République d'Autriche
Autriche

2) Politique linguistique
à l'égard de l'allemand

1 La traditionnelle non-intervention

La politique linguistique de la République fédérale d’Autriche comprend deux volets, l’une concerne la langue officielle, l’allemand, l’autre, les langues des minorités nationales. Dans cette brève partie, nous nous contenterons du premier volet de cette politique. Il s’agit bien ici de la politique fédérale, non de celles des Länder autrichiens qui, de toute façon, sont très germanophones et germanophiles.

1.1 La Constitution

En Autriche, il n’y a jusqu'à récemment pas eu de politique linguistique à l’égard de la langue allemande, du moins sur le territoire de la République; il n’existe que fort peu de textes juridiques concernant cette langue. L’article 8 de la Constitution de 2004 constitue l’un des rares documents à traiter spécifiquement de la langue allemande:

Article 8

1) La langue allemande est la langue officielle de la République, sans préjudice des droits reconnus aux minorités linguistiques par la législation fédérale.

2) La République (fédération, Länder et municipalités) est attachée à sa diversité linguistique et culturelle croissante, qui s'exprime dans les groupes ethniques autochtones. La langue et la culture, l'existence et la préservation de ces groupes ethniques doivent être respectées, sauvegardées et encouragées.

3) La langue des signes autrichienne est reconnue comme une langue indépendante. Les détails seront réglés par la législation.

C’est en vertu de ce seul article constitutionnel que l’allemand dispose d’une assise juridique en Autriche. En fait, la langue allemande n’avait nul besoin de cette disposition juridique puisque c’est la langue de la quasi-totalité de la population. Le 31 mai 2000, le gouvernement fédéral a proposé au Parlement une modification concernant l’article 8 de la Constitution. Cet article a été modifié par l’ajout d’un nouveau paragraphe 2 sur les minorités, mais cette modification ne change en rien les dispositions constitutionnelles au sujet de la langue allemande.

1.2 L'omniprésence de l'allemand

En Autriche, tout se passe en allemand ou dans les différentes variétés austro-bavaroises dans les communications informelles. La langue du Parlement est l’allemand standard, ce qui implique les débats parlementaires, la rédaction des lois, les documents dans les tribunaux, l’administration fédérale et les administrations des Länder, l’affichage, la signalisation routière, les médias, etc. Un étranger ne perçoit pas d’autre langue que la langue allemande, sauf dans les lieux touristiques, où l’anglais et parfois le français ou l’italien sont présents. Mais il ne s’agit là que de rares exceptions.

Malgré l’omniprésence de la langue allemande dans le pays, le gouvernement autrichien et les Länder accordent une place relativement importante à l’enseignement des langues étrangères dans les écoles primaires et secondaires. En effet, quelque 96% des élèves autrichiens (âgés de 10 à 19 ans) apprennent au moins une langue étrangère. Dans les écoles primaires, à partir de la 3e et 4e année de la scolarité, tous les élèves apprennent une langue étrangère. Dans l'année scolaire de 2001-2002, plus de 20 000 élèves des 1re et 2e années de scolarité ont également reçu un enseignement en anglais.

Dans les écoles secondaires (au premier cycle), les élèves d'un cours préparatoire à la vie professionnelle reçoivent en moyenne 800 heures d'anglais. Dans le cadre de l'autonomie scolaire, le gouvernement envisage d'élargir l'offre de disciplines facultatives par une deuxième langue étrangère obligatoire. Les écoles secondaires d'enseignement général offrent en moyenne un choix entre cinq langues étrangères: l’anglais, le français, l’italien, l’espagnol et le latin. L'anglais est enseigné dans toutes les écoles, mais presque toutes offrent également le français et le latin. La langue italienne est enseignée dans 81 % des écoles et l’espagnol dans 60 % d’entre elles. Le latin est enseigné comme formation éducative importante et devrait garder sa place, au cours des prochaines années, dans les programmes d'enseignement. En Autriche, 75 % des bacheliers ont appris au moins deux langues étrangères.

2 L'interventionnisme en immigration

Depuis quelques années, l’Autriche fut avec l’Allemagne et la Suède l’un des trois pays européens de destination les plus touchés par la grande vague de migration de la fin de l’automne 2015 et de l’hiver 2016; le pays a accueilli, avec 95 000 demandeurs d’asile, plus de personnes par habitant que l’Allemagne. L'Autriche compte un grand nombre d'immigrants, ce qui a eu pour effet de modifier la répartition ethnique du pays. Au début de 2019, environ 1,4 million d'étrangers vivaient en Autriche, ce qui représentait 16% de la population totale, dont la moitié résidait à Vienne, les autres sont surtout installés en Basse-Autriche et en Haute-Autriche.

2.1 La répartition des immigrants

D'après les statistiques officielles de 2021, plus de 20% de la population autrichienne serait issue de l'immigration. Selon le journal Die Presse, les personnes concernées proviennent de pays membres de l'Union européenne (UE) dans 39% des cas et elles sont principalement concentrées à Vienne, la capitale autrichienne. En 2022, environ 78 400 ressortissants ukrainiens ont immigré en Autriche. Dans le contexte de la guerre dans leur pays, les Ukrainiens constituaient ainsi le groupe d'immigrants le plus important, suivis des Allemands et des Roumains avec environ 21 700 chacun. Au total , il y avait environ 262 000 immigrants.

- Dans les Länder

L'évolution de la répartition des résidents étrangers entre 2005 et 2020 dans les différents Länder autrichiens se présentait comme suit :

 

Étrangers en 2005

% étrangers

Étrangers en 2020

% étrangers

Autriche

814 065

9,8

1 487 020

16,7

Burgenland

12 665

4,5

26 958

9,2

Carinthie

34 826

6,2

60 994

10,9

Basse-Autriche

101 948

6,4

174 293

10,3

Haute-Autriche

104 528

7,5

197 158

13,2

Salzbourg

65 015

12,3

98 959

17,7

Styrie

68 286

5,7

142 978

11,5

Tyrol

71 211

10,2

123 978

16,4

Vorarlberg

46 402

12,8

72 280

18,2

Vienne

309 184

18,7

589 422

30,8

On constate que ce sont les Länder de l'Ouest qui reçoivent le plus d'immigrants: Salzbourg (17,7%), Tyrol (16,4%) et Voralberg (18,2%). Au 1er janvier 2023, le gouvernement autrichien estimait que la population d'origine étrangère représentait 21,7% de la population totale.

- Dans la ville de Vienne

On constate également que la population étrangère se concentre principalement à Vienne avec 42,1% étrangers dans la capitale, où les nouveaux arrivants représentent de 32% à 54% de la population dans les 23 arrondissements. Mais la répartition des ressortissants d'origine étrangère à Vienne est inégale voir la carte ci-contre) : elle était supérieure à 50% en 2022 dans les arrondissements suivants: 5 - Margarethen (50,1%), 10 - Favoriten (51,5%), 15 - Rudolfsheim-Fünfhaus (54,1%), 20 - Brigittenau (52,4%).

Plusieurs arrondissements comptent plus de 40% d'immigrants: 2 - Leopoldstadt (46%), 3 - Landstrasse (43,8%), 4 - Wieden )43,4%), 6 - Mariahilf (41,5%), 9 - Alsergrund (41,7%), 11 - Simmering (44,3%), 12 - Meidling (48,1%), 16 - Ottakring (48,1%), 17 - Hernals (44,2%). Les arrondissements dont les immigrants se situent entre 35% et 39% sont les suivants: 1 - Innere Stadt, 7 - Neubaau, 8 - Josephstadt, 14 - Penzing, 18 - Währing, 19 - Döblin, 21 - Floridsdorf. Les arrondissements rassemblant le moins d'immigrants sont davantage en périphérie: 13 - Hietzing, 22 - Donaustadt, 23 - Liesing. 

No

Arrondissement

Population (2022)

Pourcentage

 

No

Arrondissement

Population
(2022)

Pourcentage

1 Innere Stadt (centre-ville) 16 623 37,3 %   13 Hietzing 55 574 30,2 %
2 Leopoldstadt 108 306 46,0 %   14 Penzing 96 827 36,7 %
3 Landstrasse 96 776 43,8 %   15 Rudolfsheim-Fünfhaus 76 110 54,1 %
4 Wieden 33 633 43,4 %   16 Ottakring 102 454 48,1 %
5 Margarethen 55 016 50,1 %   17 Hernals 56 037 44,2 %
6 Mariahilf 31 433 41,5 %   18 Währing 51 573 36,5 %
7 Neubau 31597 39,2 %   19 Döbling 75 545 37,0 %
8 Josephstadt 24 765 38,8 %   20 Brigittenau 85 713 52,4 %
9 Alsergrund 42 229 41,7 %   21 Floridsdorf 183 925 38,0 %
10 Favoriten 218 401 51,5 %   22 Donaustadt 212 691 34,6 %
11 Simmering 109 024 44,3 %   23 Liesing 117 917 32,5 %
12 Meidling 100 273 48,1 %   T

Vienne

1 982 442 42,1 %

En 2023, plus de 70% des étrangers venaient de pays différents de l'Union européenne, mais pas uniquement  (par ordre décroissant): Allemagne, Roumanie, Serbie, Turquie, Croatie, Bosnie-Herzégovine, Syrie, Ukraine, Pologne, Slovaquie, Bulgarie, Italie, etc. Si la majorité germanophone autrichienne est catholique, les minorités immigrantes sont orthodoxes ou musulmanes. 

Vienne vit une situation extrême : sur une population de 1,9 million d’habitants, le quart des Viennois provient de l'immigration. Dans les écoles, plus de 60% des élèves n’ont pas l’allemand comme langue maternelle et généralement ils le parlent mal. Dans des centaines de classes viennoises, il n’y a plus du tout d’élèves dont l’allemand est la langue maternelle. De pareils résultats font de l’Autriche un champion européen en la matière. Cela signifie aussi que les gouvernements doivent intervenir pour améliorer la situation des immigrants afin de faciliter leur intégration. Sans connaissance de la langue, il n'y a guère d'intégration possible, car c'est la marginalisation sociale qui risque de s'imposer, notamment si la religion s'en mêle. 

2.2 La politique d'intégration

Si, pendant longtemps, l'Autriche n'entreprenait aucune action ni aucune politique d'intégration à l'égard de ses immigrants, c'est qu'elle ne se percevait pas comme un pays d'immigration. Or, l'afflux considérable d'immigrants a transformé le pays, tandis que les Autrichiens ne faisaient aucun effort pour intégrer ces nouveaux arrivants. Toutefois, le gouvernement fédéral a fini par adopter une politique d'intégration comprenant un volet linguistique, car à moins d'arriver d'Allemagne les immigrants ignorent la langue allemande. De plus, il ne suffit pas de suivre des cours d'allemand avec succès, encore faut-il que les immigrants aient aussi la possibilité de pratiquer ce qui a été appris, sinon ils se trouvent dans un cercle vicieux : étant donné qu'ils ne savent pas assez bien l’allemand, ils ne trouvent pas de travail et parce qu'ils n’ont pas de travail, ils ne se sentent pas forcés ou du moins assez motivés pour l’apprendre. De plus, les immigrants ont tendance à vivre en famille ou dans un environnement allophone, ce qui ne les aide pas à améliorer leur allemand.

Depuis juin 2017, la Loi sur l'intégration (2017-2022) fixe le cadre central pour une intégration réussie des immigrants qui s'installent durablement en Autriche. Avec les modifications de la Loi sur l'intégration en juin 2019, les obligations d'intégration ont été adaptées sur la Loi fondamentale de l'aide sociale afin de coordonner le système national. Cette nouvelle législation devrait encourager les immigrants à apprendre l'allemand plus rapidement et leur permettre ainsi de participer à la société autrichienne. En fin de compte, pour le gouvernement, l'intégration est réalisée lorsqu'un individu maîtrise suffisamment l'allemand pour participer à la vie professionnelle, pour prendre par à une formation continue et interagir avec les pouvoirs publics, et s'il est capable de gagner sa vie et de respecter les lois et les valeurs de l'Autriche.

Par conséquent, la Loi sur l'intégration prévoit des modalités pour assurer l'apprentissage de la langue allemande par des cours et des examens d'allemand :

Article 4

Cours d’allemand

1)
Le ministre fédéral, qui est compétent pour les questions d’intégration, doit organiser des cours d’allemand pour les personnes relevant de l'art. 3, n° 1, 2 et 4, à partir de 15 ans, qui si nécessaire impliquent une alphabétisation en caractères latins et l’obtention d’un niveau de langue d'au moins B-1 selon le Cadre européen commun de référence pour les langues.

2) Dans les cours d’allemand selon le paragraphe 1, les valeurs du pays et les connaissances d’orientation sont obligatoires. La mise en œuvre de ces mesures est assurée par le Fonds autrichien d’intégration, qui peut faire appel à des prestataires de cours.

3) Les modalités des cours, prévues au paragraphe 1 pour les personnes ayant droit à l’asile et à la protection subsidiaire, qui sont à la disposition de l’agence pour l’emploi au sens de l’article 7, par. 2, de la loi de 1977 sur l’assurance chômage, doivent être considérées comme des mesures d’intégration pour le marché du travail en vertu de l’article 12. L’agence pour l’emploi au sens de l’article 7, par. 2, de la Loi sur l'assurance chômage est également accessible à ceux qui ont peu ou pas de connaissances en allemand.

On peut alors parler d’une politique d’intervention en matière de langue. Comme on le constate, les cours d'allemand prévus par la loi doivent répondre à des critères précis et uniformes dans toute l'Autriche. Les cours doivent faire en sorte que les immigrants se rendent au niveau B-1 selon le Cadre européen commun de référence pour les langues, ce qui correspond au «Niveau seuil, celui d'être capable de comprendre les points essentiels quand un langage clair et standard est utilisé et qu’il s’agit de sujets familiers comme le travail, les loisirs, de s’exprimer sur des sujets familiers et dans des domaines d’intérêt).

Les ressortissants d'un pays tiers qui immigrent en Autriche ou qui souhaitent rester en Autriche doivent donc prouver leur connaissance de la langue allemande. Le facteur décisif est la classification des différents niveaux de langue selon le Cadre européen commun de référence pour les langues :

• Le niveau A correspond à un usage élémentaire de la langue.
• Le niveau B correspond à un usage indépendant de la langue.
• Le niveau C correspond à un usage compétent de la langue.

Chaque niveau est divisé en deux étapes. Il y a donc six niveaux au total : A-1, A-2, B-1, B-2, C-1 et C-2. La connaissance de l'allemand jusqu'au niveau B-2 est pertinente pour l'immigration et le séjour.

En Autriche, la loi prévoit deux modules qui s’appuient l’un sur l’autre:

1. Le module 1 sert à acquérir la connaissance de la langue allemande pour un usage approfondi de la langue élémentaire au niveau linguistique A-2, conformément au Cadre européen commun de référence pour les langues, et à transmettre les valeurs fondamentales de l’ordre juridique et social ;

2. Le module 2 sert à l’acquisition de la connaissance de la langue allemande pour un usage indépendant de la langue au niveau linguistique B-1, conformément au Cadre européen commun de référence pour les langues et à l’enseignement approfondi des valeurs fondamentales de l’ordre juridique et social.

L’examen du module 1 comprend le contenu de la langue et des valeurs du pays. L’examen vise à déterminer si le ressortissant d'un pays tiers possède des connaissances élémentaires approfondies de la langue allemande pour la communication, ainsi que pour la lecture et l’écriture de textes courants au niveau linguistique A-2, conformément au Cadre européen commun de référence pour les langues et la connaissance des valeurs fondamentales de l’ordre juridique et social de la république d’Autriche.

L’examen du module 2 comprend le contenu de la langue et des valeurs du pays. L’examen a pour objet de déterminer si le ressortissant d'un pays tiers possède une connaissance approfondie de la langue allemande pour un usage autonome de la langue au niveau linguistique B-1, conformément au Cadre européen commun de référence pour les langues, et s’il a une connaissance approfondie des valeurs fondamentales de l’ordre juridique et social de la république d’Autriche.

La Loi sur l'intégration prévoit aussi des pénalités:

 Article 23

Dispositions pénales

1)
Quiconque est tenu de se conformer au module 1 de l’accord d’intégration et ne fournit pas la preuve, deux ans après la délivrance du permis de séjour, conformément à la loi sur l’établissement et le séjour ou, dans le cas où une prolongation a été accordée, conformément à l’article 9.2 ou 2a, après l’expiration de ce délai, pour des raisons qui lui sont exclusivement imputables, commet une infraction administrative et est passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 500 euros, en cas de non-récupérabilité, avec une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à deux semaines.

Mais ce n’est pas tout. Les immigrants qui échouent aux examens ont le droit de les reprendre. Ceux qui échoueraient à un examen à plusieurs reprises sont tenus de le reprendre à leurs propres frais. Les étrangers qui refuseraient de suivre le cours se verraient refuser la résidence permanente.

Parallèlement à la Loi sur l'intégration, le Parlement fédéral a adopté en 2017 la Loi anti-couvre visage ("Anti-Gesichtsverhüllungsgesetz"), qui interdit le port du voile intégral dans les lieux publics, ainsi que l'interdiction de la distribution d'écrits par des groupes problématiques. Selon l'article 1, les objectifs de la loi fédérale sont de promouvoir l’intégration en renforçant la participation à la société et en assurant la coexistence pacifique en Autriche. L'article 4 décrit cette interdiction dans les lieux publics:

Article 2

Interdiction des couvre-visages

1) Quiconque couvre ou dissimule ses traits du visage avec des vêtements ou d’autres objets dans des lieux publics ou dans des bâtiments publics, de telle sorte qu’ils ne sont plus reconnaissables, commet une infraction administrative et est passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 150 euros. L’infraction administrative peut être punie par une ordonnance pénale, conformément à l'art. 50 de la Loi pénale administrative, d'un montant maximal de 150 euros. Les lieux publics ou bâtiments publics sont des lieux dans lesquels un groupe de personnes n’est pas soumis à des restrictions a priori, y compris les transports publics et privés non stationnaires par autobus, ferroviaires, aériens et maritimes.

2) Il n’y a pas violation de l’interdiction du port du voile en vertu du paragraphe 1 si le fait de couvrir ou de dissimuler les traits du visage est prévu par la législation fédérale ou nationale, s’il a lieu dans le cadre d’événements artistiques, culturels ou traditionnels ou dans le cadre de la pratique d’un sport ou pour des raisons de santé ou d'ordre professionnel.

Bien sûr, cette loi controversée n'a rien de linguistique, mais elle croit pouvoir intégrer plus aisément les personnes, c'est-à-dire les femmes musulmanes, qui portent un couvre-visage.

Les lieux et bâtiments publics où le couvre-visage est interdit comprennent les bus et les trains, les avions et les navires. Il paraît essentiel que toute personne ait accès à ces lieux et bâtiments en étant reconnaissable et identifiable, et qu'elle soit avertie de ce genre de restriction. Les violations de l’interdiction ("Verboten") peuvent être sanctionnées d’une amende pouvant aller jusqu’à 150 € (env. 160 $US).

En réalité, le seul couvre-visage indésirable de facto est, sans le mentionner de manière résolument discriminatoire, le port du voile facial des femmes musulmanes: le tchador, le hidjab voilé et la burka.

Chaque cas de violation est évalué individuellement et les policiers ont un pouvoir discrétionnaire, et un simple avertissement est également possible. Dans un premier temps, le policier doit s'adresser à la personne et lui expliquer l'interdiction de se couvrir le visage. Sur demande, ce dernier doit être retiré sur place. Si la personne — la femme — refuse de lever son couvre-visage malgré un avertissement, ou si elle tente de récidiver, ou si son identité ne peut être établie, elle peut être conduite au commissariat par le policier et elle est passible d'une amende.

Sont exclus de l’interdiction les vêtements qui ont lieu dans le cadre de manifestations artistiques, culturelles ou traditionnelles ou dans le cadre de la pratique d’un sport ou pour raisons de santé ou d'ordre professionnel. D’autres exceptions peuvent être prévues par la loi fédérale ou celle d'un Land en particulier.

2.3 Le droit de séjour

Le droit de séjour en Autriche est sévèrement réglementé par la Loi sur l'établissement et la résidence (2005-2022). Celle-ci est une loi fédérale régissant la délivrance, le refus et la révocation des permis de séjour des étrangers qui souhaitent rester en Autriche pendant plus de six mois. La loi réglemente également la documentation du droit de séjour des citoyens de l’Espace économique européen en vertu du droit de l’Union européenne.

La carte Rouge-Blanc-Rouge (en allemand: Karte Rot-Weiß-Rot), les couleurs de l'Autriche, constitue un permis de séjour et de travail délivré pour une validité de deux ans. La personne titulaire d'une carte Rouge-Blanc-Rouge a droit à un règlement à durée déterminée en Autriche, ainsi qu'à un emploi auprès d'un employeur particulier, c'est-à-dire l'employeur nommé dans la demande.

En termes simples, la carte Rouge-Blanc-Rouge (ou RWR) est un permis unique pour les ressortissants d'un pays tiers qualifiés et leurs familles pour travailler et s'installer en Autriche de manière permanente. En principe, une carte Rouge-Blanc-Rouge ne peut être délivrée que si un emploi adéquat peut être prouvé. Cet emploi doit correspondre aux qualifications du candidat qui doit être rémunéré de manière adéquate et répondre aux critères spéciaux d’admission de ladite carte rédigée en allemand.

L'article 21a de la Loi sur l'établissement et la résidence oblige tout ressortissant d'un pays tiers à prouver sa connaissance de la langue allemande:

Article 21a

Preuve de compétences en allemand

1) Lors du dépôt d'une première demande de titre de séjour, conformément à l'article 8, par. 1, n° 2, 4, 5, 6, 8, 9 ou 10, le ressortissant d'un pays tiers doit prouver sa connaissance de la langue allemande. Cette preuve doit être fournie sous la forme d'un diplôme de langue généralement reconnu délivré par une institution désignée par règlement en vertu du paragraphe 6 ou 7, dans lequel cette institution confirme par écrit que le ressortissant du pays tiers a une connaissance de la langue allemande au moins pour l'usage de la langue au niveau le plus simple. Le diplôme de langue ne doit pas dater de plus d'un an au moment de la soumission.

En 2019, le système de points de la carte Rouge-Blanc-Rouge a été modifié pour donner plus de poids à l’expérience professionnelle et moins à l’âge. En plus de la maîtrise de l'allemand, celle de l’anglais a également été introduite parmi les critères d’admissibilité, sans en faire une condition absolue comme pour l'allemand. La catégorie des travailleurs hautement qualifiés a été affinée en ajoutant les travailleurs très hautement qualifiés (ingénieurs diplômés dans un large éventail de disciplines, commissaires aux comptes, médecins) pour lesquels une voie rapide a été créée. Onze professions ont été ajoutées à la liste des professions en pénurie en janvier 2020, portant le total à 56. D’autres, principalement dans le tourisme, ont été ajoutées à des listes locales de professions en pénurie dans tous les Länder, à l’exception de Vienne et du Burgenland. Le justificatif de logement n’est plus demandé pour la carte R-B-R depuis la fin de 2020.

2.4 La citoyenneté autrichienne

Quiconque acquiert la nationalité autrichienne par voie d'attribution doit généralement renoncer à sa nationalité antérieure. Si l'ancienne loi du pays ne prévoit pas la perte automatique de la nationalité lors de l'acceptation de la nationalité autrichienne, la nationalité autrichienne est garantie en premier. Par la suite, la personne concernée doit révoquer sa nationalité antérieure dans un délai de deux ans dans la mesure du possible afin d'obtenir ensuite la nationalité autrichienne. Dans ces deux ans, une preuve de sortie de la nationalité précédente doit être présentée en original dans les plus brefs délais et sans être demandée.

Par ailleurs, la Loi sur la citoyenneté (1985-2022) exige une condition préalable, la preuve d'une connaissance suffisante de l'allemand:
 

Article 10a

1)
Une condition préalable à l’octroi de la citoyenneté est également la preuve-

1. d'une connaissance suffisante de l’allemand, conformément à l'art. 7.2, n° 2 de la Loi sur l’intégration, et

2. une connaissance de base de l’ordre démocratique et des principes de base qui peuvent en être tirés, ainsi que de l’histoire de l’Autriche et du Land respectif.

2) Sont dispensés des preuves visées au paragraphe 1:

2. Les étrangers mineurs au moment de la demande;
3. Les étrangers qui, en raison de leur mauvais état de santé physique ou mental permanent, en particulier en raison de troubles de la parole ou de l’audition, ne sont pas en mesure de fournir la preuve, ce qui est démontré par un rapport médical officiel.
4. d’autres étrangers qui ne sont pas eux-mêmes capables d’agir, pas seulement en raison de leur âge.

4) La preuve prévue au paragraphe 1 alinéa 1 est réputée avoir été fournie si:

1. la langue allemande est la langue maternelle de l’étranger, ou

2. l’étranger a accompli le module 2 de l’accord d’intégration, conformément à l’article 10.2 de la Loi sur l'intégration, même s’il n’est pas tenu de le faire en vertu de la loi sur l’intégration, et en apporte la preuve.

Évidemment, les enfants nés en Autriche et ceux qui ont fréquenté une école primaire et secondaire en Autriche, sont exemptés de donner une preuve de leur maitrise de l'allemand, car ils sont réputés le connaître.

3 L'interventionnisme dans le Südtirol

Si la République fédérale d’Autriche a pratiqué longtemps une politique de non-intervention à l’égard de la langue allemande sur son territoire, il n’en a jamais été ainsi pour le Südtirol, un ancien territoire perdu pour l'Autriche après la Première Guerre mondiale. En effet, les programmes des principaux partis politiques autrichiens préconisent d’encourager officiellement la culture et la diffusion de la langue allemande, notamment par son usage en tant que langue officielle dans les organisations internationales et en tant que langue vivante dans l'économie et les sciences, surtout par la coopération avec d'autres États germanophones.

C’est pour cette raison que l'Autriche reste pour ses dirigeants «la puissance protectrice des habitants allemands et ladins du Tyrol du Sud» ou Südtirol en allemand (par opposition au Tyrol d'Autriche au nord), c’est-à-dire ceux habitant la Province autonome de Bolzano (Italie). Beaucoup d’Autrichiens souhaitent ouvertement récupérer cette partie d’Italie de langue germanophone (et ladine) et affirment haut et fort que la province de Bolzano appelée «le Land du Tyrol du Sud» (ou Südtirol) devrait exercer son droit à l'autodétermination. Dans la province italienne du Trentin, il n'existe qu'environ 2250 germanophones.

Selon les dirigeants autrichiens, des évolutions politiques peuvent à tout moment faire du Südtirol le jouet de conflits intérieurs italiens. Jusqu'à la réalisation du droit des «Tyroliens du Sud» à s'autodéterminer, l'Autriche a «la mission historique» de veiller par tous les moyens pacifiques à sa disposition «au maintien des groupes de populations allemande et ladine dans le Tyrol du Sud», ainsi qu'à leur statut juridique protégé au plan international.

Il ne semble faire aucun doute que si les «Tyroliens du Sud», dans l'exercice de leur droit d'autodétermination, se prononçaient contre le rattachement de leur région à l'Italie, la possibilité d'adhérer à la république d'Autriche devrait leur être maintenue. Évidemment, le gouvernement de l’Italie ne l’entend pas ainsi et, le 7 octobre 2001, lors d’un référendum national, il a préféré accorder un statut juridiquement bilingue à cette province désignée maintenant sous l’appellation officielle de Trentino-Alto Adige/Südtirol (Trentin-Haut-Adige/Tyrol du Sud). On peut consulter le document portant sur la politique linguistique du Trentin-Haut-Adige en cliquant ICI.

Cependant, la politique linguistique de la République fédérale d’Autriche n’est pas complète sans le volet réservé aux langues des minorités nationales.

 Dernière mise à jour:  16 févr. 2024

    

L'Autriche


1) Situation générale
 


2) La politique linguistique à l'égard de l'allemand
 


3) Les droits linguistiques des minorités nationales
 

4) Bibliographie

Le Burgenland La Carinthie La Styrie

L'Europe

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