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Monaco |
La principauté de Monaco est un petit État souverain (de 2,2
km²)
s’étendant sur une étroite bande côtière de 3,5 km de long; la principauté est située
aux pieds des Alpes du Sud et est bordée par la Méditerranée. Cet État,
situé à seulement 12 km à l'ouest de la frontière italienne, est enclavé dans
le département français des Alpes-Maritimes (voir
la carte). Monaco est composé de quatre districts: Monaco-Ville, La Condamine,
Monte-Carlo et Fontvieille. On surnomme Monaco «le Rocher», qui désigne le village fortifié (avec ses restaurants et ses boutiques), où l'on trouve aussi le palais du prince, la cathédrale et le Parlement. |
1.1 La richesse individuelle
Par ailleurs, la ville de Monaco est réputée pour être une ville de riches, voire d'ultra-riches disposant d'un minimum d'environ 30 millions de dollars ou 20 millions d'euros! À la blague, les Monégasques disent qu'un propriétaire d'une Mercedes qui lave lui-même sa voiture est considéré comme un pauvre! En réalité, la majorité des Monégasques appartiennent à la classe moyenne avec des individus au revenu moyen et travaillant dans les restaurants, les hôtels, les magasins, les boutiques, etc. De nombreux salariés ne gagnent pas plus de 1200 euros net par mois (1600 $US), alors que la moyenne est de 2140 euros/mois, soit 2900 $US (contre 1420 euros en France et 1800 $US ou 2500 euros aux USA). Bref, s'il y a beaucoup de riches à Monaco, il faut compter aussi sur une importante classe moyenne.
En vertu de l'Ordonnance souveraine du 8 février 1869, seuls les 5000 Monégasque d'origine (sur une population de 30 000) sont exemptés d'impôt sur le revenu, mais ils paient la TVA comme tout le monde. Toutes les autres personnes domiciliées à Monaco sont soumises à l'impôt sur les bénéfices des activités industrielles et commerciales, sur les droits d'enregistrement et de timbre, ainsi que les droits d'hypothèques.
Au plan fiscal, il n'existe guère d'impôt direct sur le revenu des personnes physiques. La Convention fiscale du 18 mai 1963 a cependant assujetti à l'impôt français sur le revenu les personnes de nationalité française ne pouvant pas justifier de cinq ans de résidence habituelle à Monaco (en date du 13 octobre 1962). Les sociétés effectuant plus de 25 % de leur chiffre d'affaires hors de Monaco sont soumises à un impôt égal à un tiers de leurs bénéfices. On compte plus de 5000 entreprises à Monaco.
1.2 L'identité monégasque
Par ailleurs, les Monégasques cherchent à protéger leur identité nationale par la Constitution qui prévoit à l'article 25 que «la priorité est assurée aux Monégasques pour l'accession aux emplois publics et privés, dans les conditions prévues par la loi ou les conventions internationales»; à l'article 26 que «les Monégasques ont droit à l'aide de l'État en cas d'indigence, chômage, maladie, invalidité, vieillesse et maternité, dans les conditions et formes prévues par la loi»; à l'article 27 que «les Monégasques ont droit à l'instruction gratuite, primaire et secondaire» et à l'article 29 que «les Monégasques ont le droit de se réunir paisiblement et sans armes […] sans […] autorisation préalable». De plus, en vertu des articles 53 et 54 de la Constitution (pour les élections au Conseil national) et 79 (pour les élections communales), seuls les Monégasques sont électeurs et éligibles. Enfin, selon l'article 32 de la Constitution, «l'étranger jouit dans la Principauté de tous les droits publics et privés qui ne sont pas formellement réservés aux nationaux».
1.3 La nationalité monégasque
Dans l'état actuel de la législation, tout enfant né d'un père monégasque est monégasque, sans la moindre condition quant aux modalités d'obtention de cette nationalité par le père. Une femme ayant obtenu la nationalité monégasque par mariage ne peut la transmettre à ses enfants et il y aurait ainsi un certain nombre d'enfants apatrides à Monaco. La nationalité monégasque s'acquiert, tout au moins pour les femmes, essentiellement par mariage et sur simple déclaration. En vertu de l'article 15 de la Constitution, après consultation du Conseil de la Couronne, le prince exerce seul le droit de naturalisation et de réintégration dans la nationalité. Il procède à cet égard par ordonnance souveraine. Il y aurait environ 500 à 600 demandes de naturalisation par année, dont seulement 10 % recevraient une décision positive, après une enquête qui peut prendre jusqu'à deux ans.
Jusqu'en 1962, la principauté de Monaco fut un royaume de «droit divin». Ce n'est qu'avec la promulgation de la Constitution du 17 décembre 1962 par le prince Rainier III que Monaco est devenu une monarchie héréditaire et constitutionnelle, mais le prince régnant conserve encore des pouvoirs importants. Ainsi, le pouvoir exécutif relève de la haute autorité du prince, dont la personne est inviolable (cf. l'art. 3 de la Constitution), ce qui signifie qu'aucune action en justice ne peut être introduite contre lui pour quelque motif que ce soit. La direction des services est confiée à un ministre d’État, assisté de conseillers de gouvernement, responsables envers le prince. C'est le prince qui désigne le premier ministre, appelé «ministre d'État», monégasque ou français, agréé par le gouvernement français.
2.1 Le pouvoir législatif
Le pouvoir législatif est exercé conjointement par le prince et le Conseil national (Parlement), lequel compte 18 membres élus au suffrage universel pour cinq ans. Cependant, c'est le prince souverain qui détient l'initiative des lois, du droit de sanction et du droit de promulgation, car le parlement de Monaco ne dispose pas des outils nécessaires à l’exercice du pouvoir: il ne peut ni modifier le budget ni contrôler le gouvernement, qui n’est pas obligé de répondre à ses questions. Le Parlement ne dispose pas du pouvoir de modifier les lois; il ne dispose que du pouvoir de présenter des propositions de loi. Toute proposition de loi adoptée par le Conseil national doit être repris par le gouvernement princier qui prend la décision de le faire adopter par la Conseil national ou de ne pas y donner suite. En réalité, tous les pouvoirs sont entre les mains du prince, qu’il s’agisse d’accorder la naturalisation par ordonnance, d’incorporer les conventions internationales dans la législation ou de lutter contre la criminalité. Le prince peut prendre seul des ordonnances souveraines, sans avoir à attendre une délibération du Conseil du gouvernement.
2.2 Les partis politiques
À l'heure actuelle, cinq partis politiques sont représentés au Conseil national: l'Union pour la principauté (UP), L'Union nationale pour l'avenir de Monaco (UNAM), la Promotion de la Famille Monégasque (PFM), le Rassemblement pour Monaco (RPM) et Principauté, Éthique et Progrès (PEP). Cependant, la principale fonction d'un parti politique dans la principauté de Monaco n'est pas de parvenir au pouvoir et/ou au gouvernement au moyen d'élections, mais de contribuer à la simple gestion des affaires de l'État grâce à une recherche permanente d'un consensus entre la volonté du prince et les attentes des Monégasques représentés par le Conseil national. Seuls les citoyens monégasques ont le droit de vote.
2.3 L'interaction avec la France
Les rapports politiques avec la France sont définis par le traité du 27 juillet 1918 et par l'article 436 du traité de Versailles du 18 juin 1919. Ce dernier institue entre les deux États un régime contractuel bilatéral et réciproque. C'est ainsi qu'en contrepartie de l'engagement de la France de défendre l'indépendance, ainsi que la souveraineté de la principauté et l'intégrité de son territoire, le gouvernement monégasque s'engageait à exercer ses droits en conformité avec les intérêts français. Après la Seconde Guerre mondiale, puis en 1951 et en 1963, de nouveaux accords furent signés afin d’apporter aux textes précédents les modifications destinées à les adapter aux nouvelles conditions économiques et sociales. La situation géographique de Monaco enclavée dans le territoire français justifie l'union douanière et monétaire entre les deux pays (en vigueur depuis 1861). Toutefois, un nouveau traité signé en 2002, a remplacé celui de 1918 et il fut suivi de la convention du 8 novembre 2005, notamment parce que la principauté de Monaco est devenue membre du Conseil de l'Europe le 5 octobre 2004. Les plus importantes fonctions, en particulier celle de ministre, demeurent réservées à des Français ou des Monégasques. De plus, les Français demeurent prioritaires pour l’accès aux postes vacants dans la fonction publique et les nominations aux plus hautes responsabilités publiques devront recueillir l’aval de la France.
En 2023, la principauté de Monaco comptait 35 800 citoyens, dont environ 10 000 Français, 7300 Monégasques, 6900 Italiens, 900 Allemands, 600 Portugais, etc. En fait, plus d’une centaine de nationalités y sont représentées, ainsi que quelque 340 000 comptes en banque, soit dix pour un habitant. La population est composée de beaucoup d'étrangers, généralement riches, qui ont choisi Monaco en raison d’un système fiscal avantageux ; de nombreuses entreprises étrangères se sont installées dans la principauté pour les mêmes raisons. On compte actuellement près de 25 000 étrangers résidant dans la principauté et parlant des langues très diverses.
3.1 Les nationalités
Parmi la centaine de nationalités résidant de manière permanente à Monaco, une catégorie bien particulière appelée «enfants du pays» (généralement des «Français de Monaco») est couramment employée pour désigner quelque 14 000 personnes vivant à Monaco depuis plusieurs générations, sans jamais avoir obtenu la nationalité monégasque.
Groupe communautaire | Population | Pourcentage | Langue | Filiation linguistique | Religion |
Français | 10 000 | 27,9 % | français | langue romane | catholicisme |
Monégasque | 7 300 | 20,3 % | ligure | langue indo-européenne | catholicisme |
Occitan | 6 900 | 19,2 % | occitan | langue romane | catholicisme |
Italien | 6 700 | 18,7 % | italien | langue romane | catholicisme |
Juif français | 700 | 1,9 % | français | langue romane | religion ethnique |
Portugais | 600 | 1,6 % | portugais | langue romane | catholicisme |
Flamand | 400 | 1,1 % | néerlandais | langue germanique | catholicisme |
Britannique | 300 | 0,8 % | anglais | langue germanique | anglicanisme |
Russe | 300 | 0,8 % | russe | langue slave | christianisme orthodoxe |
Espagnol | 300 | 0,8 % | espagnol | langue romane | catholicisme |
Arabe | 200 | 0,5 % | arabe | langue sémitique | islam |
Grec | 200 | 0,5 % | grec | langue grecque | christianisme orthodoxe |
Allemand | 900 | 0,2 % | allemand | langue germanique | protestantisme |
Autres | 1 000 | 2,7 % | - | - | - |
Total 2023 | 35 800 | 100 5 | - | - | - |
3.2 Les langues
Les langues parlées sont principalement le français (la langue officielle), l’italien et l’anglais. Environ 30 % des résidents à Monaco ont le français comme langue maternelle, mais tous les Monégasques, les Gascons et les Juifs parlent mieux le français que leur propre langue, ce qui correspond à environ 70% de la population. Suivent l'italien et l'anglais. Bref, ces trois langues dominent les communications internes au sein de la principauté. Selon l’origine des locuteurs, le français, l’italien et l’anglais servent de langues véhiculaires. Il faut dire qu’une partie de l'économie monégasque repose sur de la main-d’œuvre iimmigrante, provenant surtout de France et d'Italie. Aujourd’hui, Monaco compte plus de 44 000 emplois (publics et privés) pour 32 000 habitants. C'est que, tous les jours, 10 000 «frontaliers», dont les trois quarts sont français, les autres italiens, viennent travailler à Monaco, tout en résidant à l'extérieur de la principauté. Bref, la principauté de Monaco est cosmopolite, tant au plan linguistique qu'ethnique.
- Le monégasque
Toutefois, il existe d'autres langues, dont deux langues autochtones: le monégasque et le niçois (nissart). Seuls quelque 7300 Monégasques parleraient encore la langue monégasque, appelée ligure monégasque. Ce sont généralement les «anciens» ou les personnes âgées qui parlent encore cette langue d’origine celto-ligurienne, appelée en monégasque le munegascu. Les jeunes ne la parlent plus, même s'ils l'apprennent à l'école; c'est essentiellement une langue scolaire. |
Le monégasque est une langue à base de génois encore en usage en Ligurie (sur la côte italienne), à cette différence que le monégasque est teinté de fortes influences provençales. Il existe une école du soir où l'on enseigne le monégasque aux adultes. L'hymne national est en monégasque, mais il existe une traduction française (voir le texte en monégasque et en français).
- L'occitan et le niçois
Il ne faut pas oublier que le territoire de Monaco est un îlot linguistique ligurien dans l'aire occitane. Si peu de locuteurs parlent la variété provençale de l'occitan, de nombreux autres parlent le niçois, appelé aussi nissart ou niçart, une autre variété occitane. En 2023, la proportion de locuteurs occitans à Monaco était évalué à 19 % des Monégasques, soit près de 7000 personnes. Cette langue est également parlée à Nice, située tout près, et dans la région environnante. Il existe une autre langue, intermédiaire entre le monégasque appris à l'école et l'occitan alpin maritime; cette langue est généralement appelée «patois de la rue», parfois «monéguier» ou encore «muneghié». Cette langue est issue des apports historiques monégasques, occitans, génois et piémontais. Bref, Monaco constitue bel et bien un îlot linguistique ligurien dans l'aire occitane.
Enfin, dans la principauté, la religion catholique est la religion d’État. Toutefois, la liberté des cultes est garantie par la Constitution et de nombreuses confessions religieuses sont présentes à Monaco.
Monaco fut un comptoir phénicien au cours de l'Antiquité. La plus ancienne mention de Monaco parut dans l'œuvre d’Hécatée de Milet (en grec: Hekatê), historien et géographe grec ( vers -540 à vers -480), qui écrivit dans sa Périégèse: «Monoïkos, polis Ligustikè», c’est-à-dire «Monaco, ville de Ligurie». Le nom de Monaco provient donc du grec Monoïkos et est associé à Héraclès (en grec) ou à Hercule (en latin). Pendant toute l'Antiquité, le port de Monaco fut appelé Port-Hercule. Des temples dédiés à Hercule furent construits dans la région. Ce sont des marins phéniciens et carthaginois qui contribuèrent au développement de la région jusqu’à la conquête romaine par Jules César. Après la chute de l’Empire romain (Ve siècle), toute la région fut ravagée par les envahisseurs germaniques; cette période d'invasions dura jusqu'à la fin du Xe siècle. Après l'expulsion des Sarrasins (Arabes) en 975, la côte ligure se repeupla peu à peu, sans les peuples ligures d’origine.
En 1162, l'empereur du Saint-Empire romain germanique, Frédéric Ier de Hohenstaufen, surnommé Frédéric Barberousse en raison de son éblouissante barbe rousse, céda le «Rocher» et le rivage de Monaco aux Génois. Ils s'y installent en 1215 en construisant une forteresse. Les premiers colons, attirés par les exemptions fiscales accordées par la république de Gênes, vinrent renforcer la garnison et imposèrent leur langue, le génois, aux paysans restés sur le territoire. Très tôt, deux factions génoises occupèrent tour à tour le Rocher: les guelfes et les gibelins. Si les premiers soutenaient le pape, les seconds appartenaient à la famille impériale des Hohenstaufen; on distinguait donc le «parti de l'Église» contre le «parti impérial», selon les villes et les régions en Italie.
4.1 Les Grimaldi
En 1297, à la suite d’une bataille remportée à Gênes par Francesco Grimaldi dit Malizia, la «seigneurie de Monaco» fut acquise par la maison des Grimaldi, une riche famille de la noblesse génoise. Ce sont les descendants de Francesco Grimaldi qui règnent aujourd’hui encore sur Monaco. Cependant, les Grimaldi durent rendre la forteresse de Monaco aux Génois le 10 avril 1301. En 1304, Rainier Ier Grimaldi vainquit les Hollandais à Ziriksee (Pays-Bas), alors qu’il servait sous le roi de France Philippe le Bel. Cet exploit lui valut le titre de «grand amiral de France» et facilita l’indépendance politique de la petite seigneurie de Monaco. En 1346, Charles Grimaldi, seigneur de Monaco, acheta la seigneurie de Menton et acquit celle de Roquebrune en 1355. Ces seigneuries constituaient des propriétés personnelles des Grimaldi et n'étaient pas rattachés à Monaco tenue par les Génois. Alors que les habitants de Roquebrune parlaient le nissard oriental, ceux de Menton s'exprimaient en mentonnais, deux langues occitanes. Mais à Monaco on parlait encore le ligure génois.
- La présence espagnole
Mais Monaco ne fit définitivement partie du patrimoine des Grimaldi qu'en 1419. En 1489, le roi de France, Charles VIII, reconnut l'indépendance de Monaco. Plus tard, Louis XII renouvela cette reconnaissance en 1512, puis François Ier à son tour en 1515. En 1524, sous Charles Quint, Monaco devint un protectorat impérial espagnol, de sorte qu'une garnison espagnole fut ainsi à la charge des Grimaldi. Durant plus d’une centaine d’années d’occupation militaire espagnole, Monaco fut confrontée à plusieurs langues, notamment le catalan, le castillan, l'italien et le monégasque. En général, les documents écrits officiels étaient rédigés en italien, langue du pouvoir politique, mais aussi en latin, alors que le castillan était employé avec les autorités espagnoles.
- La présence française
En 1641, Honoré II, seigneur de Monaco, et Louis XII, roi de France, signèrent le traité de Péronne. Par ce traité, le prince de Monaco se plaçait sous la protection du roi de France qui reconnaissait la souveraineté de Monaco. L’article 6 du traité proclamait que le prince Honoré II était «libre et souverain» sur Monaco, Roquebrune et Menton. Tout au cours du XVIIe siècle et jusqu'à la Révolution française, le monégasque, l'italien et le français cohabitèrent sur le Rocher: la population parlait le monégasque, les officiers de la garnison donnaient leurs ordres en français, tandis que les membres du clergé s’adressaient en italien aux paroissiens. Un trilinguisme non imposé, mais mis en pratique selon les circonstances. Mais à Roquebrune et à Menton, la population parlait des variétés occitanes, le roquebrunois et le mentonais.
La principauté de Monaco (qui comprenait toujours les seigneuries de Roquebrune et de Menton), fut intégrée de force à la France entre 1793 et 1814. Cette fois, la langue française devint une langue officielle et non plus une simple langue d'usage. Les actes de la Convention de Monaco du 15 février 1793 et la correspondance officielle révolutionnaire furent rédigés en français. L'article 1er du décret de la Convention nationale du 14 février 1793 déclarait que «la ci-devant principauté de Monaco est réunie au territoire de la République française, et fait partie du département des Alpes-Maritimes». Ce département était principalement composé du comté de Nice, province du royaume de Sardaigne limitrophe de la République française. La petite principauté de Monaco occupait une frange de littoral à l'est de Nice. |
Les autorités françaises entreprirent d'imposer l'enseignement du français dans les écoles du département. Le 1er avril 1805 (11 germinal an XIII), le préfet Marc Joseph de Gratet Dubouchage fit parvenir une circulaire rappelant aux maires que l'enseignement religieux devait être dans la langue nationale des Français: «On ne doit point employer, pour l’instruction, d’autres langues que le français.» En somme, la langue française devenait un facteur d'unité nationale. Quant aux Grimaldi, ils furent même dépossédés de leurs biens et de leurs titres; plusieurs d’entre eux finirent même sur l’échafaud, tandis que la principauté annexée, qui dut porter le nom de «Fort d'Hercule», devint le chef-lieu du département des Alpes-Maritimes, puis une simple municipalité.
Après la Restauration des Grimaldi en 1814, le prince Honoré
IV imposa l’usage du français dans la principauté, mais cela ne
se fit pas sans mal, car la population considérait que le
monégasque était la langue nationale avec l’italien. Puis
le traité de Vienne de 1815 fit de la
principauté un «protectorat du royaume de Piémont-Sardaigne» (voir
la carte ci-contre). La principauté avait une superficie
totale de 24 km² et comprenait trois municipalités: Monaco (1250
habitants), Roquebrune (850 habitants) et Menton (4900
habitants).
Cependant, placé
sous l’autorité du roi du Piémont-Sardaigne, le Rocher vécut une
période de léthargie politique et financière, tandis que la
famille des Grimaldi vivotait à Paris. Après le 2 février 1815, les documents officiels et les ordonnances souveraines de la principauté ne furent rédigés qu'en français. Honoré IV était un prince «absolutiste» qui ne gouvernait que par ordonnance, car il n'existait pas d’assemblée législative élue. Ses successeurs, Honoré V (1819-1841), Florestan I (1841-1856) et Charles III (1856-1889) préférèrent habiter Menton plutôt que Monaco, et passaient une grande partie de l’année à Paris. |
Dans son ordonnance du 10 novembre
1815 sur l’enseignement public, Honoré IV introduisit le français et
l'italien à égalité, les deux langues devant être offertes au primaire
et au secondaire, avec ajout du latin pour le secondaire. Dans les
faits, les élites parlaient et écrivaient en français, alors que la
population s'exprimait en monégasque à Monaco, mais dans des langues
occitanes ailleurs et dans le comté de Nice. L’enseignement en
italien disparut progressivement dans les décennies suivantes pour
s’éteindre au début du XXe siècle.
À la suite des mouvements
révolutionnaires de 1848, Menton et Roquebrune s'affranchirent des
Grimaldi et se proclamèrent «villes libres» sous la protection du
royaume de Piémont-Sardaigne. Après la sécession de Menton et
Roquebrune, Monaco ne semblait plus qu'à devenir une petite bourgade
sans avenir, après avoir perdu 90% de son territoire. C’était sans compter sur les politiques du prince Charles III (1856-1889) qui eut l’idée de créer des jeux de casino (interdits dans les pays voisins) et de permettre à la principauté, en s’enrichissant, de se développer rapidement. Un luxueux casino fut construit, puis l’Hôtel de Paris, d’un confort exceptionnel. Avec l'arrivée du chemin de fer en octobre 1868, les joueurs se multiplièrent à un rythme impressionnant, d'autant plus que Monaco se trouvait à 15 minutes de Nice devenue française. Entretemps, par le traité du 24 mars 1860, le roi Victor-Emmanuel d'Italie avait cédé le comté de Nice à Napoléon III sous condition de ratification par la population, les habitants de Menton et de Roquebrune furent appelés à se prononcer, quoique ne faisant pas partie du royaume de Piémont-Sardaigne. Cette sécession fut entérinée en 1860 et les deux villes furent rattachées à la France. |
4.2 Une principauté indépendante
À la suite de l’acquisition par la France du comté de Nice, Napoléon III accorda son indépendance à la principauté, alors amputée des villes de Menton et de Roquebrune, ces dernières ayant voté par plébiscite leur rattachement à la France. En compensation, la principauté reçut quatre millions de l’État français. Monaco devait saisir l’occasion pour construire sa réputation. Depuis cette époque, la règle de dévolution veut que, en cas d'extinction de la dynastie Grimaldi, la France hérite de la principauté. Le règne du prince Charles III (1856 -1889) avait été marqué par un développement économique sans précédent, ce qui avait encouragé l’arrivée de nouveaux habitants venus de Ligurie et du Piémont (maçons, ouvriers, employés d’hôtel, etc.). Cet important apport de la population immigrante avait eu pour effet de minoriser les locuteurs du monégasque au profit du français et de l'italien. |
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En 1910 éclata la Révolution monégasque: le
prince de Monaco, Albert Ier, qui disposait jusqu'alors des pleins pouvoirs
(monarchie absolue), dut accepter une nouvelle constitution le 5
janvier 1911, ce qui faisait de la principauté une monarchie
constitutionnelle. Après la mort de son grand-père, le prince Louis II, le prince Rainier III lui succéda. De 1949 jusqu'en 2005, Rainier III fut le chef de l’État qui transforma radicalement la petite principauté. C'est sous son règne que l’enseignement de la langue monégasque fut introduit dans les écoles (1976). Suivirent la création de l’Académie des langues dialectales (1981), la Commission pour la langue monégasque (1982), ainsi que les cours de monégasque pour adultes (1993), qu’ils soient de nationalité monégasque («enfants du pays») ou résidents étrangers |
En 1993, Monaco fut admise aux Nations unies. En 2002, un nouveau traité entre la France et Monaco précisait que la principauté restera un État indépendant dans le cas où il n'y aurait pas de descendant à la famille Grimaldi. La principauté a rejoignait le Conseil de l'Europe en 2004. Bien que sa monnaie soit l'euro, Monaco acquit le droit de frapper ses propres pièces avec un décor monégasque sur la face nationale. En janvier 1997, le 700e anniversaire de la monarchie fut célébré et, en 1999, le 40e anniversaire de l’accession au trône de Rainier III. En avril 1999, la principauté le Sommet de la Francophonie, à l’issue duquel fut adoptée la Déclaration de Monaco sur la construction d’un espace de coopération économique francophone.
Le 5 octobre 2004, Monaco devint le 46e État membre du Conseil de l'Europe. Au décès de Rainier III, survenu le 6 avril 2005, son fils Albert lui succéda sous le nom d’Albert II. Il fut officiellement intronisé le 19 novembre 2005, jour de la fête nationale monégasque. Ainsi, l'histoire de Monaco est associée, depuis 700 ans, à celle de la famille Grimaldi, qui a célébré en 1997, l'anniversaire de son accession aux destinées de l'actuelle principauté. Bien que le français soit la langue officielle, l'italien et l'anglais servent également de langues véhiculaires. La principauté monégasque est l'un des plus petits États au monde (2,2 km²), mais aussi l'un des plus célèbres, Monaco étant la capitale mondiale du glamour, après Londres et la monarchie anglaise.
La principauté de Monaco a élaboré une politique linguistique axée sur le français, mais qui n'exclut pas le monégasque, l'italien et l'anglais. Celle-ci repose essentiellement sur l’article 8 de la Constitution du 17 décembre 1962: «La langue française est la langue officielle de l’État.»
5.1 Le Conseil national
D'après la Constitution de 1962, le prince partage le pouvoir législatif avec le Conseil national, lequel est un parlement monocaméral composé de 24 membres élus pour cinq ans par un scrutin plurinominal et au suffrage universel.
Article 4 Le pouvoir législatif est exercé par le prince et le Conseil national. |
La loi implique l'accord des volontés du prince et du Conseil national. L'initiative des lois appartient au prince, mais les délibérations et le vote des lois appartiennent au Conseil national. La sanction des lois appartient au prince, qui leur confère force obligatoire par la promulgation. L'Ordonnance souveraine du 15 avril 1911 sur le fonctionnement du Conseil national ne précisait aucunement l'emploi des langues. Étant donné l'article 8 de la Constitution qui proclame que «la langue française est la langue officielle de l'État, les membres du Conseil national délibèrent dans cette langue et c'est aussi en français que les ordonnances souveraines, les arrêtés ministériels et les lois sont rédigés.
5.2 La langue de la justice
La langue des tribunaux est assujettie à l'article 8 de la Constitution monégasque sur la langue officielle. D'ailleurs, selon le Code de procédure civile (2022), tous les actes de procédure doivent être en français «à peine de nullité»:
Article 969
Tous les actes des juges et des officiers ministériels et tous les actes de procédure seront rédigés en langue française, à peine de nullité et d'un emprisonnement d'un à six mois, sans préjudice des peines disciplinaires contre les magistrats ou contre les officiers ministériels. Article 975 Les commissions rogatoires décernées par un auge étranger ne seront exécutées, sauf autorisation spéciale du prince, qu'autant qu'elles auront été transmises par la voie diplomatique, avec leur traduction en langue française, si elles ne sont pas rédigées en français ou en italien. |
Le Code de procédure pénale (2014) prévoit que si une personne arrêtée ne comprend pas le français, elle doit être informée «dans une langue qu'elle comprend» des motifs de son arrestation. Un interprète est, en cas de besoin, requis par l'officier de police judiciaire. Durant un procès, le tribunal peut avoir recours à un interprète s'il est nécessaire:
Article 60-12 Si la personne placée en garde à vue ne comprend ni ne parle la langue française, les notifications et auditions prévues aux articles précédents doivent avoir lieu dans une langue qu'elle comprend. Un interprète est, en cas de besoin, requis par l'officier de police judiciaire. Si la personne placée en garde à vue est atteinte d'un handicap l'empêchant de communiquer, elle doit être assistée par toute personne qualifiée maîtrisant un langage ou une méthode permettant de communiquer avec elle. Article 139 Si le témoin ne parle ni la langue française, ni aucune autre langue familière au juge d'instruction et en usage dans la principauté, celui-ci désigne un interprète parmi les personnes âgées de plus de 21 ans, et à l'exclusion de son greffier et des témoins, auquel il fait prêter serment de traduire fidèlement la déposition du témoin, les questions et les réponses à transmettre. Article 327 Lorsque l'accusé, les témoins ou l'un d'eux ne parlent pas la même langue ou le même idiome, le président nomme d'office un interprète, majeur de vingt et un ans, et lui fait prêter serment de traduire fidèlement les discours à transmettre entre ceux qui parlent des langages différents. Article 376-1 Toute demande de renvoi de l'audience présentée par le prévenu ou son avocat doit être justifiée et le cas échéant accompagnée de justificatifs traduits en langue française s'ils sont rédigés dans une langue étrangère. La demande de renvoi doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée d'une déclaration d'adresse. Article 596-19 5) Un original des procès-verbaux qu'ils ont établis et qui doit être rédigé ou traduit en langue française est versé à la procédure monégasque. |
Les articles 47 et 49 de l'Ordonnance souveraine n° 3.782 portant organisation de l'administration pénitentiaire et de la détention (2012) reprennent des dispositions similaires:
Article 47 La constatation des faits constitutifs d'une faute disciplinaire fait l'objet d'un rapport d'incident écrit qui est établi soit par la personne qui en est le témoin ou la victime, soit par le membre du personnel de surveillance qui en a été informé. Ce rapport est immédiatement transmis au Directeur de la maison d'arrêt qui apprécie l'opportunité de poursuivre la procédure. En cas d'engagement des poursuites disciplinaires, la personne détenue est convoquée par écrit devant la commission de discipline instituée à l'article 48. La convocation comporte, dans une langue comprise par la personne détenue, l'exposé des faits précis qui lui sont reprochés. Celle-ci doit être en mesure de disposer d'un délai et de moyens suffisants pour préparer sa défense et présenter ses explications qui seront consignées sur un procès-verbal. Article 49 La personne détenue qui comparaît devant la commission de discipline est autorisée à se défendre seule ou assistée d'un membre de l'Ordre des avocats-défenseurs et avocats choisi par elle ou, à défaut, commis d'office par le bâtonnier. Elle peut en outre bénéficier gratuitement d'un interprète, si elle ne comprend pas ou ne parle pas la langue utilisée lors de cette comparution. |
L'Ordonnance souveraine n° 2.984 sur l'organisation et le fonctionnement du Tribunal suprême (1963) prescrit les mêmes dispositions concernant la langue officielle et la traduction en français au besoin:
Article 19
Les requêtes et mémoires visés aux articles 17 et 18 doivent être accompagnés de l'énonciation des pièces et documents produits. Conformément à l'article 8 de la Constitution, ils sont, à peine de nullité, établis en langue française ou, pour ce qui est des pièces et documents produits, assortis, s'il y a lieu, d'une traduction en français. Ils doivent être déposés au Greffe général, outre l'original, en autant de copies qu'il y a de parties en cause, plus trois. Communication des pièces et documents doit être faite au Greffe général à chacune des parties intéressées. Le président du Tribunal suprême en reçoit copie. |
En vertu de l'article 18 de la Loi n° 1.448 relative au droit international privé (2017), un jugement rendu par un tribunal étranger doit être accompagné d'une traduction en français si les documents ne sont pas rédigés dans cette langue:
Article 18 Le demandeur à fin d'exécution ou de reconnaissance doit produire :
Ces pièces devront être légalisées par un agent diplomatique ou
consulaire de la Principauté accrédité auprès de l'État étranger,
ou, à défaut, par les autorités compétentes de cet État. |
Bref, les tribunaux ne fonctionnent qu'en français, mais au besoin on fera appel à des interprètes.
5.3 Les services publics
Tous les services publics sont assurés en français. Au besoin, la principauté peut adopter des dispositions à ce sujet. Ainsi, l'article 37-2 du Code civil (2023) prescrit que tout acte de l'état civil provenant de l'étranger soit être traduit en français s'il a été rédigé dans une autre langue:
Article 37-2 L'acte de l'état civil établi par une autorité étrangère ne pourra être transcrit que s'il a été préalablement légalisé, sauf conventions internationales plus favorables. S'il est établi en langue étrangère, il devra préalablement être traduit en langue française, soit par un traducteur agréé par l'autorité judiciaire, soit par l'agent diplomatique ou le consul de Monaco qui exerce les fonctions d'officier de l'état civil dans le pays où l'acte a été dressé, soit par un consul ou un agent diplomatique étranger à Monaco lorsque la traduction concerne un acte dressé par une autorité du pays qui l'a régulièrement accrédité. |
L'article 15 de l'Arrêté ministériel n° 2015-90 fixant les modalités d'application de la loi n° 1.058 du 10 juin 1983 sur les marques de fabrique, de commerce ou de service (2015) impose les mêmes exigences concernant les marques de fabrique:
Article 15 [...] Tout acte ou document remis au service doit, s’il est rédigé en langue étrangère, être accompagné de sa traduction en langue française. |
- Les services aux citoyens
Afin d'assurer que les Monégasques reçoivent des services en français, certaines dispositions juridiques ont été prises, notamment dans le domaine de la santé. Par exemple, l'article 35 de l'Arrêté ministériel n° 2017-807 portant Code de déontologie des chirurgiens-dentistes (2017) exige la connaissance du français dans les documents remis au patient:
Article 35 L'exercice de l'art dentaire comporte normalement l'établissement par le chirurgien-dentiste, conformément aux constatations qu'il est en mesure de faire dans l'exercice de son art, des certificats, attestations et documents dont la production est prescrite par la législation et la réglementation en vigueur. Tout certificat, prescription, attestation ou document délivré par un chirurgien-dentiste est rédigé lisiblement en langue française et daté, permet l'identification du praticien dont il émane et est signé par lui. Le chirurgien-dentiste peut en remettre une traduction au patient dans la langue de celui-ci. |
Il en est ainsi dans l'Arrêté ministériel n° 2024-150 réglementant les conditions de recrutement des praticiens hospitaliers et des assistants du Centre hospitalier Princesse-Grace (2024):
Article 1er
Seules peuvent présenter leur candidature aux concours ouverts afin de pourvoir les emplois permanents vacants de praticien hospitalier du Centre Hospitalier Princesse-Grace les personnes satisfaisant aux exigences suivantes :
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L'annexe de l'Arrêté ministériel n° 2018-150 relatif aux règles techniques applicables aux sites Internet de commerce électronique de médicaments à usage humain (2018) exige que le contenu d'un site Internet soit être «impérativement rédigé en langue française», ce qui n'exclut pas une traduction en d'autres langues:
Annexe 1) Fonctionnalités du site Internet de commerce électronique de médicaments à usage humain Le contenu du site Internet de l'officine est impérativement rédigé en langue française. Toutefois, les pharmaciens mentionnés à l'article 33-5 de la loi n° 1.029 du 16 juillet 1980, susvisée, modifiée, peuvent également proposer une traduction du site dans une ou plusieurs autres langues. L'administration du site Internet, laquelle comprend notamment la gestion des contenus du site Internet à l'exception des données de santé à caractère personnel, ne peut être réalisée que par les pharmaciens mentionnés à l'article 33-5 de la loi n° 1.029 du 16 juillet 1980, susvisée, modifiée. |
Pour les demandes de permis de conduire, l'Ordonnance souveraine n° 7.489 du 27 mai relative à la circulation de véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques (2019) exige que dossier, ainsi que toutes les pièces l'accompagnant, soit rédigé en français:
Article
205-9 Le dossier de demande d'autorisation de circulation à des fins expérimentales d'un véhicule à délégation de conduite est adressé au Ministre d'État, par le propriétaire du ou des véhicules à délégation partielle ou totale de conduite concernés par l'expérimentation, ou par une personne justifiant de son lien avec ce propriétaire. Un dossier de demande d'autorisation de circulation peut être présenté pour plusieurs véhicules concernés par une même expérimentation. Ce dossier, ainsi que toutes les pièces l'accompagnant, doit être rédigé en langue française. |
- Les exigences aux entreprises
Les travaux publics confiés à des entreprises privées doivent rédiger leurs demandes en français, selon l'article 5 de l'Ordonnance souveraine n° 3.647 concernant l'urbanisme, la construction et la voirie (1966):
Article 5 La demande et les pièces jointes doivent être rédigées en langue française. Dans le cas de documents en langue étrangère, ceux-ci doivent faire l'objet d'une traduction officielle en langue française qui doit être jointe à l'appui de la demande. Chaque pièce porte un titre bien détaillé. |
Dans le domaine de l'affichage qui impliquerait des exigences concernant la sécurité, l'Arrêté ministériel n° 2023-48 portant application de l'Ordonnance souveraine n° 9.690 du 20 janvier 2023 relative à la sécurité, notamment sanitaire, des piscines et des bains ou bassins à remous (2023) oblige que les inscriptions soient rédigés «au moins en langue française, italienne et anglaise»:
Article 4 Les horaires de baignade sont clairement définis et affichés à l'entrée des bassins. Tout équipement ou matériel nécessitant une utilisation particulière comporte un panneau visible, lisible, indélébile et aisément compréhensible, placé suffisamment en amont du circuit de circulation pour éviter qu'un usager s'y engage inconsidérément, précisant la manière correcte de s'en servir, les usages et zones interdits et les précautions d'utilisation. Toute mesure est prise pour permettre aux usagers d'apprécier les risques auxquels ils s'exposent en fonction de l'équipement et de leurs capacités. Ces affichages sont rédigés au moins en langue française, italienne et anglaise. |
L'Arrêté ministériel n° 96-137 fixant le classement, le marquage, la distribution et l'utilisation des artifices de divertissement (1996) impose également le français:
Article 8 Tout artifice élémentaire de divertissement distribué en principauté à titre onéreux ou gratuit ou destiné à l'être, en l'état ou sous forme de pièce ou de feu d'artifice, doit comporter un marquage comprenant en langue française :
Le marquage des
artifices élémentaires contenus dans un emballage doit être
reproduit sur cet emballage. Les modes ou notices d'emploi ainsi que le certificat de qualification doivent être rédigés en langue française ou être accompagnés d'une traduction en langue française. |
- L'affichage dans la principauté
Dans la principauté de Monaco, l'affichage est français comme en France. La plupart des commerces n'affichent qu'en cette langue, mais certaines entreprises financières ou bancaires utilisent parfois l'anglais. Certains panneaux peuvent être en trois langues: français, anglais et italien. L'emploi du monégasque est rarissime (Principatu de Münegu),
- La langue monégasque
Le gouvernement princier ne se préoccupe pas seulement du français, mais aussi de la langue monégasque. C'est pourquoi une commission pour la langue monégasque a été créée en 1982, laquelle est chargée d'œuvrer pour la défense et l'illustration de la langue monégasque, de procéder à des études, de formuler des propositions propres à améliorer la connaissance du monégasque, notamment en ce qui concerne les programmes d'enseignement. L'Ordonnance souveraine n° 7.462 portant création d'une Commission pour la langue monégasque (1982) énonce ce qui suit:
Article
1er Il est constitué, auprès du Conseiller de gouvernement pour l'Intérieur, une Commission pour la langue monégasque ayant un rôle consultatif et chargée:
Article 2 Les membres de la Commission pour la langue monégasque sont nommés par ordonnance souveraine pour une durée de trois ans. La Commission désignera en son sein un président, un vice-président et un secrétaire général, et établira son règlement intérieur. |
À Monaco, 17 % de la population de la principauté parlerait encore le monégasque, et essentiellement des personnes âgées. La langue était considérée en voie d’extinction dans les années 1970, mais son introduction dans les écoles lui a donné un second souffle comme langue seconde. Du fait que la langue officielle de la principauté de Monaco soit le français, il y a fort peu d’activités en monégasque, ni publications ni émission de radio ou de télévision, y compris sur Radio-Monaco. Seul le Comité national des traditions monégasques publie chaque année un "Calendari" («calendrier»), dans lequel on trouve des poèmes et des hommages en traduction en monégasque. Il existe plusieurs ouvrages tels des dictionnaires français-monégasque et monégasque-français, une grammaire, etc.
5.4 L'éducation
Le système d'éducation est présenté dans l'Arrêté ministériel n° 2016-494 déterminant les cycles d'apprentissage de l'enseignement primaire et secondaire (2016). La principauté de Monaco dispose d'une gamme complète d'établissements d'enseignement publics et privés de différents niveaux et de différents profils. Le système d'éducation monégasque se rapproche de celui de la France dans la mesure où leurs structures sont identiques et comprennent l'enseignement préscolaire, l'enseignement primaire, l'enseignement secondaire et secondaire professionnel, l'enseignement supérieur.
L'Ordonnance souveraine n° 4.404 portant application des dispositions de la section I de la loi n° 826 du 14 août 1967 sur l'enseignement (1970) précise que l'enseignement général comprend une étude approfondie du français et l'étude d'une seule langue vivante:
Article 8 L'enseignement général du premier cycle comprend les classes dites de sixième, cinquième, quatrième et troisième ; il comporte quatre sections aux caractéristiques suivantes :
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Mais c'est la Loi n° 1.334 sur l'éducation (2007) qui est plus précise dans la mesure où elle tinet le français comme obligatoire dès la maternelle, ainsi que l'étude de la langue monégasque au primaire et au secondaire:
cle 37
Article 45
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L’aspect le plus original de la politique linguistique de Monaco repose sur les langues d’enseignement. Les programmes monégasque sont identiques à ceux offerts dans l'enseignement en France, mais ils s’en écartent également, car ils comprennent l’étude de l’histoire, des institutions de la principauté de Monaco, ainsi que de la langue monégasque.
- Les programmes
En effet, afin d’éviter l’extinction du monégasque, les écoles primaires et secondaires sont tenues maintenant d’enseigner cette langue; elle peut être choisie comme option facultative au baccalauréat. C'est en 1976 que la Direction de l’Éducation nationale a rendu obligatoire l’enseignement du monégasque dans les trois dernières classes de l’enseignement primaire, public ou privé. Cette mesure fut étendue en 1979 au cycle secondaire, mais en option, et rendue obligatoire pou l’année scolaire 1998-1999 avec possibilité de présentation comme matière à option pour le baccalauréat. Chaque année a lieu un concours de langue monégasque pour les établissements scolaires avec distribution de prix la veille de la Saint-Jean, en présence du prince souverain, de membres de la famille souveraine et des personnalités monégasques.
L'enseignement public est offert dans sept écoles primaires et préscolaires, ainsi qu’un collège (secondaire), un lycée d’enseignement général et technologique, et un lycée technique. L’enseignement secondaire est partagé entre le lycée Albert 1er, le lycée technique de Monte-Carlo (hôtellerie, commerce, enseignement spécialisé) et le collège Charles III. Le secteur privé, pour sa part, compte quatre établissements (enseignement primaire, secondaire et technique).
Outre l'enseignement traditionnel en français, l’initiation à l’anglais débute dès la première classe de la maternelle. À partir du CE2 (cours élémentaire de 2e année), les cours d'anglais intensif viennent compléter l'apprentissage de cette langue pour les élèves qui le souhaitent et dont le niveau le permet. La langue monégasque est également enseignée à partir des classes de deuxième année du primaire. Les élèves des cours d’anglais intensif sont répartis de la 6e à la 3e année du secondaire sur trois classes et bénéficient de deux heures supplémentaires d'enseignement. Des mesures de soutien en français sont mis en place pour les élèves en difficulté et les étrangers; des cours de «français, langue étrangère» sont proposés aux élèves non francophones.
Dans les classes de 6e et de 5e, l'enseignement de l’allemand, de l’espagnol et de l’italien est facultatif, mais obligatoire en 4e et en 3e en raison de deux heures/semaine. Même s’il est facultatif, cet enseignement reste choisi par le plus grand nombre et prépare les élèves au cours «Langue vivante II» (obligatoire en 4e). Des cours de latin sont également disponibles.
Sont admis dans les écoles publiques les enfants de nationalité monégasque ou ceux dont l'un des deux parents est monégasque, ainsi que les enfants dont les parents sont domiciliés à Monaco. Les autres doivent fréquenter les écoles privées dont les programmes sont sanctionnés par le gouvernement princier.
Le monégasque n’est pas enseigné à l’université voisine de Nice Sophia–Antipolis, mais il est sans cesse évoqué, comme les autres langues ligures, dans le cursus universitaire qui conduit quelques étudiants monégasques à des mémoires de maîtrise en linguistique ou de doctorat. Ils poursuivent leur carrière professionnelle à Monaco comme enseignants de la langue monégasque.
Monaco ne compte qu'une seule université : l'International University of Monaco, fondée en 1986. Cette institution est réputée pour la sélection rigoureuse de ses étudiants. Pour y accéder, il faut, en plus de bonnes notes, la connaissance de l'anglais et une expérience professionnelle dans le domaine choisi est encouragée pour l'admission. Les cours peuvent se donner en français et/ou en anglais, parfois en italien.
- Les bourses de perfectionnement
Le gouvernement princier accorde annuellement des bourses de perfectionnement pour apprendre une langue étrangère. L'Arrêté ministériel n° 2019-1059 approuvant le règlement d'attribution des bourses de perfectionnement et de spécialisation dans la connaissance des langues étrangères (2019):
Article
1er Les règles techniques applicables aux sites Internet de commerce électronique de médicaments à usage humain auxquelles se conforment les pharmaciens titulaires et assistants d'officines sont décrites en annexe du présent arrêté. Annexe 1) Fonctionnalités du site Internet de commerce électronique de médicaments à usage humain Le contenu du site Internet de l'officine est impérativement rédigé en langue française. Toutefois, les pharmaciens mentionnés à l'article 33-5 de la loi n° 1.029 du 16 juillet 1980, susvisée, modifiée, peuvent également proposer une traduction du site dans une ou plusieurs autres langues. L'administration du site Internet, laquelle comprend notamment la gestion des contenus du site Internet à l'exception des données de santé à caractère personnel, ne peut être réalisée que par les pharmaciens mentionnés à l'article 33-5 de la loi n° 1.029 du 16 juillet 1980, susvisée, modifiée. |
Pour bénéficier de cette bourse, le requérant ou la requérante devra :
- être inscrit dans un établissement de l’enseignement secondaire ou supérieur ;
- être de nationalité monégasque, conjoint de Monégasque, de nationalité étrangère dépendant d’un Monégasque, de nationalité étrangère ou orphelin à la charge d’un agent de l’État ou de nationalité étrangère résidant à Monaco depuis au moins dix ans.
Afin que le dossier d’un candidat ou d'une candidate de l’enseignement secondaire soit admissible, cette personne doit obligatoirement être scolarisé dans la principauté au moment de la demande et la langue choisie doit être enseignée dans un établissement scolaire public ou privé de la principauté de Monaco. S’agissant de l’enseignement supérieur, le choix de la langue devra être justifié par rapport au programme des études suivies.
5.5 Les médias
Il n'existe pas beaucoup de réglementation concernant les médias à Monaco, sauf pour TV Monaco. L'Ordonnance souveraine n° 8.705 portant création et organisation du service public national télévisuel (2021) énonce les dispositions suivantes, dont une sur l'usage de la langue française:
Article 4 Au titre de l'exécution de la mission d'intérêt général définie à l'article premier, TV Monaco veille notamment à la production et à la diffusion de programmes de télévision dans le respect de la Constitution ainsi que des lois et règlements en vigueur à Monaco de même que des actes juridiques déterminant ses modalités d'intervention, accompagnés du cahier des charges mentionné à l'article 11. TV Monaco est plus spécialement chargée de concevoir et de programmer, suivant une ligne éditoriale indépendante, des émissions de télévision à caractère national ainsi que de fournir aux usagers du service public national télévisuel des programmes complets, répondant aux exigences énoncées à l'article premier et dans le cahier des charges mentionné à l'article 11. Dans ce cadre, TV Monaco contribue à l'information, à la formation ainsi qu'au divertissement du public et, à ce titre, doit en particulier :
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Les habitants de la principauté de Monaco bénéficient de nombreux médias en français, en italien et en anglais. Pour la presse écrite, citons Monaco Matin (une édition locale de Nice Matin), Monaco Hebdo, L'Observateur de Monaco, Monaco Actualité, Le Petit Journal, Le Journal de Monaco et The Monaco Times. Sauf le dernier, tous les journaux sont en langue française. Il est possible aussi de se procurer la plupart des grands journaux français, britanniques et italiens.
La principauté compte quelques chaînes de radio, dont une seule est monégasque et qui diffuse en français: Radio Monaco. Il faut mentionner aussi Radio Monte-Carlo 1 (français) et Radio Monte-Carlo 2 qui diffuse en italien. Riviera Radio diffuse en anglais. De plus, une grande quantités de stations privées, tant françaises qu'italiennes, diffusent leurs émissions dans la principauté.
Quant à la télévision, il faut compter deux chaînes: Monaco Info et TMC, qui est est détenue à 80 % par le groupe TF1 et à 20 % par l'État monégasque. TMC émet non seulement en principauté de Monaco, mais aussi en France et en Suisse romande. Le 1er septembre 2023, TV Monaco, une chaîne de télévision nationale de service public monégasque, a été inaugurée par le prince souverain Albert II. Elle est destinée à présenter et à promouvoir la culture monégasque au moyen d'émissions en français.
En somme, la politique linguistique de la principauté de Monaco en est une de non-intervention, sauf en ce qui a trait aux écoles. Il s’agit donc d’une politique sectorielle axée sur l’enseignement du français, du monégasque et des langues étrangères, dont au premier chef l’anglais, puis l’italien, l’allemand et l’espagnol. Il est trop tôt pour prédire si l’enseignement du monégasque dans les écoles retardera l’extinction de cette langue. Chose certaine, la langue monégasque serait certainement disparue aujourd’hui si le gouvernement n’avait pas imposé son enseignement dans les écoles primaires et secondaires. Mais cette langue restera une langue scolaire, au mieux une langue seconde. Ainsi, contrairement à la France et à l’Italie, seule la petite principauté de Monaco offre un enseignement de la langue locale à ses citoyens. Ses grands voisins, la France et l'Italie, semblent encore incapables d’en faire autant.
Bibliographie
LECLERC, Jacques. Langue et société, Laval, Mondia Éditeur, coll.
"Synthèse", 1992, 708 p. REY, Alain, Gilles SIOUFFI et Frédéric DUVAL. Mille ans de langue française: histoire d'une passion, Paris, Éditions Perrin, 2007, 1465 p. ROUQUETTE, Rémi. «Le régime juridique des langues en France», Paris, Université de Paris X (Nanterre), thèse de doctorat, septembre 1987, 702 p. TOURTCHINE, Jean-Fred. Le Royaume de Bavière volume III — La Principauté de Monaco, collection «Les Manuscrits du Cèdre». Dictionnaire historique et généalogique, CEDRE (Cercle d'études des dynasties royales européennes), avril 2002, 289 p.
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