Canton des Grisons

4) La politique linguistique cantonale


 

Capitale:  Coire (en allemand : Chur ; en romanche: Cuira ; en italien : Coira)
Population: 202 538 (2022)
Langues officielles: allemand, italien et romanche
Groupe majoritaire: allemand (74,4 %)
Groupes minoritaires: romanche (13,2 %), italien (12,8 %), portugais (4,9 %), anglais (3,8 %), français (1,2 %), autres langues (8,8 %)
Système politique: canton souverain au sein de la Confédération suisse
Articles constitutionnels (langue): art. 4 et 70 de la Constitution suisse (2000); art. 3 de la Constitution cantonale de 2003
Lois linguistiques: Loi sur les langues (2006-2017); Ordonnance sur les langues (2007-2025).
Lois scolaires:
Décret sur les cours de romanche pour les étudiants d'une autre langue à l'école cantonale (1947) - abrogé; Loi sur les écoles maternelles (1992, abrogée); Loi sur les écoles publiques (Loi scolaire) (2000, abrogée); Loi sur la Haute École normale (2004); Ordonnance sur la procédure d'admission aux écoles secondaires (2008); Ordonnance sur le diplôme d'études secondaires (2008-2012); Ordonnance sur les écoles spécialisées (2008-2021);
Ordonnance sur l'école secondaire du commerce (2011-2023); Loi sur les écoles primaires du canton des Grisons (2012); Loi sur les écoles secondaires (2016); Règlement scolaire de l'École cantonale des Grisons en tant qu'école secondaire cantonale ayant son siège à Coire (2018); Ordonnance sur le gymnase (2019-2023); Ordonnance sur l'école (2022).
Lois à portée linguistique: Code de procédure civile du canton des Grisons (1985) abrogé;  Ordonnance sur l'emploi du romanche grison pour le matériel électoral et la collecte systématique du droit cantonal des Grisons en romanche (2001); Loi sur la justice administrative (2006); Ordonnance sur l'état civil du canton des Grisons (2007-2022); Règlement sur l'organisation du Tribunal administratif (2008-2021); Loi sur la promotion de la langue et de la culture (2017); Loi sur les communes (2018); Loi sur l'organisation judiciaire (2022); Règlement sur l'organisation et la gestion du Tribunal supérieur (2024); Ordonnance sur les frais de justice dans les procédures civiles (2025).

Plan de l'article

1 La protection fédérale
1.1 Les langues de la législation fédérale
1.2 L'administration et la justice

2 Les langues officielles et la délégation cantonale
2.1 La Constitution cantonale
2.2 La délégation cantonale
3 Les langues de la législation cantonale
3.1 Les langues admises au Grand Conseil
3.2 Les publications officielles

4 Les langues de la justice
4.1 Les langues judiciaires de la région
4.2 La transcription des témoignages
4.3 Les tribunaux supérieurs
 


5 Les langues administratives
5.1 Les publications cantonales
5.2 Les inscriptions sur les édifices
5.3 Le choix de la langue pour les membres du gouvernement

6 L'éducation
6.1 Les objectifs pédagogiques
6.2 Les langues d'enseignement
6.3 Les matières d'enseignement
6.4 La maturité gymnasiale
6.5 Les établissements spécialisés
6.6 L'enseignement des langues étrangères

7 Les médias et la vie économique
7.1 Les journaux
7.2 Les médias électroniques
7.3 La vie économique et l'affichage

1 La protection fédérale

Le canton des Grisons fait partie de la Confédération suisse dont il est le plus étendu des cantons, soit 7105 km², mais c’est aussi celui dont la densité démographique est la plus faible, car plus des deux tiers de la population habitent en altitude et dans de profondes vallées pratiquement inhabitables en hiver. Le canton représente 17,2% de la superficie du pays, mais contient seulement 2,5% de la population totale.

C'est aussi le seul canton officiellement trilingue (allemand, italien et romanche), dont le principe de la territorialité a été pour le moins adaptée. En vertu de ce principe, il ne devrait y avoir qu'une seule langue dans un territoire donné. Or, dans ce canton, il possible d'en trouver deux, généralement l'allemand et le romanche.  Il faut tenir compte que deux juridictions peuvent intervenir dans le domaine des langues: le gouvernement fédéral et le canton des Grisons.

Rappelons que l’article 4 de la dernière Constitution suisse, celle entrée en vigueur le 1er janvier 2000, déclare que «les langues nationales sont l'allemand, le français, l'italien et le romanche». L’article 70 de cette constitution fédérale stipule également ce qui suit à propos du romanche :

Article 4

1) Les langues officielles de la Confédération sont l'allemand, le français et l'italien. Le romanche est aussi langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche.

2) Les cantons déterminent leurs langues officielles. Afin de préserver l'harmonie entre les communautés linguistiques, ils veillent à la répartition territoriale traditionnelle des langues et prennent en considération les minorités linguistiques autochtones.

3) La Confédération et les cantons encouragent la compréhension et les échanges entre les communautés linguistiques.

4) La Confédération soutient les cantons plurilingues dans l'exécution de leurs tâches particulières.

5) La Confédération soutient les mesures prises par les cantons des Grisons et du Tessin pour sauvegarder et promouvoir le romanche et l'italien.

Ainsi, en vertu de l’article 70, la Constitution fédérale élève le romanche au rang de langue officielle régionale (canton des Grisons). Le texte constitutionnel reconnaît encore la primauté des cantons en matière de langue, mais ceux-ci, notamment le canton des Grisons, ont désormais l’obligation de protéger et de promouvoir les langues minoritaires que sont l’italien et le romanche. Or, la sauvegarde de la quatrième langue de la Suisse, le romanche, est considérée comme «une tâche d'importance nationale», à tel point que la Confédération accorde une contribution annuelle (actuellement de sept millions de francs suisses, soit l'équivalent de plus de quatre millions de dollars US) afin de financer le fonctionnement des organisations de défense de la langue et de l'agence de presse romanche. Bref, il est établi, selon le droit suisse, que la Constitution garantit le maintien des quatre langues nationales et prend les dispositions qu’il faut pour protéger particulièrement l’italien et le romanche dans le canton des Grisons.

1.1 Les langues de la législation fédérale

Dans les limites des compétences du gouvernement fédéral, l'allemand, le français et l'italien sont les trois langues officielles «à égalité de rang», mais le romanche jouit aujourd’hui du même statut pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes parlant cette langue dans le canton des Grisons. En principe, toutes les langues nationales ont droit de cité au Parlement fédéral de Berne. Néanmoins, le romanche reste à peu près inusité, tout en n’étant pas interdit. Le Parlement fédéral dispose d'un système de traduction simultanée pour l’allemand, le français et l’italien, mais non pour le romanche. Le romanche, qui ne jouit du statut de langue officielle que dans les Grisons ne bénéficie pas de ce «service», car celui-ci aurait entraîné, semble-t-il, des complications et des coûts jugés «disproportionnés» aux moyens d'un État relativement petit.

Conformément à la Loi sur les publications officielles du 21 mars 1986, qui règle l’emploi des langues dans les textes législatifs fédéraux, toutes les lois sont promulguées et publiées simultanément — sauf exceptions — dans les trois langues officielles importantes que sont l’allemand, le français et l’italien. Mais l’Ordonnance sur les publications officielles (1987) précise particulièrement l’emploi du romanche de la part du gouvernement fédéral. L’article 11 traite spécifiquement des actes législatifs de la Confédération en romanche:

Article 11

La Chancellerie fédérale propose au Conseil fédéral, après avoir consulté le gouvernement du canton des Grisons, la traduction d'actes législatifs qui doivent être publiés en romanche selon l'article 14, 3e alinéa, de la loi. [...]

Selon l’article 11 de l’Ordonnance sur la traduction au sein de l'administration générale de la Confédération du 19 juin 1995, le Conseil fédéral émet des directives réglant les tâches de traduction en romanche qui incombent à la Confédération, tandis que la Chancellerie d'État du canton des Grisons collabore à la traduction en romanche de textes et d'actes importants du droit fédéral. Le Conseil fédéral a également approuvé un programme de traduction de lois importantes relatives au droit fédéral, par exemple le Code pénal, la Loi sur l´égalité et la Loi sur l´assurance-accidents, la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, etc.

Dans les faits, et ce, depuis de nombreuses années, la plupart des textes législatifs sont préparés en allemand, puis traduits en français et ensuite en italien; il est rare que des projets de loi soient rédigés à l'origine en français ou en italien. Et, bien qu’aucun projet de loi ne soit rédigé originellement en romanche, certaines lois sont également traduites dans cette langue depuis 1988, soit en Romantsch Grischun.

1.2 L'administration et la justice

À Berne, l'Administration centrale est trilingue (allemand, français, italien): elle répond dans la langue utilisée par le citoyen, que ce soit par écrit ou à l'oral (p. ex. dans les échanges téléphoniques). Dans le canton des Grisons, l’Administration fédérale a généralement été trilingue allemand-italien-romanche. Depuis 1986, la Confédération suisse se sert de plus en plus du Rumantsch Grischun pour les «imprimés présentant un lien particulier avec l’aire linguistique rhéto-romane». Mais depuis le 10 mars 1996 et l’adoption de l’article 70 de la nouvelle Constitution, l’Administration fédérale est tenue d’utiliser le romanche lorsqu'elle s’adresse à l’ensemble de la population romanche.

En matière judiciaire, dans tous les tribunaux fédéraux, les citoyens des Grisons parlant le romanche ont le droit d'utiliser leur langue maternelle. Le Tribunal fédéral accepte même les pièces et mémoires rédigés en romanche et les fait traduire aux frais de la Caisse fédérale. Toutefois, même si un procès peut se dérouler en deux langues, le Tribunal fédéral ne rend ses sentences écrites que dans une seule: celle de la «partie attaquée» (ou celle de la partie défenderesse). Que ce soit pour les causes relevant du droit public, du droit civil ou du droit pénal, le Tribunal fédéral rédige toujours ses arrêts dans la langue (allemand, français, italien ou romanche) de la décision attaquée, et ce, peu importe le canton où se déroule le procès.

Compte tenu de la politique de trilinguisme, le canton des Grisons reçoit des subventions financières du gouvernement fédéral afin d'équilibrer les coûts triplés. En 2002, le canton des Grisons a ainsi reçu près de cinq millions de francs suisses (4,5 millions de dollars US ou 3,1 millions d'euros), dont la moitié sont passés à la Lia Rumantscha (ou Ligue romanche).

2 Les langues officielles et la délégation cantonale

La Constitution cantonale de 1982 ne contenait qu'un très bref article sur la langue. Il s'agit de l'article 46 qui se lisait comme suit: «Les trois langues du canton sont garanties comme langues nationales.» Cet article a toujours été interprété comme une reconnaissance officielle de l'allemand, de l’italien et du romanche, bien qu'une langue n'y était formellement nommée. En outre, selon l’opinion juridique généralement admise, les cinq idiomes régionaux romanches étaient, jusqu’à 1996, des langues officielles cantonales. Pour des raisons pratiques, le gouvernement des Grisons se limitait toutefois à deux variantes, le sursilvan et le vallader. Le 2 juillet 1996, le gouvernement cantonal a pris la décision d’utiliser le Rumantsch Grischun, le «romanche grison», comme l'unique langue officielle pour ses communications écrites avec la population romanche dans son ensemble.

2.1 La Constitution cantonale

En 2003, le gouvernement des Grisons proposait une nouvelle constitution lors de la votation populaire du 14 septembre. Le corps électoral du canton a adopté la Constitution cantonale totalement révisée qui lui était soumise. Parmi les innovations introduites, signalons la consécration du trilinguisme officiel à l'article 3:

Article 3

Langues

1)
L’allemand, le romanche et l’italien sont les langues officielles du canton. Elles ont la même valeur juridique.

2) Le canton et les communes soutiennent ou prennent les mesures nécessaires
à la sauvegarde et à l’encouragement du romanche et de l’italien. Ils favorisent l’entente et les échanges entre les communautés linguistiques.

3)
Les communes choisissent leurs langues officielles ainsi que les langues dans lesquelles l’enseignement est donné dans les écoles dans les limites de leurs compétences et en collaboration avec le Canton. Ce choix doit être fait compte tenu des langues traditionnellement parlées par leurs populations et dans le respect des minorités linguistiques traditionnellement implantées sur leur territoire.

En plus de la Constitution cantonale, il faut tenir compte de la Loi sur les langues de 2006 et modifiée en 2017. Cette loi sur les langues devait être approuvée lors d'un «référendum facultatif» le 24 janvier 2007. Le référendum sur l'adoption d'une loi est nécessaire lorsque les citoyens recueillent un nombre minimum de signatures.

La Constitution cantonale de 1880 a introduit la notion de «référendum législatif», même si les 5000 signatures nécessaires étaient alors très difficiles à réunir. Dans ce cas particulier portant sur la Loi sur les langues, la majorité germanophone demandait un référendum parce qu'elle s'estimait désavantagée par la loi cantonale qui accordait davantage d'importance aux langues minoritaires, notamment au romanche et, dans une moindre mesure, à l'italien. Autrement dit, la loi pouvait être révoquée si une majorité de citoyens du canton s'y opposait. Cependant, les citoyens n'ont pu réunir que 3736 signatures valides. La loi fut donc définitivement adoptée et elle correspondait aux dispositions de l'article 3 de la Constitution cantonale adoptée lors de la votation populaire du 14 septembre 2003.

2.2 La délégation cantonale

Le canton des Grisons se distingue de tous les autres cantons par le fait que les autorités cantonales ont délégué leur juridiction en matière linguistique aux communes. Cela signifie que l'emploi des langues dans les Grisons est régi par les administrations communales (Gemeinden, en allemand; communi, en italien) et que le fameux principe helvétique de la territorialité des langues n'est pas appliqué intégralement : le canton des Grisons n'a jamais garanti, ni dans sa constitution ni dans une quelconque loi, l'immutabilité de l'aire romanche.

- Le statut linguistique des communes

C'est le seul canton de toute la Suisse à avoir agi de cette façon. Ainsi, seules les communes sont compétentes pour choisir leur langue officielle (administrative) et leur langue d'enseignement.  Autrement dit, chaque commune est autonome et choisit librement sa langue officielle et sa langue scolaire; aucun citoyen n'est dans l'obligation de s'intégrer linguistiquement dans une communauté. Sauf qu'il y a des critères cantonaux  à respecter.

La Loi sur les langues (2006-2017), qui a été adoptée par le Parlement cantonal le 19 octobre 2006, a reconnu juridiquement cette pratique, mais en l'encadrant en conformité avec la règle des 40% pour une commune officiellement unilingue et des 20% pour une commune officiellement multilingue (mais bilingue dans les faits)  : 

Article 16

Communes

1. Langues officielles
a) Choix

1) Les communes définissent les langues officielles dans leur législation en tenant compte des principes communs de la présente loi.

2) Les communes ayant une proportion d'au moins 40 % de leur population appartenant à une communauté linguistique autochtone sont considérées comme des communes unilingues. Dans ces communes, la langue autochtone est la langue officielle de la commune.

3) Les communes ayant une proportion d'au moins 20 % de leur population appartenant à une communauté linguistique autochtone sont considérées comme des communes multilingues. Dans ces communes, la langue autochtone est l'une des langues officielles de la commune.

4) Pour déterminer la proportion en pourcentage d'une communauté linguistique, il est fait état des résultats du dernier recensement fédéral. Sont considérées appartenant à la communauté linguistique romanche ou italienne toutes les personnes qui ont répondu à au moins une question sur l'appartenance linguistique indiquant la langue romanche ou italienne.

- Les régions linguistiques

L'article 10 de la Loi sur les langues (2006, modifiée en 2017) prévoit aussi le statut des langues dans une région donnée :

Article 10

b) Régions multilingues

1) [abrogé]

2) Dans leurs plaidoiries et requêtes, les parties peuvent utiliser une langue officielle de la région.

3) L'audience principale se déroule généralement dans une langue officielle de la région parlée par le défendeur ou l'accusé.

Cet article de la loi mentionne la notion de «régions multilingues» (en italien: "regioni multilingue"; en allemand: "mehrsprachige Regionen"), alors qu'en fait il n'y a jamais plus de deux langues qui soient co-officielles, même s'il coexiste plusieurs langues dans une même commune.
 

Lorsqu'on fait référence à une langue officielle d'une région, il s'agit des zones linguistiques définies. Celles-ci sont reconnues ainsi en fonction du statut linguistique des communes. En réalité, toute commune ayant officialisé une langue ou deux se trouve à doter la région du même statut; l'inverse n'est pas possible.

C'est ainsi que les régions d'Imboden (n° 2), de Landquart (n°4) et de Plessur (n°5) sont unilingues allemandes parce que toutes les communes le sont, soit respectivement 7, 8 et 4, pour un total de 19 (voir la carte linguistique). Il en est ainsi avec les régions de la Bernina (n°10 > 2 communes sur deux) et de la Moesa (n°11 > 12 communes sur douze), qui sont unilingues italiennes.

C'est plus compliqué avec les régions bilingues allemandes/romanches. Deux régions se distinguent des autres: la Surselva (n° 1, avec 5 communes unilingues romanches et 8 bilingues sur 15) et la Basse-Engadine (n° 8, avec 4 communes unilingues romanches et 1 bilingue sur 5).

Dans toutes les autres régions, c'est le bilinguisme allemand/romanche, mais de façon plus ou moins inégalitaire. l'Albula (n° 7, avec 5 communes bilingues/6), l'Imboden (n° 2, avec 2 communes bilingues/2), la Majola (n° 9, avec 8communes bilingues/12), la Viamala (n° 3, avec 2 communes bilingues/19).

3 Les langues de la législation cantonale

Au Grand Conseil, le Parlement cantonal, les trois langues nationales sont permises, mais l'allemand ou le suisse allemand y est nettement prépondérant avec plus de 80 % des interventions. L'article 11 de l'Arrêté du Grand Conseil en date du 28 mai 1975 (aujourd'hui abrogé) précisait toutefois certaines modalités:

Article 11

Le gouvernement se charge de publier une version des lois importantes en langue italienne et une édition rhéto-romane dans les idiomes surselvan et ladin. C'est le texte allemand qui fait loi.

Cet «idiome ladin» dont il était question dans ce texte visait la variété vallader considérée comme du ladin. On constate que les autorités cantonales ne semblaient pas tenir compte des quatre autres idiomes romanches (sursilvan, sutsilvan, surmiran, puter). Cependant, sur la base des recommandations d’un groupe du travail, le gouvernement grison a décidé, le 2 juillet 1996, de reconnaître le rumantsch grischun, le romanche normalisé par la Ligue romanche, comme langue officielle... écrite. Les autorités cantonales se serviront dorénavant du rumantsch grischun pour s’adresser à l’ensemble de la population romanche, mais celui-ci pourra continuer à se servir des cinq variétés traditionnelles avec les régions, les communes et les citoyens pris isolément.

3.1 Les langues admises au Grand Conseil

Rappelons que le Grand Conseil (all. Grosser Rat; ital. Gran Consiglio; rom. Cussegl Grond) désigne le Parlement cantonal composé de 120 députés élus pour quatre ans. Cela étant dit, l'article 4 de la Loi cantonale sur les langues reconnaît l'usage des trois langues officielles, sans les distinguer:

Article 4

Le Grand Conseil

1) Dans les délibérations du Grand Conseil et dans ses commissions, chaque membre s'exprime dans la langue officielle de son choix.

2) Chaque membre du Grand Conseil peut demander des traductions sur les propositions transmises dans la langue officielle qu'il connaît.

3) Les documents officiels à publier dans le Recueil systématique du droit cantonal des Grisons doivent être traduits dans toutes les langues officielles pour leur traitement au Grand Conseil et dans ses commissions.

Selon cet article 4, tout membre du Grand Conseil peut s’exprimer dans la langue officielle de son choix. Dans les débats, les membres du Grand Conseil de langue maternelle romane ou italienne peuvent voter en romanche ou en italien. Cependant, la traduction simultanée des votes n’est pas prévue. Il n’est donc possible que, dans une mesure limitée pour les membres du Conseil purement germanophones, de suivre un tel vote dans son intégralité. 

La traduction simultanée dans trois langues cantonales semble plus complexe et plus longue qu’avec deux langues, comme dans les cantons de Berne, du Valais ou de Fribourg. Si l’on suppose que la traduction simultanée dans les cinq idiomes n’est pas nécessaire en romanche, il y aurait six directions d’interprétation (allemand-italien; allemand-romanche; italien-allemand; italien-romanche, romanche-allemand; romanche-italien). Le problème, c'est trouver des interprètes simultanés qualifiés dans toutes les directions, en particulier de l’italien au romanche et vice versa. Des solutions réduites (par exemple, uniquement des traductions de l’allemand vers l’italien et de l’italien vers l’allemand) seraient en conflit avec l’exigence constitutionnelle d’égalité de traitement. La mise en œuvre « pragmatique » nécessaire de la traduction simultanée n’est donc pas apparente, ce qui serait plutôt complexe et associé à des coûts considérables. Douze seraient nécessaires pour une seule journée de session, ce qui signifierait 18 000 francs suisses, soit 19 270 € ou 21 700$US. Il existe un consensus dans le canton dans le fait où les fonds publics (limités) peuvent être utilisés plus efficacement du point de vue de la promotion de la langue.

3.2 Les publications officielles

L'article 5 de l'Ordonnance sur les langues (2007) prescrit l'usage des trois langues officielles (allemand, italien et romanche) pour les lois, les règlements, les projets de loi, les accords intercantonaux, les décisions ou arrêtés du Grand Conseil, le Journal officiel cantonal, les directives et circulaires, les en-têtes de lettre, les enveloppes, les pages d'accueil des départements et services, les formulaires destinés au public, etc.: 

Article 5

Publications

1) Sont publiés dans les trois langues officielles:

a) les lois, les accords intercantonaux et les décisions du Grand Conseil, ainsi que les ordonnances qui doivent être publiées dans le Recueil systématique du droit cantonal des Grisons;
b) les explications sur les votes populaires, les bulletins de vote et le vote;
c) les publications dans le Journal officiel cantonal, ainsi que les communiqués de presse et autres communiqués importants du Grand Conseil, du gouvernement, des départements et services, s'ils sont destinés à l'ensemble de la population du canton;
d) les directives et les circulaires adressées à toutes les communes, les autres entités ou organismes publics dans tout le canton;
e) les avant-projets de loi qui sont placés en consultation, avec de brèves explications;
f) les réponses aux questions parlementaires au Grand Conseil;
g) les en-têtes de lettre, les enveloppes, et les pages d'accueil des départements et services;
h) les formulaires destinés au public.

2) Le département compétent peut autoriser des dérogations pour les communiqués et les formulaires destinés à un groupe particulier de personnes ou qui sont d'une importance secondaire.

Les textes des lois sont publiés dans les trois langues officielles (allemand, italien et romanche), et les trois versions sont juridiquement équivalentes. En cas de conflit d'interprétation, il faut accorder la priorité au texte qui correspond le mieux à l'esprit de la loi.

En réalité, la langue allemande (ou le suisse allemand) est de facto la langue des organismes législatifs cantonaux, car les interventions en italien et en romanche, bien que formellement autorisées, sont plutôt rares. En principe, les lois sont rédigées en allemand, puis traduites en italien et parfois en romanche (pour les lois les plus importantes), notamment dans les variétés sursilvan et vallader.

4 Les langues de la justice

Dans les tribunaux de première instance et de deuxième instance, les procès peuvent en principe se dérouler en allemand, en italien ou en romanche, mais en tenant compte de la région où siège le tribunal. Il existe 11 tribunaux régionaux; la langue officielle de la cour est celle de la région. En fait, il n'existe aucune région avec trois langues officielles. Les langues possibles sont l'allemand pour le Landquart, le Plessur et le Prëttigau/Davos et l'italien pour la Moesa et la Bernica. Dans les autres régions, c'est l'allemand ou le romanche, ou les deux langues. La parité des langues vaut en principe pour toutes les phases de la procédure judiciaire: instances et mémoires, débats, rédaction de sentences, etc.). Les parties sont libres dans le choix de la langue officielle pour leurs instances et pour leurs interventions devant les tribunaux bilingues.

4.1 Les langues judiciaires de la région

L'article 9 de la Loi sur les langues précise que l’audience principale se déroule dans la langue officielle de la région:

Article 9

3. Tribunaux régionaux

a) Régions unilingues

1) Abrogé
2) La langue officielle de la région doit être utilisée dans les mémoires et les requêtes.
3) L’audience principale se déroule
dans la langue officielle de la région.

Article 10

b) Régions multilingues

1) Abrogé.
2) Dans leurs plaidoiries et requêtes, les parties peuvent utiliser une langue officielle de la région. *

3) L'audience principale se déroule généralement dans une langue officielle de la région parlée par le défendeur ou l'accusé. *

La Loi sur l'organisation judiciaire (2022) ne fait que rappeler les dispositions de la Loi sur les langues:

Article 8

Langue de la procédure

Les langues de la procédure des autorités judiciaires sont conformes à la Loi sur les langues du canton des Grisons.

L'Ordonnance sur les frais de justice dans les procédures civiles (2025) rappelle la loi autorise le canton à payer les frais de traduction pour l'italien et le romanche:

Article 1

En général

1)
Le recours à l'autorité judiciaire est indemnisé par une somme forfaitaire, conformément à la présente ordonnance. À cela s’ajoutent les frais de prise de preuves, de traduction et d’interprétation ainsi que de représentation de l’enfant.

2) Dans les procédures impliquant une charge particulièrement faible, les autorités judiciaires peuvent percevoir une taxe réduite ou renoncer à la perception d'une taxe.

3) L'obligation de payer les frais de traduction entre différentes langues officielles d'une autorité judiciaire est conforme aux dispositions de la Loi sur les langues du canton des Grisons.

Selon l'article 9 du Règlement sur l'organisation du Tribunal administratif (2008-2021), il est précisé que, si la procédure se déroule en italien ou en romanche, le juge doit maîtriser la langue de la procédure:

Article 9

Composition

1) Chaque tribunal est composé du président, du vice-président et d’un juge supplémentaire.

2)
Si la procédure se déroule en italien ou en romanche, le juge qui maîtrise la langue concernée exerce les fonctions de juge président.

4.2 La transcription  des témoignages

La Loi sur la justice administrative (2006) oblige que les témoignages soient rédigés dans une langue officielle, sans préciser laquelle:

Article 33

Témoignages

1)
Les témoignages doivent être rédigés
dans une langue officielle et contenir une demande et un énoncé des motifs.

2) Ils doivent être signés et présentés en double exemplaire, en y joignant les preuves existantes et la décision attaquée.

3) Lorsqu'une demande ne satisfait pas aux exigences légales ou si elle est rédigée dans une forme incorrecte, illisible ou inutilement allongée, il sera prévu un délai raisonnable pour l'élimination de la faute, avec un avertissement qui, dans le cas contraire, ne sera pas mis en application.

Article 38

Témoignages

1)
Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle et contenir la demande, les faits et l'énoncé des motifs.

2) Ils doivent être signés et soumis en double exemplaire, en y joignant les preuves existantes et la décision attaquée. Des preuves supplémentaires doivent être données avec exactitude.

3) Si elle est rédigée dans une forme incorrecte, illisible ou inutilement allongée, il sera prévu un délai raisonnable pour l'élimination de la faute, avec un avertissement qui, dans le cas contraire, ne sera pas mis en application.

4.3 Les tribunaux supérieurs

L'article 8 de la Loi sur les langues (2006) autorise n'importe laquelle des langues officielles cantonales dans la Cour d'appel, la Cour de justice et le Tribunal des mesures de contrainte:

Article 8

2. Cour d'appel, Cour de justice et juge des mesures coercitives

1) Dans les procédures devant la Cour d'appel, la Cour de justice et le Tribunal des mesures de contrainte, les parties peuvent utiliser une langue officielle cantonale de leur choix pour leurs plaidoiries et leurs requêtes.

2) La langue de la procédure se conforme en règle générale à la langue officielle employée dans la décision attaquée respectivement à la langue officielle parlée par la partie défenderesse.

Le Règlement sur l'organisation et la gestion du Tribunal supérieur (2024) oblige le juge à maîtriser la langue de la procédure, ce qui exclut la traduction:

Article 16

Formation du tribunal

1)
La composition d'un tribunal se compose normalement du président, d’un vice-président et d’un juge supplémentaire.

2)
Le juge qui préside la procédure doit être un juge maîtrisant la langue de la procédure.

4) Si les membres du tribunal ne peuvent être formés conformément aux paragraphes 1 à 3, les critères suivants sont pris en compte pour déterminer sa composition :

a) les connaissances spécialisées dans un domaine particulier;
b) l’équilibre de la charge de travail des juges, compte tenu des charges de travail supplémentaires résultant de leurs fonctions et de la charge de travail des juges ;
c) la participation de membres des deux sexes, selon la nature de l’affaire;
d) participation à des décisions antérieures dans le même domaine d’études ;
e) le lien entre les affaires ;
f)
la langue;
g) les absences, notamment pour cause de maladie et de vacances.

[...]

Article 37

Composition

1) Outre le président et le vice-président, la Commission administrative est composée d'un maximum de trois autres membres de la Haute Cour. Les langues cantonales doivent être prises en compte de manière appropriée.

[...]

En fait, les sentences et les résolutions sont rédigées dans la langue officielle dans laquelle est tenue l'audience principale. Lorsqu'une partie ne connaît pas la langue employée par le tribunal, le juge peut exiger une traduction gratuite dans une autre langue officielle. En accord avec toutes les parties, il est autorisé de modifier ces pratiques. Pour les tribunaux en région, les mêmes principes sont appliqués que pour les tribunaux cantonaux. Cependant, dans les régions unilingues, le principe de la territorialité est rigoureusement appliqué, la langue judiciaire étant celle de la langue officielle de la région ou de la commune. Dans les régions bilingues, toutes les langues officielles faisant partie de la circonscription judiciaire sont reconnues comme des langues judiciaires. Ainsi, le rumantsch grischun peut, sur demande d’une partie romanche en cause, être employé pour les arrêts, les notifications et les sentences, ainsi que pour les procès-verbaux d’auditions lors d’enquêtes pénales. Ce type de romanche écrit est dorénavant la seule forme utilisée dans le Livre du droit grison (Bündner Rechtsbuch).

5 Les langues administratives

Les langues officielles sont les langues avec lesquelles l'administration publique cantonale communique avec les citoyens et vice-versa. Cela signifie que les citoyens du canton des Grisons ont le droit de communiquer avec les autorités cantonales (sous forme orale ou écrite) dans l'une des langues officielles du canton. L'article 3 de la Loi sur les langues (2006-2017) est très clair sur cette question:

Article 3

Principes

2) Chacun peut s'exprimer devant les autorités cantonales dans une langue officielle de son choix.

3) Les autorités cantonales répondent dans la langue officielle dans laquelle elles sont interpellées. Dans les communications avec les communes, les régions et les associations communales, les autorités emploient les langues officielles respectives.

Par souci de cohérence, les articles 5 et 6 de la Loi sur les langues prévoient les mêmes droits pour les employés ou les membres du gouvernement ainsi la promotion de la connaissance d'au moins deux langues officielles: 

Article 5

Gouvernement

1) Les membres du gouvernement travaillent dans la langue officielle de leur choix.

2) Le gouvernement réglementera dans une ordonnance spéciale la traduction dans les langues officielles cantonales des documents officiels, avis, communiqués presse, sites Internet, documents, correspondance et enseignes d'édifices et panneaux routiers cantonaux.

3) Le canton doit promouvoir les connaissances de son personnel dans les langues officielles cantonales.

Article 6

Embauche

À qualifications égales, la préférence doit généralement être donnée aux candidats ayant la connaissance de deux ou éventuellement des trois langues officielles pour les postes au sein de l’administration cantonale des recrutements.

5.1 Les publications cantonales

Toutes les publications du gouvernement cantonales sont publiées en allemand, mais l'article 6 de l'Ordonnance sur les langues (2007-2025) prévoit que certains documents (en 6.2) le seront également en romanche et en italien:

Article 6

Traductions

1) Les publications sont traduites, conformément à l'article 5, dans l'ordre indiqué ci-dessus.

2) En règle générale, sont traduits en romanche, également en italien:

a) les publications dans le Recueil officiel cantonal destinées en particulier à la population de langue romanche et également italienne;

b) les décrets et les décisions du gouvernement destinés aux individus et communes de langue romanche, également italienne; il n'y a pas de traduction si les décrets et les décisions réfèrent à des instances germanophones;

c) les directives et les circulaires adressées notamment aux communes et aux autres entités ou organismes publics dans les régions romanchophones, et également italophones;

d) les documents en collaboration avec l'administration cantonale de langue romanche et italienne, si elle exige formellement une traduction.

3) Les rapports techniques, les évaluations, les descriptions et autres documents similaires sont exclus de l'obligation de la traduction.

L'article 7 de la même ordonnance précise que la correspondance doit se faire dans la même langue que celle du requérant:

Article 7

Correspondance

1) Les autorités cantonales répondent aux demandes et questions écrites dans la langue officielle du canton dans laquelle elles ont été interpellées.

2) Les instances romanches répondent en rumantsch grischun.

Pour ce qui est du romanche, les autorités ne répondent généralement qu'en rumantsch grischun (en romanche grison). D'ailleurs, le Recueil systématique des lois cantonales des Grisons, les propositions du Grand Conseil pour les votations populaires, les publications dans la Feuille officielle cantonale, ainsi que les décrets du gouvernement et les décisions de l'Administration sont publiés exclusivement en romanche grison. Il n'en demeure pas moins que le romanche demeure sous-utilisé dans les avis officiels du canton, les formulaires, les panneaux routiers, les inscriptions apposées sur les véhicules publics, etc.

Le canton dispose d'un bureau d'état civil spécial basé à Coire; ce dernier est rattaché à l'Office des migrations et du droit civil. L'article 2 de l'Ordonnance sur l'état civil du canton des Grisons (2007-2022) énonce que «la langue officielle correspond à la langue de la communauté linguistique autochtone du district judiciaire de l'état civil:

Article 2

Langue officielle

1)
La langue officielle correspond à la langue de la communauté linguistique autochtone du district d'état civil. Les langues officielles d'un district d'état civil multilingue correspondent aux langues officielles de l'organisme responsable. *

2) … *

3) Dans
un district d'état civil unilingue ayant le romanche comme langue officielle, sur demande du demandeur, les extraits doivent être rédigés en allemand.

Si le romanche est l'une des langues officielles, les extraits de l'état civil peuvent être rédigés en allemand (pas en romanche).

5.2 Les inscriptions sur les édifices

L'article 8 de  l'Ordonnance sur les langues oblige les édifices de l'administration cantonale d'employer la ou les langues officielles de la commune de l'endroit:

Article 8

Inscriptions

1) Les inscriptions sur les édifices de l'administration cantonale, des écoles et des autres bâtiments accessibles au public doivent être rédigées dans les langues officielles de la commune de l'endroit; les édifices à Coire doivent porter des inscriptions dans les trois langues officielles.

2) Sur les affiches des localités, les indications de direction et les panneaux de signalisation le long des routes cantonales,
les langues officielles des localités annoncées doivent être utilisées.

3) Pour le reste s'appliquent les dispositions de l'ordonnance fédérale du 5 septembre 1979 sur la signalisation routière.

Article 8a (2024)

Représentation des régions linguistiques dans les organismes cantonaux

1) Il est nécessaire d'assurer une représentation adéquate des trois régions linguistiques au sein des organismes cantonaux chargés de l'accomplissement de tâches publiques importantes et qui sont désignés par le gouvernement ou les départements.

De façon générale, dans les panneaux trilingues, l'inscription en allemand doit être placée en premier, puis celle en italien et après celle en romanche. Dans les communes unilingues, d'autres procédures s'appliquent.

5.3 Le choix de la langue pour les membres du gouvernement

La Loi sur les langues réglemente les langues officielles cantonales, notamment leur emploi par les autorités cantonales. Elle a pour objectif de renforcer la position du romanche et de l'italien. L'article 5 de la loi reconnaît l'emploi des langues officielles pour le gouvernement cantonal:

Article 5

Gouvernement

1) Les membres du gouvernement travaillent dans la langue officielle de leur choix.

2) Le gouvernement réglementera dans une ordonnance spéciale la traduction dans les langues officielles cantonales des documents officiels, avis, communiqués presse, sites Internet, documents, correspondance et enseignes d'édifices et panneaux routiers cantonaux.

3) Le canton doit promouvoir les connaissances de son personnel dans les langues officielles cantonales.

Ce choix de la langue s'applique aux employés, sauf si leur service requiert la connaissance d'une autre langue.

Dans les communes bilingues, les employés peuvent travailler dans leur langue, mais si un citoyen demande une information en allemand ou en romanche, ceux-ci doivent le faire dans la langue de ce dernier.

6 L'éducation

En Suisse, le système scolaire diffère d'un canton à l'autre. Dans le canton des Grisons, la scolarité obligatoire incombe au département de l'Instruction publique et des sports. L'école publique est gratuite et obligatoire de 7 à 16 ans (école primaire et secondaire I) et dure neuf ans. La plupart des enfants fréquentent l'école maternelle ou la crèche pendant deux ans avant d'entrer à l'école. L'école maternelle est suivie de l'école primaire (six ans), puis du premier cycle du secondaire (trois ans).

Il existe différents types d'écoles secondaires, de niveaux de difficulté variables. Dans les Grisons, on trouve la Realschule (niveau général), la Sekundarschule (plus exigeante) et l'Untergymnasium ou Gymnasium (niveau lycée). Les parents sont libres de choisir une école privée pour leurs enfants, mais celle-ci est payante.  Les communes organisent le fonctionnement des écoles.

Les communes du canton des Grisons, qui doivent organiser le fonctionnement des écoles, connaissent donc plusieurs catégories:

1. l'école primaire : ''Primarschule'' (all.) ou ''scuola elementare'' (ital.);
2. les classes à effectif réduit : ''Kleinklasse'' (all.) ou classi ridotte''(ital.); 
3. l'école de formation pratique : ''Realschule'' (all.) ou
''scuola di avviamento pratico''(ital.); 
4. l'école secondaire : ''Sekundarschule'' (all.) ou
''scuola secondaria'' (ital.).

En ce qui a trait aux «classes à effectif réduit» ou encore aux «classes de soutien», elles sont destinées à des besoins particuliers pour enfants et adolescents en situation de handicap mental ou de handicap physique, ayant des troubles de comportement, ou pour pour les enfants et les adolescents sourds ou malentendants, ayant une déficience d'élocution grave, une déficience visuelle ou encore une maladie chronique (art. 26 de la Loi sur les écoles publiques de 2000, abrogée). Quant aux écoles de formation pratique (secondaire I), elles servent à donner des cours de formation directement sanctionnés par une qualification professionnelle ou à des types d’écoles menant à l’obtention d’un diplôme d’accès à l’enseignement supérieur (écoles professionnelles, lycées techniques).

6.1 Les objectifs pédagogiques

L'article 29 de la Loi sur les écoles publiques (2012-2016) énonce que le gouvernement cantonal détermine les matières optionnelles et les matières facultatives obligatoires et publie les programmes d’études pour les niveaux de l’enseignement primaire:

Article 29

Matières, programme d'études

1) Le gouvernement détermine les matières obligatoires, les matières optionnelles et les matières facultatives obligatoires et publie les programmes d’études pour les niveaux de l’enseignement primaire. Le programme scolaire réglemente strictement les objectifs du niveau et le contenu fondamental des leçons. Il peut fixer des objectifs contraignants pour des sujets individuels.

2) Le programme d'enseignement comprend la répartition des heures, ainsi que l'horaire, qui établit le nombre total d'unités d'enseignement et le cadre de leur répartition entre les matières. Sur une base annuelle, le nombre d'heures ne peut être inférieur à la moyenne des cantons alémaniques et des cantons plurilingues.

3) Dans la mesure du possible, le programme pédagogique doit être coordonné au niveau intercantonal.

L'article 2 de la même Loi sur les écoles publiques présente les objectifs et les domaines en éducation, dont la langue de l'école :

Article 2

Objectifs et domaines en éducation

1) Compte tenu des particularités historique, linguistique et culturelle de la communauté, l’école primaire s’engage à instruire les élèves selon les valeurs chrétiennes, humanistes et démocratiques.

5) L'enseignement offert à l'école publique comprend notamment l'entretien et
la connaissance de la langue de l'école, ainsi que des compétences de base dans d'autres langues, les mathématiques et les sciences naturelles, les sciences sociales et humaines, la musique, les arts visuels et appliqués, l'éducation physique
et la santé.

6) L'école primaire prend en compte les intérêts et les besoins des enfants et des adolescents ayant des besoins éducatifs particuliers, dotés de dons spéciaux et dont la langue maternelle est une langue étrangère.

La question est de savoir quelle doit être la langue de l'école, l'allemand, le romanche, l'italien? ou deux langues?

6.2 Les langues d'enseignement

La langue d'enseignement est déterminée par chacune des communes, mais il faut que ce soit l'une des trois langues officielles du canton ou la langue de la région ou de la zone linguistique. Dans les régions de la Moesa et de la Bernina, les communes doivent enseigner en italien. Dans les régions de Landquart, d'Imboden, de Plessur ou du Prättigau/Davos, c'est obligatoirement l'allemand. Mais dans les autres régions, les communes choisissent l'allemand, le romanche ou les deux langues, selon le statut linguistique de la commune.

En principe, les germanophones fréquentent des écoles de langue allemande, les italophones des écoles de langue italienne et les romanchophones de écoles de langue romanche. Dans les faits, ce n'est pas si simple, notamment pour les communes romanches. Il est même possible qu'une commune unilingue romanche impose le romanche à tous les enfants, tant romanchophones que germanophones, dans les écoles primaires, puis uniquement l'allemand à partir de la 4e année. Il existe aussi des écoles mixtes offrant une formation bilingue.

Selon la Loi sur les langues (2006-2017), l'enseignement de la première langue se fait dans la langue autochtone (paragr. 1 de l'art. 20) dans les communes multilingues. Dans les communes multilingues et germanophones, le gouvernement peut, sur proposition d'une commune, autoriser la gestion d'une école obligatoire bilingue dans l'intérêt du maintien de la langue autochtone (paragr.  2). Dans les communes où la proportion des personnes appartenant à une minorité linguistique autochtone est d'au moins 10 %, le romanche ou l'italien doivent être offerts à choix durant la scolarité obligatoire (art. 20 al. 3).

Article 20

c) Communes multilingues et communes de langue allemande

1) Dans les communes multilingues, l'enseignement de la première langue est offert dans la langue autochtone.

2) Dans les communes multilingues et les communes de langue allemande, dans l'intérêt de la sauvegarde de la langue autochtone, le gouvernement peut, sur demande de la commune, autoriser la gestion d'une école publique bilingue.

3) Dans les communes ayant une proportion d'au moins 10 % de leur population appartenant à une communauté linguistique autochtone, il est fait obligation pour l'école d'offrir au choix l'enseignement du romanche ou de l'italien.

Pour être admis à l'école secondaire, les enfants romanches doivent subir un examen d'aptitude non seulement dans leur langue maternelle, mais aussi en allemand. Dans les écoles secondaires, en vertu de la loi scolaire de 2012, le gouvernement grison autorise les communes à enseigner aussi le rumantsch grischun.

L'article 36 de l'Ordonnance sur l'école (2022) autorise les enfants immigrants à recevoir à leurs frais un enseignement dans leur langue d'origine durant les heures normales de classe:

Article 36

Accompagnement spécifique des enfants étrangers dans leur langue et leur culture

1) Les enfants de nationalité non suisse à qui les consulats enseignent à leurs frais la langue, l'histoire et la culture de leur pays doivent, dans la mesure du possible, bénéficier du temps nécessaire pendant les heures normales de classe.

2) Les autorités scolaires fournissent gratuitement des locaux d’enseignement.

Ce type d'enseignement ne dure pas très longtemps, mais il est surtout utile pour les enfants parlant en portugais, en anglais ou en français.

Dans son article 6, l'Ordonnance sur la procédure d'admission aux écoles secondaires (2008) autorise les parents désigner pour l'élève une langue cantonale comme langue maternelle:

Article 6

Inscription

1)
L'inscription pour l'examen se fait individuellement dans différents endroits en indiquant les sections recherchées par le candidat. Avec l'admission à l'examen, des frais doivent être payés.

2) Au moment de l'examen, ceux qui détiennent l'autorité parentale doivent désigner pour l'élève une langue cantonale comme langue maternelle.

Cette possibilité est particulièrement mise en pratique dans les communes bilingues.

6.3 Les matières d'enseignement

L'article 15 du Règlement d'exécution de la loi scolaire du 31 mai 1961 (encore en vigueur) prévoit un programme précis pour l'enseignement dans les écoles primaires du canton, dont la langue maternelle et une langue seconde:

Article 15

Matières d'enseignement à l'école primaire

1) Sont des matières obligatoires : la religion, la langue maternelle comme première langue, une langue seconde, les mathématiques, l'étude de l'environnement local, l'histoire, la géographie, les sciences naturelles, le dessin et l'expression créatrice, la calligraphie, le chant et la musique, l'éducation physique, les activités manuelles et activités textiles.

2) Les objectifs d'enseignement relatifs à l’hygiène et à la santé, à l'environnement et à la sécurité routière doivent être inclus à titre interdisciplinaire dans toutes les matières, surtout dans l'enseignement des langues, de l'étude de l'environnement ainsi qu'en éducation physique.

3) Si une classe supérieure est gérée exceptionnellement dans une école primaire, conformément à l'article 25 de la loi scolaire, l'article 16bis du règlement de mise en œuvre demeure en vigueur par analogie.

L'Ordonnance sur le diplôme d'études secondaires (2008-2012) met particulièrement l'accent sur les langues comme matières promotionnelles:

Article 6

Matières de promotion


Sont des matières de promotion la langue maternelle (allemand, romanche et italien), la langue seconde, l'anglais, les mathématiques, la biologie, la physique et la chimie, la géographie, l'histoire et l'éducation civique, les arts visuels, la musique , la psychologie / option professionnelle, ainsi que le deuxième et la troisième année des trois matières choisies dans le domaine professionnel.

Article 10

Matières de l'examen final

1)
Font l'objet d'un examen écrit la langue maternelle (allemand, romanche ou italien), la langue seconde, les mathématiques, une matière déterminée par l'administration de l'école sur proposition de la direction scolaire des études dans les sciences naturelles, les sciences sociales ou dans les arts et le sport, ainsi que les questions liées au domaine professionnel.

2)
Font l'objet d'un examen oral la langue maternelle, la langue seconde et la troisième langue; l'Office met également en place, sur proposition de la direction scolaire, une matière d'examen qui n'a pas déjà été évaluée à l'écrit dans le domaine des sciences naturelles et des sciences sociales, ainsi qu'un domaine d'études lié au monde professionnel.

Article 13

Aspects formels du diplôme

Le diplôme comprend une langue cantonale comme première langue, l’anglais comme troisième langue, ainsi que la pédagogie, le travail social ou la santé comme domaines professionnels. Le diplôme peut également contenir le niveau de l’enseignement instrumental, ainsi que des indications concernant le lieu et la compagnie de la pratique extrascolaire.

Article 21

Programme d'enseignement, examens, notes

1) La formation et les examens sont basés sur les dispositions de la Conférence des directeurs cantonaux de l'Instruction publique pour la maturité professionnelle dans le domaine pédagogique. La formation est structurée en modules. Le programme d'enseignement est émis par le gouvernement.

2) Les matières d'examen en première et deuxième langue sont deux langues cantonales ou une langue cantonale et l'anglais. *

3) Chaque matière du cycle de formation pour l'obtention de la maturité professionnelle est conclue par un examen, qui donne lieu à une note arrondie à la demi-note la plus proche.

L'article 5 du Règlement scolaire de l'École cantonale des Grisons en tant qu'école secondaire cantonale ayant son siège à Coire (2018) privilégie le trilinguisme cantonal:

Article 5

Langue d'enseignement

1) La langue d'enseignement est la langue standard correspondante. Cela est précisé dans les plans d’études.

2)
Le trilinguisme cantonal est particulièrement soutenu.

6.4 La maturité gymnasiale

Pour les personnes peu familières avec la notion de «maturité gymnasiale», cette expression peut paraître insolite, car elle n'a rien à voir ni avec les fruits ni avec les exercices physiques. En Suisse, un gymnase est un établissement d'enseignement secondaire du deuxième cycle (un lycée en France), qui propose une formation dite «de maturité», de culture générale ou de commerce; selon les cantons, on parle aussi de «collège» ou de «lycée». Quant au mot maturité, il désigne un certificat délivré à la fin des études secondaires, ce qui correspond en France au baccalauréat, au CESS en Belgique ou au DES au Canada français.

Par conséquent, la «maturité gymnasiale» (all. : gymnasiale Maturität; ital.: maturità gimnasiale; rom.: maturitad gimnasiala) est un certificat de fin d'études qui s'obtient dans une «école de maturité». De façon générale, la maturité gymnasiale atteste effectivement une «maturité» personnelle acquise dans un cadre scolaire qui se distingue par un haut niveau de connaissance et de culture générale.

Dans la plupart des cantons, dont celui des Grisons, les élèves ont la possibilité d’effectuer en plus une «maturité bilingue», voire trilingue. À noter que les écoles donnent également la possibilité à leurs élèves de préparer des certificats de langue étrangère, tel que le "First Certificate" en anglais ou le "Goethe-Zertifikat" en allemand. C'est l'Ordonnance cantonale sur le gymnase (all. Verordnung über das Gymnasium; ital. Ordinanza sul liceo) qui réglemente ce niveau de compétence. Certains sigles demandent une explication:

MAV = Maturitäts-Anerkennungsverordnung > Règlement sur la reconnaissance des certificats de maturité gymnasiale (RRM)
MAR = Maturitätsausweisen > Certificat de maturité (CM)
EDK = Konferenz der kantonalen Erziehungsdirektoren   > Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP)
SMK = Schweizerischen Maturitätskommission > Commission suisse de maturité (CSM)

Selon qu'on traduise de l'allemand ("Ordonnance sur le gymnase") ou de l'italien ("Ordonnance sur le lycée"), cette ordonnance des Grisons porte principalement sur le romanche. D'abord, il est précisé à l'art. 4 que le romanche écrit dans l'enseignement est le romanche grison ou un idiome, donc l'une des cinq variétés connues et employées: 

Artikel 4

Zweite Landessprache

Zweite Landessprache gemäss MAV/MAR ist für Bündner Schülerinnen und Schüler am Untergymnasium eine Kantonssprache. Rätoromanische Schriftsprache im Sachunterricht ist Rumantsch Grischun oder ein Idiom.

Article 4

Deuxième langue nationale


Selon le MAV/MAR, la deuxième langue nationale pour les élèves grisons du secondaire du premier cycle doit être une langue cantonale.
La langue romanche écrite dans l'enseignement général est le romanche grison ou un idiome.

L'article 5 de l'Ordonnance cantonale sur le gymnase permet la maturité gymnasiale dans l'une des langues cantonales et en anglais:

Article 5

Cours de maturité bilingue

1)
Les écoles secondaires cantonales et privées peuvent proposer des cours de maturité gymnasiale bilingues dans les langues cantonales et en anglais, sous réserve des dispositions de la SMK.

2) Les élèves qui suivent un programme de baccalauréat bilingue peuvent en plus adhérer un maximum de deux matières enseignées en immersion.

L'ordonnance fait aussi la distinction entre la Maturité bilingue grischua et la Maturité bilingue grigionese:

Article 7

Maturité bilingue grischuna et maturité bilingue grigionese


Le cours de maturité,
Maturité bilingue grischuna ou Maturité bilingue grigionese, d'une durée de quatre ans, commence en première année du lycée de quatre ans et comprend quatre cours annuellement dans la première langue, le romanche ou l'italien, et deux cours annuellement en enseignement immersif dans l'une des matières biologie, histoire ou géographie dans la langue correspondante.

Article 12

Compétences professionnelles de base pour une capacité d'étude générale

1) Les compétences de base en langue maternelle et en mathématiques pour les études de base sont généralement testées et notées par écrit ou oralement au cours de la première à la troisième année du lycée de quatre ans. La note obtenue dans la matière correspondante est employée pour calculer la moyenne pondérée cumulative du deuxième certificat.

2)
Pour les élèves dont la langue maternelle est le romanche ou l'italien, les compétences de base en langue maternelle seront évaluées en allemand.

La Maturité bilingue grischuna (en romanche) signifie que les élèves dont la langue maternelle est le romanche peuvent passer la maturité suisse «Maturitad bilingua grischuna»  en allemand et en romanche.

La Maturité bilingue grigionese (en italien) implique que les élèves dont l'italien est la langue maternelle peuvent obtenir la maturité suisse «Maturità bilingue grigionese» en italien et en allemand.

La maturité gymnasiale permet ainsi un accès direct à toutes les universités et écoles polytechniques fédérales de Suisse. La maturité est délivrée à la suite d'un examen cantonal ou fédéral; il s'agira, selon le cas, d'une «maturité cantonale» ou d'une «maturité fédérale». En réalité, il n'y a guère de différence de reconnaissance entre ces deux diplômes sur le plan national, mais entre un certificat de maturité fédérale et un certificat de maturité cantonale, sauf que ce dernier est reconnu seulement sur le territoire suisse pour l'accès à des facultés suisses et autres universités helvétiques.

6.5 Les établissements spécialisés

Il existe deux types d'écoles spécialisées en Suisse. Les premières sont des établissements scolaires à scolarité obligatoire et spécialisés dans certaines formes de handicap ou des difficultés spécifiques liées à l’apprentissage et au comportement. Les secondes sont des hautes écoles spécialisées (HES) constituant, avec les hautes écoles universitaires (universités et écoles polytechniques fédérales) et les écoles supérieures, l'un des trois piliers des études supérieures en Suisse (aussi appelées «formation tertiaire»).

Dans les Grisons, il s'agit notamment de l'École des sciences appliquées des Grisons ("Fachhoschule Graubünden"; "Scuola universitaria professionale dei Grigioni"; "Scola auta spezialisada dal Grischun") et de la Haute École pédagogique des Grisons ("Pädagogische Hochschule Graubünden"; "Alta scuola pedagogica dei Grigioni"; "Scola auta da pedagogia dal Grischun"). Il faut ajouter aussi l'École secondaire du commerce ("Handelsmittelschule"; "Scuola media di commercio"/), la seule école secondaire spécialisée.

Dans l'Ordonnance sur les écoles spécialisées (2008-2021), les matières dites «de promotion» ("Materie di promozione" en italien; "Werbematerialien" en allemand) comprennent notamment trois langues: une langue cantonale comme première langue, une langue nationale comme deuxième langue, l'anglais comme troisième langue.

Article 6

Matières de promotion

1) Les matières de promotion comprennent une langue cantonale comme première langue, une langue nationale comme deuxième langue, l'anglais comme troisième langue, les mathématiques, la physique/chimie/biologie, la géographie, l'histoire, l'économie et le droit, les arts visuels/l'art, la musique, la psychologie/pédagogie, le sport ainsi que des matières du domaine professionnel choisi en deuxième et troisième année.

2)
Le romanche ou l'italien peuvent être définis comme première langue avec l'allemand. Pour le calcul de la note de passage dans la première langue combinée, les deux langues sont considérées à 50% chacune.

Cet article 10 décrit ainsi les matières de l'examen final pour l'évaluation des langues:

Article 10

Matières de l'examen final

1) Sur proposition soumise par la direction de l'école à l'Office, font l'objet d'un examen écrit :

1. la première langue, 180 minutes
2.
la deuxième langue, 180 minutes
3. les mathématiques, 180 minutes
4. une matière parmi quatre domaines d'études : 120 minutes

a) les mathématiques, les sciences naturelles, l'informatique ;
b) les sciences humaines et sociales ;
c) les matières artistiques ;
d) le sport

5. une matière liée au domaine professionnel :

a) sauf la forme et la couleur, 120 minutes
b) la forme et la couleur, 240 minutes

2) L'examen oral porte sur la première langue, la deuxième langue et l'anglais. L'Office établit, sur proposition de la direction de l'établissement, une matière n'ayant pas fait l'objet d'un examen écrit par les filières de mathématiques, de sciences naturelles, d'informatique ou de sciences humaines et sociales, ainsi qu'une matière en lien avec le domaine professionnel.

3) L'examen oral dure 15 minutes ; un temps de préparation supervisé de 15 minutes est préalablement accordé.

Il en est de même dans l'Ordonnance sur l'école secondaire du commerce (2011-2023):

Article 4

Matières promotionnelles


Les matières promotionnelles sont les suivantes:

1. les disciplines des domaines de base : une première langue nationale (allemand, romanche/allemand, italien); une seconde langue nationale (allemand, français, italien); une troisième langue (anglais); les mathématiques;
2. les matières à options spécifiques: finance et comptabilité; économie et droit;
3. les matières à options complémentaires: histoire et politique; technologie et environnement;
4. les matières supplémentaires dans les connaissances professionnelles composées de deux matières: la pratique professionnelle (domaines de compétences opérationnelles B à D) et les compétences numériques (domaine de compétences opérationnelles E) ainsi que l’éducation physique.

Article 9

Matières d'examen

1)
Font l'objet d'un examen écrit
la première langue nationale, la deuxième langue nationale, la troisième langue (anglais), les mathématiques; les finances et la comptabilité ainsi que l'économie et le droit. La durée des examens est conforme aux dispositions du droit fédéral.

2) Les examens oraux durent 15 minutes.
La première langue nationale, la deuxième langue nationale et la troisième langue (anglais) font l'objet d'un examen.

On peut affirmer que le canton des Grisons fait d'énormes efforts pour promouvoir la maîtrise de plusieurs langues. De façon générale, la langue seconde correspond à une langue nationale de la Confédération suisse, soit l'allemand pour les non-germanophones, le français pour les non-francophones, l'italien pour les non-italophones et le romanche pour les non-romanchophones, particulièrement les germanophones. Les langues étrangères sont les langues parlées dans d'autres pays à l'exception des quatre langues nationales suisses. On pense surtout à l'anglais, mais également à l'espagnol, au portugais, au russe, etc. 

6.6 L'enseignement des langues étrangères

Depuis l’année scolaire 1999/2000, les écoles primaires germanophones enseignent l’italien ou le romanche comme première langue étrangère. Dans les écoles primaires de langue italienne et romanche, l’allemand est enseigné comme première langue étrangère. Depuis l’année scolaire de 2002/2003, une langue cantonale (l’italien ou l’allemand) et l’anglais sont enseignés comme matières obligatoires au secondaire du premier cycle. Depuis l’année scolaire 2012/2013, l’anglais est enseigné comme deuxième langue étrangère dès la 5e année de l’école primaire. Dans le premier cycle de l’enseignement secondaire, il existe également des matières optionnelles spéciales pour les langues nationales (dont le français) qui ne sont pas obligatoires.

Le choix de la seconde langue se fait conformément aux prescriptions de l'article 30 de la Loi sur les écoles publiques (2012):

Article 30

Enseignement des langues étrangères

1. Niveau primaire

1) Au niveau primaire, au moins une langue cantonale et l'anglais doivent être enseignés comme langues étrangères.

2) La première langue étrangère dans les écoles primaires de langue romanche et italienne est l'allemand. La première langue étrangère dans les écoles primaires de langue allemande est l'italien.

3) L'enseignement de la première langue étrangère commence en 3e année, l'enseignement de l'anglais commence en 5e année.

4) Dans les écoles primaires de langue allemande, le conseil scolaire peut décider :

a) que le romanche soit enseigné à la place de l’italien ;
b) que le romanche et l'italien sont proposés comme matières optionnelles obligatoires.

5) Le conseil scolaire peut également prévoir que, dans ces cas, le romanche soit enseigné dès la première année de l'école primaire.

- Les écoles germanophones

Dans les Grisons alémaniques, l’enseignement se fait uniquement en allemand, mais l'apprentissage de l’italien est obligatoire dès la 4e année du primaire (ou français facultatif). Dans les écoles où l’enseignement de la langue seconde se fait en italien, on espère ainsi assurer un lien avec les vallées italophones des Grisons et celles du canton du Tessin, améliorer la situation de l’italien en tant que langue nationale minoritaire et comme langue de communication avec l’Italie voisine, tout en gardant une ouverture vers une autre langue latine, le français. Le Règlement d'exécution de la loi scolaire (1961, en vigueur) est très précis à l'égard des écoles primaires germanophones:

Article 15.2

Langue seconde dans les écoles primaires et les classes enfantines germanophones 

1) L'enseignement de la langue italienne commence dans la 4e classe du primaire et en règle générale dans la 4e classe à effectif réduit.

2)
L'enseignement du romanche commence en règle générale dans la première classe du primaire ainsi que dans la première classe à effectif réduit; un tel enseignement doit cependant être offert plus à la tard à partir de la 4e classe primaire et de la 4e classe à effectif réduit.

3) Si dans une commune le romanche et l'italien sont offerts comme matières optionnelles obligatoires, il revient à l'autorité parentale en exercice de décider dans laquelle des deux langues l'enseignement doit être offert à ses propres enfants. Sur demande des représentants légaux respectifs, le conseil scolaire peut autoriser, dans les cas motivés, d'autres attributions. Des sections avec moins de cinq écoliers peuvent être prévues seulement dans les exceptionnels et avec l'autorisation du gouvernement.

4) Dans les écoles primaires et les classes germanophones à effectif réduit situées dans les arrondissements dans laquelle la majorité de la population parle le romanche, le canton peut promouvoir, au moyen d'une consultation en la matière, l'introduction et l'enseignement de la langue romanche à titre de langue de contact et de voisinage.

5) L'enseignement de l'anglais commence en 5e année de l'école primaire et généralement dans les classes à effectif réduit en 5e année. (2012)

- Les écoles italophones

Pour ce qui est des Grisons italophones, qui compte 14 communes et quatre Valli ou vallées (Val-Bregaglia, Val-Mesocco, Val-Poschiavo et Val-Calanca), l’enseignement tant à l’école maternelle qu’à l’école primaire se fait en italien. Au secondaire, l’allemand est obligatoire comme langue seconde, mais certaines matières sont enseignées en italien (histoire, biologie, géographie et chimie), alors que les autres matières sont dispensées en allemand. À la fin du secondaire, l’allemand est devenu plus important que l’italien. Ainsi, les élèves italophones subissent une immersion tardive en allemand.

Il semble que l’italien soit menacé dans certaines vallées grisonnes, notamment dans le Val-Bregaglia. Mais l'article 70 de la Constitution suisse impose à la Confédération d'aider le canton des Grisons à promouvoir l'italien.

- Les écoles romanchophones

Le système scolaire grison est régi par la Loi sur les écoles publiques (2012) ainsi que par les programmes prévus pour les différents niveaux scolaires. Dans le domaine scolaire, les textes juridiques cantonaux sont très clairs à ce sujet. Toutefois, dans le canton des Grisons, en raison de la «délégation législative», le choix de la langue administrative communale et de la langue d’enseignement relève de la compétence des communes et non des autorités cantonales.

Le canton, rappelons-le, compte 101 communes, dont 38 comprises dans l’aire traditionnelle du romanche et 15 dans l’aire italienne. La plupart des 38 communes «romanches» enseignent au primaire en romanche — soit le sursilvan, le surmiran, le sutsilvan, le vallader ou le putèr — avec un enseignement de l’allemand à partir de la quatrième année en raison de quatre à six heures hebdomadaires. L'instruction en romanche y est réduite de deux à quatre heures par semaine comme matière et à un tiers de l'enseignement des sciences de l'homme et de la nature; l'enseignement artistique est dispensé pour environ six heures en romanche, en fonction des possibilités offertes par l'organisation de ces écoles, lesquelles sont souvent centralisées.

Les germanophones établis dans ces communes suivent leurs cours en allemand, mais sont soumis à une immersion romanche (l’un des cinq idiomes) pendant que les Romanches passent à une immersion progressive vers l’allemand. On compte aussi 16 communes de l’aire romanche dont l’école primaire se fait en allemand, mais avec un enseignement du romanche comme matière d’enseignement en raison de deux à trois heures par semaine. Dans la commune italophone de Beiva (Bivio), l’enseignement est trilingue, ce qui signifie qu’il se fait à la fois en italien, en allemand et en partie en romanche; dans les dernières années, l’enseignement se poursuit principalement en allemand. Dans 18 communes, les écoles n’enseignent strictement qu’en allemand.

Précisons également que l’enseignement en romanche dans les 38 communes romanches ne dure que durant les trois ou quatre premières années, puis l’élève passe peu à peu à l’allemand. Enfin, dans la vingtaine de communes restantes, les écoles ignorent complètement le romanche dans l’enseignement et celui-ci est presque absent comme langue de communication scolaire (2,6 %), même parmi les enfants qui le parlent en famille. Les communes dont l'école de base est allemande peuvent décider d'obliger une école à enseigner le romanche comme langue seconde.

N’oublions pas que, dans les écoles primaires romanches, la langue d’instruction reste encore l’une des cinq variétés locales utilisées par les élèves, soit soit le sursilvan, le surmiran, le sutsilvan, le vallader ou le putèr. D’ailleurs, jusqu’à récemment, les manuels scolaires étaient encore édités en trois idiomes romanches, mais le professeur pouvait enseigner dans l'un des cinq idiomes. Aujourd’hui, les écoles visent uniquement à introduire certaines notions passives (comme une langue seconde) du rumantsch grischun, et ce, à partir de la deuxième année. Présentement, les manuels scolaires sont publiés dans les cinq idiomes romanches, mais la situation devrait être normalisée en faveur du rumantsch grischun! Beaucoup de parents romanchophones sont d'accord pour que leur(s) enfant(s) apprenne(nt) à comprendre et à écrire le rumantsch grischun, tout en continuant de pratiquer leur propre idiome.

Évidemment, l’emploi du romanche tend à reculer au profit de l’allemand dès que celui-ci apparaît dans l’enseignement et tombe à moins du quart chez les élèves. Ainsi, l’emploi d’une langue pour la communication en milieu scolaire dépend plus de la position de cette langue dans l’enseignement que de la composition linguistique de la population.

7 Les médias et la vie économique

Les médias paraissent massivement en langue allemande dans le canton des Grisons. Mais les minorités italienne et romanche ont accès à la radio et à la télévision dans leur langue. Il en est ainsi pour les journaux et les magazines.

7.1 Les journaux

Les Grisons possèdent de nombreux journaux en langue allemande: Südostschweiz, Davoser Zaintung, Bündner Monatsblatt, Engadiner Post / Posta Ladina (bilingue), Engadiner Wochenzeitung, Klosterser Zaitung, Bündner Tagblatt, Novitats, Pöschtli, Aroser Zeitung, Prättigauer und Herrschäftler, etc. Le Südostschweiz, avec sa rédaction à Coire, publie dans le canton des Grisons, mais aussi dans les cantons de Glaris, de Schwytz, de St-Gall et au Liechtenstein.

L'Engadiner Post / Posta Ladina est bilingue avec des articles en allemand et en romanche puter. Le Pöschtli est un hebdomadaire de l'Abula (Thusis) qui publie ses articles en allemand, mais parfois en romanche surmiran.

Le journal La Quotidiana, le seul journal interrégional en romanche, est rédigé dans les cinq idiomes traditionnels, qui ont leur propre langue écrite, ainsi qu'en rumantsch grischun; mais l'idiome sulselvan accapare plus de la moitié des articles, en raison du nombre plus important de ses abonnés dans la Surselva. Ce journal a absorbé tous les autres journaux romances, sauf La Pagina da Surmeir en publiée à Surses en surmiran.

Enfin, en italien, on doit citer l'Il Grigione Italiano, qui est rédigé en italien et lu dans les régions de la Moesa, de la Bernina et de l'Albula, a en concurrence La Pagina da Surmeir. Cependant, l'offre médiatique en italien dans les vallées du sud des Grisons est plus modeste que celle en allemand et même en romanche. Une infrastructure technique en partie obsolète, la transition des offres de médias imprimés vers l'ère numérique et la petite taille du marché des lecteurs et de la publicité ne sont que quelques-uns des problèmes auxquels sont confrontées les entreprises de médias dans les vallées du sud des Grisons.

7.2 Les médias électroniques

Avec ses trois langues, les Grisons doivent couvrir un vaste territoire dans de hautes montagnes et des vallées isolées. La Société suisse de radiodiffusion et télévision (SRG- SSR) est le groupe audiovisuel public de la Suisse. Elle diffuse dans toute la Suisse grâce à ses filiales: Schweizer Radio und Fernsehen, Radio Télévision Suisse francophone, Radiotelevisione svizzera di lingua italiana et Radiotelevisiun Svizra Rumantscha.

La Loi fédérale sur la radio et la télévision (2006) prévoit fournir à la population des émissions de radio et de télévision dans les trois langues officielles, l'allemand, le français et l'italien, mais l'article 24.2 et l'article 30 font mention des besoins de la population romanche:

Article 24
Mandat

1) La SSR [Société suisse de radiodiffusion et télévision] remplit le mandat constitutionnel dans le domaine de la radio et de la télévision (mandat).

Elle doit en particulier:

a. fournir à l'ensemble de la population des programmes de radio et de télévision complets et de même valeur dans les trois langues officielles;
b. promouvoir la compréhension, la cohésion et l'échange entre les différentes parties du pays,
les communautés linguistiques
, les cultures et les groupes sociaux, et tenir compte des particularités du pays et des besoins des cantons;
c. resserrer les liens qui unissent les Suisses de l'étranger à la Suisse, promouvoir le rayonnement de la Suisse à l'étranger et y favoriser la compréhension pour ses intérêts.

2) La SSR diffuse au moins un programme de radio pour la Suisse d'expression romanche. Par ailleurs, le Conseil fédéral fixe les principes régissant la prise en compte des besoins spécifiques de cette région linguistique en matière de radio et de télévision.

3) Le Conseil fédéral fixe les principes régissant la prise en compte des besoins des personnes atteintes de déficiences sensorielles. Il détermine notamment dans quelle proportion des émissions spéciales doivent être offertes dans la langue des signes pour les malentendants.

4) La SSR contribue:

a. à la libre formation de l'opinion en présentant une information complète, diversifiée et fidèle, en particulier sur les réalités politiques, économiques et sociales;
b. au développement de la culture et au renforcement des valeurs culturelles du pays ainsi qu'à la promotion de la création culturelle suisse, en tenant particulièrement compte de la production littéraire, musicale et cinématographique suisse, notamment en diffusant des émissions de producteurs suisses et des émissions produites par elle;
c. à la formation du public, notamment grâce à la diffusion régulière d'émissions éducatives;
d. au divertissement.

5) Dans les émissions d'information importantes susceptibles d'intéresser un public au-delà de la région linguistique et hors des frontières nationales, la langue standard est en règle générale utilisée.

Article 30

1) Les programmes de radio et de télévision de la SSR sont diffusés au moins dans toute la région linguistique concernée. Au moins un programme de radio et un programme de télévision de la SSR en allemand, français et italien sont diffusés sur l’ensemble du territoire suisse. Le Conseil fédéral peut prévoir des exceptions. En outre, il tient compte des besoins de la population romanche selon l’art. 24, al. 2. Il s’assure à cet égard que, pour chaque mode de diffusion, des fréquences et des canaux soient à la disposition des autres diffuseurs.

2) Le Conseil fédéral détermine pour chaque programme la zone de desserte et le mode de diffusion.

 

 

La Schweizer Radio und Fernsehen (SRF) produit des émissions en allemand, mais les radios locales émettent aussi en suisse allemand, en Bündnerdeutsch, en Walserdeutsch et en Bairishdeutsch. Évidemment, les germanophones peuvent capter des émissions de l'Allemagne, sinon de l'Autriche.

La Radiotelevisione svizzera di lingua italiana (RSI) diffuse des émissions en italien dans les vallées du sud des Grisons, mais il est aisé de la part des italophones des Grisons d'écouter des émissions de la Radiotélévision suisse de langue italienne (RSI) et de la Società cooperativa per la radiotelevisione nella Svizzera italiana (CORSI).

La Radiotelevisiun Svizra Rumantscha diffuse ses émissions en romanche sur la chaîne de télévision SRF 1, comme le Telesguard (journal d'information quotidien) du lundi au vendredi, le Minisguard (programme d'information pour enfants) le samedi et les Cuntrasts le dimanche. Les programmes sont sous-titrés en allemand. L'émission Telesguard sera également rediffusée sur SRF info et RSI LA 2. Il existe plusieurs stations locales de radio, qui diffusent 24h/24 dans les cinq variétés romanches.

7.3 La vie économique et l'affichage

Dans le canton des Grisons, la vie économique se déroule en allemand et en italien dans le Sud. Dans un tel contexte, le romanche est pratiquement inexistant. Par exemple, il est inutile de chercher des textes en romanche sur les emballages, ainsi que dans les prospectus et les annonces publicitaires. Les données sur l’emploi des langues au travail témoignent de la marginalisation du romanche et de la domination de l'allemand. Dans la région romanche, on estime que le tiers des personnes actives mentionnent l'employer au travail, alors que plus des trois quarts indiquent l’allemand et le tiers l’italien. Même dans les communes où le romanche est majoritaire, les trois quarts ont recours à l'allemand.

La diffusion du romanche diffère suivant le type d'activité ou le secteur considéré. Par exemple, si l’on prend la situation dans professionnelle, on constate que les chefs d'entreprise et les cadres supérieurs sont les personnes qui se servent le moins du romanche et le plus de l’allemand. Par ailleurs, la langue romanche est plus répandue dans les activités plus traditionnelles comme l'agriculture, alors qu’elle est peu employée non seulement dans les professions liées au tourisme, mais aussi dans celles de la santé. Notons aussi l’importance des mariages mixtes germano-romanches dans le canton des Grisons, alors que le phénomène semble moins développé dans les autres régions linguistiques du pays.

L'article 8 de l'Ordonnance sur les langues (2007-2025) énonce la réglementation concernant les inscriptions sur les édifices publics. La loi ne porte pas sur les affiches privées. Seules les affiches de l'administration cantonale et des administrations municipales sont visées par la loi, mais la tendance est de ne jamais éclipser l'allemand.

De façon générale, l'allemand est omniprésent dans le paysage du canton des Grisons, y compris dans les zones romanches. Seules les communes italiennes réussissent à imposer une autre langue. Le romanche peut être parfois présent, mais il faut alors s'en tenir aux villages.

Il est aisé de constater que dans les communes romanches les enseignes privées sont plus fréquemment rédigées en langue allemande qu'en romanche. Seules les affiches des administrations cantonales sont en trois langues et encore elles demeurent relativement rares.

En pratiquant la séparation territoriale des langues, la Confédération suisse a su préserver les différentes communautés linguistiques et éviter les conflits linguistiques. Le système présente quand même des lacunes, notamment dans le cas du romanche qui ne jouit pas tout à fait du même statut que les autres langues. Le gouvernement fédéral a dû intervenir pour remédier à la situation, ce qui reste très rare en Suisse. Il a chargé un groupe de travail d'étudier la question linguistique et de lui soumettre des propositions. Le sort du romanche était particulièrement visé du fait qu'il semblait délaissé par ceux-là qui devraient s'en préoccuper le plus: les autorités cantonales des Grisons.

Or, on sait que l’article 70 (intitulé Langues) de la Constitution suisse reconnaît maintenant le romanche comme «langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche». De plus, dorénavant, la Confédération «soutient les mesures prises par les cantons des Grisons et du Tessin pour sauvegarder et promouvoir le romanche et l'italien». Ainsi, la Constitution suisse élève maintenant le romanche au rang de langue officielle régionale. Cette modification constitutionnelle est importante parce qu’elle donnera certains moyens au gouvernement fédéral pour protéger et promouvoir les langues minoritaires du canton des Grisons dans la mesure où celui-ci se ferait toujours tirer l’oreille. Espérons que ces mesures puissent diminuer, voire éliminer, le processus d’assimilation — ou plutôt de germanisation — qui désarticule la société romanche. L'application du principe de la territorialité linguistique accorde normalement à une langue menacée comme le romanche une certaine protection, mais cela ne peut empêcher son déclin lorsqu'un territoire est déserté par ses locuteurs.

Dernière mise à jour: 03 mai 2025

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1) Situation générale
 

2) Donnée démolinguistiques
 

3) Données historiques
 

4) La politique linguistique cantonale
 

5) Les politiques linguistiques locales
 

6) Bibliographie
 

Grisons - Suisse

 

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