977, c. 5, a. 58; 1983, c. 56, a. 12; 1988, c. 54, a. 1; 1993, c. 40, a. 18.
En vig.: 2025-06-01
Article 58.1Malgré l’article 58, dans l’affichage public et la publicité commerciale, une marque de commerce peut être rédigée, même en partie, uniquement dans une autre langue que le français, lorsque, à la fois, elle est une marque de commerce déposée au sens de la Loi sur les marques de commerce (L.R.C. 1985, c. T-13) et qu’aucune version correspondante en français ne se trouve au registre tenu selon cette loi.
Toutefois, dans l’affichage public visible depuis l’extérieur d’un local, le français doit figurer de façon nettement prédominante, lorsqu’une telle marque y figure dans une telle autre langue.
1988, c. 54, a. 1; 1993, c. 40, a. 18; 2022, c. 14, a. 48.
Article 58.2. (Remplacé).
1988, c. 54, a. 1; 1993, c. 40, a. 18.
Article 59L’article 58 ne s’applique pas à la publicité véhiculée par des organes d’information diffusant dans une langue autre que le français, ni aux messages de type religieux, politique, idéologique ou humanitaire pourvu qu’ils ne soient pas à but lucratif.
1977, c. 5, a. 59; 1988, c. 54, a. 2; 1993, c. 40, a. 19.