Slovénie
2) Données historiques | |
République de Slovénie |
Plan de l'article
1 Les temps plus anciens 1.1 L'Empire romain 1.2 La principauté de Carantanie 2 La domination des Habsbourg 2.1 Le début de la langue slovène 2.2 L'emprise tenace des Habsbourg 3 L'intermède des Provinces illyriennes 3.1 La présence française et ses conséquences 3.2 La résilience de l'identité slovène 4 La montée du nationalisme slovène |
4.2 La radicalisation des identités
5 La Slovénie
yougoslave |
Historiquement, le territoire de la Slovénie a fait partie de nombreux États différents: l'Empire romain et l'Empire byzantin, puis l'Empire carolingien, le Saint-Empire romain germanique, le Royaume de Hongrie, la République de Venise, les Provinces illyriennes du Premier Empire français, l'Empire austro-hongrois et la Yougoslavie. Cette ancienne république constituante de l'ex-Yougoslavie a proclamé son indépendance en juin 1991.
1.1 L'Empire romain
À l’âge du fer, la Slovénie actuelle était habitée par des tribus illyriennes et celtiques, une période qui s'est étendue jusqu’au 1er siècle avant notre ère. À cette époque, les Romains conquirent la région en établissant les provinces de Pannonie et de Norique. Ce qui constitue aujourd’hui l’ouest de la Slovénie fut inclus directement dans l’Italie romaine. L'Empire romain
établit sa domination dans la région au premier siècle de notre ère, après 200
ans de combats avec les tribus locales. Les villes romaines antiques les plus
importantes dans cette région comprenaient Celeia (aujourd'hui Celje), Emona (Ljubljana), Nauportus (Vrhnika) et Poetovio (Ptuj). Le territoire de la Slovénie moderne était divisé entre les provinces romaines de Dalmatie, d'Italie, de Noricum et de Pannonie.
L'arrivée des Huns à la fin du IVe siècle, puis celle des Slaves au VIIe siècle submergèrent les populations romanophones sans les éradiquer totalement. La région subit les invasions en raison de sa position stratégique en tant que principal passage de la plaine pannonienne à la péninsule italienne. Rome abandonna finalement la région à la fin du IVe siècle. |
La plupart des villes furent détruites, tandis que la population locale restante se déplaça vers les zones montagneuses en établissant des villes fortifiées. Au Ve siècle, la région faisait partie du royaume des Ostrogoths, avant d'être annexée à l’Empire byzantin. Les ancêtres slaves des Slovènes actuels arrivèrent dans la région alpine orientale à la fin du VIe siècle. Ils s'installèrent dans la région de la Carinthie (au nord de l'actuelle Solvénie), puis progressèrent vers la Styrie et vers le sud en Slovénie centrale d’aujourd’hui. La Carinthie constitue donc le berceau de la nation slovène. C'est autour d'un noyau slave constitué que se sont construites des racines ethniques générées à partir de groupes autochtones slaves, germaniques et celtiques. Ce regroupement se voulait une coalition visant à se protéger de la domination des Avars, une alliance de plusieurs groupes de nomades d'origine turco-mongole.
1.2 La Carantanie
La première formation nationale slovène connue est le duché puis la principauté de Carantanie, célèbre pour son organisation démocratique, son système judiciaire, l’élection populaire de ses princes et les droits progressistes des femmes. Cette principauté prit place entre 630 et 745, avec comme centre le château de Krn, près de Klagenfurt en Autriche. Cette principauté slave occupait principalement le territoire des actuelles Carinthie autrichienne et Carinthie slovène.
En raison de la menace des Avars, cette coalition réunit des Slaves, des Bavarois et même des Francs vers l'an 743. La partie orientale de la principauté de Carantanie (en slovène, Karantanija; en allemand, Karantanien) fut gouvernée à nouveau par les Avars entre 745 et 795. Cette principauté médiévale était centrée sur l'actuel land de Carinthie autrichienne et la Carinthie slovène, tout en comprenant quelques zones de la Styrie et Basse-Styrie, du Tyrol oriental (dans l'actuelle Autriche). La Carantanie fut annexée en 745 par le duché de Bavière, mais resta peuplée par les Slaves de l’actuelle Slovénie. La région fut incorporée dans l’Empire carolingien, ce qui entraîna une certaine colonisation allemande, tandis que les Carantaniens et autres Slaves vivant dans l’actuelle Slovénie se convertirent au christianisme. Néanmoins, la plus importante ethnie de la Carantanie demeura celle des Slaves installés dans les Alpes orientales au VIe siècle. Les habitants de la Carantanie sont considérés comme les précurseurs et les ancêtres de la Slovénie. |
À partir du IXe siècle, le territoire de ce qui est aujourd'hui la Slovénie subit le passage d'un envahisseur à l'autre au gré des puissances voisines, que ce soit la Bavière, la république de Venise ou les Habsbourg. Entre le IXe et le XIIe siècle, les proto-Slovènes se répandirent dans le nord de l'Istrie et dans les régions autour de Trieste (Italie). Au Xe siècle, après la partition de l'Empire franc, les terres où habitaient les locuteurs du proto-slovène furent attribuées à des seigneurs de langue allemande, qui assujettirent les habitants au servage; ces derniers étaient alors appelés Wenden ou Winden. Dans l'Europe germanophone au Moyen Âge, le terme Wenden était interprété comme synonyme de «Slaves» et sporadiquement employé dans la littérature pour désigner les Slaves de l'Ouest et les Slaves du Sud vivant au sein du Saint-Empire romain germanique.
2.1 Le début de la langue slovène
Les documents les plus anciens écrits en slovène datent de la fin du Xe siècle; il s'agit des manuscrits de Freising, une ville située aujourd'hui en Bavière. Les premiers exemples connus d'une langue slovène distincte proviennent des manuscrits de Freising, connus en slovène sous le nom de "Brižinski spomeniki". L'estimation consensuelle de leur date d'origine se situe entre 972 et 1039 (très probablement avant 1000). Comme toutes les langues slaves, le slovène tire ses origines du même groupe de langues proto-slaves, lesquels ont produit le vieux slavon d'église.
Au XVe siècle, la plupart des régions du Nord furent progressivement germanisées : la frontière septentrionale du territoire de langue slovène s'est stabilisée sur la ligne allant du nord de Klagenfurt au sud de Villach et à l'est d'Hermagor en Carinthie, tandis qu'en Styrie c'était à peu près identique à l'actuelle frontière austro-slovène. Cette frontière linguistique est restée presque inchangée jusqu'à la fin du XIXe siècle, lorsqu'une deuxième période de germanisation eut lieu, principalement en Carinthie. Pendant la majeure partie du Moyen Âge, le slovène fut une langue vernaculaire de la paysannerie, bien qu'il aie été également parlé dans la plupart des villes du territoire slovène, avec l'allemand ou l'italien. Au cours de cette période, l'allemand devint la langue parlée de la noblesse, mais le slovène joua un rôle restreint dans la vie de cour de la noblesse des régions historiques de la Carinthie, de la Carniole et de la Styrie. |
Du haut Moyen Âge jusqu'à la dissolution de l'Empire austro-hongrois en 1918, sur le territoire de la Slovénie actuelle, l'allemand demeura la langue de l'élite, tandis que le slovène était la langue du peuple. Alors que les élites se sont germanisées, les paysans ont résisté à la germanisation et ont conservé leur langue et leur culture esclaves uniques. Même si la plupart des Slovènes sont devenus protestants, la région fut «recatholisée» sous le règne de l'archiduc Ferdinand II d'Autriche intérieure, qui a régné de 1590 à 1637.
Au cours de cette période médiévale, la langue allemande eut une forte influence sur le slovène, car de nombreux germanismes sont encore employés dans le slovène familier contemporain. Même les scientifiques slovènes rédigeaient généralement leurs travaux dans des langues étrangères, principalement en allemand, qui était à l'époque la lingua franca de la science dans toute l'Europe centrale.
Au cours du Moyen Âge, du fait de la proximité de l’Empire ottoman, les territoires slovènes subirent, pendant de longues années, la pression des Ottomans qui, à partir des Balkans, envahirent les contrées européennes.
2.2 L'emprise tenace des Habsbourg
Au cours du XIVe siècle, la plupart des terres slovènes étaient déjà sous la domination des Habsbourg. L'empereur du Saint-Empire romain germanique, issu de la maison de Habsbourg, était devenu souverain des territoires héréditaires des Habsbourg et, en tant qu'archiduc d'Autriche, était roi de Bohême, de Hongrie et de Croatie. Les Slovènes vivaient dans la région administrative connue sous le nom d’Autriche intérieure (Innerösterreich en allemand et Notranja Avstrija en slovène), c'est-à-dire l'ensemble des territoires du Saint-Empire gouvernés par la maison autrichienne des Habsbourg : les duchés de Styrie, de Carinthie et de la Carniole, ainsi que les possessions du Littoral autrichien. La ville capitale était Graz en Styrie. Les Slovènes formaient la majorité de la population de ces régions, mais ils habitaient aussi dans le comté de Gorizia et Gradisca (aujourd'hui dans la région autonome du Frioul-Vénétie Julienne) et dans la plus grande partie du territoire de la ville libre impériale de Trieste, bien que représentant la minorité de sa population. |
- La réforme protestante
Au XVIe siècle, la réforme protestante se répandit dans tout le territoire slovène, lequel n'était pas encore un pays, ni un duché, ni un comté. C'était seulement une région administrative de la Hongrie («Autriche intérieure»). C'est au cours de cette période que les premiers ouvrages en slovène furent écrits, notamment par les prédicateurs protestants, établissant ainsi la base du slovène standard. Dans la seconde moitié du XVIe siècle, de nombreux livres furent imprimés en slovène, dont une traduction intégrale de la Bible. Au cours de la Contre-Réforme à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe, presque tous les protestants furent expulsés des terres slovènes (à l'exception de la Prémurie). Néanmoins, ces derniers laissèrent un héritage important dans la tradition slovène, dont l'ancienne orthographe slovène, également connue sous le nom d'alphabet de Bohorič, qui est resté en usage jusqu'au milieu du XIXe siècle.
Entre la fin du XVe et le début du XVIIIe siècle, les terres slovènes furent le théâtre de nombreuses guerres, que ce soit les guerres entre la monarchie des Habsbourg et la République de Venise ou celles des paysans slovènes paysannes (1515, 1573, 1635 et 1713). Aux XVIIe et XVIIIe siècles, une partie du territoire de l'Istrie slovène (correspondant presque entièrement aux municipalités actuelles de Koper, d'Izola et de Piran) fut sous domination vénitienne. Au cours de cette période, la population de la zone côtière, qui avait parlé divers idiomes romans adopta la langue vénitienne. Durant cette période, de nombreux artistes italiens, principalement des architectes et des musiciens, installés dans les terres slovènes, se sont démarqués par leur vive activité intellectuelle et artistique, ce qui contribua grandement au développement de la culture locale. Conformément à la coutume religieuse des seigneurs provinciaux, il y eut une suppression du protestantisme au XVIIe siècle, mais celui-ci a persisté en Prémurie, qui était sous contrôle hongrois.
La ville adriatique de Trieste fut déclarée port franc en 1718, ce qui stimula les activités économiques dans toute la partie occidentale des régions slovènes. À la fin du XVIIIe siècle, un processus de standardisation du slovène débuta, car les locuteurs de cette langue se trouvaient dispersés en de nombreuses variétés dialectales. Au cours de la même période, des paysans-écrivains commencèrent à promouvoir la langue vernaculaire slovène dans les campagnes, bien que l'allemand soit resté la langue principale de la culture, de l'administration et de l'éducation, et ce, jusqu'au XIXe siècle.
- La langue allemande
À la suite de la dissolution du Saint-Empire romain germanique en 1804, l'empire d'Autriche intégra de nombreux territoires que sont les pays actuels: l'Autriche, la Hongrie, la République tchèque (Bohême et Moravie), la Slovaquie, la Slovénie, la Croatie et une partie du nord de l'Italie (Lombardie). Forcément, les Slovènes devinrent hongrois. L'époque de Marie-Thérèse d'Autriche (1717-1780) marqua le début de l'organisation des écoles primaires et secondaires, car la bureaucratie de l'État autrichien avait toujours besoin d'une population instruite dans laquelle elle pouvait trouver de nouveaux fonctionnaires. Mais la centralisation de l'administration de l'État entraîna aussi l'introduction de l'allemand comme langue officielle.
3 L'intermède des Provinces illyriennes
Pour une courte durée, soit entre 1805 et 1813, le territoire habité par les Slovènes fit partie des Provinces illyriennes, une province autonome de l' Empire français napoléonien, dont la capitale était fixée à Ljubljana. Ce territoire regroupait des zones de la Carinthie de l'Ouest et le Tyrol oriental, l'Istrie, les villes de Trieste et de Gorizia, la Carniole, la Croatie au sud de la Save, la Dalmatie et la ville de Raguse.
3.1 La présence française et ses conséquences Malgré la durée relativement courte de la présence française dans les «Provinces illyriennes», celle-ci eut comme conséquence d'influencer, entre autres, les populations slovènes. En effet, la Révolution française introduisit l'égalité devant la loi, l'abolition de certains privilèges fiscaux, la séparation de l'Église et de l'État, l'instauration d'une administration moderne, la conscription obligatoire, l'apprentissage du français comme discipline obligatoire, l'admission d'une «langue provinciale» dans les écoles, dont le slovène, etc. En plus des droits linguistiques acquis par le slovène dans les écoles publiques sous le régime français, il faut ajouter la désignation de Ljubljana comme capitale des Provinces illyriennes, ainsi que la création des écoles centrales, transformées plus tard en Académie, et l'instauration d'un établissement d'enseignement supérieur avec tous les attributs d'une véritable université. Bien que ces changements dans le domaine scolaire aient pu être bénéfiques, ils n'ont pu entraîner d'effets définitifs parce qu'ils n'ont été appliqués seulement durant trois années scolaires. En raison des mauvaises conditions économiques et sociales, de nombreuses écoles slovènes ont dû fermer, les municipalités étant incapables de faire face aux nouvelles obligations. |
3.2 La résilience de l'identité slovène
Néanmoins, la présence française, en dépit de ses déboires et erreurs, révéla la résilience de l'identité slovène par la reconnaissance du slovène comme langue d'enseignement dans les écoles primaires et secondaires. C'est ainsi que les Slovènes des régions à population slovénophon se sont rendu compte qu'ils avaient le droit d'exister comme nation, ce qu'ils n'avaient jamais obtenu sous le régime autrichien. C'est également sous le court régime français que les premiers manuels en slovène furent rédigés et publiés. La guerre contre les Français convainquit également de nombreux citoyens, dont les Slovènes, que leur État autrichien n'était guère invincible. Cette prise de conscience eut comme conséquence un renforcement des mouvements nationalistes qui ont reçu un fort soutien des mouvements italiens et allemands pour leur propre unification nationale.
Le linguiste et philologue Jernej Kopitar (1780–1844) fut l'un des artisans de «renaissance slave» au sein de l'Empire autrichien. Encore à cette époque, le slovène était une langue rurale et ouvrière où tous les termes savants ou techniques étaient allemands. Kopitar et ses successeurs ont créé, recréé ou retrouvé un vaste lexique slave pour remplacer ces les mots germaniques, mais rares sont les Slovènes qui l'ont entièrement adopté au point de le maîtriser. Ayant découvert de nombreux mots empruntés au latin et à l'allemand, Kopitar émit l'hypothèse que ces mots n'étaient présents dans la langue slave parlée par la population que dans les zones proches du latin et de l'allemand. Sous l'influence des efforts d'un groupe de philologues slovènes de Carinthie contemporains, en particulier Urban Jarnik (1784-1844) et Matija Ahacel (1779-1845), Kopitar chercha à former une nouvelle génération de linguistes qui développeraient des grammaires et des manuels, préconiseraient une réforme orthographique et favoriseraient la littérature populaire. En 1808, Jernej Kopitar publia en allemand la Grammatik der Slavischen Sprache in Krain, Kärnten und Steyermark ("Grammaire de la langue slave en Carniole, en Carinthie et en Styrie"). Grâce à ces efforts, il obtient une chaire en slovène au Ljubljana Lyceum en 1817. |
Au début des années 1830, Kopitar s'impliqua dans «la guerre de l'alphabet slovène» (en slovène : Abecedna vojna, ou Črkarska pravda), un débat sur la réforme de l'orthographe. Il soutint des réformes radicales qui minèrent sa crédibilité pour ses opposants. Finalement, un compromis fut trouvé avec un alphabet latin adapté. Il fut connu et respecté dans certaines capitales européennes, dont Vienne, Paris, Londres et Rome).
Voici quelques exemples d'emprunts à l'allemand en slovène: abschlesen («lu» ou «relu»), augenmascharfen («avoir l'oeil» ou «regard accrocheur»), baulast («pesant» ou «chargé»), vater («père»), Fussball («football»), Klapper («véhicule vétuste»), Gesicht («visage»), schlampast («négligé», «bâclé»), schlechter («pire»), Iässig («tranquille»), Makaronfleisch («viande pour pâtes» et par métonymie «sauce bolognaise»), Knödel («boulette»), Nudeln («nouilles»), Butter («beurre»), Bohrenmaschine («perceuse»), Schnittlauch («ciboulette»), Schnitzel («escalope»), Suppe («soupe»), scharf («pimenté», «épicé»), zwingen («renforcer»), asenbriefer («graveur de lettres»). Aujourd'hui, les emprunts anglais ont tendance à remplacer les Allemands, et beaucoup de gens considèrent que les "slovénismes" sont soit archaïques, soit snobs.
En août 1813, l'Autriche déclara la guerre à la France. Par conséquent, les troupes autrichiennes envahirent les Provinces illyriennes. Toutes les régions slovènes redevinrent autrichiennes, mais progressivement les Slovènes développèrent une conscience nationale distincte et se mirent à rêver d'une unification politique de tous les Slovènes.
4 La montée du nationalisme slovène
Au cours des décennies de 1820 à 1840, l'intérêt pour la langue et le folklore slovènes augmenta considérablement, de même les travaux de nombreux philologues rassemblant des chansons folkloriques et faisant les premiers pas vers une standardisation de la langue. En 1848, un mouvement politique et populaire «pour la Slovénie unie» ("Zedinjena Slovenija") émergea dans le cadre du mouvement du «Printemps des Nations» au sein de l'Empire autrichien. Les militants slovènes exigèrent l'unification de tous les territoires de langue slovène dans un royaume slovène unifié et autonome au sein de l'Autrichien. Bien que ce projet devait échouer, il servit de plate-forme à l'activité politique slovène au cours des décennies suivantes.
4.1 Les influences linguistiques étrangères
Lors de la montée du nationalisme au XIXe siècle, le mouvement culturel du panslavisme introduisit dans la langue slovène des mots du serbo-croate, en particulier des parlers croates, ainsi que du tchèque, principalement pour remplacer des mots précédemment empruntés à l'allemand. La plupart de ces innovations lexicales sont restées aujourd'hui, bien que certaines d'entre elles aient été abandonnées lors de développements ultérieurs. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, de nombreux auteurs slovènes nationalistes firent un usage abondant des mots serbo-croates, dont Josip Jurčič (1844-1881) qui écrivit le premier roman en slovène en 1866. À la fin du XIXe siècle, Trieste était devenue la plus grande ville slovène de l'Europe, ayant eu plus d’habitants slovènes que Ljubljana.
Entre 1848 et 1918, de nombreuses institutions, dont des théâtres et des maisons d'édition, ainsi que des organisations politiques, financières et culturelles, furent fondées dans ce qu'on a appelé le «Réveil national slovène» ("Slovensko narodno prebujanje"). Avec l'introduction d'une constitution accordant les libertés civiles et politiques dans l'Empire autrichien en 1860, le mouvement national slovène prit de l'ampleur, notamment en appelant à une autonomie culturelle et politique du peuple slovène. À la fin des années 1860 et au début des années 1870, une série de rassemblements de masse appelés "tabori", s'organisèrent afin de soutenir l'idéologie de la «Slovénie unie» ("Zedínjena Slovénija"). À la fin du XIXe siècle, les Slovènes avaient réussi à élaborer une langue standardisée et une société civile florissante. Les niveaux d'alphabétisation étaient parmi les plus élevés de l'Empire austro-hongrois et de nombreuses associations nationales étaient présentes au niveau local. C'est alors que l'idée d'une entité politique commune de tous les Slaves du Sud, connue sous le nom de Yougoslavie, émergea.
4.2 La radicalisation des identités
Au tournant du XXe siècle, les luttes nationales dans les régions ethniquement mixtes, en particulier en Carinthie, à Trieste et dans les villes de la Basse-Styrie, dominèrent la vie politique et sociale des habitants. Dans les années 1910, les luttes nationales entre les slovénophones et les italophones du Littoral autrichien, et entre les slovénophones et les germanophones, éclipsèrent d'autres conflits politiques et provoquèrent une radicalisation nationaliste des deux côtés. Au tournant du siècle, des centaines de milliers de Slovènes émigrèrent vers d'autres pays, principalement aux États-Unis, mais aussi en Amérique du Sud , en Allemagne, en Égypte et dans les grandes villes de l'Empire austro-hongrois, surtout Zagreb et Vienne. On estime qu'environ 300 000 Slovènes émigrèrent entre 1880 et 1910, ce qui signifie qu'un Slovène sur six aurait quitté son pays d'origine.
Malgré tout, dans les deux décennies avant la Première Guerre mondiale, les arts et la littérature slovènes connurent l'une de ses périodes les plus florissantes, avec de nombreux auteurs, peintres et architectes modernistes. Au cours de cette période, environ un tiers de la population de la ville de Trieste était slovénophone, de telle sorte que le nombre de Slovènes à Trieste était plus élevé qu'à Ljubljana. Bien sûr, les municipalités slovènes (Idrija, Ajdovščina, Vipava, Kanal, Postojna, Pivka et Ilirska Bistrica) allaient être soumises à une italianisation forcée. La minorité slovène en Italie (1920-1947) n'eut aucune protection minoritaire en vertu du droit international ou national.
La Première Guerre mondiale, déclenchée par un ultimatum de la part de l'Empire austro-hongrois au Royaume de Serbie entraîna la fin de l'Autriche-Hongrie qui ne survécut pas à sa défaite. L'Empire fut en effet démantelé en sept États-nations (voir la carte de l'Europe en 1914 et en 1919) et de nouvelles frontières furent tracées et reconnues lors de la signature des traités de Saint-Germain-en-Laye en 1919 et du Trianon en 1920 : la république d’Autriche, la régence de Hongrie, la Tchécoslovaquie, la république de Pologne, le Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes (future Yougoslavie titiste), le royaume de Roumanie et le royaume d’Italie.
On distingue trois Yougoslavie. La première, qui prit le nom de Royaume de Yougoslavie en 1929 dans l'entre-deux-guerres, fut dominée par la monarchie serbe. La seconde, la République fédérale socialiste de Yougoslavie, sur laquelle régna Tito jusqu'à sa mort en 1980, prit fin en 1991 avec la sécession de la Slovénie et de la Croatie, suivies des déclarations d'indépendance de la Macédoine et de la Bosnie-Herzégovine. La Serbie et le Monténégro proclamèrent alors la troisième Yougoslavie: la République fédérale de Yougoslavie (RFY), qui correspond essentiellement au règne de Slobodan Milosevic (1992-2000), mais la Slovénie était devenue indépendante.
5.1 Le Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes (1918)
Pendant la
dissolution de l'Empire austro-hongrois au lendemain de la Première Guerre
mondiale, un Conseil national des Slaves du Sud, c'est-à-dire les Slovènes, les
Croates et les Serbes, prit le pouvoir à Zagreb, le 6 octobre 1918. Le 29
octobre, l'indépendance fut déclarée par un rassemblement national à Ljubljana
et par le Parlement croate, déclarant la création du nouvel État des Slovènes,
des Croates et des Serbes, auxquelles se sont joints les représentants de la
Bosnie-Herzégovine. Le 31 octobre 1918, le nouvel État fut officiellement
proclamé indépendant de l'Autriche et de la Hongrie. Le 1er
décembre, l'État des Slovènes, des Croates et des Serbes fusionna avec la
Serbie, ce qui créait le nouveau Royaume des Serbes, des Croates et des
Slovènes, sous l'égide de la dynastie serbe des Karađorđević. Ce royaume se
trouvait ainsi constitué par la fusion de
l'État des Slovènes, des Croates et des Serbes qui rassemblait les populations
slovènes, croates et serbes de l'ancienne Autriche-Hongrie, avec les royaumes de
Serbie et du Monténégro, réunis trois jours auparavant. De plus, la Bulgarie
avait rendu la Macédoine à la Serbie, ce qui agrandit aussi la Voïvodine avec
ses minorités allemandes, hongroises et roumaines, et récupéra la Métohie
(Kosovo) dont la moitié de la population était albanaise.
Le 31 octobre 1918, le nouvel État fut officiellement proclamé indépendant de l'Autriche et de la Hongrie. Le 1er décembre, l'État des Slovènes, des Croates et des Serbes fusionna avec la Serbie, ce qui créait le nouveau Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes, sous l'égide de la monarchie serbe des Karađorđević. |
Ce royaume se trouvait ainsi constitué par la fusion de l'État des Slovènes, des Croates et des Serbes; il rassemblait les populations slovènes, croates et serbes de l'ancienne Autriche-Hongrie, avec les royaumes de Serbie et du Monténégro, lequel avait intégré le royaume serbe trois jours auparavant. De plus, la Serbie avait repris le contrôle de la Macédoine qu'elle avait intégrée à son royaume, ainsi que les Hongrois de la Voïvodine et des Albanais du Kosovo.
En octobre 1920, la population du sud de la
Carinthie vota majoritairement pour rester en Autriche, de telle sorte que seule
une petite partie de la province fut intégrée au royaume des Serbes, des Croates
et des Slovènes. Par le traité de Trianon, le Royaume reçut la région de la
Prémurie
habitée par les Slovènes, mais qui appartenait à
la Hongrie depuis le Xe siècle. Quant à l'Italie, en vertu du traité
de Londres (1915) et du traité de Rapallo (1920), elle s'est vu accorder un
tiers du territoire slovène à l'ouest, y compris Trieste et des zones qui
étaient exclusivement de langue slovène, ce qui touchait 327 000 personnes sur
une population totale de 1,3 million de Slovènes. En 1921, contre le vote de 70 % des députés slovènes (mais avec l'accord de la grande majorité des députés serbes) le Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes adopta une constitution passant du «droit du sang» au «droit du sol» et divisant son territoire en «banovines» géographiques, ne correspondant que partiellement aux anciennes provinces historiques et aux langues parlées dans le royaume. La gouvernance devint alors très centralisatrice. De plus, l'Assemblée constitutionnelle avait adopté la Constitution à la majorité simple de 223 voix pour et 35 voix contre, mais 158 députés étaient absents. |
Seuls deux articles de cette constitution de 1921 portaient sur la langue:
Члан 16
13) Мањинама друге расе и језика даје се основна настава на њиховом материнском језику под погодбама, које ће прописати закон. 1) За посланика у Народној Скупштини може бити изабран само онај, који има бирачко право, без обзира је ли уведен у бирачки списак. 2) Од сваког се посланика траже ови услови: да је држављанин по рођењу или прирођењу Краљевине Срба, Хрвата и Словенаца. 3) Прирођени држављанин, ако није народности српско-хрватскословеначке, мора
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Article 16
13)
Les minorités d'autres races et d'autres langues reçoivent un enseignement de base dans leur langue maternelle en vertu d'accords qui seront prescrits par la loi. 1) Seule une personne ayant le droit de vote peut être élue député à l'Assemblée nationale, qu'elle ait ou non été inscrite sur la liste électorale. 2) Les conditions suivantes sont exigées de chaque député : être citoyen de naissance ou de naissance du Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes. 3) Un citoyen naturel, s'il n'est pas de nationalité serbo-croate-slovène, doit :
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Il n'y avait donc pas de langue officielle, mais le texte constitutionnel était rédigé en serbe (voir le texte ci-dessus). Cette constitution démontrait aussi de grandes divergences de la part des partis politiques relevant des principaux groupes ethniques. Il paraissait aussi évident que ce royaume avait été présenté par des hommes d'État serbes, qui savaient employer la peur tant des Croates à l'égard des Italiens que des Slovènes à l'égard des Italiens et des Autrichiens, de sorte que les représentants croates et slovènes ont consenti à accepter l'union avec la Serbie et la monarchie serbe. En dépit de cette situation vexante, les Slovènes réussirent à maintenir un niveau acceptable d'autonomie culturelle et économique.
5.2 Le Royaume de Yougoslavie de 1929
Le roi Alexandre Ier, de la dynastie des Karađorđević, supprima toutes les instances politiques du royaume pour laisser la place à un régime centralisé et policier appuyé par l'armée, ce qui fut perçu comme le triomphe de l'hégémonie serbe sur le pays.
Le 3 octobre 1929, le pays fut renommé «royaume de Yougoslavie» et redécoupé de façon à occulter les anciennes frontières historiques. Le pays fut divisé en neuf nouvelles provinces appelées «banovines» (ou banat) : la Drave (ou Drava pour la Slovénie), la Save (ou Sava), le Vrbas, le Littoral (ou Primorska), la Drina, le Danube (ou Dunavska), la Morava (ou Moravska), la Zeta et le Vardar. Ces territoires furent découpés selon des critères strictement géographiques de façon à supprimer les frontières ethniques. Bien que le roi ait voulu imposer l’idéologie d’une nation yougoslave unifiée, il ne put supprimer la grande diversité nationale. Dépourvu d’une base solide, le roi tenta d’améliorer ses appuis en dotant le royaume d’une constitution en septembre 1931. Cette dernière confiait au souverain l’essentiel du pouvoir législatif, en interdisant les anciens partis politiques et en restreignant les libertés publiques. |
Toutefois, le nationalisme des Croates, des Albanais et des Macédoniens se radicalisa. Le royaume de Yougoslavie fut confronté à la résistance armée dans la banovine du Vardar, essentiellement les Albanais du Kosovo et les Macédoniens favorables au rattachement à la Bulgarie. Les insurrections furent durement réprimées; les familles des insurgés, déportées dans des camps d’internement; leurs propriétés, confisquées. Les représentants politiques albanais déploraient des milliers de victimes, probablement près de 100 000 (mais moins de 5000 de la part des autorités). La Slovénie s'appela dorénavant "Drava Banovin", la «banovine de la Drave». Durant l'entre-deux-guerres, les électeurs slovènes appuyèrent fortement le Parti populaire slovène conservateur; celui-ci lutta en vain pour l'autonomie de la Slovénie au sein d'une Yougoslavie fédéralisée. Mais la crise économique créa un terrain fertile pour la montée des radicalismes de gauche et de droite. En 1937, le Parti communiste de Slovénie fut fondé en tant que parti autonome au sein du Parti communiste de Yougoslavie.
- L'intermède allemand
Lors d'un voyage officiel en France en 1934, Alexandre Ier fut assassiné à Marseille par un nationaliste bulgare, membre de l'Organisation révolutionnaire intérieure macédonienne. L’héritier au trône, Pierre II de Yougoslavie, étant mineur, une régence fut instituée et dirigée par le prince Paul Karadjordjević. En 1941, le régent Paul signa une alliance avec l'Allemagne nazie, ce qui occasionna un coup d'État de la part des officiers favorables aux Alliés. En représailles, Hitler fit alors envahir la Yougoslavie qui capitula le 17 avril 1941.
Le IIIe Reich démantela aussitôt la Yougoslavie qui fut partagée entre les vainqueurs de la guerre en fonction de leurs intérêts stratégiques ou de leurs prétentions nationales. Les Allemands occupèrent la Serbie réduite à ses frontières de 1912 et annexèrent la Slovénie du Nord à l'Autriche, avec Maribor comme capitale. De leur côté, les Italiens occupèrent la Slovénie du Sud (avec Ljubljana comme capitale), ainsi que la Dalmatie, le Monténégro, l'Albanie, le Kosovo et une partie de la Macédoine qu'ils annexèrent en une Grande Albanie (voir la carte albanophone). De plus, ils créèrent une Croatie indépendante alliée, incluant la Bosnie-Herzégovine. La Hongrie annexa à son territoire la Voïvodine, ainsi que d'autres régions limitrophes. Enfin, la Bulgarie annexa la partie orientale de la Macédoine.
L’Allemagne nazie eut à faire face à des mouvements de résistance importants, notamment les tchetniks (nationalistes serbes) du colonel royaliste Draza Mihajlović et les partisans du chef communiste croate Josip Broz, dit Tito. En 1943, aidés par l’Armée rouge, les titistes finirent par l'emporter sur les divisions allemandes, libérant Belgrade en 1944 et Zagreb en 1945, ensuite la majeure partie du pays. |
- L'Istrie
Pendant ce temps, le 13 septembre 1943, le Comité populaire pour la libération de l’Istrie mit fin à la souveraineté italienne sur ce territoire et annexa l’Istrie et Fiume dans la Croatie. Les accords avec l’Italie furent déclarés nuls et les fonctionnaires italiens furent remplacés par des Slaves. En Istrie, l’administration italienne ne tarda pas à être slavisée et la totalité des registres publics fut brûlée.
5.3 La République fédérale socialiste de Yougoslavie
Au moment de sa création en novembre 1945 par le chef communiste croate Josip Broz dit Tito, la République fédérale socialiste de Yougoslavie était une fédération formée de six républiques et de deux régions autonomes.
La composition ethnique de ce nouveau pays, alors de 23 millions d’habitants, était relativement complexe, car on y comptait plus d'une vingtaine de communautés linguistiques. Au nombre de six, les nations correspondaient aux ethnies d'origine slave: les Serbes, les Croates, les Macédoniens, les Slovènes, les Monténégrins et ceux qu'on appelait les «Musulmans», ces Slaves de religion musulmane parlant un croate fortement turquisé. À eux seuls, les Serbes et les Croates formaient 66 % de la population. Le
serbo-croate de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine s’écrivait en alphabet latin, celui de la Serbie et du Monténégro, en cyrillique.
Quant aux nationalités, elles correspondaient aux communautés qui ne disposaient pas d'une république assignée: les Albanais du Kosovo, les Hongrois de Voïvodine, les Bulgares, les Tchèques, les Roumains, les Italiens, les Allemands, les Ruthènes, les Turcs, les Ukrainiens, les Valaques, les Roms/Tsiganes, etc. La Yougoslavie titiste était un pays très multilingue et les républiques «ethniques» reconnues formellement ne correspondaient pas toujours à la réalité.
Sauf en Slovénie et un peu au Kosovo, les populations dans chacune des républiques yougoslaves demeuraient très diversifiées à peu près partout, notamment en Bosnie-Herzégovine et en Voïvodine, mais aussi en Croatie et en Serbie, au point où de nombreux citoyens ont préféré se déclarer «yougoslaves» lors des recensements fédéraux. |
- Le nationalisme slovène
L'intégration de la Slovénie dans la République fédérale socialiste de Yougoslavie eut pour effet de faire renaître l'identité slovène. Des écoles et des universités furent instituées. La Slovénie fut la seule république de l'ex-Yougoslavie à avoir toujours eu une population relativement homogène avec une majorité sans équivoque (les Slovènes). Très fortement influencée par son héritage austro-hongrois, la Slovénie constituait un cas particulier. Déjà à l’époque de Tito, c’est en Slovénie que le niveau de vie était le plus élevé. Néanmoins, la naissance de la Yougoslavie fut aussi une tragédie pour les Slovènes, car conformément à la décision du Pacte de Londres un bon tiers de leur territoire s'est retrouvé en Italie, la majorité des Slovènes de Carinthie ne voulaient pas rejoindre la Yougoslavie, et certains Slovènes sont restés en Hongrie, tandis que des Hongrois ont rejoint la Yougoslavie.
La Constitution (1946) de la République populaire fédérale de Yougoslavie ne mentionnait aucune langue officielle. L'article 13 déclarait que «les minorités nationales de la République populaire fédérale de Yougoslavie jouissent du droit et de la protection de leur développement culturel et du libre usage de leur langue». L'article 65 énonçait que «les lois et autres règlements généraux de la République populaire fédérale de Yougoslavie sont publiés dans les langues des républiques populaires». Bref, il n'existait pas de langue officielle pour la fédération. En outre, seul le serbo-croate était utilisé comme langue de communication au niveau fédéral, tandis que le slovène n'était valable que sur le territoire de la Slovénie qui s'appelait alors la République populaire de Slovénie.
Entre 1945 et 1948, une vague de répressions politiques eut lieu en Slovénie. Des milliers de Slovènes furent emprisonnées pour leurs convictions politiques. Plusieurs dizaines de milliers de Slovènes quittèrent leur république immédiatement après la guerre par crainte des persécutions communistes. Beaucoup d'entre eux s'installèrent en Argentine, qui devint le noyau de l'émigration anticommuniste slovène. Plus de 50 000 autres ont suivi au cours de la décennie suivante, souvent pour des raisons économiques, ainsi que politiques. Ces dernières vagues d'immigrants slovènes se sont principalement installées au Canada et en Australie, mais aussi dans d'autres pays occidentaux.
- Le Territoire libre de Triste
À l'issue de la Seconde Guerre mondiale, par une décision du Conseil de sécurité des Nations unies du 10 janvier 1947 et officialisé en 1947 par le traité de Paris, le Territoire libre de Trieste (en italien :
Territorio libero di Trieste ; en slovène : Svobodno tržaško ozemlje) fut créé. Il s'agissait d'un État neutre placé sous contrôle de l'Organisation des Nations unies (ONU). L'éphémère «Territoire libre de Trieste» fut divisé en deux zones: la zone A, qui comprenait Trieste, était sous l'administration militaire anglo-américaine, alors que la zone B, qui comprenait le littoral slovène et l'Istrie, revenait à l'armée yougoslave, la zone étant au sein de celle-ci partagée entre la Croatie et la Slovénie qui retrouvait ainsi un accès à la mer.
La partie du Territoire libre situé en zone A comptait 311 000 habitants en grande majorité des Triestins italophones, ce qui comprenait la ville de Trieste; l'autre partie, située en zone B, comptait 54 000 habitants en majorité des Istriens, dont 40 000 italophones, mais aussi des Slovènes et des Croates. Les villes de Koper, d'Izola et de Piran, enclaves urbaines peuplées d'Italiens, allaient vivre une émigration massive des Italiens et des anticommunistes en raison de la poursuite de l'exode de l'Istrie. Les langues officielles étaient de facto l'italien et le slovène, éventuellement avec l'emploi du serbo-croate dans la partie de la zone B au sud de la Dragonja. En 1954, à la suite du Mémorandum de Londres, les Alliés se retirèrent des deux zones occupées et laissèrent la zone A aux mains de l'Italie et la zone B aux mains de la Yougoslavie, garantissant que les citoyens des deux zones pouvaient choisir dans l'année suivant le retrait, lequel des deux territoires qu'ils souhaitaient résider, mais en renonçant à tous les biens et avoirs situés dans l'autre territoire. |
- La question linguistique
Sous la République fédérative socialiste de Yougoslavie, la Constitution de 1963 était plus explicite en matière de langue avec cinq articles. Cependant, seuls deux articles mentionnent nommément les langues:
Article 42 1) Les langues des peuples de Yougoslavie et leurs écritures sont égales. 2) Les membres du peuple yougoslave ont, conformément à la loi de la République, le droit de recevoir leur instruction dans leur propre langue sur le territoire d'une autre république. 3) Exceptionnellement, dans l'armée populaire yougoslave, le commandement, la formation militaire et l'administration sont donnés en serbo-croate. Article 131 |
Il faut retenir à l'article 42 que le serbo-croate devait servir de façon exceptionnelle comme langue de commandement dans l'armée yougoslave, mais ce n'était pas la langue officielle de la fédération. De fait, l'article 131 énonce que les lois fédérales devaient être publiées «dans les langues des peuples de Yougoslavie», c'est-à-dire en serbo-croate ("srpsko hrvatskom") ou en croato-serbe ("hrvatsko srpskom"), en slovène ("slovenačkom") et en macédonien ("makedonskom"). Bref, il y a trois langues plus égales que les autres parmi «les langues des peuples de Yougoslavie» : le serbo-croate, le slovène et le macédonien. Les autres langues étaient considérées comme les «langues des nationalités». Le slovène demeurait l'une des langues employées de la fédération, mais sur le territoire de la Slovénie, il était couramment utilisé dans presque tous les domaines de la vie publique. Une exception importante était l'armée yougoslave, où le serbo-croate était utilisé exclusivement, même en Slovénie.
À la fin des années 1960, la faction réformiste a pris le contrôle du Parti communiste slovène, lançant une série de réformes visant à la modernisation de la société et de l'économie slovènes. Par la suite, la censure et la répression de la presse et des artistes s'accrurent, tandis que la liberté d'expression déclina. De nombreux Slovènes furent emprisonnés en raison de leurs convictions politiques.
- Le traité d'Osimo de 1975
Le traité d'Osimo (officiellement: Traité entre la République fédérale socialiste de Yougoslavie et la République italienne) fut signé le 10 novembre 1975 par la République fédérale socialiste de Yougoslavie et la République italienne à Osimo, en Italie, pour partager de façon définitive le «Territoire libre de Trieste» entre les deux États : la ville portuaire de Trieste avec une étroite bande côtière à le nord-ouest (Zone A) a été donné à l'administration civile de l'Italie; une partie de la partie nord-ouest de la péninsule d'Istrie (Zone B) a été accordée à la Yougoslavie avec une zone partagée entre la Croatie et la Slovénie. Le traité entrait en vigueur le 11 octobre 1977 et donnait à la Slovénie un accès à la mer.
Le traité ne contenait formellement aucune disposition linguistique, mais protégeait l'identité des communautés slovène en Italie et italienne en Slovénie. La plupart des dispositions des accords d'Osimo furent mises en œuvre, malgré les réticences de l'Italie en matière de protection des minorités. La question de la protection des minorités linguistiques devait être traitée ultérieurement via la signature de protocoles séparés. Ce ne sera qu'en 2001, soit un quart de siècle plus tard, que l'Italie adoptera la Loi nationale du 23 février 2001, n° 38 (Règles en matière de protection de la minorité linguistique slovène de la Région du Frioul-Vénétie Julienne) et la Slovénie la Loi sur les droits particuliers des communautés nationales italienne et hongroise dans le domaine de l'éducation.
- La montée du nationalisme slovène
Au cours des années 1980, la Slovénie connut une montée du pluralisme culturel. Au milieu des années 1980, une fraction réformiste, dirigée par Milan Kučan, le chef de la Ligue des communistes de Slovénie, prit le contrôle du Parti communiste slovène, entamant une réforme progressive vers un socialisme de marché et un pluralisme politique contrôlé. La Slovénie, qui comptait moins de 10 % de la population yougoslave globale, produisait environ un cinquième du PIB du pays et un quart de toutes les exportations yougoslaves. Les différends politiques autour des mesures économiques ont trouvé un écho dans l'opinion publique, car de nombreux Slovènes ont estimé qu'ils étaient exploités économiquement, devant soutenir une administration fédérale coûteuse et inefficace.
En même temps, l'affrontement entre les communistes slovènes et le Parti communiste serbe (qui était dominé par le leader nationaliste Slobodan Milošević), devint la lutte politique la plus importante en Yougoslavie. Les faibles performances économiques de la Fédération et les affrontements croissants entre les différentes républiques créèrent un terrain fertile pour la montée des idées sécessionnistes parmi les Slovènes, à la fois anticommunistes et communistes. Le 27 septembre 1989, l'Assemblée slovène apporta de nombreux amendements à la Constitution de 1974, notamment l'abandon du monopole de la Ligue des communistes de Slovénie sur le pouvoir politique et le droit de la Slovénie de quitter la Yougoslavie. Dans le domaine linguistique, on ne trouvait aucune prescription d'ordre linguistique dans la Constitution de la Slovénie, sauf des allusions à la nation slovène et aux nationalités italienne et hongroise :
1. člen Položaj SR Slovenije v SFRJ 1) Socialistična republika Slovenija je država, ki temelji na suverenosti slovenskega naroda in ljudstva Slovenije, na oblasti in samoupravljanju delavskega razreda in vseh delovnih ljudi, in socialistična samoupravna demokratična skupnost delovnih ljudi in občanov, slovenskega naroda in italijanske in madžarske narodnosti. 2) Socialistična republika Slovenija je v sestavi Socialistične federativne republike Jugoslavije. |
Article 1er Situation de la RS de Slovénie dans la RFSY 1) La République socialiste de Slovénie est un État fondé sur la souveraineté de la nation slovène et du peuple slovène, sur le pouvoir et l'autonomie de la classe ouvrière et de tous les travailleurs, et sur une communauté démocratique autonome socialiste de travailleurs et citoyens, sur la nation slovène et les nationalités italienne et hongroise. |
En 1987 et 1988, une série d'affrontements entre la société civile et le régime communiste culmina avec le «Printemps slovène». Un groupe d'intellectuels libéraux publia un manifeste dans la revue alternative Nova revija, lequel demandait la démocratisation et à une plus grande indépendance de la Slovénie. Certains articles envisageaient même ouvertement l'indépendance de la Slovénie en Yougoslavie et l'instauration d'une démocratie parlementaire à part entière. Peu de temps après, à la mi-mai 1988, un organisme nationaliste indépendant fut créé, l'Union paysanne de Slovénie. Un mouvement démocratique de masse, coordonné par le Comité de défense des droits de l'homme, incita les communistes à entreprendre des réformes démocratiques.
- Le référendum sur l'indépendance
Après maintes péripéties, le 23 décembre 1990, un référendum sur l'indépendance de la Slovénie eut lieu, au cours duquel plus de 88 % des résidents slovènes votèrent pour l'indépendance de la Slovénie vis-à-vis de la Yougoslavie. La Slovénie est devenue indépendante par le passage des actes appropriés le 25 juin 1991 en quittant la RSFY - la République socialiste fédérative de Yougoslavie. Dès le lendemain de la déclaration d'indépendance de la Slovénie, des hostilités ont opposé les unités territoriales slovènes et les troupes fédérales. Dans la soirée, l'indépendance fut solennellement proclamée à Ljubljana par le président du Parlement (France Bucar). Le 26 octobre 1991, le dernier soldat yougoslave quittait la Slovénie, ce qui signifiait que les parties serbe et yougoslave acceptaient de facto la sécession de la Slovénie.
Le 23 décembre 1991, l'Assemblée de la république de Slovénie adoptait une nouvelle constitution, qui est devenue la première Constitution de la Slovénie indépendante. C'était la première fois dans l'histoire de ce peuple que leur territoire était devenu un «pays» et non plus une «province».
Le premier pays à reconnaître la Slovénie en tant que pays indépendant fut la Croatie, le 26 juin 1991. Au cours du second semestre de 1991, certains des pays formés après l'effondrement de l'Union soviétique reconnurent la Slovénie: les pays baltes (la Lituanie, la Lettonie et l'Estonie), ainsi que la Géorgie, l'Ukraine et la Biélorussie. Le 19 décembre 1991, l'Islande et la Suède reconnurent la Slovénie, et l'Allemagne adopta une résolution sur la reconnaissance de la Slovénie, réalisée aux côtés de la Communauté économique européenne (CEE) le 15 janvier 1992. En décembre 1992, après l'indépendance et la reconnaissance internationale de la Slovénie, Milan Kučan fut élu premier président de la Slovénie lors de l' élection présidentielle de 1992, avec le soutien de la liste des citoyens. Il a remporté un autre mandat de cinq ans aux élections de 1997, se présentant à nouveau comme indépendant et remportant à nouveau la majorité au premier tour.
6.1 Le renforcement de la langue slovène
L'indépendance nationale a entraîné un renforcement de la langue slovène. Depuis 1991, le slovène est utilisé comme langue officielle dans tous les domaines de la vie publique. En effet, la langue slovène n'a plus à se maintenir par opposition au serbo-croate de la Yougoslavie. Le slovène s'impose dans les tribunaux, l'administration, l'éducation, les médias et dans toute communication avec les citoyens.
Le recensement de 2002 révélait que les slovénophones représentaient 83,7% de la population (1 948 250). Cela signifiait que 16,3 % de la population parlait une autre langue. Par ordre décroissant, on comptait des Serbes (1,99%), des Croates (1,82%), des Bosniaques (1,10%), des Hongrois (0,32%), des Albanais (0,31%), des Macédoniens (0,20%), des Tsiganes (0,16), des Italiens (0,11%), etc. Il s'agissait sans aucun doute des ex-Yougoslaves. Dès cette époque, la Slovénie avait adopté pas moins d'une trentaine de lois pour réglementer l'usage des langues minoritaires. Cependant, seuls les Hongrois et les Italiens purent bénéficier d'une protection juridique. Toutes les autres minorités durent composer avec la langue slovène.
En 2004, le slovène est même devenu l'une des langues officielles de l'Union européenne au moment de l'admission de la Slovénie. Bien que le slovène ne soit pas une langue en danger, sa portée se trouve nécessairement réduite, en raison du faible nombre de ses locuteurs (environ deux millions de locuteurs).
6.2 La nationalité slovène Lorsque la Slovénie est devenue indépendante en 1991, toute personne résidant en permanence et vivant en Slovénie à cette date était en droit d'obtenir la nationalité slovène. La population immigrée de Slovénie ayant obtenu la nationalité de cette manière représente environ 10 % de la population totale. Il y eut quelques appels, émanant de partis à tendances nationalistes, en faveur d'une modification de la Loi sur la nationalité et d'un réexamen des naturalisations accordées aux personnes n'étant pas d'origine ethnique slovène. Les sondages d'opinion révélèrent que le public paraissait, dans l'ensemble, favorable à une politique plus restrictive. Un certain nombre de critiques furent formulées mettant en cause le caractère trop discrétionnaire des pouvoirs de l'administration en matière de naturalisation et le peu de voies de recours possibles contre les décisions de refus. Après 1991, quelque 130 000 anciens citoyens de l’ex-Yougoslavie, particulièrement des Croates, des Bosniaques et des Serbes, sans oublier de nombreux Roms/Tsiganes et des Albanais, furent rayés des registres de l’État. Les débuts de l’existence de
la Slovénie furent marqués par un paradoxe: d’un côté, les autorités se sont
montrées relativement généreuses dans l’attribution de la citoyenneté à ceux
qui pouvaient justifier un travail et un logement; de l’autre, elles
ont rayé les noms de milliers de personnes des registres nationaux, soit
plus de 18 000 personnes. Cet acte et la gestion de ses conséquences
révèlent les profondes divergences qui divisent la classe politique slovène.
Si l'acquisition de la nationalité slovène s'est déroulée sans complications majeures, il n'en fut pas ainsi pour les candidats censés lutter activement contre l'indépendance de la république de Slovénie contre l'armée yougoslave. Cependant, ceux (moins d'un dixième de tous) qui n'ont pas opté pour la nationalité slovène ont été illégalement radiés de leur résidence permanente. Depuis ce temps, environ 90 000 auraient quitté la Slovénie ou auraient trouvé refuge à l’étranger. Les quelque 40 000 autres ont résidé dans le pays «en toute illégalité». N’étant pas considérés comme des citoyens slovènes, ils n’ont pas eu droit à l’éducation dans les écoles de l’État, ni à la sécurité sociale, ni à la santé, ni à l’emploi, ni à la retraite, ni à la propriété, ni à aucun des droits sociaux et politiques. Bref, tous ces citoyens de l’ex-Yougoslavie ont été exclus de la société slovène. Le problème est particulièrement grave pour les Tsiganes qui ne possédaient aucune pièce d’identité officielle.
6.3 Les citoyens «autochtones»
Pour les autorités slovènes, certaines régions du pays sont habitées par des minorités dites «autochtones». Ce sont des communautés linguistiques qui habitaient le territoire actuel de la Slovénie avant que celle-ci ne devienne indépendante. Ces minorités ont déjà fait partie intégrante des sociétés des pays voisins (par exemple, l'Italie et la Hongrie), mais elles sont désormais liées à la nation slovène. On compte trois minorités ayant acquis le statut de «minorités autochtones»: les Italiens, les Hongrois et les Roms/Tsiganes.
La protection des deux minorités nationales «autochtones», les Italiens et les Hongrois, était à un tel niveau qu'au moment de l'indépendance ceux-ci ont souhaité et reçu la promesse que l'indépendance de l'État n'aggraverait pas leur situation ou ne réduirait pas leurs droits. Jusqu'à présent, l'État slovène n'a pas rompu cette promesse. La manière dont s'exerce l'influence des communautés nationales a considérablement changé, mais leur influence relative ne s'est pas réellement réduite.
De fait, le statut de ces deux communautés s'est même renforcé lorsqu'elles ont obtenu un droit de veto dans l'adoption de règlements concernant l'exercice des droits constitutionnels des Italiens et des Hongrois, ce qui a été introduit au niveau de l'État et au niveau local par la Constitution de 1991 (art. 64.5) de la république de Slovénie. Formellement, ce droit n'est pas défini dans la Constitution comme un veto, mais sous la forme que certaines lois et certains règlements ne peuvent entraver les droits de ces communautés, quel que soit le nombre de leurs membres.
Le 15 janvier 1992, l'Italie et la Croatie signèrent le Mémorandum d'accord entre la Croatie, l'Italie et la Slovénie relatif à la protection de la minorité italienne en Croatie et en Slovénie (en slovène: "Memorandum o dogovoru med Hrvaško, Italijo in Slovenijo glede varstva italijanske manjšine na Hrvaškem in v Sloveniji”), mais le ministre des Affaires étrangères de l'époque avait assuré que le Mémorandum serait respecté et appliqué comme s'il l'avait signé. Le 5 novembre 1996, l'Italie et la Croatie signèrent l'Accord entre la République italienne et la République de Croatie sur les droits des minorités ("Sporazumu med Republiko Italijo in Republiko Hrvaško o pravicah manjšin”), ce qui sous-entendait que la Slovénie le respectait.
Enfin, les droits accordés aux Roms ne s'appliquent qu'à ceux des membres de cette communauté, qui sont considérés comme «autochtones», parce que les Roms «non autochtones», qui ont immigré, par exemple en tant que réfugiés dans les années 1990, n'ont pas droit à la protection, même en ayant obtenu la citoyenneté slovène.
6.4 Les citoyens non autochtones
Les autochtones désignent ceux qui sont installés traditionnellement ou historiquement en Slovénie depuis plusieurs siècles, tandis que les non-autochtones sont originaires d'autres régions des Balkans.
- Les Roms
Les Roms non autochtones sont souvent appelés «Roms des Balkans», parce qu'ils sont arrivés plus récemment dans le pays. Parmi les Roms appartenant à ce dernier groupe qui représente près de la moitié de la population rom du pays, nombreux sont ceux qui vivent en Slovénie depuis plusieurs décennies.
L’article 65 de la Constitution slovène énonce que le statut et les droits particuliers de la communauté rom de Slovénie sont régis par la loi. En 2007, le Parlement slovène a adopté la Loi sur la communauté rom, mais il ne s'agissait pas d'une loi linguistique. Compte tenu de la situation particulière de la communauté rom, notamment la situation socio-économique plus précaire de ses membres, des mesures spéciales étaient nécessaires dans les domaines de l'éducation, de l'emploi, des conditions de vie, de la santé et des soins sociaux et de la lutte contre préjugés et stéréotypes. Il reste encore des mesures à prendre pour protéger également la langue de cette communauté. De plus, la Cour constitutionnelle a estimé que l'article 39.5 de la Loi sur l'autonomie locale, qui accorde un représentant au conseil municipal dans les zones habitées par la communauté tsigane n'est pas conforme à la Constitution, car elle ne fixe pas de critères et autorise l'arbitraire quant à la question de savoir quelle commune est habitée par une communauté rom autochtone. Jusqu'à présent, une vingtaine de municipalités sur 35 ont rempli leurs obligations légales. Néanmoins, la situation inadéquate des Roms est soulignée avec persistance par les représentants du Conseil de l'Europe, ce qui est compréhensible, étant donné que les Roms sont des Européens qui n'ont d'autre pays que celui qu'ils habitent. - Les ex-Yougoslaves
Parmi les non-autochtones figurent les ex-Yougoslaves, c'est-à-dire les Serbes, les Croates, les Bosniaques, les Albanais, etc. Un grand nombre d'entre eux sont arrivés en Slovénie après la Seconde Guerre mondiale et se sont installés dans les villes, en raison des migrations économiques internes au sein de l'ex-Yougoslavie, à laquelle appartenait alors la Slovénie. Les membres de ces communautés ethniques, ainsi que d'autres et communautés religieuses (Tchèques, Allemands, Juifs, Slovaques, Turcs, Ukrainiens et autres) qui habitent sur le territoire slovène, n'ont pas des droits collectifs reconnus accordés aux minorités autochtones parce qu'ils ne sont pas considérés comme «autochtones», mais comme des immigrants. De plus, pour le gouvernement slovène, les Croates, les Bosniaques et les Serbes ne sont pas considérés comme des minorités puisqu'ils parlent des langues apparentées au slovène.
Cependant, une partie des communautés ethniques allemande, serbe ou croate auraient probablement le droit d'être reconnues comme minorités autochtones puisque leurs membres résident sur ce territoire de la Slovénie depuis des siècles. Le nombre de citoyens qui ont déclaré appartenir à la communauté ethnique musulmane ou bosniaque a augmenté dans une décennie précédente en raison de la l'arrivée de réfugiés de Bosnie et du Kosovo. Comme ces derniers ne bénéficient pas de droits culturels auxquels les minorités autochtones ont droit, la demande d'octroi d'un lieu où serait construite une mosquée peut se perdre dans les méandres bureaucratiques.
Finalement, les droits garantis aux membres des communautés non autochtones se trouvent à être inclus dans des dispositions constitutionnelles sur l'égalité devant la loi, l'expression de l'appartenance nationale, le droit d’utiliser sa langue et son écriture et le droit de s'assembler.
Dans ces conditions, seuls les Slovènes, les Hongrois et les Italiens sont des citoyens à part entière. Néanmoins, on peut s'attendre éventuellement à ce que s'intensifie la tendance à reconnaître le statut de communautés nationales minoritaires aux Serbes, aux Croates, aux Bosniaques, aux Macédoniens, aux Albanais et aux Monténégrins.
6.5 Les traités internationaux Pour le moment, la Slovénie s'en tient à ses obligations dues aux traités internationaux concernant la protection des seules minorités italienne et hongroise. Pour comprendre les problèmes que rencontrent les communautés minoritaires en Slovénie, il est pertinent de les comparer avec les problèmes qui peuvent attendre la Slovénie en tant que «petit pays» et les Slovènes en tant que «nation majoritaire», c'est-à-dire de n'avoir que de bonnes expériences d'intégration dans des pays multinationaux. D'ailleurs, l'article 8 de la Constitution prescrit la primauté du droit international. Tous les principaux instruments internationaux dans le domaine de la protection des minorités ont été ratifiés. Lors de la ratification de la Convention-cadre du Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales, la Slovénie a déclaré que les dispositions de la convention seraient appliquées aux membres des trois communautés autochtones susmentionnées. La Charte européenne des langues régionales ou minoritaires que la Slovénie a ratifiée le 4 octobre 2000 est entrée en vigueur le 1er janvier 2001. Le pays a déclaré son engagement en faveur de la protection des langues italienne, hongroise et rom. Par conséquent, il est temps d'accélérer la réglementation de ce que la Slovénie n'a pas encore fait dans le domaine de son attitude envers les communautés nationales minoritaires sur son propre territoire. Dernière mise à jour:
19 févr. 2024
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