Les politiques linguistiques
dans les provinces et territoires

1 Les compétences législatives en matière de langue

La Constitution canadienne ne prévoit aucune disposition concernant les compétences des gouvernements en matière de langue. Lors d'un arrêt rendu en 1988, la Cour suprême du Canada a alors affirmé: «La langue n’est pas une matière législative indépendante, elle est “accessoire” à l’exercice de la compétence relative à une catégorie de sujets attribués au Parlement ou aux assemblées législatives provinciales par la Loi constitutionnelle de 1867.» Il faut donc comprendre que le pouvoir de légiférer dans le domaine linguistique appartient aux deux paliers de gouvernement le fédéral et les provinces , en vertu des compétences législatives que leur attribue la Constitution.

2 La variété des régimes linguistiques provinciaux

Comme le Canada est une fédération, les régimes linguistiques varient beaucoup d’une province et d’un territoire à l’autre. Historiquement, seuls les provinces de Québec et du Manitoba se sont vu imposer des obligations linguistiques au moment de leur entrée dans la Confédération, notamment le bilinguisme dans les domaines de la législature et des tribunaux. Aujourd'hui, la plupart des provinces ont adopté des mesures législatives en faveur du français, surtout dans la législature, la justice, l'éducation ou l'offre de services: Québec, Ontario, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard. D'autres provinces ont adopté des politiques plus sectorielles comme au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. Seules les provinces de la Colombie-Britannique et de Terre-Neuve s'en tiennent aux prescriptions constitutionnelles concernant l'accès à l'école de la minorité de langue officielle. Le Nouveau-Brunswick demeure la seule province officiellement bilingue et, à sa demande, certaines dispositions linguistiques ont même été insérées dans la Constitution canadienne.

En éducation, toutes les provinces ont mis en œuvre des mesures législatives (lois scolaires) afin de se conformer aux prescriptions énoncées à l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, lequel article reconnaît aux parents le droit de faire instruire leurs enfants aux niveaux primaire et secondaire dans la langue de la minorité lorsque «le nombre le justifie». Selon la Cour suprême du Canada, l'article 23 implique aussi le droit pour la minorité de langue officielle de gérer ses propres écoles.

Dans le domaine judiciaire, l’article 530 du Code criminel canadien garantit à tout accusé le droit de subir un procès dans la langue de son choix. Si le Code criminel est de juridiction fédérale, ce sont les provinces et les territoires, qui ont le pouvoir et l'initiative d'intenter des poursuites pour des infractions au Code criminel canadien. Ce sont également les provinces qui décident de se conformer ou non aux prescriptions linguistiques du Code criminel. La plupart des provinces acceptent que le justiciable emploie sa langue maternelle (p. ex., le français ou une langue autochtone), mais n'accorde pas nécessairement à ce dernier le droit d'être compris dans sa langue par la cour; il faut recourir en ce cas à l'interprétariat.

Du côté des municipalités, les provinces de Québec et du Nouveau-Brunswick ont prévu des modalités pour imposer des régimes linguistiques aux communautés de langue officielle lorsqu'elles sont minoritaires. Dans les autres provinces, certaines municipalités ont un statut bilingue (comme Winnipeg) ou offrent des services dans les deux langues officielles: Ontario, Manitoba, Nouvelle-Écosse, Île-du-Prince-Édouard, Alberta, Saskatchewan et Territoires du Nord-Ouest.

3 Le statut du français et de l'anglais dans les provinces

L'anglais est reconnu dans toutes les provinces, même au Québec où cette langue jouit d'un statut au parlement, dans les tribunaux, les écoles, l'administration de certaines municipalités, etc. L'anglais est l'unique langue officielle des huit provinces suivantes: l'Alberta (de jure), la Colombie-Britannique (de facto), l'Île-du-Prince-Édouard (de facto), le Manitoba (de jure), la Nouvelle-Écosse (de facto), l'Ontario (de facto), la Saskatchewan (de jure) et Terre-Neuve (de facto). Certaines provinces ont adopté des lois au sujet du statut de l'anglais comme en Alberta, au Manitoba, en Saskatchewan et au Nouveau-Brunswick (avec le français).

Quant au français, il est est l'unique langue officielle de la province de Québec, mais il est également une langue co-officielle avec l'anglais dans la province du Nouveau-Brunswick, ainsi que dans les trois territoires fédéraux (Nunavut, Territoires du Nord-Ouest et Yukon). Toutefois, la situation juridique des langues n'est pas aussi simple que peut le supposer le statut officiel, car dans la plupart des provinces le français et l'anglais bénéficient de certaines reconnaissances juridiques. 

4 Les politiques globales

Dans les faits, le Québec, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick sont bilingues dans leur parlement, leurs tribunaux (civils et criminels), leur fonction publique et leurs services auprès de la population. Les lois provinciales font du français et de l’anglais des langues officielles au plan législatif, judiciaire et scolaire. Tout anglophone au Québec et tout francophone en Ontario et au Nouveau-Brunswick a le droit d’utiliser sa langue au parlement, de se faire comprendre par un juge dans les tribunaux, d’envoyer ses enfants dans les écoles publiques de langue minoritaire et de recevoir des services gouvernementaux dans la langue de son choix. Il y a parfois des lacunes au plan des services gouvernementaux lorsque la population minoritaire est numériquement faible, mais le principe est acquis, les tribunaux étant l pour faire respecter les droits des minorités.

Ces trois provinces n’ont probablement pas de leçon recevoir de quiconque sur la façon dont elles traitent leur minorité qui, en principe, jouit des mêmes droits que la majorité. La législation linguistique de ces provinces ferait bonne figure au Conseil de l’Europe.

5 Les politiques sectorielles

Dans toutes les autres provinces, les politiques linguistiques sont strictement sectorielles, c’est-à-dire qu’elles se limitent le plus souvent au seul secteur de l’éducation dans la langue minoritaire. C’est le cas en Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan et Terre-Neuve. En Alberta, la Cour suprême du Canada a reconnu aux francophones le droit de s'exprimer en français devant un juge, mais pas celui d'être compris, la loi ne donnant pas le droit un citoyen d'exiger que le jugement soit rendu dans la langue officielle qui est la sienne.

Comme on le constate, les droits linguistiques ne sont pas les mêmes selon les provinces. Ils sont égalitaires au Québec, en Ontario et au Nouveau-Brunswick, mais très restrictifs dans la plupart des autres provinces, sauf en Nouvelle-Écosse et à l’Île-du-Prince-Édouard où des droits supplémentaires ont été consentis aux francophones. Le Canada étant une fédération, il est difficile d’harmoniser les droits des minorités provinciales, car la législation fédérale ne reconnaît pas de minorité «canadienne».

6 Le bilinguisme juridique

Les dix provinces du Canada ont chacune leur politique linguistique. Le Québec est la seule province officiellement française, le Nouveau-Brunswick, la seule province officiellement bilingue, les huit autres demeurant unilingues anglaises. Cependant, ce statut officiel des langues masque complètement la réalité, dans la mesure où le français et l'anglais bénéficient d’une statut dans toutes les provinces, de façon fort inégale il va sans dire. Dans la plupart des provinces (sauf en C.-B. et à T.-N.), différentes formes de bilinguisme sont devenues obligatoires, notamment dans les domaines de la législation, de la justice, de l'administration publique ou de l'éducation. Le tableau qui suit présente un résumé de ces politiques provinciales de bilinguisme.

Province/territoire Statut officiel Législation Justice Administration Éducation
Alberta anglais
(de jure)

anglais*
français autorisé sur préavis

anglais
français (criminel)

anglais

anglais
français

Colombie-Britannique anglais*
(de facto)
anglais*

anglais
français (criminel)

anglais anglais
français
Île-du-Prince-Édouard anglais*
(de facto)
anglais
français
anglais
français
anglais
français (municipalités désignées)
anglais
français
Manitoba anglais
(de jure)
anglais
français
anglais
français (traduction)
anglais
français (Winnipeg)
anglais
français
Nouveau-Brunswick anglais/français
(de jure)
anglais
français
anglais
français
anglais
français
anglais
français
Nouvelle-Écosse anglais*
(de facto)
anglais
français autorisé
anglais
français (criminel)
anglais
français (ponctuel)
anglais
français
Ontario anglais*
(de facto)
anglais
français
anglais
français
anglais
français (régions désignées)
anglais
français
Québec français
(de jure)
anglais
français
anglais
français
français
anglais (municipalités)
anglais
français
Saskatchewan anglais
(de jure)
anglais
français autorisé
anglais
français (criminel)
(civil: traduction)
anglais anglais
français
Terre-Neuve anglais*
(de facto)
anglais anglais
français (criminel)
anglais anglais
français
Nunavut anglais/français
(de jure)
inuktitut/inuinnaqtun
(de facto)
anglais
français
autochtones
anglais
français (criminel)
anglais
français (Iqaluit)
anglais
français
langues autochtones
Territoires
du Nord-Ouest
anglais/français
(de jure)
anglais
français
autochtones
anglais
français (criminel)
anglais
français (Yellowknife)
anglais
français
langues autochtones
Yukon anglais/français
(de jure)
anglais
français
autochtones
anglais
français (criminel)
anglais
français (Whitehorse)
anglais
français
langues autochtones

ALBERTA:

Le français est autorisé au Parlement, mais celui-ci peut décider, par simple résolution, d'adopter et de faire imprimer ses lois uniquement en anglais. Avant d'utiliser le français lors d'une période de questions, un député doit, selon les Règlements de l'Assemblée législative, prévoir un avis de deux heures au président de l'Assemblée pour pouvoir s'exprimer dans cette langue afin de recourir aux services d'un traducteur.

Il est possible d'obtenir un procès en français en matière criminelle. Dans les tribunaux de juridiction civile, la Cour suprême du Canada a reconnu aux francophones le droit de s'exprimer en français devant un juge, mais pas celui d'être compris. De plus, la loi ne donne pas le droit à un citoyen d'exiger que le jugement soit rendu dans la langue officielle qui est la sienne. Cependant, le personnel judiciaire doit être en mesure de transcrire les déclarations dans la langue choisie par le justiciable.

En éducation, la Loi scolaire de l'Alberta (2000) prévoit à l'article 9 que «tout élève a le droit de recevoir une instruction scolaire en anglais», mais un parent francophone peut demander que son enfant soit inscrit dans une école de langue française en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Les francophones le droit de gérer leurs écoles.

COLOMBIE-BRITANNIQUE:

En matière de justice, la province applique les dispositions relatives au Code criminel canadien, ce qui permet d'utiliser le français dans les tribunaux. Dans les tribunaux de juridiction civile, il est possible d'exiger la présence d'un interprète. En éducation, conformément à l'article 23 de la Charte des droits et libertés, tous les districts scolaires sont tenus d'offrir un enseignement en français là où se trouvent 10 enfants francophones ou plus. 

ÎLE-DU-PRINCE-ÉDOUARD:

Depuis l'entrée en vigueur de Loi sur les services en français, les lois de la province sont déposées, modifiées, adoptées et publiées à la fois en anglais et en français. Certaines dispositions de la loi prévoient l’utilisation du français dans l’administration de la justice; les décisions écrites des tribunaux doivent être simultanément rendues publiques en anglais et en français lorsque la procédure judiciaire s'est déroulée, en totalité ou en partie, dans les deux langues ou que les plaidoiries ou d’autres documents ont été rédigés dans les deux langues.

Dans l'Administration, la Loi sur les services en français précise l'étendue des services en langue française fournis par les institutions du gouvernement provincial. En éducation, la Loi scolaire reprend les dispositions de l'article 23 de la Charte des droits et libertés, mais le ministre de l'Éducation peut utiliser son pouvoir discrétionnaire en statuant qu'il faut un minimum de 25 élèves (étalés sur trois années successives) pour ouvrir une classe française.

MANITOBA:

Depuis 1979, la Législature provinciale est redevenue juridiquement bilingue; un député francophone peut donc s'exprimer en français, mais il lui faut donner un avis au Président de l'Assemblée avant de pouvoir s'y exprimer en français.

Dans les tribunaux, le gouvernement a prévu un service de traduction simultanée partout parce qu'il n'y a pas assez de juges pouvant s'exprimer en français, même si le système judiciaire est demeuré fortement unilingue anglais.

Depuis 1971, le gouvernement manitobain a délégué une partie de ses pouvoirs pour obliger la Ville de Winnipeg à offrir des services bilingues à la population. La Charte de la Ville de Winnipeg de 2002 précise les services en français que chaque service municipal doit offrir. Des services en français sont offerts dans deux autres régions désignées, là où la concentration de francophones est la plus forte.

Le Loi sur les écoles publiques (version du 9 juillet 2004) précise que «la commission scolaire de langue française dispense au moins 75 % de l'enseignement en salle de classe en français, dans chaque classe» (art. 21.31). De plus, afin que ses élèves acquièrent de bonnes connaissances en anglais et les conservent, la commission scolaire de langue française doit imposer l'anglais comme matière obligatoire, dans toutes les classes, de la quatrième à la douzième année dans la division scolaire de langue française; toutefois, le temps consacré à l'anglais dans chaque classe ne peut dépasser 25 % de l'enseignement en salle de classe. L'article 21.32 prévoit que l'administration et le fonctionnement de la division scolaire de langue française se déroulent en français.

NOUVEAU-BRUNSWICK:

Le bilinguisme est de rigueur pour tous les organismes relevant de la juridiction provinciale en vertu de la Loi sur les langues officielles (2002) de cette province et de la Constitution canadienne de 1982. Cette province est rigoureusement bilingue dans les domaines de la législation, de la justice, de l'éducation et des services gouvernementaux.

NOUVELLE-ÉCOSSE:

Dans les tribunaux, la partie XIV.1 du Code criminel canadien est en vigueur en Nouvelle-Écosse depuis 1988, de telle sorte qu'un procès en matière criminelle peut s'y tenir en français.

La Loi sur l'éducation (modifiée en 2004) reconnaît le droit à l'éducation, sans frais, soit en anglais soit en français. Elle institue aussi la mise sur pied du Conseil scolaire acadien provincial (art. 11) et concrétisent pour les parents francophones et acadiens de la province le droit constitutionnel à l'éducation en français en tant que langue maternelle pour leurs enfants, ainsi que le droit de gestion du système éducatif.

En vertu de l'article 10 de la Loi sur les services en français, le gouvernement peut prciser par règlement quelles institutions publiques auront l'obligation de fournir des services en langue française.

ONTARIO:

En vertu des lois ontariennes, bien que l'anglais soit l'unique langue officielle, le bilinguisme est de obligatoire pour les domaines de la législation, des services judiciaires et de l'éducation.

En vertu de la Loi sur les services en français (ou loi 8), les francophones ont le droit à des services administratifs dans leur langue là où le nombre le justifie dans les 25 «zones désignées». L'Office des affaires francophones a été créé et des coordonnateurs linguistiques ont été nommés dans tous les ministères. Le tout relève d'un membre du Conseil des ministres.

Dans cette province, le principe en éducation du «là où le nombre le justifie» ne s'applique pas, du moins au plan juridique. Tout élève a droit à l'enseignement dans la langue maternelle de l'un de ses parents.

QUÉBEC:

La Constitution canadienne de 1867 a imposé un bilinguisme législatif (Assemblée nationale) et judiciaire (tribunaux) au Québec. Ainsi, bien qu'officiellement français, le Québec est bilingue à l'Assemblée nationale et pour tous les tribunaux, ainsi que dans l'éducation et les services gouvernementaux. Dans l'ensemble, les droits linguistiques accordés à la minorité de langue officielle sont à peu près équivalents en Ontario, au Québec et au Nouveau-Brunswick.

SASKATCHEWAN:

Dans cette province, les lois et règlements de l'Assemblée législative peuvent tous être adoptés, imprimés et publiés en anglais seulement ou en français et en anglais. C'est par règlement ou par résolution que l'on peut désigner, parmi les lois et règlements déjà adoptés et publiés en anglais seulement, celles qui doivent l'être en français et en anglais.

Pour les tribunaux, loi précise que les règles de procédure des tribunaux sont à imprimer et à publier en français et en anglais; le droit d'utiliser le français dans les tribunaux est limité à six cours et la garantie de comparaître devant un juge bilingue est refusée (mais possible), exception faite des cours criminelles qui sont de juridiction fédérale et où le bilinguisme est reconnu. Toutefois, le personnel judiciaire est tenu de transcrire les déclarations dans la langue choisie par le justiciable. En matière civile, le bilinguisme est permis, mais non obligatoire dans six principaux tribunaux.

En éducation, l'article 180 de la Loi sur l'éducation énonce que «l'anglais est la langue d'enseignement dans les écoles», sous réserve des règlements qui prévoient une autre langue. Dans les écoles fransaskoises, le français est donc la première langue d'enseignement. Le gouvernement de la province a créé le Bureau de la minorité de langue officielle, qui est responsable de l'éducation française en Saskatchewan. Son rôle principal consiste en l'élaboration, la mise à l'essai, l'implantation et l'actualisation des programmes d'études pour le programme de français de base, pour les écoles d'immersion et pour les écoles fransaskoises.

TERRE-NEUVE:

La législation existante et les pratiques en matière de droits linguistiques découlent des dispositions de l'article 23 de la Charte des droits et libertés. Les droits sont donc limités à l'éducation. La Loi scolaire de 2004 de la province ne prévoit aucune disposition obligatoire concernant l'éducation en français: L'accès à l'école française est laissé à la discrétion des conseils scolaires, lesquels peuvent établir, maintenir et faire fonctionner une école de français langue maternelle dans laquelle seront dispensés des programmes scolaires. La minorité francophone dispose d'un conseil scolaire pour gérer ses écoles.

NUNAVUT (territoire fédéral):

En tant que territoire fédéral soumis au bilinguisme en vertu de la Loi sur les langues officielles (1988), l'anglais et le français sont les langues officielles (de jure) du Nunavut, mais l’inuinnagtun ou l’inuktitut le sont également dans les faits (de facto). Il est probable que, dans un proche avenir, seuls l'anglais, le français et l'inuktitut deviennent des langues officielles.

L'Assemblée législative autorise les députés à employer l’anglais, le français, l’inuinnagtun ou l’inuktitut dans ses débats et travaux. Les citoyens ont le droit d'utiliser l'une de ces quatre langue dans les tribunaux en matière criminelle et civile, mais pas nécessairement celui d'être compris par le juge, les services de traduction devant suppléer.

En éducation, les francophones et les autochtones ont le droit  de fréquenter les écoles dans la langue de leur choix: anglais, français, inuktitut et inuinnagtun. Les services gouvernementaux en d'autres langues que l'anglais demeurent embryonnaires.

TERRITOIRES DU NORD-OUEST:

En vertu de la Loi sur les langues officielles des Territoires du Nord-Ouest (1988), le français et l'anglais sont les langues officielles des Territoires. Ces langues sont permises lors des débats et travaux de l'Assemblée législative qui reconnaît aussi certaines langues autochtones: le chipewyam, le cri, le dogrib, le gwich'in, l'inuktitut et le slavey. Dans les faits, l'anglais est pratiquement la seule langue orale utilisée dans les débats parlementaires.

En ce qui concerne l'usage des langues dans les tribunaux, la Loi sur les langues officielles précise que chacun a le droit d'employer le français ou l'anglais, ou encore une langue autochtone. Cependant, ce droit est limité dans les faits aux procès en matière criminelle et il ne comprend pas celui d'être compris directement par le juge

En éducation, les citoyens des Territoires ont le droit de fréquenter une école dans la langue de leur choix, l'anglais, le français ou encore une langue autochtone (au primaire): le flanc-de-chien, le dogrib, l'esclave (slavey) du Sud, l'esclave (slavey) du Nord et l'inuktitut.

YUKON:

Le territoire du Yukon a l'obligation, du moins en principe, d'utiliser les deux langues officielles du Canada, l'anglais et le français. L'article 3 de la Loi sur les langues précise que chacun a le droit d'employer le français ou l'anglais ou une langue autochtone du Yukon dans les débats et travaux de l'Assemblée législative. Quant aux députés autochtones qui s'expriment dans une langue autochtone, il s'agit d'un fait relativement rare, car la majorité d'entre eux utilisent l'anglais lors de leurs interventions.

Dans les tribunaux, le droit à un procès en français est limité aux causes de nature criminelle et il ne comprend pas celui d'être compris. Les justiciables comparaissant en justice ne peuvent se prévaloir des services d'un interprète, à moins qu'il soit évident que le procès ne pourrait se dérouler convenablement sans cette assistance. Dans les faits, le bilinguisme dans le domaine judiciaire est limité, puisqu'il risque de ne garantir que la présence d'un interprète. Il en est ainsi des autochtones qui ne comprennent pas l'anglais.

En éducation, tous les élèves ont droit à un enseignement en anglais, mais la Loi scolaire de 1991 permet aux parents francophones, conformément à l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, de faire instruire leurs enfants en français. La loi prévoit aussi un enseignement dans une langue autochtone, notamment en tutchone du Sud, en tutchone du Nord, en kaska, en qwich'in et en tlingit. 

Au Canada, les politiques linguistiques visent conserver la langue des communautés minoritaires de langue officielle. Il n’existe pas de politiques linguistiques l’égard des immigrants, pas plus qu’à l’égard des autochtones. Le Canada anglais n’offre pas de programmes spéciaux pour l’apprentissage de la langue parce que les immigrants qui ne parlent pas l’anglais s’intègrent par le marché du travail et qu’ils apprennent l’anglais «sur le tas». Au Québec, c’est différent: les classes d’accueil sont nombreuses afin de mieux intégrer les immigrants allophones à la société francophone, mais ceux-ci apprennent souvent aussi l’anglais parce que c’est la langue de l’Amérique du Nord.

La grande différence entre les politiques canadiennes et américaines, c’est que les premières tendent sauvegarder le français au Canada anglais et l’anglais au Québec, alors qu’aux États-Unis les politiques visent assimiler tous les allophones. L’histoire est là pour démontrer que les communautés francophones du Canada ont pu sauvegarder leur langue, surtout au Québec, au Nouveau-Brunswick et en Ontario, alors qu’aux États-Unis, notamment en Nouvelle-Angleterre et en Louisiane, les francophones ont presque tous disparu.

Cela étant dit, le merveilleux monde du bilinguisme institutionnel ne brille pas toujours au firmament canadien des langues. Le fait d’accorder des droits linguistiques égaux à des groupes inégaux ne produit pas nécessairement des résultats égalitaires. Ainsi, les services réels auprès de la population minoritaire d’une province sont loin d'être toujours satisfaisants et les faits démontrent qu'on ne peut empêcher l'assimilation d'une bonne partie des francophones dans la plupart des provinces, sauf au Québec et au Nouveau-Brunswick. Ainsi, on ne peut assurer, dans les faits, un enseignement en français qu'à 50 % des francophones au Canada anglais, contre 96,7 % des enfants des anglophones du Québec, qui fréquentent une école de leur groupe linguistique.

Dans beaucoup de journaux américains, le cas du Canada-Québec (mais aussi la Belgique) est souvent cité comme un bel exemple de balkanisation, voire de libanisation, lorsque le bilinguisme s'introduit dans un pays. Les Américains ne veulent pas que le modèle du bilinguisme canadien se transpose dans leur propre pays. Si les Canadiens tentent, de façon inégale il est vrai, de protéger leurs minorités de langue officielle (l’anglais au Québec et le français ailleurs), les Américains ont élaboré des mesures transitoires qui consistent faire patienter les minorités, en attendant de les assimiler la société anglo-américaine. Le Canada veut protéger ses minorités historiques, les États-Unis les ignorent, mais dans toute l’Amérique du Nord les immigrants doivent s’intégrer à la majorité. Dans les faits, les immigrants du Canada adoptent les us et coutumes de la société d’accueil aussi rapidement qu’aux États-Unis. À la deuxième génération, ils sont intégrés; à la troisième, ils sont assimilés. Quant aux autochtones, ils sont assimilés aussi bien au Canada qu'aux États-Unis, sauf dans le Grand Nord canadien où l'inuktitut résiste assez bien. 

Alberta Colombie-
britannique
Î.-P.-É. Manitoba Nouveau-
Brunswick
Nouvelle-
Écosse
Ontario Québec Saskatchewan Terre-Neuve-
et-Labrador
Nunavut T.N.-O. Yukon

 Dernière mise à jour: 08 février, 2024

 
 

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