Confédération suisse |
SuisseSchweizerische Eidgenossenschaft (all.)
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La Suisse — aujourd'hui officiellement
appelée en français Confédération suisse,
en allemand Schweizerische Eidgenossenschaft,
en italien Confederazione Svizzera et en
romanche Confederaziun Svizra — est
un pays de 41 285 km² limité au nord par l'Allemagne (356 959 km²), à l'est par
l'Autriche (83 859 km²) et la principauté du Liechtenstein (160 km²), au sud par
l'Italie (301 230 km²), à l'ouest et au sud-ouest par la France (543 965 km²).
Lorsqu'on compare la superficie de la Suisse à celle de ses voisins, il s'agit d'un bien petit pays, d'autant plus qu'une bonne partie, surtout au sud, est très peu peuplée, en raison des hautes montagnes. La Suisse occupe une superficie plus grande que la Belgique (32 545 km²). On peut consulter une carte de la Suisse en cliquant ICI, s.v.p. |
1.1 Un État fédéral
La Suisse forme aujourd'hui un État fédéral composé de 26 cantons (voir une carte détaillée) et appelée officiellement Confédération suisse (avant le 18 avril 1999: la «Confédération helvétique»). Auparavant, il existait des demi-cantons: Bâle-Ville et Bâle-Campagne, Nidwald («le Bas») et Obwald («le Haut»), Appenzell Rhodes-Intérieures et Appenzell Rhodes-Extérieures. La constitution du 18 avril 1999 a supprimé la notion de demi-canton; ces anciens demi-cantons sont considérés maintenant comme des cantons à part entière. Il peut paraître insolite pour un étranger de constater que plusieurs cantons ont un territoire discontinu. Seule une carte détaillée permet de vérifier ces frontières cantonales discontinues: Genève, Vaud, Fribourg, Soleure, Obwald, Schaffhausen (ou Schaffhouse) et Thurgovie. La liste des cantons (selon leur population) apparaît dans le tableau 1, avec l'année d'entrée dans la Confédération, la capitale cantonale, la population (recensement de 2011), la superficie, la densité de la population, le nombre des communes et les langues officielles (voir la tableau 1 ci-dessous). Depuis le XIXe siècle, la Suisse se distingue sur la scène internationale: outre le chocolat, la fondue et la raclette, sa spécialité reconnue est… la neutralité ! |
Tableau 1 : Population
des cantons
(2022, d'après Wikipedia)
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Malgré son appellation longue de «Confédération suisse» (en italien: Confederazione Svizzera; en allemand: Schweizerische Eidgenossenschaft), la Suisse est un État fédéral composé de 26 cantons —, à leur tour subdivisés en communes, ce qui donne une structure administrative à trois niveaux. Au point de vue constitutionnel, les cantons romans de Genève, de Neuchâtel, du Jura, du Valais, de Vaud et du Tessin ont reçu l'appellation de «république». Ces cantons ont déjà fait partie de la République française ou, dans le cas du Tessin, de la République italienne. Tous les autres cantons sont des «États» (Staat en allemand), selon la tradition germanophone.
1.2 Les particularités du fédéralisme suisse
De plus, en tant que composants de l'État suisse, les cantons constituent des entités politiques autonomes avec un territoire (garanti par la Constitution fédérale), une population, des ressources financières et une administration politique propre. Ce sont techniquement des États souverains membres d'une confédération, mais ils ont délégué une partie de leurs pouvoirs à l'État central. Par ailleurs, il existe un principe implicite d'égalité entre les cantons qui participent, de façon égale, à la formation et à l'expression de la volonté nationale. L'exemple le plus significatif de cette égalité entre les cantons semble celui Chambre haute appelée aussi le Conseil des États. La composition de cette chambre est telle que chaque canton, qu'il soit petit ou grand, délègue deux députés. Dans les référendums constitutionnels, non seulement les votes de chaque canton sont comptés, mais il faut, en plus, ceux du corps électoral de toute la Suisse: il faut, de manière plus précise, la double majorité à la fois de la Suisse et des cantons pour adopter une modification constitutionnelle au plan fédéral. Lors de la présentation des projets de loi fédérale, tous les cantons doivent être consultés. Les cantons sont aussi consultés dans la procédure concernant les prises de décision et enfin, dans certains domaines, les membres des gouvernements cantonaux se réunissent en conférence avec le conseiller fédéral du même domaine pour délibérer sur leurs affaires communes.
- La démocratie directe
La Suisse est un fédéralisme souvent qualifié de «fédéralisme d'exécution». À l'opposé de ce qui se passe dans d'autres États fédéraux, le gouvernement fédéral suisse n'applique pas lui-même grande partie de sa législation au moyen de son administration, car il transfère cette tâche aux cantons.
De plus, la Suisse est caractérisée par sa «démocratie directe». Les principaux instruments de cette démocratie sont le référendum et l'initiative populaire. Ainsi, les lois fédérales de portée générale et les traités internationaux font l'objet d'un référendum facultatif. Par exemple, toute loi fédérale peut être soumise au vote du peuple lorsque 50 000 citoyens actifs le demandent, dans les 100 jours qui suivent leur publication. L’adoption d’un tel projet requiert la double majorité: la majorité du peuple (majorité des suffrages valables) et la majorité des cantons (majorité des cantons où les votants ont approuvé le projet). Évidemment, le peuple dispose ainsi d'une sorte de veto qui, non seulement ralentit le processus politique, mais peut bloquer systématiquement les projets de loi proposés par le Parlement ou le gouvernement.
- Les initiatives populaires
Pour ce qui est des initiatives populaires, les citoyens peuvent proposer un projet de loi (ou toute autre initiative) au parlement s'ils recueillent 100 000 signatures de la part de citoyens actifs dans un délai de 18 mois. Les autorités, pour leur part, peuvent opposer un contre-projet à une initiative populaire. Depuis 1987, il existe la possibilité du «double oui» : l’initiative populaire et le contre-projet peuvent être acceptés.
Enfin, toutes les instances suisses sont jalouses de leurs prérogatives. On peut résumer la situation par la formule suivante: «Ce que les communes peuvent faire, le canton ne doit pas le faire; ce que les cantons peuvent faire, la Confédération ne doit pas le faire.» On pourrait ajouter aussi avec un certain humour : «Ce que chaque pays peut faire, l'Union européenne ne doit pas le faire!» Dans la pratique, chacun des cantons applique ses propres politiques. On peut constater qu'au plan des politiques linguistiques un canton peut appliquer une politique très différente d'un autre et mettre en application des politiques scolaires très variables. Chaque canton demeure souverain dans son champs de juridiction.
On dit aussi que la Suisse est un pays neutre. Cependant, un proverbe helvétique affirme qu’un bon diplomate est celui qui sait mentir dans les quatre langues nationales.
Avec une moyenne nationale de 174 hab./km², les cantons dont le taux de densité est le plus élevé sont Bâle-Ville (5033), Genève (1883), Zurich (838) et Bâle-Campagne (532).
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Au point de
vue linguistique, la Suisse comprend quatre
grandes communautés: germanophone,
francophone, italophone et romanchophone. Selon l’Office fédéral
de la statistique (OFS) de 2018, la majorité de la population parlait l'allemand dans une
proportion de 62,2 %, alors que les minorités utilisaient des
langues
romanes: le français (23,0 %), l'italien (8,0 %) et le romanche
(0,5 %). Il existe d'autres langues nationales «non officielles», comme
le franco-provençal, le walser ou le lombard.
Les autres langues sont énumérées dans le tableau ci-dessous. |
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Chacun des quatre groupes linguistiques nationaux de la Suisse vit dans une région correspondante dont les frontières linguistiques sont restées à peu près inchangées depuis plus de 1000 ans; ces frontières linguistiques sont donc antérieures à la création de la Suisse. On distingue principalement la Suisse alémanique (de langue allemande), la Suisse romande (de langue française) et la Suisse italienne ou Svizzera italiana (de langue italienne). L'Office fédéral de la statistique définit la «région linguistique» d'après la langue majoritaire de la population des communes respectives. Dans certains cas peu fréquents, il existe une divergence entre cette définition statistique et la définition politique de la région linguistique. Il arrive aussi que des communes changent de région linguistique après un recensement, par suite de l'évolution de leur population et du nombre de locuteurs des différentes langues. Par exemple, le recensement de 2000 a montré que la commune tessinoise de Bosco-Gurin a pour la première fois une population majoritairement italophone; elle est donc attribuée à la région italophone. Par ailleurs, cinq communes romanches ont passé dans l'aire germanophone en 2000, soit autant qu'en 1990. |
On peut représenter la répartition des
langues nationales dans les cantons de la façon suivante:
Cantons unilingues allemands (14) | Bâle, Soleure, Argovie, Lucerne, Unterwald, Uri, Glaris, Zoug, Schwyz, Zurich, Thurgovie, Schaffhausen, Saint-Gall, Appenzell |
Cantons unilingues français (4) | Genève [GE], Vaud [VD], Neuchâtel [NE], Jura [JU] |
Canton italophone du Tessin (1) | Tessin [TI] / (Ticino) |
Cantons bilingues allemand-français (3) | Berne [BE], Fribourg [FR], Valais [VS] |
Canton
trilingue des Grisons
(1) (allemand-italien-romanche) |
Grisons [GR] / (Graubünden) |
Ces frontières linguistiques ne sont pas sans susciter des tensions qui se traduisent par l’usage de certaines expressions courantes. On parle, en Suisse romande, de «germanisation de la Suisse»; en Suisse italienne, de l’«alémanisation du Tessin» et, surtout, de Röstigraben ou de «rideau de rösti». Le terme très populaire de Röstigraben utilisé par les francophones provient de Rösti (plat de pommes de terre utilisé par les Alémaniques) et de graben («fossé», «barrière» ou «rideau»). Le mot Röstigraben (ou en français «rideau de rösti») sert à désigner, d’une part, la frontière linguistique séparant le Suisse romande de la Suisse alémanique (le long de la rivière Sarine), d’autre part, les difficultés nées des tensions entre Romands et Alémaniques. En Suisse italienne, on parle aussi de Polentagraben («rideau de polenta»: galette de farine de maïs) entre la Suisse alémanique et le canton du Tessin.
Si l'application rigide du principe de la territorialité a pour effet d'éviter un déplacement des frontières linguistiques, il implique aussi une politique d'assimilation pour tous les «migrants» internes. Par exemple, lorsqu'un germanophone s'établit en Suisse romande, il doit accepter ipso facto de ne plus rien revendiquer dans sa langue et il doit faire instruire ses enfants en français, mais il pourra communiquer en allemand au bureau fédéral à Berne. Le tableau 2 présente la population par canton selon les quatre langues nationales. On peut constater qu'il y a des minorités germanophones, francophones, italophones, romanchophones et allophones dans tous les cantons:
Tableau 2 - Langues principales selon les cantons (en 2018)
Canton | Langue |
Allemand ou suisse allemand |
Français |
Italien ou tessinois |
Romanche | Anglais | Autres | Population totale |
Zurich |
allemand |
1 029 623 | 42 485 | 72 076 | 3 426 | 121 261 | 267 997 | 1 276 291 |
Uri | allemand | 28 463 | - | 427 | - | 1 003 | 2 882 | 30 466 |
Schwyz | allemand | 118 851 | 2 533 | 4 708 | 371 | 8 535 | 18 034 | 134 575 |
Obwald | allemand | 29 144 | 465 | 386 | 178 | 1 102 | 3 117 | 31 675 |
Nidwald | allemand | 33 186 | 600 | 1 184 | - | 1 984 | 3 639 | 36 616 |
Glaris | allemand | 29 385 | 416 | 1 862 | 203 | 1 361 | 5 784 | 33 983 |
Zoug | allemand | 85 202 | 3 653 | 4 589 | 191 | 12 880 | 21 058 | 106 045 |
Soleure | allemand | 201 949 | 6 810 | 11 093 | 419 | 9 915 | 37 883 | 231 764 |
Bâle-Ville | allemand | 125 201 | 8 214 | 10 022 | 267 | 19 742 | 40 873 | 162 990 |
Bâle-Campagne | allemand | 209 829 | 7 909 | 13 430 | 264 | 16 317 | 38 010 | 243 491 |
Schaffhouse | allemand | 60 189 | 1 226 | 2 688 | - | 3 601 | 12 367 | 69 345 |
Appenzell-Rhodes-Extérieures | allemand | 41 718 | 513 | 1 036 | - | 2 135 | 5 752 | 45 950 |
Appenzell-Rhodes-Intérieures | allemand | 12 594 | - | 205 | - | 433 | 932 | 13 270 |
Saint-Gall | allemand | 372 327 | 5 441 | 14 973 | 1 547 | 17 498 | 74 123 | 424 721 |
Lucerne | allemand | 303 063 | 5 564 | 11 389 | 668 | 15 690 | 54 177 | 342 001 |
Argovie | allemand | 493 846 | 11 299 | 29 018 | 810 | 31 539 | 101 899 | 571 882 |
Thurgovie | allemand | 207 699 | 2 955 | 8 585 | 320 | 9 023 | 35 692 | 233 109 |
Vaud | français | 36 089 | 542 613 | 32 729 | 310 | 58 570 | 147 966 | 657 154 |
Neuchâtel | français | 6 908 | 128 455 | 8 318 | - | 6 772 | 26 316 | 146 440 |
Genève | français | 15 605 | 309 901 | 24 916 | 330 | 47 320 | 112 382 | 389 107 |
Jura | français | 4 569 | 55 082 | 1 545 | - | 1 409 | 6 470 | 61 370 |
Tessin | italien | 30 632 | 14 081 | 265 638 | 427 | 11 612 | 36 860 | 299 826 |
Berne | allemand-français | 727 120 | 95 390 | 27 360 | 795 | 38 349 | 111 516 | 868 970 |
Fribourg | allemand-français | 68 438 | 181 335 | 6 343 | 162 | 10 211 | 45 032 | 262 654 |
Valais | allemand-français | 71 000 | 195 915 | 13 201 | - | 11 116 | 46 135 | 288 793 |
Grisons |
allemand-italien- romanche |
127 941 | 2 294 | 22 504 | 25 014 | 5 822 | 20 013 | 170 045 |
Total |
- |
4 470 571 | 1 625 149 | 590 225 | 35 702 | 465 200 | 1 276 909 | 7 132 533 |
Pourcentage | 62,6 % | 22,7 % | 8,2 % | 0,5 % | 6,5 % | 17,9 % | 100 % |
Le tableau
ci-contre révèle que la plupart des Suisses résident dans leur région
linguistique d'appartenance. Les germanophones emploient l'allemand dans une
proportion de 97,5% ou le suisse allemand à 88,7%. Les francophones
recourent au français dans une proportion de 99,4% dans leur
région et les italophones à 99,7%. Dans la région germanophone, le français est néanmoins employé dans une proportion de 19,3% et l’italien à 11,7%, mais l'anglais à 46%. Dans la région francophone, l’allemand est employé à 20,3%, l'italien à 15,4% et l'anglais à 43,0%. Dans la région italophone, l'allemand est employé à 26,6%, le français à 24,0% et l'anglais à 36,9%. Le tableau ci-dessous indique la moyenne dans l'emploi des langues:
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En ce qui a trait à la région romanchophone, c'est-à-dire le canton des Grisons (170 045 habitants), on constate que les romanchophones ne forment que 14,7 % (25 014) de la population avec une présence de quelque 75 % de germanophones (127 941 hab.) et de 13,2 % d'italophones (22 504). Autrement dit, la région romanchophone est la région la moins homogène de la Suisse au plan linguistique. Par ailleurs, on estime qu'il existe quelque 60 000 romanchophones dans toute la Suisse, ce qui signifie que seulement 41,6% de tous les romanchophones du pays vivent dans leur région linguistique et 58,3% dans les autres régions linguistiques. Enfin, c'est la ville de Zurich qui abrite le plus grand nombre de romanchophones en dehors du canton des Grisons, soit 3 420 locuteurs.
2.1 Les germanophones
Les germanophones constituent le groupe majoritaire (62,6 %), mais leur langue maternelle n'est pas l'allemand pour la plus grande partie de cette communauté. C’est là l’un des paradoxes du système suisse: la langue de plus de 62 % des Suisses n’est pas reconnue juridiquement. Les germanophones parlent l'une des nombreuses variétés du Schweizerdeutsch (ou Schwizerdütsch), appelé en français le «suisse alémanique» (de l'ancien royaume des Alamans) ou le «suisse-allemand»; le terme «dialecte» est souvent employé pour désigner les formes du Schwizerdütsch, qui sont demeurées très vivantes dans toute la Suisse alémanique. On parle le Schwizerdütsch avec des formes différentes (mais relativement intercompréhensibles) à Bâle, à Fribourg, à Lucerne, à Zurich, etc. On distingue ainsi le «dialecte bâlois», le «dialecte bernois», le «dialecte fribourgeois», le «dialecte zurichois» , etc. Les linguistes ont défini l’aire géographique du suisse-allemand en quatre grande zones: d’une part, l’alémanique du Sud et l’alémanique du Nord (axe nord-sud), d’autre part, le haut-alémanique et l’alémanique alpin (axe est-ouest). |
Comparativement aux dialectes de l'Allemagne, les dialectes de la Suisse alémanique sont parmi les plus archaïsants, car ils ont conservé des traits phonétiques et morphologiques du moyen-haut-allemand.
On peut consulter une carte des variétés allemandes, ainsi qu'un tableau, en cliquant ICI.
De façon générale, les germanophones de la Suisse emploient évidemment le suisse-allemand à la maison, entre amis, dans la rue et dans toutes les communications informelles. Mais le Schwizerdütsch envahit aussi les affaires, les écoles, les tribunaux, la radio et la télévision, les parlements cantonaux, les commissions fédérales, etc. Dans les écoles, un sondage révèle que près de 30 % des écoliers (au primaire) disent ne parler que le suisse-allemand. Dans le monde des affaires, les décisions se prennent en suisse-allemand durant la pause-café. Ce témoignage de Friedrich Dürrenmatt (1921-1990), l’un des plus importants dramaturges germanophones suisses de l’après-guerre, illustre parfaitement la complexité de la réalité linguistique en Suisse alémanique:
Je parle en dialecte bernois et j’écris en allemand. [...] Je dois toujours quitter la langue que je parle pour trouver une langue que je ne peux pas parler, car quand je parle en allemand je parle avec un accent bernois. [...] Certains me le reprochent. Ils me disent qu’on sent le dialecte bernois dans mon allemand. Eh bien! tant mieux. J’écris un allemand qui a poussé sur le sol du dialecte bernois. |
En Suisse allemande, ne pas s’exprimer en suisse alémanique constitue un sérieux handicap, d'autant plus que le brassage de la population et les médias électroniques ont progressivement forgé un Schwizerdütsch moyen, compréhensible par tous les Alémaniques, quel que soit leur idiome cantonal. Le nombre des Suisses qui parlent cette langue est relativement proche, par exemple, de la population de la Norvège ou du Danemark.
Cette expansion du Schwizerdütsch ne va pas sans générer de réelles tensions avec les autres communautés linguistiques (francophones et italophones) qui, pour leur part, apprennent le «bon allemand». Si certains Tessinois italophones apprennent le suisse-allemand, les francophones romands manifestent beaucoup de réticence. C’est là l’un des obstacles supplémentaires dans les communications en Suisse: les germanophones s’expriment dans une langue que les autres ne comprennent pas parce que ces derniers ont appris à l’école le «bon allemand». C’est sans doute ce que signifie l’adage bien connu à propos des Suisses: «Les Suisses s’entendent bien parce qu’ils ne se comprennent pas.»
Pour ce qui est du «bon allemand» ou de l’«allemand d’Allemagne» (ou «allemand standard»: le Hochdeutsch), les Suisses alémaniques l’apprennent à l’école primaire, mais n’aiment manifestement pas s'exprimer dans cette langue. En fait, les Suisses alémaniques utilisent l'allemand d'Allemagne surtout lorsque les circonstances de la vie publique les y obligent; ils détestent même devoir passer au «bon allemand» sous prétexte qu’un francophone membre d’un comité administratif ne les comprendra pas. Les Suisses alémaniques n’écrivent qu’en allemand standard.
La plupart d’entre eux habitent la zone n° 2 de langue allemande, qui compte 14 cantons unilingues (Bâle, Soleure, Argovie, Lucerne, Unterwald, Uri, Glaris, Zoug, Schwyz, Zurich, Thurgovie, Schaffhausen, Sint-Gall, Appenzell) ou la partie germanophone de l'un des trois cantons bilingues (Fribourg, Valais, Berne) ou du canton trilingue des Grisons.
Depuis quelques années, les cantons suisses du Nord reçoivent beaucoup d'immigrants venant de l'Allemagne. On estime que cette communauté atteint au moins les 260 000 personnes dont la langue maternelle est généralement l'allemand standard. Or, en réaction, les Suisses germanophones ont tendance à utiliser davantage leur suisse alémanique comme pour s'opposer aux Allemands d'Allemagne.
2.2 Les francophones
Les francophones (22,7 %), pour leur part, occupent la Suisse romande (zone n° 1), soit les cantons unilingues de Genève, de Vaud, de Neuchâtel et du Jura ou l'aire française des cantons bilingues de Fribourg, du Valais et de Berne. Toute leur vie sociale ne se déroule qu’en français, que ce soit dans les parlements cantonaux, les cours de justice, les réseaux d’enseignement, les services publics, les affaires, les commerces, etc. Toutefois, lorsqu’ils font carrière dans la fonction publique fédérale, ils doivent apprennent l’allemand. Les francophones ne s'expriment généralement qu'en français standard, sauf pour les rares locuteurs qui, dans certaines communes fribourgeoises ou valaisannes, pratiquent encore les dialectes franco-provençaux, le plus souvent dénommé «patois» par leurs locuteurs. |
Lorsqu'ils sont bilingues, les francophones apprennent en général l'«allemand d'Allemagne», souvent appelé, en Suisse, le «bon allemand», mais aussi le «suisse-allemand», lorsqu'ils habitent près de la frontière linguistique.
2.3 Les italophones
Les italophones (8,2 %), pour
leur part, habitent le canton unilingue du
Tessin et l'une des trois régions italiennes (zone n° 3) situées au sud dans
le canton des Grisons, ce qu'on appelle la Svizzera italiana. Les
Suisses italophones, à l’exemple des Suisses alémaniques, parlent un italien
différent de celui en usage en Italie. En fait, l’italien de la Suisse italienne
se compose de trois types d’«italien»: le dialecte local (différent selon
les vallées et inintelligible pour un Italien), l’italien régional (celui
du Tessin ou des Grisons) et l’italien standard (celui d’Italie). La
langue maternelle de la majorité des Suisses italophones (environ 80 %) est
un «dialecte local», non l’italien standard.
Si les personnes âgées de plus de 40 ans parlent couramment leur dialecte local, les plus jeunes parlent également un italien régional qu’ils considèrent comme de l’italien standard. Cet italien régional est fortement marqué par des éléments tessinois, tant au point de vue phonétique que lexical. Dans les plus grandes agglomérations, l’italien régional est aujourd’hui la langue maternelle de toute la jeune génération. |
Cependant, les italophones apprennent l’italien standard à l’école. C’est la langue officielle dans les cantons du Tessin et des Grisons (avec l'allemand et le romanche). Elle est utilisée concurremment avec l’italien régional au Parlement cantonal (Tessin et Grisons), les cours de justice, les écoles et collèges, les services publics, les affaires, les commerces, etc. Depuis, plusieurs années, le développement touristique a également favorisé l’anglais. Enfin, dans l'aire italophone, environ la moitié de la population est bilingue, contre seulement un quart dans les régions francophone et germanophone.
2.4 Les romanchophones
Enfin, pour ce qui est des Romanches (0,5 %), au nombre de 35 000 locuteurs
environ, ils habitent le canton des Grisons
(zone 4), sont dispersés ça et là dans les montagnes ou dans des
municipalités peu peuplées
et relativement pauvres. Ils parlent le romanche, une langue
rétho-romane d'origine latine fragmentée en cinq variétés intercompréhensibles:
le sursilvan (vallée du Rhin antérieur),
le vallader (en Basse-Engadine),
le surmiran (dans les Surses et la
vallée de l’Alvra), le sutsilvan
(dans la vallée du Rhin postérieur) et le putèr
(en Haute-Engadine). Le parler romanche est divisé en romanche proprement dit
(dans les Grisons) et en ladin (le sutsilvan et le putèr). En 1982, la Lia Rumantscha / la Ligue romanche (voir le site officiel) a créé un romanche normalisé, appelé le Rumantsch Grischun (le «romanche des Grisons»), lequel est basé essentiellement sur trois des cinq variétés de romanche: le sursilvan, le vallader et le surmiran, tout en prenant en considération le sutsilvan et le putèr (ces deux dernières variétés étant associées au ladin en Italie). |
Une Uniun Rumantsch Grischun a été fondée en 1991 dans le but de promouvoir la diffusion de la langue standard et de publier des ouvrages dans cette langue. Depuis 1994, la Ligue romanche utilise le Rumantsch Grischun comme langue standard pour les textes administratifs et officiels destinés à l’ensemble de l’aire de langue romanche. Ainsi, grâce à cette langue unifiée, le romanche touche maintenant des domaines jusque-là réservés à l’allemand, au français et à l’italien, par exemple le domaine des affiches et de la signalisation, ainsi que dans celui de l’Administration, des médias et, à un degré moindre, celui de l’école.
Enfin, il faut souligner qu’environ 70 % des locuteurs du romanche utilisent, en plus de leur langue maternelle, une autre langue (généralement l’allemand) qu'ils parlent habituellement en famille, dans la vie professionnelle ou à l'école. Il serait plus exact d’affirmer que presque tous les locuteurs du romanche sont bilingues et que, fait à noter, les jeunes n'apprennent plus beaucoup leur langue ancestrale.
2.5 La «langues non nationales»
Environ le tiers des immigrants, selon le recensement fédéral de 2000, parle une «langue non nationale», une expression consacrée et utilisée par les autorités fédérales, par opposition aux quatre «langues nationales» reconnues juridiquement par la Confédération: l'allemand, le français, l'italien et le romanche.
Les langues non nationales peuvent provenir de deux sources. Il y a d'abord les langues «autochtones» parlées par des populations anciennes et installées en Suisse depuis parfois plusieurs siècles. En réalité, ces langues sont des «langues nationales» parce que ce sont des langues parlées par des populations autochtones. Ensuite, il faut compter les langues non nationales issues de l'immigration, qui sont en forte croissance.
- Les langues autochtones
Ces langues «non nationales» autochtones ne proviennent pas d'une immigration récente, car la plupart sont parlées en Suisse depuis fort longtemps. Distinguons le bavarois des Autrichiens et des Allemands, le walser (Valais, Tessin, Grisons, etc.), le franco-provençal parfois appelé arpitan (Fribourg, Valais et Vaud), le lombard (Tessin), le yiddish, le tsigane et le romani.
Groupe ethnique |
Population | Langue maternelle |
Lombard (A) | 314 000 | lombard / italien |
Bavarois (A) | 36 000 | allemand / bavarois |
Romani (Sinte) (A) | 21 000 | tsigane / allemand |
Yéniche (A) | 20 000 | yéniche / allemand |
Juif (A) | 20 000 | yiddish / allemand |
Walser (A) | 15 000 | walser / allemand |
Franco-Provencal (A) | 10 200 | franco-provencal / français |
Total des groupes : 7 | 433 200 |
Le tessinois (langue romane) n'est pas considéré comme une «langue» distincte par les autorités suisses, mais comme un «parler alpin» apparenté à l'italien; c'est donc de l'«italien» pour les autorités. En fait, le tessinois ("ticinese") est une variété dialectale appartenant au groupe des langues lombardes (voir la carte), plus précisément de la branche du lombard occidental ("lombardo occidentale"). Donc, le tessinois est une variante du lombard qui comprend une extension plus grande; beaucoup d'italophones parlent encore le lombard, notamment en Italie du Nord, c'est-à-dire en Lombardie et au Piémont, même mais également dans certaines localités de la province du Trentin. Quant au tessinois, il est en usage au Tessin ainsi que dans une partie du canton des Grisons et dans quelques zones frontalières en Italie, notamment dans la région du Sopraceneri du Sud et dans la plus grande partie du Luganese, et du Mendrisiotto, ainsi que dans le Val-Bregaglia et le Val-Poschiavo. L'usage du tessinois est courant : il est grandement employé de nos jours par toutes les couches de la population italophone, aussi bien pour un usage privé que dans l'administration, mais aussi dans certaines émissions de radio et télévision.
Le bavarois (langue germanique) est parlé normalement en Allemagne et en Autriche, dans les régions montagneuses de la partie méridionale de l'Europe germanique. Il est considéré comme un dialecte de l'«allemand supérieur» (Oberdeutsch) et se divise en trois variétés: le bavarois du Nord (Nordbairisch), le moyen-bavarois (Mittelbairisch) et le bavarois du Sud (Südbairisch). Pour les autorités suisses, le bavarois est une variété de l'alémanique. De plus, les locuteurs originaires d’Allemagne et d’Autriche ne sont pas prises en considération dans les statistiques, d'autant qu'elles ont pratiquement toutes déclaré l’allemand comme leur langue principale.
Le walser (langue germanique) est une langue de type alémanique comme le Schweizerdeutsch utilisé surtout dans les cantons germanophones de la Suisse (Valais, Grisons, Saint-Gall, Berne, Uri, Glaris), mais aussi dans le Tessin, en Italie (Vallée d'Aoste, Piémont, Südtirol et Frioul), au Liechtenstein et en Autriche (Voralberg et Tyrol). La langue des Walsers est appelé en allemand Walserdeutsch; en walser, Walsertitsch; en français, simplement walser. Elle fait donc partie du groupe des langues appartenant à l'allemand supérieur (Oberdeutsch). Pour les autorités suisses, le walser est considéré comme une variété de l'alémanique.
Le franco-provençal (ou francoprovençal, parfois appelé arpitan) est, comme l'italien et le français, une langue romane (groupe franco-provençal). Demeurée bien vivante au Val-d'Aoste (Italie), cette langue que ses locuteurs continuent de désigner du nom de «patois», est en déclin rapide en France, où elle reste toutefois parlée, surtout par des personnes âgées, dans la région Rhône-Alpes. En Suisse, où le franco-provençal était historiquement présent dans tous les cantons francophones, sauf dans le canton du Jura (zone de langue d'oïl), il a disparu comme pratique vivante dans les cantons protestants (Neuchâtel, Genève et, dans une moindre mesure, Vaud). Il s'est mieux maintenu dans les cantons catholiques de Fribourg [FR] (en particulier dans le district de la Gruyère) et surtout dans le canton du Valais [VS] , où la transmission intergénérationnelle est encore assurée dans la commune d'Evolène, dans le Val d'Hérens. Il est difficile de savoir le nombre exact des locuteurs potentiels de cette langue, considérée comme éteinte par les autorités suisses, mais on peu l'estimer à 10 000.
Le yéniche (Roms) est une langue mixte faite de l'allemand, du suisse-allemand et du tsigane. Dans d'autres pays, les Yéniches (voir la carte) sont appelés «Tsiganes» ou «Gitans». En France, on les appelle souvent les «Tsiganes suisses» ou encore les «Tsiganes à passeport suisse». En Suisse, la communauté est estimée entre 50 000 et 30 000 personnes. Les communautés qui parlent cette langue sont désignées par les autorités helvétiques comme des «gens du voyage». On distingue les Yéniches des Manouches, ces derniers étant beaucoup moins nombreux. Les Yéniches sont considérés comme des autochtones en Suisse; ils parlent leur langue propre, le yéniche. Les Yéniches se distinguent physiquement de la plupart des Tsiganes ou Roms des autres pays par leurs traits «européens» (cheveux clairs, yeux bleus ou verts, etc.), ce qui leur vaut souvent le surnom de «Manouches blancs». Environ 3500 Yéniches pratiquent encore le nomadisme en Suisse. Contrairement aux Yéniches, les Tsiganes et les Roms sont considérés comme des immigrants. Lors de la ratification de la Convention cadre du Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales, la Suisse a reconnu formellement «les gens du voyage» en tant que minorité autochtone suisse, et leur langue, comme «une langue sans localisation territoriale», parce que ses locuteurs sont disséminés sur presque tout l'ensemble du territoire. Le Conseil fédéral, pur sa part, a déclaré le yéniche «langue nationale sans territoire de la Suisse». La fondation «Assurer l'avenir des gens du voyage en Suisse» a été instituée par la Confédération en 1997.
Le yiddish (langue
germanique) est parlé par une petite communauté de quelque 1500 Juifs. Or,
avant même la fondation de la Confédération helvétique en 1291, on trouvait déjà
des Juifs sur le territoire de la Suisse actuelle. Venant d'abord d'Allemagne et
de France, ils remontèrent le cours des fleuves et s'établirent dans les cantons
de Berne, Zürich, Genève, Saint-Gall, Lucerne, Neuchâtel et Fribourg. En 1920,
la population juive a atteint son nombre le plus élevé, soit 21 000 membres. Au
niveau cantonal, on observe que seuls les cantons de Zurich, Bâle-Ville, Genève
et Vaud coptent aujourd'hui une communauté juive de plus de 1000 personnes, dont
le tiers habite dans le canton de Zürich (6252 personnes).
- Les langues immigrantes ou étrangères
Les langues étrangères, issues de l'immigration, sont en forte progression en Suisse, surtout depuis la disparition de l'ex-Yougoslavie. De 1 % en 1990, elles sont passées à 9 % en 2000. Les données du recensement de 2000 révèlent que près des deux tiers des étrangers ont déclaré une langue nationale comme «langue principale». Pour près d’un tiers (29,4 %) d'entre eux, il s’agit de l’allemand. La proportion des locuteurs dont la «langue principale» est le français (18,0 %) semble un peu moins élevée parmi les étrangers que parmi les Suisses. Cependant, la proportion des italophones est nettement plus élevée parmi les étrangers que parmi les Suisses, et aussi plus élevée que dans l’ensemble de la population. L’allemand (29,4 %), le français (18,0 %) et l’italien (14,8 %) sont manifestement les langues les plus pratiquées par les étrangers, puisque ceux-ci ont choisi le romanche dans une proportion de 0,1 %.
Dans la région germanophone, plus de 60 % des immigrants de la deuxième génération déclarent l'allemand comme langue principale, contre seulement 27,7 % des immigrants qui ne sont pas nés en Suisse. L'intégration semble encore plus élevée dans la région francophone. En effet, en Suisse romande, près de 80 % des personnes nées en Suisse et 40 % de celles nées à l'étranger, déclarent le français comme langue principale. Ce deuxième résultat témoigne de la force d'intégration de la région francophone: nombreux sont ici les étrangers qui changent de langue principale dès la première génération. Dans la région italophone, les personnes originaires d'Italie ayant ont été écartées, celles-ci représentent 65,1 % de toutes les personnes étrangères nées en Suisse et 56,8 % de toutes les personnes étrangères qui n'y sont pas nées; elles indiquent pratiquement toutes l'italien comme langue principale.
Les autres immigrants parlent encore leur langue maternelle dans une proportion de 37,7 %.
Les 15 langues les plus importantes sont, dans l'ordre, le serbe/croate (103 350), l'albanais (94 937), le portugais (89 527), l'espagnol (77 506), l'anglais (73 425), le turc (44 523), le tamoul (21 816), l'arabe (14 345), le néerlandais (11 840), le russe (9003), le chinois (8272), le thaï (7569), le kurde (7531) et le macédonien (6415).
Groupe ethnique |
Population | % | Langue maternelle |
Serbes/Croates | 103 350 | 1,4 % | serbe/croate |
Albanais | 94 937 | 1,3 % | albanais |
Portugais | 89 527 | 1,2 % | portugais |
Espagnols | 77 506 | 1,1 % | espagnol |
Anglais/Américains | 73 425 | 1,0 % | anglais |
Turcs | 44 523 | 0,6 % | turc |
Tamouls | 21 816 | 0,3 % | tamoul |
Arabes | 14 345 | 0,2 % | arabe |
Néerlandais | 11 840 | 0,2 % | néerlandais |
Russes | 9 003 | 0,1 % | russe |
Chinois | 8 272 | 0,1 % | chinois |
Thaïs | 7 569 | 0,1 % | thaï |
Kurdes | 7 531 | 0,1 % | kurde |
Macédoniens | 6 415 | 0,1 % | macédonien |
Dans le tableau précédent, certaines langues ont été regroupées sous une dénomination unique. Ainsi, l'espagnol comprend le catalan et le galicien, l'anglais comprend l'écossais, le turc comprend d'autres langues turques, le russe comprend le biélorusse et l'ukrainien. Il faudrait ajouter d'autres langues numériquement moins importantes tells que le bosniaque, le tchèque, le néerlandais, le grec, le hongrois, le roumain, le japonais, le suédois, le finnois, le créole capverdien, etc.
Le pourcentage de locuteurs de langues non nationales varie fortement d'une région linguistique à l'autre. Autrement dit, les langues étrangères ne sont pas non plus réparties de manière uniforme sur l'ensemble du territoire de la Suisse. Par exemple, les cantons de Genève (16,6 %), de Bâle-Ville (13,1 %), de Zoug (11,1 %), de Zurich (11 %), de Vaud (10,5 %), de Glaris (9,3 %), de Schaffhouse (9,2 %0 et de Saint-Gal (9 %) sont les cantons réunissant le plus d'immigrants parlant une langue non nationale. Les principales langues sont réparties ainsi:
Un autre tendance mérite d'être soulignée: l'anglais accuse une nette progression dans le monde des affaires. Par ailleurs, l’italien recule, passant de 7,6 % en 1990 à 6,5 % en 2000. Les Suisses d’origine italienne délaissent leur langue, sauf dans le Tessin où l’italophonie se maintient solidement. En revanche, le romanche se marginalise de plus en plus, passant de 65 082 (1990) à 60 561 locuteurs (2000).
Bien avant la création de la Suisse, les habitants du pays parlaient des langues celtiques. Avec la conquête romaine, la plupart des Helvètes étaient passés au latin, mais avec un certain nombre de variations lexicales locales, sauf dans les régions de hautes montagnes, par exemple dans les vallées grisonnes, où l'on continua pour un temps à parler encore des langues celtiques. Puis les invasions germaniques, qui eurent lieu au cours du IIIe siècle, vinrent bouleverser cette relative unité linguistique. Les Allamans germanisèrent tout l'Est, les Burgondes s'installèrent dans l'Ouest et adoptèrent le latin des habitants. C'est ainsi que naquit une nouvelle frontière linguistique en Helvétie: à l'ouest, le latin se transforma en parlers franco-provençaux (sauf dans le Jura), puis plus tard en français; à l'est, les langues germaniques devinrent les dialectes alémaniques (et l'allemand).
3.1 La Confédération
C'est en 1291 qu'est née ce qu'on a appelé jusqu'à récemment la Confédération helvétique. Trois cantons alpins de langue alémanique (Uri, Schwyz, Unterwald constitué de deux demi-cantons: constituée des deux demi-cantons d'Obwald et de Nidwald) se lièrent par un pacte perpétuel de défense contre l'Autriche (les Habsbourg), le Milanais au sud et la Savoie à l'ouest. Les armées confédérées, qui venaient de se forger ainsi une solide réputation, commencèrent à se désigner du nom valorisé de Schwyz, puis d'autres cantons exprimèrent le désir d'adhérer à cette alliance: Luzern (Lucerne) en 1332, Zürich en 1351, Glarus (Glaris) et Zug (Zoug) en 1352, puis Bern (Berne) en 1353. À cette époque, tous les cantons n'avaient qu'une appellation allemande. Les Confédérés infligèrent une nouvelle défaite à l'Autriche (bataille de Sempach, dans le canton de Luzern, en 1386), qui reconnut l'indépendance des Huit-Cantons (1389). |
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Les Suisses cherchèrent ensuite à agrandir leur territoire : Freiburg (Fribourg) et Solothum (Soleure) rejoignirent la Confédération, tandis que, entre 1403 et 1440, les Uranais (canton d'Uri) enlevèrent la Léventine (en allemand: Livinen et le val d’Ossola (Tessin) achevant de contrôler la route du Saint-Gothard. Les Suisses s'allièrent au Valais, à Neuchâtel, etc., et imposèrent leur domination à d'autres territoires. En 1415, l’Argovie (Aargau) tomba puis, en 1460, ce fut au tour de la Thurgovie (Thurgau). Durant plusieurs siècles, la Suisse demeura un pays de langue allemande. L'entrée du canton de Freiburg (Fribourg) n'a rien changé, car le canton était bilingue, alors que la langue allemande prédominait.
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La Suisse devint un État plurilingue dès la fin des guerres de Bourgogne (1477), dès l'instant où les cantons de Bern (Berne) et de Freiburg (Fribourg) conquirent de nouveaux territoires dans le pays romand de l'Ouest. Berne occupa le pays de Vaud (Wallis), alors que Fribourg s'empara du comté de Gruyère et de la région bilingue de Morat. Les conquérants n'imposèrent pas l'usage des parlers germaniques, car les nouveaux baillis parlaient en général l'allemand et le français. En 1501, les cantons de Bâle (Basel) et de Schaffhouse (Schaffhausen) rejoignirent la Confédération, suivis en 1513, par l’Appenzell. C'était l'époque où les Suisses prenaient une part active aux guerres entre l’Italie et la France. Les mercenaires suisses au service de la France réussirent à s’emparer de plusieurs villes d'Italie, qui formeront plus tard le canton du Tessin. La conquête du pays de Vaud (Waadt) en 1536 (qui faisait partie du royaume de Bourgogne avant d'être annexé au Saint-Empire romain germanique, puis par le canton de Berne) ne modifia pas davantage le statut des langues en Suisse, car ses habitants n'étaient reconnus que comme «sujets». |
3.2 La Réforme
En 1519, Ulrich Zwingli (1484-1531), un réformateur religieux, dénonça la vente des indulgences par l’Église catholique et se mit à prêcher d’après le texte original des Écritures. En 1523, il parvint à faire adopter la Réforme au canton de Zürich. C'est donc depuis Zurich que Zwingli fut à l'origine des Églises réformées de la Suisse alémanique, alors que Guillaume Farel (1489-1565) à partir de Neuchâtel et Jean Calvin (1509-1564) à partir de Genève furent les principaux réformateurs en Suisse romande.
La Réforme bouleversa les relations entre les cantons et favorisa de nouveaux rapprochements entre les villes réformées telles que Genève, Lausanne, Neuchâtel, Bâle (all. Basel), Berne (all. Bern), Glaris (all. Glarus) et Zurich (all. Zürich). Elle fit passer au second plan les conflits linguistiques, car les rivalités se cristallisèrent sur les religions. Les tensions entre catholiques et protestants dégénérèrent en conflits sanglants et perdurèrent jusqu'au XVIIIe siècle en entraînant à chaque fois de nouveaux conflits armés.
Mais le Réforme eut d'importantes conséquences au point de vue linguistique. C'est que l'impression de la Bible exigeait qu'on en vienne à une entente sur une langue et une orthographe utilisées. Les États germanophones adoptèrent aussitôt l'«allemand standard» qui avait l'avantage d'être commun pour servir à l'impression des nouvelles versions de la Bible de Luther produites à Bâle; cette écriture fut reprise dans toute la Suisse alémanique. C'est depuis cette époque que les Suisses alémaniques se sont mis à parler le Schwizerdütsch et à écrire en allemand standard. La pratique du protestantisme exigeait qu'on lise la Bible en allemand et c'est pour cette raison que les Alémaniques se sont toujours conformés à cette obligation tout en conservant leurs nombreux dialectes locaux.
Pour leur part, les Suisses romands protestants abandonnèrent progressivement leurs dialectes franco-provençaux pour passer au français, l'autre langue commune pour lire la Bible. Ceci explique que les parlers franco-provençaux, appelés généralement patois par les locuteurs, se soient mieux maintenus dans les cantons catholiques (Fribourg et Valais) que dans les cantons réformés (Neuchâtel, Vaud, Genève, où ils n’étaient plus parlés dès le XIXe siècle, sauf dans certaines régions du canton de Vaud (le Jorat), où ils ont pu se maintenir, de façon discrète, jusqu’à nos jours. L’autre raison de la disparition rapide des dialectes franco-provençaux est l’idéal linguistique unitaire lié au centralisme français, qui fut largement repris à leur compte par les francophones «périphériques» de Suisse.
Cependant, le français n'avait pas encore acquis en Suisse romande de véritable statut, même s'il était largement employé. À la même époque, au XVIIe siècle, le français demeurait une langue de prestige et restait dans toute l'Europe la langue de la diplomatie et de la culture. La langue de la Diète (Parlement de la Confédération) demeurait l'allemand, tandis que les francophones et les italophones n'étaient même pas représentés. Seuls les cantons alémaniques et le canton de Fribourg, bilingue celui-là, étaient membres de la Confédération.
3.3 La Suisse et la Révolution française
Il fallut attendre la Révolution française de 1789 pour que le
français puisse acquérir un véritable statut en Suisse, tandis que tout le pays
croulait sous le joug de la
France révolutionnaire. La situation évolua avec l’arrivée au pouvoir de
Bonaparte qui élabora, en 1803, l'Acte
de médiation par lequel la Suisse redevenait une Confédération: le nombre de
cantons passa de 13 à 19, dont l'arrivée des cantons du Tessin, de Saint-Gall,
des
Grisons, d'Argovie, de Thurgovie et de Vaud, qui rejoignaient la Confédération, à
égalité avec les autres cantons. La Diète fédérale se vit confier de nouveaux
pouvoirs, rapidement contestés par les anciens cantons. Bonaparte fit donc de la
Suisse un État multilingue avec la reconnaissance formelle de l’égalité des
langues.
Durant la République helvétique (1798-1803), l’allemand, le français et l’italien bénéficièrent du même statut. Dans une lettre aux délégués de la République helvétique, Bonaparte avait statué : |
Saint-Cloud, le 19 frimaire an 11 [10 décembre 1802] de la
République française Bonaparte, premier Consul et Président ; Aux députés des dix
huit Cantons de la République helvétique. Le premier devoir, le
devoir le plus essentiel du Gouvernement français sera toujours de
veiller à ce qu’un système hostile ne prévale point parmi vous, et
que des hommes dévoués à ses ennemis ne parviennent pas à se mettre
à la tête de vos affaires. [...] |
Le ministre de l'Éducation, Philippe-Albert Stapfer (1766-1840) sous le gouvernement français, élabora une politique d'apprentissage des langues dès la première année de l'école primaire et préconisa la création d'une université nationale.
Après la chute de Napoléon, le Congrès de Vienne de 1815 décida de rendre aux pays européens leurs frontières d'avant la Révolution française de 1789, sauf pour certains aménagements. C'est alors que la Suisse perdit Mulhouse (qui demeura française), la Valteline et la région de Bormio (rattachées à la Lombardie). Les possessions jurassiennes de l'évêché de Bâle furent attribuées au canton de Berne, en compensation du pays de Vaud, dont l'indépendance comme canton suisse était alors reconnue. La Diète suisse fut restaurée et l'allemand redevint sa langue officielle, mais les délégués des cantons romands purent s'exprimer dans leur langue. Les cantons de la république de Genève, de la principauté de Neuchâtel (qui restait la propriété personnelle du roi de Prusse jusqu'en 1848) et du Valais (département du Simplon sous Napoléon) se joignent la Confédération helvétique. Chaque canton choisit sa constitution (et sa langue) et presque tous revinrent au régime en vigueur avant la Révolution. |
La Confédération suisse se dota d'une nouvelle constitution en 1848 et devint officiellement trilingue. En effet, l'article 109 de la Constitution de 1848 proclamait dorénavant : «Les trois langues principales parlées en Suisse, l'allemand, le français et l'italien, sont les langues nationales de la Confédération.» C'est la délégation vaudoise, conduite par le populaire Henri Druey (1799-1855), qui avait proposé cette disposition sur les langues. Alors que toute l'Europe (et le reste du monde entier) avait adopté le principe d'«un État / une langue», la Suisse affichait sa singularité avec un État multilingue proclamant l'égalité de statut de trois langues. Au milieu du XIXe siècle, une telle situation était unique!
Mais l'indépendance et la neutralité perpétuelle de la Suisse furent reconnues par les grandes puissances. La Confédération helvétique comptait alors 22 cantons. La Constitution de 1848 fut révisée en 1874, en accroissant le caractère fédéral de l’État. L'article 109 sur les langues devint alors le fameux article 116. Toutefois, cette égalité proclamée des langues ne fut toutefois jamais vraiment totalement respectée. Les lois fédérales n'étaient traduites qu'en français après avoir été rédigées en allemand. Lois et arrêtés fédéraux ne furent traduits en italien qu'en 1902.
Mais la Confédération helvétique n’est devenue juridiquement un État multilingue que lors de la création de l’État fédéral moderne de 1848. Dans l'article 109 de la Constitution fédérale de 1848, l'allemand, le français et l’italien acquirent le statut de «langues nationales» et de «langues principales»:
Article 109
(1848) Les trois langues principales de la Suisse, l’allemand, le français et l’italien, sont les langues nationales de la Confédération. |
Cette unique disposition constitutionnelle relative à la langue mit ainsi fin à l’ancienne prédominance de l’allemand. Lors de la révision de la Constitution en 1874, l’article 109 fut reprit pratiquement sans changement en devenant l'article 116.
Article 116
(1874) Les trois principales langues parlées en Suisse, l'allemand, le français et l'italien sont langues nationales de la Confédération. |
Après la Première Guerre mondiale, la Ligue romanche (Lia Rumantscha) se lança dans des campagnes pour la protection et la reconnaissance du romanche. Le canton des Grisons intervint en 1935 auprès du Conseil fédéral pour que le romanche obtienne le statut de «langue nationale». Lors du référendum du 20 février 1938, la population de la Suisse se prononça à 92 % en faveur du romanche comme «quatrième langue nationale», sans acquérir le statut de «langue officielle». L'article 116 de la Constitution fédérale de 1938 se lisait comme suit:
Article 116
(1938) 1) L’allemand, le français, l’italien et le romanche sont les langues nationales de la Suisse. 2) Sont déclarées langues officielles de la Confédération: l’allemand, le français et l’italien. |
Sur le front francophone, après une longue agitation autonomiste (qui avait débuté en 1893) de la part des Jurassiens francophones du canton de Berne, un 23e canton, francophone celui-là, fut créé en 1978: le Jura. Il fallut aussi un référendum à l'échelle du pays. Plus de 82 % des Suisses ont répondu OUI à la question qui suit: «Approuvez-vous la création du canton du Jura?» Au 1er janvier 1979, le canton du Jura entrait «en souveraineté». Soulignons que, au cours de l'histoire, il y eut également des cantons qui, pour diverses raisons, ont quitté la Confédération helvétique: Rottweil, Mülhausen, Chablais, Montbéliard, etc. |
En 1996, l'article 116 de la Constitution de 1874 fut revu et corrigé pour devenir l'article 70 de la nouvelle Constitution du 18 avril 1999, qui fixait les principes de la politique linguistique actuelle. C'est ainsi que le romanche est devenue une langue officielle partielle «pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche» (par. 1). Pour leur part, les cantons déterminent leurs langues officielles, respectent leur répartition territoriale et prennent en considération les minorités linguistiques autochtones (par. 2). La Confédération soutient les cantons plurilingues dans l'exécution de leurs tâches particulières (par 4). Enfin, la Confédération soutient les mesures que prennent les cantons des Grisons et du Tessin pour la sauvegarde du romanche et de l'italien (par. 5).
3.4 Les problèmes linguistiques
Il ne faudrait pas conclure que tous les problèmes linguistiques sont résolus en Suisse. Il reste l'épineuse question de l'enseignement des langues et le problème relié à l'avant-projet de loi fédérale sur les langues.
- L'enseignement des langues secondes
Au cours des années soixante-dix, il s'était élaboré en Suisse une certaine politique de l'enseignement des langues secondes, alors que la Conférence des directeurs cantonaux de l'instruction publique (la CDIP) émettait ses recommandations, notamment que les enfants puissent apprendre, dès la 4e ou la 5e année, d'une part, le français en Suisse alémanique et Tessin, d'autre part, l'allemand en Suisse romande ainsi que dans les communes italophones et romanches des Grisons. Dans l'ensemble, les cantons respectèrent ces recommandations. Le principe apparaissait clair pour tous les Suisses: lors de leur scolarité obligatoire, les élèves suisses devaient entamer l'apprentissage d'une deuxième langue nationale avant de suivre des cours d'anglais.
Toutefois, en 1997, le canton de Zurich modifia sa politique et introduisit l'anglais dès la 1e année du primaire, en application des articles 23 et 24 de la loi zurichoise sur l'école publique. L'exemple du canton de Zurich fit tache d'huile et suscita une vive polémique. Pendant que de nombreux pays européens font des efforts pour rejoindre le «niveau suisse», plusieurs cantons alémaniques «affaiblissent» le trilinguisme en introduisant l'anglais dit «précoce» dès le début du primaire. L'un des problèmes soulevés en Suisse, c'est que, avant même d'avoir appris l'anglais, les élèves alémaniques fréquentant ces «cours d'anglais précoce» auront cru que, dans leur propre pays, l'anglais est plus important que le français ou l'italien, et qu'il ne leur est pas nécessaire d'apprendre d'autres langues nationales puisque l'anglais remplace toutes les autres langues. Ceux qui s'indignent des effets néfastes de cette politique préférentielle de l'anglais sur les langues nationales voudraient bien faire intervenir les pouvoirs du gouvernement fédéral afin de mettre au pas les cantons «progressistes» qui minent la cohésion nationale. Quant aux cantons pro-anglais, ils invoquent l'autonomie cantonale en matière d'éducation. Or, en Suisse, dès qu'on tente d'uniformiser les cantons dans ce domaine, il faut se résigner tôt ou tard à ce qu'ils brandissent leur souveraineté. Rien ne peut empêcher les cantons alémaniques de refuser les recommandations fédérales sur l'enseignement précoce d'une langue nationale.... En effet, l'article 62 de la Constitution précise que l'instruction publique obligatoire relève de la juridiction exclusive des cantons. La Confédération ne peut donc pas interférer dans leurs décisions éducatives. Aucune disposition ne peut empêcher un canton d'introduire l'anglais comme première langue étrangère à l'école si des objectifs d'apprentissage sont fixés et respectés pour la seconde langue nationale. Autrement dit, un canton ne viole le paragraphe 3 de l'article 70 de la Constitution que si l'anglais l'emporte sur le français en tant que première langue seconde.
En 2003, la Conférence intercantonale de l'instruction publique de la Suisse romande et du Tessin (la CIIP) publia une Déclaration relative à la politique de l'enseignement des langues, qui établissait les principes de sa politique d'apprentissage des langues. En Suisse romande et au Tessin, l'allemand est enseigné au plus tard dès la 3e année, puis l'anglais dès la 7e année.
Comme on le constate, le choix de la première langue étrangère enseignée à l'école primaire devint une question nationale traitée avec abondance dans les médias et dans les groupes politiques. Mais la vogue de I'anglais comme première langue étrangère a mis fin à toute politique nationale d'apprentissage des langues.
- La loi fédérale sur les langues
Par ailleurs, l'avant-projet de la Loi sur les langues présenté le 29 mars 2001 a fait également l'objet de controverses. L'une des Chambres du Parlement fédéral, le Conseil d'État, en plein accord avec les cantons de la Suisse romande et du Tessin, souhaitait que le projet de loi soit revu avec plus d'ambition et de clarté, en insistant sur la question cruciale de l'enseignement des langues nationales. Certains politiciens fédéraux espéraient pouvoir utiliser cette loi comme d'un levier pour imposer aux cantons le choix d'une langue nationale dans l'enseignement. Or, la nouvelle mouture de la loi ne traite pas de la question du choix de la première langue étrangère enseignée à l'école. Son objectif de favoriser la promotion des langues nationales en offrant un éventail de subventions : formation des professeurs, enseignement immersif, échanges d'élèves et d'enseignants, aide à la production de moyens d'enseignement. La loi permettrait aussi aux enfants de suivre des cours de langue et de culture, lorsqu'ils font leurs classes dans une autre langue que la leur.
Pour la suite des travaux, le projet de loi devait être retravaillé avec les organismes nationaux pour tenir compte des réserves émises par les cantons et les partis politiques. La procédure de consultation s'est achevée le 31 janvier 2002. Elle a obtenu résultats relativement positifs, car 12 cantons ont accepté la nouvelle loi sans réserve (Fribourg, Genève, Jura, Tessin, Berne, Valais, Grisons, Bâle-Ville, Bâle-Campagne, Zurich, Lucerne et Argovie), ainsi que trois partis politique. Puis, en décembre 2003, le Conseil fédéral a modifié son point de vue et, le 28 avril 2004, il renonçait à présenter la loi au Parlement, invoquant comme motif le coût de son application, estimé à 17 millions de francs dès 2008. Même si le Conseil fédéral a décidé de faire des économies au lieu d'encourager le multilinguisme, le projet de loi sur les langues devra néanmoins passer devant le Parlement, parce qu'une initiative parlementaire a été déposée pour exiger que la loi soit soumise au Parlementent. La Commission de la science, de l’éducation et de la culture, compétente en la matière, a ensuite décidé d’agir et de reformuler la Loi sur les langues. Le 5 octobre 2007, le Parlement fédéral approuvait le projet de Loi sur les langues nationales et la compréhension entre les communautés linguistiques (Loi sur les langues, LLC). La loi est finalement entrée en vigueur le 4 décembre 2009.
Situation politique et démolinguistique |
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